Écoutez l’histoire que voici.
Trois galants, un bandit que l’échafaud réclame,
Puis un duc, puis un roi, d’un même coeur de femme
Font le siège à la fois. L’assaut donné, qui l’a ?
C’est le bandit.
Avec humour, Victor Hugo s’amuse à résumer sa propre pièce en trois vers et quatre pieds. C’est bien sûr une marque de complicité avec le spectateur.
Les caveaux qui renferment le tombeau de Charlemagne, à Aix-la-Chapelle. De grandes voûtes d’architecture lombarde. ... À droite, le tombeau de Charlemagne avec une petite porte de bronze ... On ne voit pas le fond du souterrain ; l’oeil se perd dans les arcades, les escaliers et les piliers qui s’entrecroisent dans l’ombre.
Historiquement, l’élection de Charles Quint a eu lieu à Francfort, mais son couronnement a bien eu lieu à Aix-la-Chapelle. Pour l’effet dramatique, c’est ce dernier lieu que retient Victor Hugo.
Une fois à Aix-la-Chapelle, Don Carlos a découvert qu’une ligue se réunit dans les caveaux du tombeau de Charlemagne pour préparer son assassinat. Il s’y rend donc pour les surprendre et les arrêter. Bien sûr, il n’est pas seul, Don Ricardo l’accompagne à l’intérieur, et le duc de Bavière reste à l’extérieur avec des soldats...
Dans les montagnes d’Aragon. La galerie des portraits de famille de Silva ; grand salle, dont ces portraits, entourés de riches bordures et surmontés de couronnes ducales et d’écussons dorés, font la décoration. Au fond une haute porte gothique. Entre chaque portrait une panoplie complète, toutes ces armures de siècles différents.
Scène 1, c’est le jour des noces de Doña Sol avec son vieil oncle Don Ruy Gomez. Mais c'est sans compter la série de coups de théâtre que Victor Hugo réserve à son spectateur...
Saragosse, un patio du palais de Silva. À gauche, les grands murs du palais, avec une fenêtre à balcon. Au-dessous de la fenêtre, une petite porte. À droite et au fond, des maisons et des rues. — Il est nuit. On voit briller çà et là, aux façades des édifices, quelques fenêtres encore éclairées.
Chaque acte se passe dans un décor différent. Dans sa préface de Cromwell, Victor Hugo remet en cause explicitement l’unité de temps et l’unité de lieu, pour mieux défendre l’unité d’action :
"Il suffirait enfin, pour démontrer l’absurdité de la règle des deux unités, d’une dernière raison, prise dans les entrailles de l’art. C’est l’existence de la troisième unité, l’unité d’action ... Celle-là est aussi nécessaire que les deux autres sont inutiles. C’est elle qui marque le point de vue du drame ; or, par cela même, elle exclut les deux autres. Il ne peut pas plus y avoir trois unités dans le drame que trois horizons dans un tableau."
Victor Hugo, Préface de Cromwell, 1827.
Saragosse, une chambre à coucher, la nuit. Une lampe sur la table. Dona Josefa Duarte, vieille, en noir, avec le corps de sa jupe cousu de jais, à la mode d’Isabelle la Catholique. Elle ferme les rideaux cramoisis de la fenêtre et met en place quelques fauteuils ...
Dans ses pièces, Victor Hugo utilise des didascalies très précises pour mettre en place le décor et les personnages. C’est une démarche propre aux romantiques : on va créer des tableaux, avec des clair-obscurs, une atmosphère mystérieuse, des objets symboliques, une couleur locale et historique. Dès le début, Victor Hugo nous plonge dans l’Espagne du XVIe siècle.
Réalisé au tout début des années 80, "Blow Out" est à la fois le dernier film d’une période particulièrement faste dans la filmographie de Brian De Palma – période qui avait débuté quelques années plus tôt avec "Soeurs de sang" – et très certainement son point culminant. Directement inspiré, comme son titre l’indique, par le dispositif du mythique "Blow Up" d’Antonioni, ici transposé sur un plan purement sonore, "Blow Out" est en effet un concentré du cinéma maniériste de Brian De Palma. À l’époque, beaucoup de cinéphiles considèrent encore De Palma comme un petit maître, un imitateur de Hitchcock, ou ici d’Antonioni, sans voir que son projet est précisément de retravailler des figures, des formes pour aller ailleurs. Précisément, ce qu’on nomme maniérisme sans pour autant que le terme, inspiré par l’histoire de l’art et la période qui suit immédiatement la Renaissance italienne, ait la moindre connotation péjorative. Dans "Blow Out", les références et autres allusions sont évidemment nombreuses : "Blow Up" donc, mais aussi "Psychose" et "Vertigo" sans oublier l’assassinat de Kennedy et les théories du complot qui en ont découlé. Sur ce fond très riche, voire un peu chargé, De Palma réalise une sorte de rêve : faire une oeuvre entièrement théorique qui soit, en même temps, un pur film de genre.
Pour en savoir plus, site de l'ACRIF (Association des cinémas de recherche d'Île-de-France).
Les élèves de Terminale littéraire du lycée Marguerite Yourcenar vous livrent leurs commentaires sur le film.
Quand il tourne L’homme qui tua Liberty Valance au début des années 60, John Ford a derrière lui une oeuvre considérable et une série de chefs-d’oeuvre au compteur. Dans le sprint final qui va le mener en 1966 à son ultime film, Frontière chinoise, il ne décélère pas, bien au contraire, mais on sent chez lui le désir de se retourner sur l’histoire de cet Ouest qu’il a tellement « légendé » tout au long de sa trajectoire. C’est notamment visible dans des films comme Le sergent noir, Les deux cavaliers ou Les Cheyennes où Ford conjure, avec une confondante intelligence, les pulsions racistes qui traversent l’histoire du western. Et c’est encore plus vrai, mais d’une toute autre manière, dans L’homme qui tua Liberty Valance qui révèle en quelque sorte l’envers du décor ou, plus précisément, la part de secret et d’illusion, si ce n’est d’imposture, que contient toute écriture de l’Histoire. Western de chambre aux accents presque borgésiens (relire à ce sujet la nouvelle Thème du traître et du héros), L’homme qui tua Liberty Valance ne montre ni chevauchée fantastique, ni charge héroïque. C’est un film réflexif, sans action ou presque, dont les décors sont pratiquement réduits à un saloon et une rue mais qui, pourtant, apparaît comme une sorte de western au carré. L’histoire de cet avocat, incarné par un James Stewart déjà vieillissant, venu dans l’Ouest dans l’espoir d’imposer la Loi à toutes et surtout à tous, offre à Ford l’occasion d’une sublime épure où l’émotion affleure au moindre geste.
Pour en savoir plus, site de l'ACRIF (Association des cinémas de recherche d'Île-de-France).
Les élèves de Terminale littéraire du lycée Marguerite Yourcenar vous livrent leurs commentaires sur le film.
Morse, le film de Tomas Alfredson adapté d’un best-seller suédois, met en scène Elli, une vampire de douze ans qui pourrait être notre voisine à tous et qui est tout sauf un corps étranger. Si l’âge des protagonistes et le thème vampirique pourraient donc spontanément rapprocher Morse de la série des Twilight, il y a pourtant certaines différences notables entre les deux. Tout particulièrement l’absence totale d’effets ou de signes gothiques dans le film de Tomas Alfredson. Ce qui signifie ici un traitement quotidien, voire domestique, sans référence directe à l’imagerie des Nosferatu et autres Dracula, de l’irrépressible pulsion vampirique. Cette histoire d’amour entre deux jeunes gens solitaires est d’abord une parfaite métaphore de la psyché adolescente.
Pour en savoir plus, site de l'ACRIF (Association des cinémas de recherche d'Île-de-France).
Les élèves de Terminale littéraire du lycée Marguerite Yourcenar vous livrent leurs commentaires sur le film.