17 décembre 2016

Bonnes vacances

Toute l'équipe de l'Œil de Minerve vous souhaite d'excellentes fêtes de fin d'annees, et des vacances reposantes, auprès des vôtres.  

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13 décembre 2016

Paul Valéry, La crise de l’esprit, suivi de Note (ou l’Européen), Manucius, Le philosophe, Paris, 2016, lu par Florence Salvetti.

Paul Valéry, La crise de l’esprit, suivi de Note (ou l’Européen), Manucius, Le philosophe, Paris, 2016, lu par Florence Salvetti.

On connaît le fameux Fragment 53 d’Héraclite selon lequel « la guerre est le père de toute chose ». Il est une de ces choses dont, en tant qu’expérience capitale et douloureuse, elle est assurément le père, c’est de la pensée. La guerre détruit, mais il reste encore des hommes, dans la mêlée ou non, pour la penser. Nous ne pensons d’ailleurs jamais autant qu’en temps de guerre, à proprement parler ou métaphoriquement parlant, parce que notre monde est remis en question, que nous savons que demain sera ce que nous aurons choisi d’en faire aujourd’hui, et que nous ne nous contentons pas de vivre la douleur, nous l’intellectualisons pour lui donner sens. Nombreux sont à ce titre les écrivains (historiens, poètes, philosophes) auxquels la guerre a donné à penser. Paul Valéry, dont la vie (1871-1945) est rythmée par les guerres, est de ceux-là. Avec quelques autres, dont pour certains nous serons amenés à évoquer le nom, il pense la guerre, sans être de la mêlée, car il n’est pas mobilisé. Valéry demeure à Paris pendant les deux périodes d’affrontements mondiaux.

 

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06 décembre 2016

Mark Alizart, Pop théologie, PUF, lu par Arnaud Lecompte

Mark Alizart, Pop théologie, PUF, 2015

 

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 "Les sociétés post-modernes sont dominées par le culte hédoniste de la marchandise", "la pensée 68 n'est que le  produit d'un long processus de sécularisation s'accompagnant de la perte des valeurs humanistes traditionnelles". Mark  Alizart cherche à confondre ce type de jugements dans son ouvrage Pop Théologie publié en février 2015 au PUF  dans la collection Perspectives critiques. Par un renversement de perspective plutôt radical, Alizart défend la thèse  selon laquelle le règne de la marchandise et l'hégémonie de la pop-culture ne sont pas liés au nihilisme, à l’absence de  religion et au désenchantement du monde mais, à l'inverse, au triomphe de la croyance protestante.

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25 novembre 2016

Norman MALCOLM, Wittgenstein, un point de vue religieux ? Suivi d'une réponse de Peter Winch ; traduit et postfacé par Michel Le Du ; éditions de l'éclat, philosophie imaginaire, 2014 Lu par Marc KUSZEL.

Norman MALCOLM, Wittgenstein, un point de vue religieux ? Suivi d'une réponse de Peter Winch ; traduit et postfacé par Michel Le Du ; éditions de l'éclat, philosophie imaginaire, 2014 Lu par Marc KUSZEL.

La philosophie de Wittgenstein a sans doute été négligée et longtemps méconnue des philosophes de langue française. On se souvient du travail monumental accompli par Jacques Bouveresse pour la tirer de l'oubli ou encore des travaux remarquables de Christiane Chauviré allant dans un sens analogue. Depuis quelque temps, il semble que la tendance s'est heureusement inversée et qu'une inflation de livres consacrée à la pensée wittgensteinienne a fait son apparition. Dans cet ordre de grandeur, nous parvient en l'espèce un livre consacré au point de vue religieux de Wittgenstein, signé Norman Malcolm, dont le nom n'est certes pas étranger à quiconque s'intéresse à la pensée du maître de la philosophie analytique. Il y a bien longtemps déjà, Malcolm rédigeait un véritable petit livre d'une grande clarté en guise de postface au Cahier bleu et le cahier brun, et peu avant sa mort, cet ancien professeur de philosophie à l'Université Cornell puis au King's College de Londres tournait un dernier regard global en direction de la philosophie wittgensteinienne sous un aspect quelque peu insolite : le point de vue religieux de Wittgenstein. C'est de cet opus ultime dont nous nous efforcerons de rendre compte ici et l'enjeu est d'autant plus important que l'ouvrage lui- même fait l'objet d'une réponse de Peter Winch, collègue et ami proche de l'auteur mais également éditeur dudit ouvrage. La traduction française de ces travaux est due à Michel Le Du, maître de conférences à l'université de Strasbourg qui signe également en l'espèce une postface suivie d'une annexe. Il est aisé dans de semblables conditions de deviner que l'important volume paru aux Éditions de l'éclat promet d'être foisonnant.  

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22 novembre 2016

Nicolas Roussellier, La force de gouverner, Le pouvoir exécutif en France XIXe – XXIe siècles, Gallimard, 2015 lu par Bruno Hueber

Nicolas Roussellier, La force de gouverner, Le pouvoir exécutif en France XIXe – XXIe siècles, Gallimard, 2015  lu par Bruno Hueber

Parmi les nombreux ouvrages qui s'attachent à disserter sur les évolutions institutionnelles des sociétés démocratiques en général et de la nôtre en particulier, celui de Nicolas Roussellier mérite indubitablement de retenir l'attention. Fruit d'un travail patient, d'une érudition maîtrisée, bien loin de l'emballement en matière de publications d'auteurs « reconnus », cet ouvrage est un livre d'histoire au sens le plus précis et le plus respectable du terme : énoncer les faits que l'on aura établis en affrontant avec scrupule des collections d'archives et une vaste documentation parfois dispersée, les éclairer en les articulant en un récit, trouver la formulation adéquate pour nous aider à dépasser l'émiettement des événements, et cela tout en se défiant de l'esprit de parti ou de « système », bref nous délivrer les éléments nécessaires à un jugement éclairé, réfléchi et responsable. Un livre d'histoire, qui par son objet et sa qualité intrinsèque, devrait donc aussi bien intéresser le spécialiste que le citoyen et le philosophe. Le projet ou le fil conducteur de cet ouvrage d'histoire politique est en  fait triple.

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     Il s’agit tout d'abord de montrer combien la culture républicaine de la France doit être appréhendée comme étant en fait double, mais non pas tant d'une dualité jouant sur l'opposition entre tradition libérale et tradition socialiste que reposant sur deux visions du fonctionnement des institutions. La première se réclame avant tout du parlement : une pensée républicaine première qui se construit donc comme rejet explicite de la tradition monarchique, c'est-à-dire par une défiance profonde à l'endroit de l'exécutif, et cela au nom de la souveraineté nationale qu'incarne ce parlement donc, que représentent les élus, ce collectif qui peut se targuer d'être sans « visage », dépersonnalisé, fier de ses débats libres, fier de la confiance de ses mandants, refusant tout ce qui pourrait s'apparenter à un quelconque césarisme. La seconde est la pensée républicaine de gouvernement et aussi bien de la Présidence : un exécutif qui, décomplexé quant à sa légitimité, prétend pouvoir au nom de l'intérêt général qu'il « connaît », comprend et incarne, agir avec force, réactivité, continuité, et le plus possible indépendamment des atermoiements des législateurs ou bien au-dessus des clabauderies et des tractations « sordides » des partis.
        Le second fil conducteur de l'ouvrage est que le basculement de la première façon d'entendre l’idée de République vers la seconde s'est jouée sans aucun doute entre 1870 et 1920, peut-être les années 30 aussi, sous le coup de différentes dynamiques, circonstances, impératifs historiques ou du moins considérés comme tels et sur lesquels nous allons revenir. Et ce qui s'ensuivit ne fit en quelque sorte, avec les deux autres constitutions, qu'entériner, exploiter, perfectionner et porter à son point le plus haut cette période de bascule. L'exécutif peu à peu, inexorablement, aura cessé de n'être qu'un simple exécutant. Au terme de cette évolution, avec la Ve République, et surtout le point d'orgue de 1962, nous voici donc ainsi rendus à une « démocratie exécutive », le moment où l'Etat semble l'emporter définitivement sur la nation « assemblée », où le pouvoir exécutif, « présidentialisé », a constitutionnellement jugulé, neutralisé et réduit le législatif, si ce n'est parfois le judiciaire, au maximum de ce que semble pouvoir admettre une constitution qui prétend se dire républicaine, si ce n'est véritablement démocratique.
    Le troisième et dernier fil est que ce basculement n'aurait jamais été, selon l'auteur, en dépit de la conscience ou des infléchissements de la pratique de certains, véritablement intellectuellement, culturellement, anticipé par les républicains attachés à la première idée de la République. C'est que ceux-ci attestent non seulement d'une identité forgée par-delà les querelles ou les sensibilités autour d'un refus, parfois chèrement payé, du modèle de l'Ancien régime ou de l'Empire, mais aussi bien du partage d'un idéal qu'ils veulent prioritaire : celui, avant toute problématique constitutionnelle, d'un progrès social, certes selon eux « raisonnable » ou «  de bon sens » mais qui serait à même d'accomplir les promesses d'un principe initial d'égalité hérité des Révolutions.
    Pour restituer sommairement et clarifier quelque peu le déroulé proposé par l'auteur de la montée en puissance de l'exécutif au détriment d'une première culture républicaine beaucoup plus « parlementariste », il peut être utile de distinguer dans l'avénement de cette redistribution des cartes institutionnelles, d'une part les nécessités, d 'autre part, les modèles, et enfin les acteurs de cette dramaturgie.

 

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15 novembre 2016

John Stuart Mill, Sur le Socialisme, trad. Michel Lemosse, [petite] bibliothèque de la liberté, Les Belles Lettres, 2016, lu par Jean-Baptiste Bertin

John Stuart Mill, Sur le Socialisme, trad. Michel Lemosse, [petite] bibliothèque de la liberté, Les Belles Lettres, Paris, 2016.

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En début d’année, les éditions Les Belles Lettres ont publié la première traduction française d’On Socialism, bref texte posthume paru en 1879, 6 ans après la mort de John Stuart Mill, qui regroupe les notes rédigées à partir de 1869 par le philosophe anglais en vue d’un ouvrage de fond sur le sujet, qu’il n’aura pas le temps de terminer. Entre notes de lecture et ébauches de chapitres, qu’il aurait sans doute éditées, cet « essai » n’en constitue pas moins une lecture consistante et profitable encore aujourd’hui, grâce à la clarté stylistique et conceptuelle et à la probité intellectuelle de Mill. Il analyse avec lucidité les méfaits de la société capitaliste tout en parvenant à prévoir les risques politiques et économiques associés au socialisme.

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11 novembre 2016

Laurence Devillairs, Les 100 citations de la philosophie, Que sais-je, 2015, lu par Alexandra Barral

http://t2.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcRzeEEMkSzf2xO4qZe4AG7jlCbw9g16GHC4EDp3yhn2x9KW4kzhLaurence Devillairs, Les 100 citations de la philosophie, Que sais-je, 2015

Ce petit livre de 124 pages paraît aux éditions PUF dans la collection des « Que sais-je ».  Il a pour objectif de rassembler les citations les plus connues de l’histoire de la philosophie et de donner une explication concise à ces formules. Le format est strict : un page d’explication pour chacune des citations, ce qui a pour double conséquence la nécessité d’être très synthétique dans les explications et de ce fait relativement bref et clair d’une part ; et de l’autre de  passer sous silence des explications plus exhaustives et plus approfondies.

Après un bref avant propos, les citations sont déclinées par ordre chronologique, en commençant par Héraclite d’Éphèse, et en terminant par Sloterdijk. Dans l’avant propos, l’auteur rappelle que la philosophie, même si elle n’est pas littérature, peut être belle, et les formules de langage trouvées par les philosophes, riches, vibrantes, fécondes et heureuses. Les philosophes veulent aussi toucher la pensée par la formule et de se contentent pas simplement de concepts et de démonstrations

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08 novembre 2016

Sigmund Freud - Benedictus de Spinoza : Correspondance 1676-1938 Gallimard NRF, mars 2016, lu par Jean-Baptiste Chaumié

Les lecteurs de Spinoza connaissent cette fameuse formule de l’Ethique selon laquelle « les hommes se croient libres par cela seul qu'ils sont conscients de leurs actions et ignorants des causes qui les déterminent » (Ethique, III, scolie de la proposition 2). De là, on fait parfois un peu rapidement de Spinoza  un précurseur du fondateur de la psychanalyse.

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04 novembre 2016

Geneviève Fraisse, Les excès du genre (concept, image, nudité), Nouvelles Éditions Lignes, août 2014, lu par Caroline Forgit.

     1540-1.jpg       Geneviève Fraisse, Les excès du genre (concept, image, nudité), Nouvelles Éditions Lignes, août 2014, lu par Caroline Forgit.

            Philosophe et historienne de la pensée féministe, Geneviève Fraisse se propose dans cet essai de revenir sur la polémique sexe/genre : doit-on abandonner le terme « sexe », celui-ci est-il devenu obsolète ? Elle s’interroge également sur les images et les stéréotypes « de genre » : comment lutter contre les stéréotypes ? Les dénoncer, n’est-ce pas les renforcer ? Enfin elle analyse la nudité comme geste politique.

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18 octobre 2016

C. Kintzler, Penser la laïcité, Paris, Minerve, 2014, lu par Anne Beilin.

C. Kintzler, Penser la laïcité, Paris, Minerve, 2014, 220 p., lu par Anne Beilin.

Signataire en 1989 de la Lettre ouverte à Lionel Jospin qui demandait l'interdiction des signes religieux au sein de l'école publique, Catherine Kintzler n'a cessé depuis de prendre la laïcité comme objet philosophique. Elle approfondit ici bien des points développés dans son précédent ouvrage, Qu'est-ce-que la laïindex.jpgcité?, publié en 2007.  Le positionnement de l'auteur est bien connu : il n'est ni nécessaire ni souhaitable de « toiletter » la laïcité et d'y apposer un adjectif  – « ouverte », « apaisée », « raisonnable », «positive ». La laïcité se suffit à elle-même, à condition toutefois d'en penser le concept de manière à ce qu'il livre toutes ses propriétés et ses effets. L'ambition de Catherine Kintzler est de poursuivre ici une saisie philosophique du concept, qui permette d'éclairer les problèmes contemporains dans leurs aspects concrets.

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14 octobre 2016

Guillaume Carnino L’invention de la science. La nouvelle religion de l’âge industriel, Seuil « L’univers historique » 2015 Lu par Alexandre Klein

Guillaume Carnino L’invention de la science. La nouvelle religion de l’âge industriel,  Seuil « L’univers historique » 2015 Lu par Alexandre Klein

Quand et comment « la science » s’est-elle imposée, en France, comme l’unique garant du vrai et par là même comme une référence sociale et culturelle centrale, voire même sacrée ? C’est à cette question que l’historien Guillaume Carnino tente de répondre dans son dernier ouvrage, issu d’une thèse de doctorat soutenue en 2011 sous la direction de Dominique Pestre. Il ne s’agit pas là d’une énième histoire des sciences modernes, retrouvant dans les travaux de Bacon, Descartes ou Galilée l’apparition d’un nouvel esprit scientifique et des fondements de notre http://t0.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcQ756EmF3VeTkQBLidUexdOZxLqCn_W1HBjGTUShfatJAbpjrZqaRv_FvNgmodernité. L’auteur préfère ici retourner l’interrogation sur les origines de la science moderne en analysant « les origines modernes de la science », et ce afin d’identifier le « moment précis où des pratiques préexistantes […] en viennent à être subsumées sous le vocable de science au singulier » (p. 12). Autrement dit, il se demande quand on a commencé à parler de « la science » et de quelle manière cette expression est devenue synonyme de vérité ? Pour mener à bien son enquête, il sollicite des sources diverses, allant des fonds d’archives d’institutions scientifiques françaises de renom aux correspondances de savants, en passant par des revues et des publications populaires. Son étude se divise en quatre grandes parties abordant respectivement l’avènement de « la science », son rôle de nouvelle autorité publique, ses rapports avec l’industrie et enfin son implication politique dans l’avènement de la IIIe République.

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11 octobre 2016

Alain Corbin Histoire du silence. De la Renaissance à nos jours, Albin Michel 2016 Lu par Alexandre Klein

Alain Corbin Histoire du silence. De la Renaissance à nos jours, Albin Michel 2016 Lu par Alexandre Klein

http://t1.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcT-06bjGk8nZJTKBszg5meKB6DSJiw0Cen10sGPdw3hFIdM0WKodHjEs1gNotre société connectée nous aurait fait perdre le sens du silence. Pire, le flot continu de paroles produit par l’hypermédiatisation nous le ferait désormais craindre. Pourtant, le silence est une source inestimable de vertus tant méditatives et réflexives que jouissives. C’est ce qu’entend nous rappeler l’historien français Alain Corbin dans son nouvel opus. Après avoir étudié les transformations de notre sensibilité aux odeurs, dans son célèbre Le Miasme et la Jonquille (1982), ou plus récemment notre rapport aux arbres ou au temps qu’il fait, ce spécialiste de l’histoire des sensibilités s’attache ici à écrire une histoire de notre relation au silence.

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07 octobre 2016

Hélène Péquignat, Platon et Descartes passent le bac. Carnet de bord d’une prof de philo. Editions Le Pommier, Collection : Essais - Les défis de l'éducation, mars 2016, 172 p., lu par Jean-Baptiste Chaumié

http://www.editions-belin.com/e_img/boutique/full/74651087.jpgLe titre de l’ouvrage d’Hélène Péquignat, Platon et Descartes passent le bac peut prêter à confusion, car il y est très peu question de Platon et de Descartes. Il s’agit pour l’auteure, professeur en terminale, de partager différentes expérimentations pédagogiques originales faites avec ses élèves en vue de les mettre en situation de philosophes.

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30 septembre 2016

Chantal Jaquet, Sub specie æternitatis - Étude des concepts de temps, durée et éternité chez Spinoza, Classiques Garnier, 2016, lu par Eric Delassus

Quels sont les rapports entre la durée et l’éternité dans la pensée spinoziste ? Le livre de Chantal Jaquet, Sub Sub specie aeternitatisspecie æternitatis – Étude des concepts de temps, durée et éternité chez Spinoza, répond à cette question en montrant et en démontrant comment l’esprit peut concevoir l’existence actuelle des choses de manière spatio-temporelle selon la durée et sub specie æternitatis. La traduction de cette expression est cependant difficile et pose le problème de savoir comment les modes finis peuvent partager l’éternité avec Dieu qui existe nécessairement alors qu’eux ne jouissent que d’une nécessité d’exister. La question de l’articulation entre durée et éternité est donc abordée ici comme une porte d’entrée pour mieux comprendre le rapport entre la substance et ses modes. Cette question n’est pas sans incidences sur le plan éthique puisqu’elle permet de mieux comprendre le rapport entre les lois éternelles et les enseignements temporaires de la religion, ainsi que la nature du lien entre la joie, qui s’inscrit dans la durée en tant que passage d’une perfection moindre à une perfection plus grande, et la béatitude qui est la perfection même et provient de l’accès à l’éternité par la puissance de l’entendement.

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20 septembre 2016

Xavier GUCHET, La médecine personnalisée ; un essai philosophique, Les Belles-Lettres, lu par Jean Kessler.

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Xavier GUCHET,  La médecine personnalisée ; un essai philosophique, Les Belles-Lettres, lu par Jean Kessler, 432 p.

La révolution scientifique engendrée par les avancées dans le domaine de la génétique humaine a changé la médecine et notre compréhension de la maladie. Cette médecine « nouvelle » (on peut encore s’interroger sur l’effectivité de cette nouveauté dans notre rapport quotidien à la médecine) porte le nom de médecine personnalisée, puisqu’aussi bien le décodage du génome humain permet une approche plus différenciée, plus individualisée de la maladie. La médecine personnalisée (qu’on notera désormais MP) est donc, pour en donner ici un premier sens, « la promesse de diagnostics et de thérapies finement adaptées aux caractéristiques génétiques de chaque patient pris individuellement » (19). Cette évolution de la pratique et de la connaissance médicale est rendue techniquement et économiquement possible par « le progrès des techniques très haut débit qui rendront désormais accessible en routine clinique le séquençage intégral du génome de chaque individu (nous soulignons) pour un coût relativement faible » (20). Jusqu’à présent  la notion de personnalisation de la médecine faisait avant tout référence à l’idée d’une prise en compte accrue du patient dans sa singularité et sa subjectivité – qu’on supposait négligée par l’invasion de la dimension de plus en plus technique, scientifique et donc dépersonnalisante de la médecine. C’est ce qu’on a appelé le « care », par opposition au « cure ».

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13 septembre 2016

Pierre Macherey Études de « philosophie française » - De Sieyes à Barni Ed. Publications de la Sorbonne 2013 Lu par François Fine

Pierre Macherey Études de « philosophie française » - De Sieyes à Barni Ed. Publications de la Sorbonne 2013 Lu par François Fine

Les Études de philosophie « française» sont, comme d'autres ouvrages de Pierre Macherey, constituées d'un recueil d'articles publiés sur une quinzaine d'années, mais ce recueil permet de saisir l'unité de ce travail d'histoire de la philosophie, unité révélée par l'avant-propos qui en trace le cadre général. Les 17 chapitres sont consacrés pour l'essentiel à des auteurs souvent considérés comme « mineurs » (parmi eux, seul Auguste Comte apparaît au programme des classes de Terminale) dont Macherey montre l'inscription dans l'histoire « majeure » de la philosophie en les faisant dialoguer avec Spinoza, Kant, Hegel ou Marx. Avec l'avant-propos, deux chapitres centraux, consacrés à la notion d'idéologie et à celle de « rapports sociaux », permettent de saisir l'enjeu de l'enquête de Macherey, qui semble être de construire une généalogie non seulement des concepts, mais aussi des problèmes et de la pratique de la philosophie en France, en jetant un regard attentif sur ce dix-neuvième siècle qui leur a donné naissance. Il s'agit de montrer que nous héritons de ces auteurs souvent peu lus aujourd’hui (Destutt de Tracy, Bonald, Saint-Simon, Cousin, Barni...) jusque dans nos pratiques d'enseignement et nos problématiques professionnelles.Car c'est au XIXe, entre Siéyès et Barni dont les deux noms encadrent ces études que la philosophie est « devenue à un certain moment comme française », privilégiant certaines questions, en même temps qu'elle s'est instituée comme discipline scolaire. C'est ce que souligne l'avant-propos, qui se termine par la question, inévitable pour tout professeur de philosophie, de savoir si la philosophie est susceptible d'enseignement. Ce qui conduit Macherey à cette question est une réflexion historique sur la manière dont il faut comprendre l'adjectif français du syntagme « philosophie française ». Si les guillemets sont indispensables, c'est que loin d'être une nature la « francité » de la philosophie est le fruit d'un processus historique, inséparable des conséquences sociales et politiques de la Révolution Française. Écartant l'idée que la langue donne à la pensée une couleur nationale, Macherey porte son attention sur les conditions institutionnelles du discours philosophique.  L'hypothèse à l'arrière-plan du livre, explicitée dans l'avant-propos, c'est que la philosophie est devenue « française » (en même temps qu'elle devenait ailleurs allemande ou anglaise) avec l'avènement des États-nations après la Révolution. En France, cela a signifié en même temps une « intense politisation du discours philosophique » (conduit à faire de la réalité politique et sociale un des ses principaux objets, mais aussi à devoir penser ses effets politiques) et une professionnalisation de la démarche philosophique. Le philosophe a du se penser comme éducateur, au moment où l'enseignement devenait affaire d’État, et l’État, affaire d'enseignement. Faire de la philosophie en France, cela a désormais signifié « prendre position dans la forme républicaine », forme qui s'inventait avec la participation directe des philosophes. C'est là qu'apparaît la figure du philosophe-professeur, dont Victor Cousin sera le symbole, assumant la nouvelle fonction de former des citoyens. C'est dans ce contexte que s'est constituée une nouvelle rhétorique philosophique, spécifiquement française. Ces thèses très générales sont développées par Macherey en s'appuyant sur l'histoire de l'institutionnalisation de la philosophie dans la France post-révolutionnaire, depuis L'École normale de l'an III, inspirée par les Idéologues jusqu'à la IIIe République avec Barni.. Cet angle d'analyse permet à Macherey de montrer comment nos problèmes se sont constitués sur ce sol, celui de savoir ce que devait être l’École de la République. C'est ainsi qu'on voit surgir la question du rapport de la philosophie à la littérature, de la philosophie aux sciences, de la philosophie à la sociologie, comme autant de questions qui naissent lorsque la philosophie devient une matière d’enseignement. La philosophie, attirée sur la place publique depuis la Révolution, prise en tenaille entre sciences, littérature, et discours idéologiques n'aura de cesse de retracer des lignes de partage. Il ne s'agit pas pour Macherey de pointer de faux problèmes, mais bien de montrer comment sont apparues les tensions qui habitent aujourd'hui l'enseignement comme le discours philosophique en France.

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13 juillet 2016

Bonnes vacances

Bonnes vacances à tous. 

L'Œil de Minerve est de retour début septembre. 

06 juillet 2016

Hoquet et Merlin (dir.), Précis de philosophie de la biologie, Vuibert, 2014 Lu par Jonathan Racine

Hoquet et Merlin (dir.), Précis de philosophie de la biologie, Vuibert, 2014 Lu par Jonathan Racine

Après les très utiles Précis de philosophie des sciences et Précis de philosophie de la physique, les éditions Vuibert nous proposent ce Précis de philosophie de la biologie. Cet ouvrage collectif est publié sous la direction de T. Hoquet, à qui l’on doit notamment des études sur Darwin, Linné, et une anthologie de textes sur le sexe biologique, et F. Merlin, auteur d’un intéressant ouvrage sur Le hasard dans la théorie de l’évolution. Il réunit les contributions aussi bien de jeunes chercheurs que des noms bien connus de la philosophie de la biologie, tels ceux de J. Gayon, M. Morange, E. Fox Keller.  On ne peut que saluer cette entreprise, qui contribue à donner un peu plus de visibilité à ce qui constitue un champ disciplinaire à part entière dans le monde philosophique anglo-saxon, et qui est en voie de s’établir solidement en France. Rappelons tout de même que le premier ouvrage de synthèse en français, le remarquable Philosophie de la biologie de F. Duchesneau, date de bientôt 20 ans (1997). Un nouvel état des lieux était nécessaire.

            L’introduction s’attache à préciser le sujet, dans la mesure où la réflexion philosophique sur la vie est, en France, peut-être un peu trop vite réduite aux analyses de Canguilhem sur le normal et le pathologique et sur l’émergence de certains concepts importants dans le domaine des sciences de la vie.  Même si l’approche historique n’est pas absente, il est clairement reconnu qu’ « un grand nombre des contributeurs […] se situent plutôt du côté de la ‘philosophie de la biologie’ anglo-saxonne ».

 

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04 juillet 2016

Cyril Morana, Éric Oudin et Marianne Perruche (dir.), La Parole, Ellipses 2016

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   La préparation des concours est souvent l'occasion de publications pleines d'intérêt. Cyril Morana, Éric Oudin et Marianne Perruche ont dirigé un ouvrage collectif sur la parole - notion sur laquelle les candidats au concours d'entrée aux grandes écoles de commerce seront amenés à disserter en 2017.

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01 juillet 2016

Frédéric Laupies, La vérité, Leçon philosophique, Paris, Presses Universitaires de France, 2014, lu par Anthony Dekhil

http://static.fnac-static.com/multimedia/Images/FR/NR/f1/1b/59/5839857/1507-1.jpgFrédéric Laupies, La vérité, Leçon philosophique, Paris, Presses Universitaires de France, 2014

 

L'ouvrage de M. Laupies, Professeur de philosophie au lycée Notre-Dame du Grandchamp à Versailles, est un cours à destination des élèves de classes préparatoires économiques et commerciales. Il s'intéresse au statut de la vérité en tant qu'elle est objet de connaissance et principe de la grandeur morale.

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24 juin 2016

Francis Hutcheson, Système de philosophie morale, présenté et traduit par J. Szpirglas, Vrin 2016

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   Il aura fallu attendre deux cent quarante-six ans pour lire dans une nouvelle traduction A System of Moral Philosophy, l'un des chefs-d'œuvre de l'enseignement de Hutcheson. L'attente fut excessivement longue pour ce qui reste l'un des textes essentiels des Lumières écossaises, un livre qui fut admiré tout aussi bien par Lessing que par Diderot, et dont la postérité, pour être discrète, n'en fut pas moins considérable.

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22 juin 2016

Jean-Frédéric Schaub Pour une histoire politique de la race , Seuil Collection Librairie du XXIe siècle, mars 2015, Lu par Nawal El Yadari

Jean-Frédéric Schaub Pour une histoire politique de la race ,  Seuil Collection Librairie du XXIe siècle, mars 2015, Lu par Nawal El Yadari

Dans cet ouvrage, J.-F. Schaub propose une histoire des constructions des catégories raciales : il s'agit  d'exhumer des catégories qui fonctionnent parfois sans dire leur nom, et de dépasser le paradigme simpliste qui réduit le racisme à la seule idéologie raciste biologique. Des catégories imprègnent nos cadres de pensée et les cadres de l'action politique, et  il s'agit d'en comprendre les racines. L'ouvrage est donc polémique, puisqu'il se propose de déceler la politique de la race et ses continuités sous différentes idéologies universalistes. Il convient de se rappeler des apports fondamentaux des pensées de Fanon et de De Beauvoir :  la construction sociale de l'altérité, qu'elle soit raciale ou genrée, va de pair avec un processus de définition de soi. Assigner autrui à une place, c'est se définir soi-même. Ainsi on ne peut pas comprendre la racialisation sans y saisir en creux la construction de la blanchité. De même que le sexisme permet de construire une certaine masculinité.

L'ouvrage part d'un constat, à savoir celui d'une tension propre à nos sociétés contemporaines : la tension entre, d'une part la « plasticité individuelle des appartenances », autrement dit la possibilité pour tout un chacun d'échapper aux assignations identitaires, et d'autre part, la permanence du racisme dans les sociétés contemporaines – le racisme biologique fût-il disqualifié.
« Le triomphe de la plasticité des appartenances devrait favoriser une extinction des positions racistes dans les sociétés contemporaines. » (p. 18

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17 juin 2016

Max Weber, La Domination, Paris, La Découverte, collection «Politique et sociétés», 2013, 426 p. Édition critique française établie par Yves Sintomer, lu par Yves Laberge.

Un siècle après sa rédaction en langue allemande, cette première parution en français du livre La Domination de Max Weber (1864-1920) peut être considérée comme un événement majeur pour les sociologues, philosophes des religions, anthropologues et politicologues de langue française. Cette primeur est complétée à quelques mois d’intervalle par une autre parution dans la même collection, La ville, avec une maquette de couverture similaire. Période faste : les sociologues francophones sont comblés en découvrant coup sur coup deux «nouveaux» livres de Max Weber (1).

 

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13 juin 2016

Jeanne Larghero, Quand la philosophie se mêle de sexe, Desclée de Brouwer, Paris, Septembre 2014, 170 pages, lu par Laurence Bur

C'est de la question de l'identité sexuelle que « se mêle » la philosophe Jeanne Larghero dans cet ouvrage animé d'un grand souci pédagogique. Dans un parcours en six chapitres, écrits avec humour, puisant dans des sources aussi variées que la physique aristotélicienne ou la phénoménologie d'un Merleau-Ponty, l'auteur, rompue aux « gender studies » et à l'histoire de la pensée féministe, se donne pour but de « poser un regard neuf sur l'identité sexuelle  ».

 

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10 juin 2016

Laurent de Sutter, Théorie du kamikaze, PUF, 2016, lu par Ugo Batini

Au milieu du chaos des détonations des attentats du 13 novembre 2015, une seule certitude semblait pouvoir s’imposer : nous avions affaire à des « kamikazes ». C’est cette étrange notion que Laurent de Sutter prend comme point de départ de son nouvel essai paru aux PUF, Théorie du kamikaze, afin de mieux mettre au jour la façon dont elle dit quelque chose de notre présent en éclairant de manière crue ce qui tend pourtant à se dérober.

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