"L'HOMME QUI TUA LIBERTY VALANCE" de John Ford - États-Unis – 1962 – 2h03 – noir et blanc avec John Wayne, James Stewart, Vera Miles, Lee Marvin
Par Serge Archimbaud (Lycée Marguerite Yourcenar Morangis (91)) le 01 mars 2017, 11:51 - Lien permanent
Quand il tourne L’homme qui tua Liberty Valance au début des années 60, John Ford a derrière lui une oeuvre considérable et une série de chefs-d’oeuvre au compteur. Dans le sprint final qui va le mener en 1966 à son ultime film, Frontière chinoise, il ne décélère pas, bien au contraire, mais on sent chez lui le désir de se retourner sur l’histoire de cet Ouest qu’il a tellement « légendé » tout au long de sa trajectoire. C’est notamment visible dans des films comme Le sergent noir, Les deux cavaliers ou Les Cheyennes où Ford conjure, avec une confondante intelligence, les pulsions racistes qui traversent l’histoire du western. Et c’est encore plus vrai, mais d’une toute autre manière, dans L’homme qui tua Liberty Valance qui révèle en quelque sorte l’envers du décor ou, plus précisément, la part de secret et d’illusion, si ce n’est d’imposture, que contient toute écriture de l’Histoire. Western de chambre aux accents presque borgésiens (relire à ce sujet la nouvelle Thème du traître et du héros), L’homme qui tua Liberty Valance ne montre ni chevauchée fantastique, ni charge héroïque. C’est un film réflexif, sans action ou presque, dont les décors sont pratiquement réduits à un saloon et une rue mais qui, pourtant, apparaît comme une sorte de western au carré. L’histoire de cet avocat, incarné par un James Stewart déjà vieillissant, venu dans l’Ouest dans l’espoir d’imposer la Loi à toutes et surtout à tous, offre à Ford l’occasion d’une sublime épure où l’émotion affleure au moindre geste.
Pour en savoir plus, site de l'ACRIF (Association des cinémas de recherche d'Île-de-France).
Les élèves de Terminale littéraire du lycée Marguerite Yourcenar vous livrent leurs commentaires sur le film.
Commentaires
L’Homme qui tua Liberty Valance est un film western funèbre en quelque sorte qui repose essentiellement sur l’erreur et sur un sentiment : la nostalgie. En effet si nous résumons concrètement les faits, nous avons tout d'abord d'un côté, Ransom Stoppard incarné par un excellent acteur, il faut bien l'avouer, James Stewart, un avocat, qui est devenu un homme politique reconnu et respecté et qui pense avoir tué un célèbre gangster qui terrifier l'ouest, Liberty Valance. Liberty Valance est un criminel. Mais malgré cela, Stoppard reçoit un éloge digne d'un héros c'est-à-dire la reconnaissance de toute l'Amérique de l'Ouest et tous les bénéfices accompagnent cet acte héroïque. En effet, il possède une vie que tout homme désire, c'est-à-dire une vie comblée grâce à la stature politique nationale qu'il possède, il ne manque en aucun cas d'argent alors que généralement l'argent est cœur des perturbations des hommes et est une source de problème, une femme splendide qu'il aime et inversement. Contrairement à Tom Doniphon, le véritable héros de la délivrance de la terreur et des souffrances de la population de l'Ouest qui meurt seul, ignoré de tous malgré son acte courageux et héroïque. D'autant plus cet aspect pathétique et nostalgique est renforcé avec son enterrement misérable. En effet, on assiste à l'enterrement médiocre de Doniphon dans une toute petite pièce, sans meuble, juste accompagnée d'un petit banc et de son seul ami qui fut son employé. Et pour finir, un homme qui n’aura jamais su déclarer l'amour qu'il porte encore à une splendide femme qu’il aima à temps puisque avant de lui déclarer tout l'amour qu'il lui porte, il voulait faire les choses bien, dans l'ordre et en parallèle, il lui construisit une maison et il avait prévu de lui demander sa main à la fin de la construction de cette maison pour qu'il emménage directement ensemble sans perdre un instant. Malheureusement, pendant la construction de cette maison il apprend que son ami Stoppard aime la même femme que lui et que elle aussi l'aime. Par conséquent, en apprenant cette triste nouvelle , il fut pris de fureur et brûla leur future maison. Ensuite, il sauve Stoppard du gangster car le gangster voulait le tuer à coup de revolver lorsque Stoppard et le gangster se retrouvèrent seuls dans une rue et que le reste de la population se cachait et admirait la scène dans des bars, chez eux. Liberty Valance touche le bras de Stoppard et Doniphon avec son fusil tire en plein cœur Liberty Valance et il meurt. Cependant Doniphon tire en même temps que Stoppard et Stoppard pense que c'est lui le meurtrier mais en réalité il manque sa cible contrairement à Doniphon qui l'a atteinte. Doniphon lui laisse même l'éloge qui accompagne cet acte héroïque alors que Stoppard n'a rien fait. Avec tout ces éléments le spectateur se sent maussade, morose, peiné et une profonde amertume l'envahit. Cependant on constate avec ce film une nette différence contrairement à d'autres. La fin du film repose sur une réplique que le spectateur ne peut pas oublier, que le journaliste adresse à Stoppard: « À l’Ouest, quand la légende dépasse la réalité, on imprime la légende. » Cet Ouest fut incarné par le cow-boy Tom Doniphon, un cow-boy digne de confiance et gentil. Mais cette victoire n'est pas totalement une victoire puisqu'elle est amère. Contrairement à la plupart des films que nous avons l'habitude de voir, la fin repose sur une note de nostalgie et non pas sur une fin totalement heureuse puisqu'on aperçoit que le couple mythique du film formé par Ransom et Hallie, après les épreuves, les moments partagés qu'ils ont vécus, malgré tout cela, ils ne semblent pas réellement heureux et amoureux car leur histoire est fondée sur un mensonge, un quiproquo et sur la mort d'un être aimé.