09 mars 2022

Une voix

                                        Je venais de finir mes études de médecine et une fois sorti du bâtiment j'eus l'impression que le vent soufflait plus fort que d'habitude telle qu'on crut entendre une douce voix. Histoire de fêter la fin de mes études  j'étais partis boire un verre avec ma famille et mes amis. Etrangement la soirée ne me plaisait pas et la bière me paraissait amer. La fête semblait durer une éternité et pour cacher mon malaise je buvais sans même compter (j'avais fini par vomir 1 ou 2 fois). Je me sentais comme enfermé, étouffé dans une cage sans ouverture, j'avais besoin de prendre l'air. Sans parler à personne je sortis et courus le plus loin possible, le sol semblait se rapprocher de plus en plus de mon visage. J'étais sûrement ivre( cette hypothèse était fortement possible) vu le nombre de verres que j'avais bu. Rapidement je me trouvai face à une forêt dont le souffle glacial qui me donna des frissons s'échappait.

La sylve me paraissait étroite comme si elle pouvait s'effondrer sur moi une fois à l'intérieur. Cependant face à cette dernière, hormis les frissons, elle ne me paraissait pas dangereuse, plutôt étrange. Je continuai d'observer la multitude d'arbres présents sous mes yeux en me questionnant sur le temps que j'allais passer ici. J'entendis, non, je crus entendre une voix, la voix d'une fille provenant de la forêt.  Une voix remplit de crainte, qui m'appelait, qui prononçait mon nom. Cette voix me semblait familière, trop familière. Comment connaissait t'elle mon nom? Pourquoi m'appelait t'elle? Était-ce simplement le fruit de mon imagination? Tant de questions sans réponses. La voix continuait. Elle ne s'arrêtait pas. J'avais comme l'impression que le bois m'attendait.

J'étais désormais à l'intérieur de la forêt et je ne savais même pas pourquoi j'y étais. Je n'entendais plus la voix et mon esprit enivré m'empêchait de réfléchir. Décidé à retrouver cette fille qui pleurait, je marchais sans m'arrêter. Le sol était humide et la boue absorbait mes pas tel le sable mouvant. Mes pieds me faisaient mal mais ce n'était pas assez pour m'arrêter. D'ailleurs je ne savais pas vraiment pourquoi je marchais, je savais que c'était pour retrouver cette fille bien que je doutais encore. Je marchais toujours mais plus vite. J'avais l'impression que le sol m'agrippait comme si des mains en sortaient. Avec le brouillard j'avais du mal à percevoir ce qu'il y avait devant moi. Les arbres avaient des visages, du moins c'est-ce que je croyais voir mais ce n'était pas possible. Dans ma panique je trébuchai sur une racine qui me parut énorme. Et puis la voix reprit dans ma tête, j'entendais des pleurs toujours de la même fille. Je me sentais mal je ne voulais pas y croire. Comment quelqu'un pouvait parler dans ma tête!? C'était impossible...je...je reconnaissais cette voix. Du moins celle que je crus entendre.

C'était la voix d'une personne que j'ai connue et au moment où je l'ai reconnue j'ai commencé à sombrer dans le doute, la folie. Durant mes études de médecine j'ai pu apprendre et pratiquer au côté de médecins expérimentés. Malheureusement durant une pratique j'ai tué une jeune fille, on m'avait répété à plusieurs reprises que de toute manière il aurait été très dur de la soigner. Mais je me sentais énormément coupable j'en avais fait des cauchemars et aujourd'hui dans ma tête, dans cette forêt je l'entendais pleurer, crier, gémir, m'accuser de l'avoir tué, de ne pas l'avoir sauvé. J'avais horriblement mal à la tête et je ne savais pas si c'était à cause de cette voix ou de l'alcool. J'avais mal, j'avais peur. Mes mains étaient moites, je tremblais avec l'impression que mon crâne allait exploser. En levant la tête j'eus l'impression de voir des silhouettes me pointer du doigt. Je ne voulais pas y croire j'essayais de trouver une raison rationnelle mais je n'y arrivais plus, désormais j'y croyais, beaucoup trop. Je ne pouvais plus bouger, les ombres m'encerclaient, la voix résonnait sans arrêter. J'étais fou! Voilà c'était ça la folie! Je frappais ma tête de plus en plus fort de plus en plus vite. Arrête! Tais toi! Je répétais ces phrases dans ma tête. Je pleurais, je vomissais. Décider à en finir j'avais pris un caillou pour frapper ma tête et à ce moment je vis une lumière blanche apparaître je croyais que cela signifiait que c'était la fin, mais juste après j'entendis une voix, celle de ma mère qui venait me chercher. Elle m'avait sauvé la vie. Encore aujourd'hui je ne sais pas ce qui c'est passé ce soir-là.

 

La nuit des nuages

Je m’avançais dans une allée bondée de monde dans l’aéroport.

15h30. Encore une heure avant d’embarquer dans l’avion qui m’emmènera en vacances dans l’Etat du Maine, aux Etats-Unis. Mon cousin Tommy m’y attendait avec impatience, ainsi que ma tante Chelsea et mon oncle Stephen. 

Enfin les grandes vacances ! Je venais de finir mon année de terminale, prêt à m’orienter dans le secteur littéraire, pour devenir auteur, comme mon oncle. Nous étions le treize Juillet, je venais de fêter mon anniversaire le sept. Dix-huit ans ! Enfin majeur ! Et je pars aux U.S.A. ! Tout seul ! En avion ! Tout, absolument tout dans ma vie allait bien. J’avais envie de le crier au monde entier : « Moi, Peter je suis le plus heureux du monde ! » ! Bien sûr, je ne l’ai pas hurlé et j’ai continué ma balade dans la grande allée de l’aéroport où s’alignaient une multitude de magasins.

Cinquante minutes après, j’étais dans la queue pour embarquer pour le vol 4321. J’avais passé les contrôles de sécurité et tout ce qui allait avec. Enfin… j’étais tout seul pour embarquer pour l’instant. Il y avait toujours autant de monde dans la grande artère de l’aéroport et je me senti soudain seul au milieu de tous ces gens, eux de l’autre côté de la petite barrière qui délimitait la file d’attente, moi, dans celle-ci.

Je sortis le cookie au caramel que j’avais acheté un peu plus tôt, pris d’une petite faim. 16h25. Des personnes arrivèrent derrière moi dans la file : un couple du troisième âge qui arborait de grands chapeaux et des lunettes de soleil, une famille avec trois enfants et c’était tout. On nous fit entrer à 16h27.

Je m’assis à ma place, côté hublot. Il n’y avait personne sur les deux autres sièges à ma droite. Je m’installais donc à mon aise. Le bruit de la foule de l’aéroport avait laissé place à un calme serein. Une mère et sa fille arrivèrent bientôt, suivies d’une jeune femme blonde et de son chien, qu’elle avait mis dans son sac en fourrure synthétique rose bonbon. Les trois hôtesses de l’air nous expliquèrent les règles de sécurité et tout le tralala.

16h30. L’avion s’avançait sur la piste de décollage. Je sortis une petite bouteille de jus d’orange que j’entamais.

16h32. Comme j’étais anxieux à l’idée de m’envoler tout seul en avion ! Enfin, pas totalement, il y avait quelques autres passagers, mais j’étais stressé… Mes parents étaient très protecteurs et n’avaient jamais voulu que je prenne l’avion seul, c’était donc pour moi une première ! 

16h37. On avait décollé ! J’avais déjà fini mon jus d’orange.

16h41. Nous étions maintenant en plein ciel. Je sortis le roman d’Agatha Christie « La mort dans les nuages », qui, je dois le dire, n’est pas très recommandé lorsqu’on voyage en avion. Absorbé par ma lecture, je ne vis pas passé l’heure. En même temps, aucune importance, car le vol durait 9h…

17h13. Je sortis mes écouteurs et j’écoutais du Nirvana suivi de Chopin pendant un certain temps. La famille et ses trois enfants étaient installée sur les sièges du milieu sur deux rangées. Le couple de vacanciers étaient deux rangées derrière moi. La femme avec son petit chiwawa se trouvait trois rangées devant et, la mère et sa fille sur la rangée de siège de l’autre côté de l’avion, sur la même rangée que moi. Je remarquai soudain un homme que je n’avais pas vu lors de l’embarquement, il s’était levé pour prendre quelque chose dans sa valise qu’il avait mise dans le petit compartiment au-dessus de lui.  Il me semblait bizarre, habillé tout en noir, un horrible rictus déformant son visage pâle et mal rasé. Il était placé de l’autre côté de l’avion, une rangée devant la mère et sa fille. 

Curieux de constater comment le temps passe vite, je sortis ma montre. 17H13…17H13 ? mais tout à l’heure, il…il était déjà 17H13 ! Je regardais alors le mécanisme de ma montre, mais, non, tout allait bien… J'attendis 5 minutes… dubitatif. Je regardais à nouveau ma montre :17H13 ! je…je…je ne comprenais pas… impossible…illogique…cette situation ! 

Je me résolus donc à aller voir le couple avec leurs enfants, je leur demandais s’ils avaient la même heure que moi. La réponse fût affirmative ! Et eux non plus ne comprenaient pas ce qu’il se passait. La jeune femme et son chien vinrent à ma rencontre pour me poser la question que je venais de demander. 

Bientôt, tous les passagers se regroupèrent pour tenter de trouver une explication à cet évènement quelque peu étrange. Tous les passagers, sauf l’homme en noir…

Je l’observais d’un œil intrigué pensant qu’il ne me voyait pas. Soudain, il se retourna, me fixant de ses petits yeux noirs arrogants. Pris de peur, je détournais le regard.   Pourquoi ? Pourquoi avais-je été angoissé face à l’homme en noir, comme je l’appelais à présent ? Je sentais les battements de mon cœur s’accélérer à mesure que l’anxiété montait en moi.

Le climat étrange avait rapidement laissé place à une atmosphère anxiogène. Il était toujours 17H13… tout le monde était retourné s’asseoir à sa place, semblant attendre quelque chose. Quelque chose ? Quoi ? Une annonce du commandant de bord ? Des hôtesses de l’air ? On ne savait même pas. Personne des membres de l’équipage ne se montrait !

Si l’heure ne s’était pas “figée” ainsi, il serait certainement déjà 19H…ou je ne sais combien… La peur m’envahissait peu à peu… Le silence abominable, l’heure qui restait sur les mêmes chiffres, l’inaction du personnel… j’avais peur.

L’obscurité pris soudain possession de l’avion. Des cris d’angoisse s’élevèrent et je m'agrippai à mon siège.  Il faisait noir également à l’extérieur et nous avions l’impression de ne plus nous trouver dans l’avion mais, dans le ciel obscur lui-même. 

Soudain, la lumière devant la porte de l’avion clignota. Je me tournais lentement côté couloir pour essayer de distinguer ne serait-ce qu’un passager… J’aperçus le couple, leurs trois enfants dans leurs bras, avec les yeux terrifiés. Tous les passagers devaient être affolés, j’en faisais partie. Et si c’était l’avion qui n’avait plus de carburant ? Non ! Impossible ! Les mécaniciens avaient dû vérifier le niveau avant le décollage. Si c’était le pilote qui voulait se crasher, se suicider ? bon ça se tenait, mais je n’étais pas prêt à mourir… J’en avais la chair de poule rien que d’y penser…

J’étais tellement plongé dans mes pensées que je ne vis pas les magazines, les prospectus et le menu de l’avion flotter en lévitation dans l’allée.  Quand je les vis, je sursautai. A présent, des assiettes au nom de la compagnie aérienne arrivaient par dizaines, de l’arrière de l’avion.  La petite lumière clignotait toujours, les cris s’étaient tus, le silence régnait à présent, tous les objets étaient encore suspendus dans les airs, comme s’ils étaient attachés à un fil transparent. Ce silence n’était que plus pesant et je tremblais d’horreur face à cette situation.

Cette situation dura plusieurs heures jusqu’à ce que les lumières reviennent. Les assiettes et l’argenterie tombèrent sur la moquette des allées et tous les passagers, y compris moi, se regardèrent. 

L’heure n’était plus bloquée à 17H13, il était désormais 02H36, heure des USA. On apercevait par le hublot les nuages baignés de la douce lumière de l’aube. On commença à descendre doucement à travers les nuées de coton du ciel, le commandant de bord annonça enfin :

« Nous allons bientôt atterrir à Augusta, capitale du Maine. Merci d’attacher vos ceintures. L’équipage et moi tenons à nous excuser car nous avons eu un problème avec les annonces, les hauts parleurs, l’avion ayant subi un court-circuit. De plus, quand nous avons voulu les réparer, les lumières de l’avion se sont éteintes… merci aux mécaniciens et aux hôtesses pour leur aide et excusez-nous pour ces désagréments. Les hôtesses, nous ayant assistées lors de la réparation, n’ont pu être présentes pour vous donner les consignes de sécurité, mais heureusement, il n’y a eu aucune perturbation météorologique. Sur ce, l’équipage et moi-même vous souhaitons un agréable séjour dans le Maine et espérons vous revoir prochainement sur nos lignes. Attention à l’atterrissage ! ».

Les lumières de la ville d’Augusta nous parvinrent. Enfin arrivés. 3h00. Nous venions de nous poser. Les hôtesses étaient enfin sorties de la petite salle réservée au personnel et les passagers commençaient à descendre de l’avion. J'ai pris ma valise et fait la queue pour partir. L’homme en noir était derrière moi. L’aura d’horreur -incompréhensible- que je ressentais en sa présence m’assaillit. Je me dépêchais de sortir de l’avion en disant au revoir aux hôtesses de l’air et je me retrouvais devant un petit escalier. Je le descendis avec les autres passagers et me retrouvai sur la piste.

Je me retournais, l’homme en noir était toujours là. Je me rendis à l’aéroport qui était grand et me semblait très haut. Je vis mon oncle, ma tante, et mon cousin. Ils m’attendaient avec des grosses pancartes colorées à mon nom et je les rejoignis. Je regardais une dernière fois derrière moi, l’homme en noir me suivait. Soudain, il disparut, comme ça, d’un seul coup. Il était là et la seconde d’après, il ne l’était plus. Je me retournais vers ma famille avec de grands yeux horrifiés et je leur demandais s’ils avaient vu la même chose que moi. Ils me répondirent par la négative et tous me dirent :« tu dois être fatigué ». Je partis avec eux et les vacances furent géniales.

Cette histoire date de vingt-cinq ans, je ne l’ai jamais racontée à personne. Je ne sais toujours pas ce qu’il s’est passé, les objets volants, l’homme en noir… Maintenant, j’en suis à me demander si ce n’était pas un fantôme, ma famille ne l’ayant pas vu quand il a disparu. Je ne le saurai sans doute jamais. 

 Vois-tu Jim, dans la vie, il y a souvent des choses inexpliquées, des étrangetés auxquelles on ne sait pas donner d’explications rationnelles. Cette histoire en est la preuve. C’est la chose la plus incompréhensible que j’ai jamais vécue. Profite de ta jeunesse mon fils, car la vie te réservera des joies… et des frayeurs. 

 

Départ pour Storybrook

"Mickael !" me cria mon patron. Je courus et rentrai doucement dans son bureau.

- Oui Monsieur, murmurai-je d'une petite voix douce.

- Tu vas partir pour Storybrook !, dit-il en pouffant de rire.” Il gloussait tellement avec son cigare qu'il manquait de s'étouffer à chaque fois qu'il plaisantait. Il me regarda alors droit dans les yeux et reprit son sérieux : "Mickael, t'es jeune, t'as j'sais pas... 30 ans..." Je le coupai d'une voix tremblante : "euh 25 Monsieur".

Il fit comme s'il n'avait rien entendu et s'exclama "mon p'tit Mickael, t'es tout jeune, t'es tout beau, tu pourras séduire plein de jolies p'tites minettes !" Là, il éclata de rire, si fort, que j'ai cru qu'il allait s'étouffer.

Il m'expliqua pourquoi je devais aller à Storybrook, pour le travail. Je partirai donc à Storybrook dans deux jours. Cela ne m'enchantait guère car je devais quitter mon appartement en centre ville pour me retrouver au milieu de nulle part, dans une campagne perdue. Cela me faisait peur...

Une fois arrivé à Storybrook, épuisé par mon trajet, je n'avais qu'une hâte, rejoindre au plus vite le logement que mon patron avait prévu pour mes quelques jours sur place, situé dans une zone très boisée de la ville. Il était tard, l'air était frais et un brouillard s'accumulait, limitant ma visibilité. En traversant la ville, je ne voyais personne. Les rues étaient désertes. Plus j'avançais, plus mon cœur se serrait et je sentais comme des frissons de froid mêlés à de la peur. Je m'imaginais qu'à tout moment, un monstre pourrait surgir et me dévorer tout cru. Je vérifiai à plusieurs reprises si la voiture était bien bloquée, à chaque feu ou chaque stop et je continuai à rouler en ne quittant pas des yeux mon GPS, qui perdait petit à petit tout signal. En plus, je n'avais presque plus d'essence, qu'allais-je bien pouvoir faire ? Je continuai à rouler tant que possible, mais la voiture s'arrêta.

Sans m'en apercevoir, j'avais dépassé la ville, j'étais à présent dans la forêt. Elle était sombre et j'entendis du bois craquer. J'angoissais de plus en plus et le pire de tout, c'est qu'il n'y avait pas de réseau. Je me voyais déjà dans les journaux : "Mickael, de taille moyenne, 1m72, les cheveux bruns et ébouriffés, les yeux marron vert, les chaussures noires, un pull bleu foncé, des chaussettes noires, un jean bleu clair... le nez recourbé, une paire de fossettes... Mickael était parti pour le travail et a disparu. Est-il encore vivant ?"

Tout d'un coup, j'entendis un cri d'animal, je sentis une sorte de frayeur me monter à la tête, le bruit se rapprochait de plus en plus fort, j'étais terrifié. Mon cœur battait à 100 à l'heure, lorsque, j'aperçus une ombre, celle d'une créature, puis un cri terrifiant, qui me glaça le sang, puis un autre... On aurait dit un animal qui se faisait attaquer.

Mes jambes tremblaient tant, que je tenais à peine debout et ne pouvais courir plus vite. D'un coup, le bruit s'arrêta. Des feuilles formaient une petite tempête et tournoyaient dans le vent quand je vis une petite ombre au loin.

Cette ombre s'avança et commença à s'approcher de moi. Était-ce la mort ? L'ombre progressait vers moi chaque seconde. Quand alors, j'aperçus que cette créature n'était pas un spectre, c'était un animal que je n'arrivais pas à identifier. Il avait les yeux noirs, ses pupilles étaient rouges, il avait le dos courbé, il marchait sur ses deux pattes, mais donnait des coups d'accélération lorsqu'il se mettait à quatre pattes.

La créature était énorme et très poilue, de ma hauteur et avait la tête d'un rat, en dix fois plus gros.

J'étais terrorisé, la créature avait du sang autour de sa bouche. La bête resta d'abord immobile sur ses deux pattes arrières, il respirait l'air de la forêt. Puis se redressa d'un coup et commença à foncer vers moi. J'avais lu tous les livres sur la vie des animaux sauvages et quand un animal veut attaquer sa proie, il recourbe ses pattes avant de foncer et de passer à l'attaque. Il ne me restait plus qu'une chose à faire... COURIR !!!

Je courais comme jamais auparavant, moi, qui n’avait jamais été un grand sportif. Mon sport se résumant à aller de mon bureau à la cantine ou à la photocopieuse, ou au bureau de M. Laroche, mon patron à la banque HVLC. Et moi qui me plaignais lorsque l'ascenseur était en panne.

Alors que la créature me poursuivait encore, j'aperçus au loin un arbre géant, faisant la taille de deux maisons superposées. Ses feuilles étaient si verdoyantes et si épaisses que l'arbre en était majestueux et me semblait protecteur. Je voulais le rejoindre. Cependant une rivière passait juste devant et on ne voyait pas le fond. Pouvais-je la traverser ? J'entendais la bête approcher, alors, sans réfléchir, je sautais. Une fois dans l'eau, je ne voyais plus rien, je n'entendais plus la créature et je me sentis couler tout doucement. Etait-ce la fin ?

J'étais terrifié, ne trouvais pas de prise, je ne savais que faire. Puis, j'ouvris les yeux et j'aperçus une petite lueur briller au loin. Je n'avais plus de souffle et n'arrivais pas à remonter à la surface. Je me dirigeai sans le vouloir vers cette lueur qui n'était autre que la porte dorée. Alors, dans un dernier souffle, je l'ouvris et j'atterris sur une des branches de l'arbre.

A présent, je ne pouvais et ne voulais plus redescendre. Le temps était doux, les oiseaux chantaient, une magnifique cascade était devant moi. Dans l'arbre je vis une petite boîte de Mr Laroche j'étais arrivé à destination.

 

 

Une main tendue

Je terminai de monter le dernier colis dans ma chambre. Au rez-de-chaussée, je pouvais entendre mes parents remercier les déménageurs. Je soufflais, moi qui vivais dans le coin le plus branché de la capitale, me voici coincée dans le plus petit village de France.

De la fenêtre de ma chambre, je pouvais observer une immense forêt qui entourait le manoir, devant la bâtisse, une petite route en terre rejoignait le centre-ville. Mes parents se sentant étouffés dans notre appartement parisien, ils avaient acheté ce manoir perdu dans la forêt. Je n’allais pas me plaindre, ma chambre faisait trois fois la taille de l’ancienne mais le fait que la civilisation était à plus de 30km me rendait retissante.

Il était dix-sept heures, et déjà je pouvais voir le soleil descendre lentement. Après avoir pris ma douche dans la nouvelle salle de bains, je descendis pour me prendre quelque chose à grignoter. Mes parents étaient partis tester le nouveau restaurant du coin. Dehors, un épais brouillard entourait le manoir, et les pins de la forêt m'avaient l’air trois fois plus grand, je frissonnai. Je m'apprêtais à m’allonger sur le canapé quand le bruit d'une porte qui grince me stoppa dans mon élan.

- Biscotte ? demandai-je d’une voix hésitante.

Biscotte, c’était le nom de mon chat, il était constamment en train de vadrouiller dans la demeure. J’avais l’impression qu’il n'aimait pas sa nouvelle maison comme si un danger allait surgir de n’importe où, il grognait et miaulait lorsqu’il entrait dans ma chambre. Je me levai doucement pour aller vérifier que la porte d'entrée était bien verrouillée. Sous mes pas, le plancher grinça, je sursauta, apeuré par ce bruit soudain. Mon père m’avait prévenu “ Ophélie c’est une vieille maison, c’est normal qu’elle grince un peu”. Je me surpris avoir les mains tremblantes, je traversai le hall d'entrée pour accéder à l’escalier lorsque je vis une ombre immobile dans l’obscurité, je pu apercevoir une longue robe noire flottait au-dessus du sol. Je clignais des yeux pensant que c’était une hallucination de mon cerveau. Je les rouvrit, plus rien, le hall était vide. J’inspirai un grand coup dès le premier jour, cette maison me joue des tours…

Dans ma chambre, je me glissais sous ma couette, j’éteignis les lumières et fermais les yeux. Autour de moi, je sentais le bois craquer et le vent souffler contre mes fenêtres comme des chuchotements m’implorant de les ouvrir. Soudain dans un grand fracas, elles s'ouvrirent laissant une puissante rafale pénétrer dans la pièce, je criai de surprise. Mes rideaux volèrent et des feuilles s’éparpillèrent partout par terre. Je sautai pour refermer mes fenêtres, j’eus du mal, luttant contre le vent. Après quelques secondes d’efforts, je réussis, épuisée, je m’assis sur mon lit méditant les événements passés. Les portes qui grincent, la mystérieuse ombre du hall et puis maintenant les fenêtres qui s’ouvrent toute seule. Je soupirai, soudain la peur étreignit ma gorge, devant mon lit se tenait, l’ombre que j’avais aperçu précédemment. Elle était debout immobile, la tête légèrement penchée vers la gauche ressemblant à une pâle vision de mon esprit. Mon sang se figea, paralysé par la terreur je ne pouvais pas descendre de mon lit pour m’enfuir. L’ombre ne bougeait pas,ce qui la rendait encore plus terrifiante. Les murs de ma chambre semblaient de plus en plus grands, m'oppressant comme les barreaux d’une prison. Derrière le papier peint, des mains tapaient sur le béton comme si la maison était vivante et que j’avais dérangé les véritables occupants de la demeure. Je plaquai une main sur ma bouche pour étouffer un cri. L’ombre tendit sa main doucement, essayant de m’attraper, je reculais terrifié à l’idée que cette “chose” me touche. Le bruit des escaliers interrompit la créature, mes parents étaient rentrés. L’ombre se mit à fondre comme de la glace en été puis disparut dans les failles de mon plancher.

Le corps tremblant, je me levai chancelante.

 

Portrait hanté

Nous étions lundi, dehors l’aube pointait déjà le bout de son nez, il n’était pourtant pas huit heures, heure à laquelle le soleil commence à apparaître depuis ces derniers jours.
En effet, l’hiver dans lequel je me trouvais depuis maintenant cinq jours était déjà froid, la neige tombait du matin au soir et le soleil se levait tard et se couchait très tôt.
Des fois, il arrivait même qu’on ne le voit pas pendant des jours, même parfois des semaines ou même des mois...
Mais enfin, nous, habitants de la Norvège, avions l’habitude.

Pour en revenir à mon récit, je me promenais de long en large dans mon grand mais humble manoir, la demeure de mes ancêtres comme celle de mes descendants, si un jour je me marie.
J’habitais ici depuis ma naissance, je connaissais donc parfaitement les salles et les couloirs de mon château, pourtant je ne crus pas reconnaître l’allée dans laquelle je me trouvais, longue infiniment longue, un grand et étendu tapis rouge en velours s’étendait devant moi, les murs recouverts de papier peint bordeaux et agrémentés de beaux ornements sculptés dans le marbre ou étaient disposés tous les portraits de mes ancêtres , jamais je n’avais remarqué ma famille aussi grande, je n’avais connu que mes parents, Louise et Mark, ainsi que mon petit frère, Lysandre qui avait disparu subitement sans laisser de trace et sans avoir quitté le château, il y a sept ans, le dix septembre.

Après m’être arrêté à chaque tableau dans l’espoir de reconnaître un de mes ancêtres, j’eus l’impression que leurs yeux me suivaient, me dévisageaient, qu’ils m’épiaient. Une goutte de sueur aussi froide que la neige qui tombait dehors à présent coula le long de mes tempes : peut-être les avais-je connus dans un lointain passé, dans une autre vie... Je ne le saurai jamais sauf si j’avais le pouvoir de remonter le temps, et ainsi aurais-je peut-être pu revoir mon frère et découvrir le mystère de sa disparition.

Après ma frayeur, j’étais enfin arrivé au bout du couloir et à présent se dressait devant moi une grande porte en bois entourée de métal, un imposant cadenas en acier était accroché à la porte et m’empêchait de l’ouvrir pour que je puisse voir ce qui s’y cachait, peut être un trésor, ou bien de l’or, non je ne puis y penser car sinon mes parents m’en aurait parlé.
Toujours est-il qu’il fallait que je découvre ce que cette porte cachait, ou ce que la pièce qui se trouvait derrière renfermai (si c’était une pièce).
Je me mis donc à réfléchir et je commençai à chercher tout autour de moi quelque chose qui pourrai l’ouvrir, peut-être une clef ou un instrument.
Une idée me vint, je commençai à revenir sur mes pas pour accéder aux jardins pour que je puisse récupérer une scie et ainsi revenir découper la porte.

 Une fois arrivé à la fin du couloir se dressait à ma droite le portrait de mon frère, il devait avoir quinze ans quand il fut peint ; je me mis à me remémorer les moments que j’avais passé avec lui, bons comme mauvais, quand soudain je crus entendre sa voix venir du bout du couloir, elle m’appelait, me demandait de l’aider...
Une phrase me perturba tout particulièrement, elle me murmura (ou peut-être était-ce le vent) à l’oreille comme une énigme, la phrase suivante :
« Marche jusqu’à ma chambre je t’attends, je veux te revoir, sortir de mon cauchemar »
Et plus elle me parlait, plus elle murmurait, jusqu’à ce que je ne puis plus l’entendre.
J’étais tétanisé, essayant de me raisonner, je sentais mes jambes flageolantes, se dérober sous moi, le couloir de velours se referma et je sombrais dans un sommeil profond.

Je me réveillai subitement dans une ancienne chambre délabrée et poussiéreuse, une brise légère s’échappait par la fenêtre ouverte.
Les rideaux s’envolaient de part et d’autre de l’ouverture, et des araignées sortaient où plutôt fuyaient la pièce, des centaines de mites comblaient le sol, sur le parquet de bois flotté de chêne ou d’hêtre, j’essayais de poser mon pied, dans l’espoir de me lever ; en effet je m’étais réveillé sur un lit où la poussière et les acariens avaient pris une place importante, le lit possédait une structure en bois également grignoté par les mites. Les tissus troués qui pendaient le long du sommier avaient dû être autrefois de beaux rideaux de soie blancs qui protégeaient l’intimité du dormeur.
En face du matelas se trouvait de grands tableaux, encore un portrait qui représentait mes parents et mon frère, Lysandre, décidément mes ancêtres me suivaient, peut-être voulaient-ils que des souvenirs me reviennent, ou peut-être un seul en particulier.
Il y avait un bureau disposé juste au-dessous de celui-ci, lui ne paraissait pas abîmé, une plume, de l’encre et le début d’une lettre à moitié brûlée y était disposée.
Je me levai et me dirigea donc vers celui-ci, mais le tapis visiblement ancien, déchiré et poussiéreux, et ayant comme motifs ceux qui me faisaient penser au Moyen-Age, disposé juste devant le lit semblait vouloir me retenir, m’enrouler pour ne pas que j’approche le secrétaire. Mais cela était impossible, les objets ne peuvent pas bouger !

Pendant que je me faisais tordre par un bout de tissu, un corbeau vint croasser sur le rebord de la fenêtre, une brume épaisse l’accompagnait, blanche et qui ne permettait plus de distinguer le moindre objet de la pièce dans laquelle je me trouvais, l’angoisse commença à monter en moi, mes poils se hérissèrent, et mon cœur se mit à battre tel un tambour déchaîné.
Un personnage translucide, sans aucune once de vie vola par la fenêtre, tout mon corps se mit à trembler car je cru d’un coup reconnaître mon frère !
Bloqué à l’âge de sa disparition comme transformé en fantôme, il paraissait plus vieux, plus fatigué que sur le tableau, deux autres spectres l’accompagnaient, Louise et Mark, mes parents !

Ma mère vêtue d’une longue robe de fumée vierge et opaque. Mon père quant à lui portait un costume de la même blancheur, leurs yeux lumineux, vides et sans pupilles me dévisageaient, me punissaient horriblement, un regret si immense s’empara de moi de tout mon corps, de toute mon âme.
Ils se mirent à me parler, non, à m’annoncer ma mort et à me lire le début de cette étrange lettre qu’ils prirent délicatement du bureau, elle disait :
« N’as-tu pas reconnu la chambre de ton humble frère disparu subitement du jour au lendemain, de la seconde à la minute, celle dans laquelle tu avais joué autrefois avec celui qui portait le même sang que toi, n’as-tu pas cherché à le retrouver, à cause de toi notre fils ne pourra jamais revenir à la matière d’humain ».

D’un coup plus rien puis craquement, cris, soufflements et même hurlements se mirent à m’oppresser et je tombais dans le noir complet, la nuit la plus totale.

Je me réveillais dans mon vaste salon, derrière moi se trouvait la grande cheminée de pierre où brûlait un feu doux et où reposait le tableau familial de la chambre de mon frère, je me dis que tout cela n’était qu’un rêve, un cauchemar.
Devant moi reposait une assiette bien garnie de viande, de légumes et de pommes de terre, à droite de celle-ci était disposée un bon verre de vin rouge datant de sept ans et juste en face la bouteille où ne restait plus que la lie reflétait mon visage.
Je me levai pour aller voir l’heure et je sentis tomber quelque chose, je me baissai et ramassa l’objet.
La lettre !
C’était bien la lettre brûlée et trouée, celle de mon cauchemar, celle qui me faisait regretter d’avoir laissé, abandonné mon frère et qui m’annonçait ma mort le dix septembre de l’an prochain...
Mais comment était-elle arrivée là ?
Je n’avais que rêvé, c’était juste et tout bonnement impossible !

Avais-je vraiment rêvé ?...