Francesco Careri, Walkscapes, la marche comme pratique esthétique, Éditions Jacqueline Chambon, Rayon Art, 2013, 221p., traduit de l’italien par Jérôme Orsoni.
Francesco Careri, architecte et chercheur (Université de
Rome III), nous propose un essai dont l’objectif est de donner à l’architecture
une ressource nouvelle, un moyen de s’ouvrir par la marche à ce qu’il nomme, en
référence aux surréalistes, l’inconscient des villes. Sa démarche s’inscrit
dans le cadre d’un travail initié en 1995 par la création du groupe « Stalker »
avec d’autres chercheurs architectes, mais aussi des artistes, des urbanistes,
etc. Pour autant, il ne s’agit pas d’un texte dont l’intérêt serait réservé aux
spécialistes du genre. Ce dont il est question, c’est de la marche, chose que
nous connaissons tous, mais que nous avons sans doute laissé s’enfermer dans
les trajets convenus, habituels, balisés. La marche nous est ici présentée
comme un outil critique, à la fois génératrice d’architecture et comme moyen
d’explorer cet inconscient des villes, ce que notre monde, notre ville génère
en sa périphérie, dans les « zones », là où la société se débarrasse
de ses déchets, comme pour les refouler dans ce « vide » urbain qui,
loin d’être aussi vide qu’on le pense, regorge de vie et de créativité libre.
Ainsi, la société ignore encore que ces zones vivent, deviennent. S’aventurer
dans la zone, par la marche, est donc un moyen de rencontrer cet autre qui est
nôtre. C’est renouer avec un dialogue entre le plein (la ville), nous pourrions
dire le saturé, et le vide, et découvrir par la rencontre la genèse d’une ville
nouvelle. L’ouvrage s’inscrit donc dans une perspective qui touche autant
l’esthétique que l’anthropologie.