Classe 3e 2 › Concours Etonnants Voyageurs

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10 avril 2014

Lucas

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche folle mais pas désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre (…)

La mère et sa fille marchaient lentement en regardant droit devant elles comme si elles étaient télécommandées, marchant vers la poupée, entourées d’explosions d’obus démolissant tout sur leur passage. Jusqu’au moment où elles virent un petit garçon d’au moins sept ans prit la poupée et il la serra contre sa poitrine en les fixant comme s’il allait les manger. La mère s’appelait Martine et sa fille Claudine. Martine demanda au petit garçon son nom, sans réponse. Elle s’approcha donc doucement du petit. Sûrement par peur, il courut vers une autre personne de l’autre côté de la route, une fois le petit et cette mystérieuse personne, au loin, un obus éclata sur eux. Il ne resta plus que des poussières… Claudine tomba à terre en pleurant de tristesse et de colère envers la guerre si injuste dont elle ne connaissait pas les causes. Sa mère la serra dans ses bras en la soulageant avec des mots doux. Elles étaient là, entourées d’explosions, de cadavres, de mitraillettes, debout se serrant l’une contre l’autre, quand tout d’un coup, un homme arriva en courant et leur cria de le suivre car elles étaient en danger. Mais elles ne réagissaient pas comme si elles n’avaient plus d’espoir, comme si elles voulaient quitter ce monde de fous ensemble. Mais l’homme n’abandonna pas et prit la fille dans les bras, puis la mère par la main. L’homme les avait emmenées dans une cave chez lui et dès leur arrivée, l’étranger ressortit pour aller chercher d’autres survivants. Martine et sa fille regardaient autour d’elles et constatèrent qu’elles n’étaient pas seules. Elles étaient en compagnie d’autres réfugiés, malades ou blessés. Dix minutes après leurs arrivée, Claudine qui était endormie dans les bras de sa mère, se réveilla d’un coup en poussant des cries de douleurs en criant : « Mon bras ! Mon bras ! ». Sa mère, enleva le pull de sa fille et remarqua une plaie profonde remplie de sang avec des morceaux d’obus. Une femme se leva en affirmant qu’elle était médecin et en regardant la plaie dit qu’elle était infectée et qu’il fallait désinfecter, le seul problème, c’était que le seul désinfectant disponible était de l’alcool à 90°. Le médecin demanda la permission à Martine, qui accepta immédiatement. Claudine souffrait tellement qu’elle s’évanouit.

A son réveil, elle était dans un lit d’hôpital entourée  d’autres blessés. Elle appela immédiatement sa mère, sans réponse. Un docteur accourut vers Claudine avec joie.

- « Pourquoi êtes-vous si heureux de me voir me réveiller ? » demanda Claudine intriguée.

- « Tu est resté sept mois dans le coma, nous n’avions plus d’espoir ! »

- « Où est ma maman, Martine ? » demanda Claudine

- « Ta mère a été forte mais elle a dû se sacrifier pour te sauver … » répondit le docteur tristement »

Claudine se mit à pleurer, comme le ferait n’importe quelle fille ayant perdu sa mère. Le médecin la prit dans ses bras et dit :

-         « Ta mère avait le choix entre sa vie et la tienne, elle n’a pas hésitée et a choisi la tienne »

-         « Que s’est-il passé ? » demanda Claudine sous le choc

 A ce moment, l’homme qui avait amené Martine et sa fille dans la cave s’approcha du lit doucement avec un visage à la fois heureux et triste :

-         « Comment vas-tu mon enfant ? »

-         « Bien, que s’est-il passé avec ma mère ? » questionna Claudine une nouvelle fois

-         « Ta mère était la plus courageuse du groupe, elle était … »

Alors que l’étranger allait terminer sa phrase, des coups de mitraillettes retentirent dans l’hôpital. C’était des nazis, ils abattaient tout le monde sur leur passage. Une fois arrivés au lit de Claudine, ils la visèrent, quand un homme, Adolf Hitler, arrêta le tireur. Un sourire lui monta aux lèvres et il se jeta sur Claudine, elle sauta du lit avant de se faire attrapa et courut hors de l’hôpital. Les nazis avec Hitler à sa tête la coursèrent dans les rues sans lui tirer dessus. Elle se retourna pour voir si elle les avait semées et trébucha contre des escaliers. Une fois Hitler arrivé à côté de Claudine, il regarda autour de lui et tira sa tête qui était en fait un masque. C’est à ce moment que Claudine reconnut sa mère et avec elle derrière les survivants qui étaient dans la cave avec elle.

Claudine horrifiée, prit sa mère dans les bras et dit :

-         « Pourquoi as-tu abattu tous ces innocents ? »

-         « Pour te sauver ma fille » répondu Martine

-         «  Pour me sauver de quoi ? » questionna Claudine.

-         « Hé bien, de tous ces ennemis français ! »

-         « Mais nous sommes français maman » rétorqua Claudine.

-         « Non ! Nous sommes allemands ! » contredit Martine.

-         « Mais que t’arrive- t’il nous avons toujours été français ! »

A l’instant où Claudine termina sa phrase, sa mère tira sa tête vers le haut, c’était encore un masque, et Claudine vit que c’était en fait Hitler :

-         « Je savais que vous étiez français » cria Adolf Hitler

Il sortit son arme et tira en plein cœur sur Claudine …

Tomber (Moïra)

Tomber

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespérée, d'un simple jouet d'enfant, d'une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu'était la guerre.

Elle avança, sa fille dans les bras, dans la poussière, dans la foule précipitée, avec une sérénité qui lui était soumise. Elle marcha dans les allées d'un pas réfléchi et lourd. Le feu détruisait tout sur son passage et, sous les pas de la jeune femme, une pluie d'acier torturait la moindre lueur d'espoir. Elle avançait, déterminée à survivre, tenant fermement sa fille contre son cœur. Soudain, un sifflement assourdissant se fit entendre et la mère, d'un mouvement vif et précis, posa sa fille à terre et se coucha sur elle le temps de l'explosion. Elle attendit le calme pour relâcher lentement ses muscles et libérer sa fille qui ouvrit ses petits yeux doucement.

-      « Qu'est ce qu'il s'est passé maman ? dit la petite fille d'un ton sec et affolé.

-      C'est une étoile qui est tombée du ciel... »dit-elle pour ne pas détruire l’innocence dans les yeux et dans le cœur de sa tendre fille, pour qu'il lui reste un peu d'espoir.

Elle prit sa fille par la main et contourna le cratère qui était non loin de là. Elles arrivèrent à la sortie du village et tournèrent derrière une maison en ruine, noire de cendre et de désespoir. Là, la jeune femme lâcha sa fille et fit un pas puis se mit accroupie devant une masse noire. La petite fille regarda sa mère, immobile. La jeune femme tendit la main, prit la petite masse et l'essuya. Elle se releva et retourna vers sa fille. Elle se mit à sa hauteur et lui tendit la main. Sa fille regarda sa mère dans les yeux et, brusquement, jeta son regard sur la petite chose que tenait sa mère.

Sous la suie, elle reconnut.

Il manquait un bas à sa poupée. Elle la prit et la regarda quelques instants. Sa mère se releva et tourna les talons. La petite fille la suivit. Soudain, elle s’arrêta et fixa, horrifiée, un corps noir de suie où l'on pouvait voir une tache blanche en forme de poupée.

-      « Maria, dépêche-toi. » lui murmura sa mère.

La petite fille regarda une dernière fois le corps sans vie qui se présentait à elle et rejoignit sa mère. Elles continuèrent le long du chemin qui conduisait à la forêt, où, de l’autre côté, se trouverait un endroit sûr pour elle et sa fille. Une fois arrivées à l’orée de la forêt, elles s’y hâtèrent car elles pouvaient encore entendre les obus s’écraser sur Verdun et la foule appelant à l’aide. Au bout de quelques heures de marche, la jeune femme décida de s’arrêter pour faire une pause. Elles allèrent donc s’asseoir au pied d’un arbre sur de la mousse. La fillette, exténuée par le voyage, s’allongea et ne tarda pas à s’endormir après avoir ingurgité les baies que sa mère avait soigneusement cueillies pour elle. Le soleil se couchait et la mère alla se coucher auprès de sa fille. Au loin, on pouvait toujours voir le monstrueux spectacle de Verdun…

Au petit matin un bruit mystérieux les réveilla. Il venait des buissons. La mère s’avança prudemment et se jeta menaçante sur le buisson. Là elle découvrit un petit garçon qui les avait suivies. Il leur expliqua qu’il s’appelait Sam et que sa famille avait péri lors d’un incendie, la veille. La jeune femme le convia à leur périple et ils reprirent leur route. La petite fille serrait toujours sa poupée de chiffon dans ses bras et elle était de plus en plus effrayée à chaque minute qui passait. Sam était un petit garçon timide qui devait être du même âge que la petite fille, six ou sept ans au plus. Il paraissait malheureux durant le voyage car il regardait souvent le sol et poussait soudain de grands soupirs en levant les yeux au ciel ; sans doute il pensait à sa famille…. La jeune femme s’occupait du mieux qu’elle pouvait des deux enfants, mais cela restait pénible et dur pour elle, faute de ravitaillement. La forêt semblait ne plus en finir et leurs pieds commençaient à être très fatigués et en mauvais état. Une odeur s’installait dans leurs habits et la crasse devenait de plus en plus présente sur eux.

Le soir, alors qu’ils allèrent s’arrêter pour se reposer, la petite fille aperçut une maisonnette cachée par des arbres. Ils s’en approchèrent et virent que la porte était ouverte. Il ne semblait y avoir personne. Dans l’unique pièce que contenait cette maison, se trouvait un lit où ils s’empressèrent de se jeter. Au lever de soleil, la jeune femme était déjà debout. Elle n‘avait presque pas dormi car la peur la rongeait. Elle ne savait ni comment elle en était arrivée là ni comment elle allait s’en sortir. Elle se disait que si elle était encore en vie, s’était seulement parce qu’elle devait sauver sa fille. Les deux enfants se réveillèrent et la jeune femme leur lança un regard affectueux puis ils se préparèrent pour repartir car l’armée allemande ne devait pas être très loin vu leur rythme de marche. La mère ne prit qu’un sac où elle mit des provisions trouvées dans un recoin de la salle et une couverture pour les enfants. Ils reprirent leur chemin à travers les bois. En début d’après- midi, ils trouvèrent un ruisseau où ils firent leur toilette et où ils burent toute l’eau qui leur était permis de boire. Lorsqu’ils repartirent, Sam traina un peu. Lorsque la jeune femme vit une armée allemande passée, elle s’empressa de se jeter à terre et de prendre sa fille dans ses bras. Sam, lui, ne s’aperçut pas tout de suite de la présence des allemands : il ne put donc pas se cacher. Il se trouvait à une trentaine de mètres des deux filles. La jeune femme ne put se résoudre à alerter Sam de peur de risquer la vie de Maria. Lorsque Sam aperçut les allemands, paniqué, il se mit à courir. Le chef allemand ordonna de l’attraper et les soldats se lancèrent à la poursuite du petit garçon. Ils finirent par le rattraper et Sam se mit à hurler de toutes ses forces. Quand ils arrivèrent devant le militaire, ils jetèrent Sam à terre. La jeune femme se colla contre l’arbre auquel elle faisait face. Les militaires ne les virent pas. Soudain un coup de feu se fit entendre et la petite fille sursauta. Une larme coula sur le visage de la jeune femme. Maria se blottit dans les bras de sa mère et sanglota en silence. La mère regarda le ciel à travers les branches d’arbres et respira pour reprendre des forces car elle se devait d’être forte pour sa fille. Elle attendit que les soldats repartent pour dire à sa fille :

·         Tout va bien …

Elle prit sa fille dans ses bras pour la porter et se leva. Ne voulant pas montrer à sa fille le corps de Sam, elle décida de le contourner légèrement pour qu’elle puisse l’apercevoir. En le voyant, elle se dit que cette mort n’était pas nécessaire et laissa une larme couler sur ses joues… Elle aurait aimé offrir au corps de Sam une sépulture, mais le temps lui manquait et l’épreuve qu’ils avaient endurée ne serait que plus lourde avec cette mort sur sa conscience.

Alors la mère et sa fille continuèrent leur voyage vers une prochaine source de protection …

Durant de longues semaines elles durent endurer les cachettes malsaines et la faim qui les tiraillait. Durant tout ce temps où le temps commençait par sembler tellement long qu’on eut l’impression qu’il jouait contre nous. Durant tout le temps il fallait veiller l’une sur l’autre pour ne pas sombrer dans une folie occasionnelle… Le poids de cette opération devenait de plus en plus lourd….

Cette situation paraissait bien trop inconfortable pour une jeune mère et sa fille.

Ce qu’elles vécurent durant un mois et demi fut une expérience humaine que la jeune mère ne souhaita à personne. La faim, la crasse, le manque de soin, les maladies, les animaux, la peur, l’angoisse, la tristesse, la culpabilité, la folie, les maux de têtes insoutenables ; les câlins, les sourires, la compagnie, le réconfort, furent les seules choses auxquelles elles eurent droit. La poupée était l’exemple même de la situation dans laquelle elles se trouvaient : la poupée semblait mourir lentement, physiquement et moralement…

Le sac à dos était presque vide et la folie rongeait leurs esprits. Au fur et à mesure du temps, la poupée de chiffon tombait en lambeaux. Le visage de la petite fille s’effaçait petit à petit. Toutes deux étaient devenues livides.

Le soleil disparaissait entre les branches. La brume du matin s’engouffrait dans leurs poumons. La jeune femme offrit à sa fille la dernière bouchée de pain. Ils ne leur restaient plus beaucoup de force. Elles avaient vécu dans d’atroces conditions.

Durant cette dure période, un évènement avait traumatisé la jeune femme : elle avait dû tuer un homme. Cela s’était passé en fin de matinée, lors d’une journée relativement ensoleillée. La jeune femme et sa fille s’étaient, comme à leurs habitudes à cette heure -ci, assises au pied d’un arbre pour faire une pause. Elles se reposaient tranquillement après avoir longuement marché. Elles étaient essoufflées et à bout de force. La mère découpait des fruits avec un couteau qu’elle avait trouvé sous les feuilles plus tôt dans la journée. Brusquement, un homme est sortit de dernière l’arbre et a basculé sur les demoiselles. Ce ne fut pas long. La mère le repoussa sur le coté et s’aperçut que l’homme avait le couteau planté dans la poitrine. La jeune femme s’apercevant qu’il devait s’agir d’un homme qui vivait sûrement dans les mêmes conditions de vie qu’elle vivait, essaya de lui venir en aide et lui compressa sa blessure, mais en vint…. L’homme était mort. Il avait le visage couleur terre et des vêtements déchirés. Il avait dû devenir fou.

Mais voilà, la jeune femme n’en revenait toujours pas ; comment avait-elle pu tuer un homme !?

Cet évènement avait eu lieu trois semaines plus tôt.

Elles marchaient donc à travers la forêt quand une horde de soldats cria subitement de s’immobiliser. La mère mit sa fille dans son dos et regarda les soldats qui lui faisaient face. Elle essayait de les éloigner, mais ses efforts furent vint. Un coup de feu retentit et tous les oiseaux alentour s’envolèrent. La jeune femme, n’étant pas blessée,  se retourna vers sa fille qui était tordue en deux. La mère s’approcha avec un visage coléreux. Lorsqu’elle vit la blessure, elle sut qu’elle serait fatale. Les soldats, voyant que leur fin était proche, repartirent. La petite fille était maintenant à genoux et sa mère lui tenait les épaules. La jeune femme savait qu’elle ne pouvait plus rien et pleura doucement. Soudain le visage de la jeune fille se blêmit, et sa mère comprit.

La petite fille tomba et avec elle l’innocence, la joie, l’espoir.

La mère alla se mettre à la hauteur de sa tête, posa la petite tête de sa fille sur ses genoux et hurla. Elle hurla pendant des heures et personne ne vint l’aider.

-«  Et ça finit comme ça ? dis-je.

- Oui » répondit grand-mère.

Et après la jeune femme eut une autre fille, ta mère.

-« Mais alors grand-mère !

-C’était toi !

-En tout cas elle était triste ton histoire. »

Et elle se glissa dans les bras de sa grand-mère.

02 avril 2014

La poupée de chiffon (Sophie)

La poupée de chiffon

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre. Elle serrait encore et encore sa fille dans ses bras, elle avait eu si peur de la perdre lorsqu’elle avait entendu l’explosion, mais sa fille était là. C’était le principal. La jeune mère ne voulait pas reposer son enfant au sol, alors elle la gardait contre elle ou elle pouvait la sentir à proximité, en sécurité.

Leur maison brûlait doucement. Angeles, la jeune mère, fixa son regard dans les flammes qui semblaient engloutir leur ancien domicile et ainsi détruire leurs souvenirs autrefois heureux. Elle se détourna de cette vue qui lui faisait saigner le cœur. Finalement son enfant, sa petite Lola, était tout ce qu’il lui restait. Dans la rue, bien qu’on aurait pu s’attendre à entendre des hurlements, des cris d’effroi, de peur, il n’en n’était rien. La ville semblait dormir paisiblement. Les familles essayaient, en vain, de récupérer des objets. Elle, elle se contentait de sourire tristement, le visage inondait de larmes qui ne cessaient de couler, roulant le long de ses joues. Sa fille ne pipait mot et restait sagement dans les bras de sa mère. Angeles avait promis à sa petite de lui retrouver sa poupée, alors elle commença à chercher autour de la demeure enflammée. Contrainte d’attendre que les flammes s’éteignent, elle s’assit par terre, positionnant Lola sur ses genoux. Son enfant perdit, à son tour, son regard à présent vide d’expression, à force de regarder chez elle.

Deux heures passèrent, il ne restait que des débris calcinés mais Angeles était déterminée, et s’aventura, tout de même à la recherche de cette poupée de chiffon. Après quelques minutes à fouiller, elle finit par ressortir, déçue de n’y avoir vu que des objets dont on ne distinguait même plus l’utilité avec la déformation qu’avait produit le feu. Ses yeux bleus se posèrent sur le trou qu’avait produit l’obus dans la terre. Elle la vit. Sans savoir pourquoi, les larmes recommencèrent à couler. Elle s’agenouilla alors près de la petite poupée et lui caressa les cheveux. Elle essuya du bout des doigts ses joues, décidée à se montrer forte devant sa fille. Elle revint vers Lola qui n’avait pas bougé d’un pouce. Une pensée traversa l’esprit de la mère. Où allait-elle allé vivre avec sa précieuse enfant ? Elle ne pouvait pas vivre dans la rue, elle devait tout faire pour que Lola ne se rende compte de rien vis-à-vis de l’atrocité dans lequel le monde était plongé en ce temps de guerre. Angeles s’abaissa près de la petite, et la reprit dans ses bras.

«  - Maman, pourquoi tu n’as pas ma poupée ? Où elle est ? »

Le cœur de la mère rata un battement à cette question redoutée.

«  - En sécurité, mon cœur, en sécurité » répondit-elle simplement.

Elle n’avait pas envie de briser l’espoir de son enfant. Le père de cette dernière était déjà décédé pour la guerre sur le front, et comme ici, Angeles ne lui avait rien dit. Elle voulait se montrer forte, elle le devait. Pourtant, dès que la petite dormait paisiblement, Angeles pleurait.  Alors qu’elle était perdue dans ses pensées, ses pas la guidèrent vers une église. L’endroit où elle pouvait avoir du réconfort, où elles seraient à l’abri…

« - Regarde ma Lola, on va dormir dans une grande maison ! » souffla-t-elle à sa fille.

Cette dernière se contentait de sourire. Ce n’était pas plus mal, lorsque Lola parlait, Angeles avait l’impression de l’entendre d’une voix faible, lointaine, qui résonnait dans sa tête. Elles pénétrèrent dans l’église. Etrangement, c’était vide. Elles n’étaient que toute les deux.

Pendant des heures, Angeles joua à des jeux d’enfants avec Lola, comme cache-cache, et autres. Assez tard, elles se couchèrent sur un banc de l’église, aucune lumière n’était là pour les éclairer. Seul un rayon de la lune passait au travers de la fenêtre et s’écraser sur le carrelage glacé.

« - Maman, j’ai faim. »

Elle regarda sa toute petite puis lui embrassa le front ;

« - On mangera demain matin ma puce… »

Alors sa fille se tut et finit par s’endormir. Angeles, elle, était bel et bien réveillée. Elle ne dormait pratiquement plus et ce depuis des jours. La nuit lui inspirait des angoisses lui titillant les entrailles. Doucement, lentement, les secondes passèrent… Angeles resserra ses bras autour de sa fille et ses yeux commencèrent à papillonner puis se fermèrent. Sa respiration s’apaisa et sa poitrine oscilla au rythme de celle-ci, de moins, en moins vite, jusqu’à s’arrêter…

 

Trois jours passèrent. Une petite fille pénétra toute seule dans l’église. Cette enfant eut le regard attiré vers une masse sur le banc, en s’approchant, elle vit une jeune femme endormie apparemment profondément car elle ne bougeait pas d’un millimètre. La dame serrait dans ses bras une étrange petite poupée de chiffon… La petite fille prit le jouet et se précipita dehors vers sa mère en criant «  Maman ! Regarde ce que j’ai trouvé ! Je peux la garder ? ». Et sa mère hocha positivement la tête ignorant que la dame, Angeles, qui possédait juste avant la poupée était devenue folle en voyant son enfant, Lola, morte, et ne voulant pas se retrouver seule, avait prit cette petite poupée appartenant autrefois à son enfant comme si c’était sa fille. Sa vraie fille.

La malheureuse petite fille (Elodie)

La malheureuse petite fille

 

 

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais désespérée, d'un simple jouet d'enfant, d'une toute petite poupée de chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu'était la guerre.

 

Elles avancèrent lentement pendant une dizaine de minutes. La petite fille, qui se prénommait Adèle et qui avait six ans était sur le point de s'endormir. Sa mère la regardait tendrement malgré tous les sifflements perçants des obus et des autres projectiles qui arrivaient toujours à une vitesse étonnamment surprenante. Leurs vies étaient constamment en danger mais elles avaient l'air serein. La mère fit une pause pour laisser sa fille dormir.

 

Au bout de quelques heures, elles se réveillèrent et repartirent à la recherche de la poupée. Elles tournèrent derrière le virage mais tout avait été détruit. Plus une maison, plus un arbre n’était entier. A la place, des trous gigantesques s'étaient formés à cause des obus. Il restait cependant quelques ruines d'anciens bâtiments publics comme les magasins. Adèle s'était mise à pleurer, en pensant que sa poupée avait disparu.

«  Ne t'inquiète pas ma chérie, elle ne doit pas être très loin » lui assura sa mère.

Elle prit sa fille dans ses bras et continua d'avancer en scrutant le sol pour y chercher le moindre petit signe de la poupée.

 

Au bout d'une demi-heure, lorsqu'elle crut voir un bras de la poupée, un obus siffla dans son oreille, elle lâcha sa fille et se coucha dessus. La pluie d'obus ne s'arrêtait pas, les projectiles fusaient, ils tombaient parfois à quelques centimètres de leurs têtes mais heureusement ne faisaient que les projeter un peu plus loin. Adèle hurlait, elle était horrifiée, son visage se déformait à chaque fois qu'un obus tombait. On voyait dans le reflet de ses yeux verts, si magnifique avant la guerre, les obus qui venaient s'écraser sur le sol. Elle était triste, elle avait peur.

 

Deux heures passèrent sans que rien ne change. La mère croyait que sa fin ainsi que celle de sa fille étaient proches lorsque tout à coup, elle entendit une voix. Au début, elle se dit que cette voix n'était qu'une hallucination mais elle fut bien obligée d'admettre que cette voix continuait sans cesse d'appeler. Son visage s'illumina lorsqu'elle reconnut la voix et qu'elle entendit qui l'appelait. Elle releva la tête et cria :

« - Arthur ! On est là ! »

Une voix lui répondit :

« - Ariel ! Adèle ! Où êtes- vous ? Je ne vous vois pas ! »

« - Nous sommes à côté du seul arbre reconnaissable », lui dit-elle pleine de joie. Elle dit à sa fille que son père était revenu. Adèle l'appela et il arriva. Elle lui sauta dans les bras et ils restèrent comme cela un bon moment. Arthur finit par dire qu'il fallait aller se mettre à l'abri, qu'un convoi avait été organisé pou que toutes les familles partent en même temps, mais Adèle refusa d'y aller sans sa poupée. Elle expliqua à son père que sa poupée avait disparu et qu'elle la cherchait. Elle lui demanda son aide.

« -D'accord mais juste trente minutes sinon le convoi partira sans vous. Je devrais repartir après, ils m’attendent au front, ils ne savent pas que je suis venu vous voir» dit- il en lançant un regard désespéré vers Ariel qui le lui rendit.

Arthur prit Adèle dans ses bras et attrapa sa femme par la main. Ils reprirent le chemin pour retrouver la poupée.

 

Ils tournèrent derrière un autre virage. Tout était également détruit mais il restait une maison qui était encore debout. Ils entrèrent à l’intérieur, tout était intact, rien n’avait été touché. Il y avait une table avec quatre chaises, Ariel et Adèle s’assirent à la table pendant qu’Arthur allait regarder dans le réfrigérateur pour leur sortir à manger. Ils mangèrent jusqu’à être rassasiés et ressortir de la maison, toujours à la recherche de la poupée.

 

En repartant, un éclat lumineux attira leur attention. Ils s’avancèrent vers cette lumière et découvrirent une montre, sans doute en or. Il y avait dessus des initiales, mais elles étaient illisibles. Néanmoins il y avait un mot accroché à cet objet. Il disait : 

« Si vous trouvez cet objet, qui que vous soyez, donnez le à votre enfant ou à quelqu’un de très proche. Si cette personne s’appelle Adèle et que son frère est parti à la guerre cela veut dire que ce dernier est mort. »

La montre était cassée mais elle fonctionnait encore. Le père d’Adèle la ramassa et lui donna en disant :

« Je suis sûr qu’elle appartenait à ton frère. Elle te fera un souvenir de lui et te portera chance plus tard, tu verras. »

 

Arthur regarda l’heure et dit à sa famille qu’il était temps de rentrer, que le convoi allait partir et que lui aussi le devait. Ils firent donc marche arrière, Adèle s’était remise à pleurer. Elle avait compris qu’il n’y avait plus de chance de retrouver sa poupée et qu’elle ne reverrait sans doute jamais son frère. Son père la prit dans ses bras et la serra très fort contre lui. Dans ses bras rassurants, elle se calma. Ils avancèrent lentement mais malheureusement le temps avançait quand même. Arthur devait repartir, il entendait déjà ses supérieurs en train de le sermonner. Il embrassa longuement sa fille et sa femme, il ne voulait pas les lâcher mais les obus recommençaient à fuser au dessus de leurs têtes et cela redevenait dangereux.

Une poupée de chiffon pas comme les autres (Valentine)

Une poupée de chiffon pas comme les autres

                                                     Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespéré, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre.

En quelques minutes, tout pouvait basculer. Les uns pensaient à leurs habitations tantôt en ruines, tantôt en cendres. Les autres eux, pensaient à leurs proches perdus là haut, dans ce grand linceul que dissimulait la brume épaisse accumulée au fil des combats. Que fallait-il faire ? C’était cette maudite question qui ne cessait de tourmenter la jeune mère… « Vais-je être assez forte, assez brave ? » dit-elle tout haut comme si quelqu’un pouvait lui répondre, lui dire qu’elle y arriverait certainement. Beaucoup de questions restaient dans sa tête, l’indécision était à son apogée. Dans ces moments, il n’était pas envisageable de concevoir un avenir, aussi paisible et heureux soit il… Tout ce que l’on pouvait faire était attendre, s’abriter, rêver… Rêver était la seule manière de s’échapper le temps d’une heure ou deux…

La femme courait… Elle jurait tel un charretier. On voyait dans ses yeux, son regard, la détermination sans fin dont elle faisait preuve. Jamais nul ne vit une battante comme elle ! Elle courait au milieu des pluies d’obus qui ravageaient le paysage et qui s’abattaient aussi facilement que la porcelaine pouvait se briser. Elle courait inlassablement, avec la même détermination. On voyait que elle ne serait satisfaite que lorsque la poupée de son enfant serait sienne.

Au loin, dans la brume épaisse, elle jeta son dévolu sur une petite maisonnette encore assez solide pour pouvoir s’y cacher. Elle prit sa fille par la main et partit sans attendre en direction de la petite maison. La femme était épuisée, après cette bataille acharnée contre les obus. La mère et la fille s’assirent quelques instants. Le feu flamboyait, les fusils grésillaient, les balles sifflaient et l’on entendait des gémissements venir de divers endroits. La mère crut percevoir parmi cette cacophonie de bruits si variés et plus horribles les uns que les autres, un gémissement qui semblait se rapprocher. Les deux réfugiés furent envahis par une terreur qui se traduisit par de forts tremblements et des larmes coulant le long de leur visage souillé de terre. Malgré cette peur bel et bien présente, toutes deux s’avancèrent doucement. La mère entendit les gémissements, et se dirigea vers un rideau cachant les fenêtres de l’habitation. Elle dit à sa fille de bien rester derrière elle afin que celle-ci soit en sécurité et elle tira d’un coup sec le rideau. Elle resta figé, muette, surprise. La peur ? Non plus à cet instant car ce qu’il y avait sous ce rideau c’était un chien. Il avait trouvé refuge là, derrière ce rideau à moitié déchiré. C’était une créature grande, musclée avec un air peu commun. La jeune femme le caressa à plusieurs reprises, puis les gémissements s’atténuèrent. Elle observa l’animal sous tous ses angles, son regard se posa sur son oreille gauche. Celle-ci était en lambeaux, probablement à cause des barbelés présents un peu partout… Elle prit son tablier et en déchira un morceau afin de stopper l’écoulement de sang qui ruisselait le long de son thorax. Puis, soudain, l’animal vint sentir la mère et son jeune enfant, il se dressa et commença à se diriger vers la porte de sortie. La mère décida de le suivre avec son enfant dans les bras. Elle avait espoir que le chien l’amènerait à l’endroit où sa fille avait perdu sa poupée. L’animal sortit de la maisonnette et s’élança à travers la brume épaisse qui recouvrait le paysage. La jeune femme ne distinguait que très vaguement la silhouette de la bête. Mais plus ils avançaient, plus le ciel se dégageait. Les obus continuaient à déferler et les mêmes bruits se faisaient entendre aux alentours. Le chien arriva à la lisière d’un bois. Juste avant ce bois, on distinguait les débris d’une ancienne habitation probablement détruite par les bombardements… L’animal s’arrêta face à cette ruine qu’était devenue l’ancienne demeure. La jeune femme juste derrière, se figea et tout à coup s’écroula à terre et fondit en larmes. Pourquoi ? Cette demeure ne lui était pas inconnue, elle lui était même très familière… Même en ruine elle était reconnaissable. Elle était tout bonnement retournée sur ses pas… Cette maison qu’elle avait délaissée à cause de cette guerre. La mère se releva et prit la main de sa petite fille, elle s’avança dans les décombres. Les larmes lui coulaient inlassablement et elle ne put rien y faire, une partie d’elle s’était envolée… La maison où elle et sa fille avaient grandi.

Tout à coup, au milieu des débris, la jeune fille montra du doigt un morceau de tissu rouge. La mère s’avança avec l’enfant et découvrit avec effroi une petite fille blonde aux yeux clairs. Elle était vêtue d’une petite robe rouge en soie. La jeune enfant était inerte sur le sol. A ce moment là, la fille de la jeune femme la pointa du doigt et dit « La poupée ! » La mère comprit à ce moment que sa fille depuis le début ne cherchait non pas sa poupée de chiffon, mais quelque chose qui lui était bien plus cher, bien plus précieux. Il s’agissait de sa meilleure amie, qui devait venir la voir et jouer avec elle durant l’après midi. L’enfant se précipita à côté du corps sans vie et le serra fort dans ses bras avant de le reposer délicatement sur le sol. La jeune femme s’agenouilla pour consoler son enfant qui pleurait. La scène continua longtemps…

Presque cent ans après, à ce même endroit repose trois corps, Lesquels ? Ceux de trois personnes ayant essayé de faire face à cette guerre en étant solidaires, braves et téméraires… Deux d’entres elles étaient de simples enfants. Ces trois tombes sont recouvertes de rose rouge, avec une inscription que l’on pouvait lire au loin : « Elles n’auraient jamais dû mourir si jeunes… ».

Valentine

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre. Elle regarda autour d’elle mais ne voyait rien d’autre que de la fumée. La seule trace de vie semblait être ce corbeau noir posé sur la carcasse d’une voiture. Perdue, elle ne savait pas quoi faire ni où aller. Sa fille la regarda et lui dit :

« - Maman, on va chercher ma poupée ? 

  - Oui chérie, répondit la mère sans réellement écouter. »

Mais soudain, dans un fracas terrible, un obus tomba à quelques mètres d’elles. Pendant quelques instants, il n’y eut plus rien, plus aucun bruit, plus aucun signe de vie. Tout avait disparu, c’était comme si ce village n’avait jamais existé.Il ne restait plus qu’un nuage opaque qui recouvrait ce qui fut autrefois un village paisible et tranquille. Ce n’était plus qu’un vaste terrain complètement détruit et inexploitable.

 

         Petit à petit, la mère reprit ses esprits. Affolée, elle cherchait sa fille. Elle était terrifiée à l’idée qu’il ait pu lui arriver quelque chose. Elle scrutait les alentours, essayant de percevoir quelque chose, peut-être un signe de vie de son enfant. Puis une petite voix qui hurlait « Maman » se fit entendre. La jeune femme reconnue immédiatement la voix de son enfant. Se laissant guider par son instinct  maternel, il ne lui restait plus qu’à retrouver sa fille afin de partir se mettre à l’abri des obus. Mais cette fumée épaisse ne lui facilitait pas la tache. Les cris étant de plus en plus forts, elle savait qu’elle se rapprochait. Tout à coup, elle sentit un petit être s’accrocher à sa jambe. Elle sut tout de suite que c’était sa fille. Soulagée, elle la prit dans ses bras et la serra fort contre elle. La petite fille était en pleurs, terrorisée. Sa mère la rassura pendant quelques minutes. Lorsque la fillette fut calmée, elle regarda sa mère et lui dit : « Maman, la poupée il faut qu’on la retrouve! Elle doit avoir peur toute seule. » Cependant, la jeune femme lui fit comprendre qu’elles n’avaient pas le temps, que c’était trop dangereux. Alors la petite fille s’arrêta net et rétorqua : « Maman il faut la retrouver, je peux pas l’abandonner ma poupée ! » Désemparée, sa mère ne voulait pas perdre plus de temps, d’autres obus tomberaient sûrement. Hors, sa fille refusait de faire un pas de plus. Elle fut contrainte d’accepter. Elles partirent donc à la recherche de cette poupée. Ne sachant pas où chercher, elles s’éloignèrent un peu plus loin : peut-être que la poupée avait était projetée. Elles scrutaient les environs mais il n’y avait aucune trace de cette poupée. Alors, elles marchèrent encore un peu, elles se trouvaient maintenant loin de leur foyer. Il n’y avait plus aucune chance de la retrouver. La fillette ne voulait pas arrêter les recherches. Après une heure de recherche, la mère avait perdu tout espoir.

 

Rapidement, un vent fort s’installa. Il fit voler la poussière dans tous les sens et provoqua presque une tempête. La mère et la fille allèrent donc s’abriter sous un arbre. Elles s’assirent et la mère prit l’enfant dans ses bras afin de la protéger du mieux qu’elle le pouvait. Lorsque les rafales s’atténuèrent, elles se relevèrent, puis la fillette, folle de joie, cria à sa mère : « Maman, maman, maman ! Regarde c’est ma poupée. On l’a retrouvée! » La poupée poussée par le vent, s’était déposée à quelques mètres d’elles. La petite fille, plus heureuse que jamais, se jeta sur sa poupée. Elle la serra fort contre elle. La jeune mère attendrie, fut elle aussi heureuse d’avoir retrouvé cette poupée. à présent, il leur fallait trouver un refuge car elles étaient bien trop loin de leur maison. Avant de partir, la mère rangea la poupée dans son sac afin de ne plus la perdre.

 

         Mais soudainement, un sifflement aigu parvint à leurs oreilles. Un choc terrible se fit ressentir. Dans un chaos d’horreur, un énième obus vint s’écraser  à quelques centimètres d’elles. Il n’y avait plus rien, juste un grand vide. Puis, la mère reprit ses esprits. Elle se leva, assez étourdie par la violence du choc. Elle était légèrement blessée mais rien de très grave. Elle regarda autour d’elle et eut comme une impression de déjà vu. Elle remarqua qu’elle ne se trouvait pas au même endroit : elle était revenue au point de départ devant sa maison. La jeune femme étonnée chercha la poupée dans son sac mais ne la trouva point. Que se passait-il ? Tout se mélangeait et se brouillait dans sa tête.  Où était sa fille ? Pourquoi n’était elle pas dans ses bras ? Et où était donc cette satanée poupée ?

 

Tout à coup, un détail attira son attention : le corbeau…… il était toujours posé au même endroit, sur la carcasse de la voiture, comme figé dans le temps. Ce n’était pas possible…… Puis une petite voix qui hurlait « Maman » se fit entendre.

 

Et là, elle comprit ! Il n ‘y avait pas d’énième obus…Il y avait juste l’obus….. Elle avait perdu connaissance et tout ceci n’avait été que le fruit de son imagination pendant sa perte de connaissance… Alors il n’y avait plus de temps à perdre; sa fille avait besoin d’elle.

Un rêve ... (Bruce)

Un rêve …

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais

pas désespérée, d'un simple jouet d'enfant, d'une toute petite poupée en chiffon,

dans ce monde cruel et obscur qu'était la guerre. La femme et la fille

continuèrent à chercher cette poupée perdue quand, tout à coup, un homme qui

avait l'air blessé se retrouva devant eux. Il demanda ce qu'elles faisaient ici, au

beau milieu de cet endroit dévasté par la guerre , où l'on entend encore les obus

au loin . La femme expliqua à l'homme qu'elles étaient à la recherche de la

poupée de la petite fille . Il les prévint que c'était peine perdu d'aller chercher

une poupée dans cet endroit, mais la femme n'en avait rien à faire des conseil de

cet homme mystérieux .

Elles reprirent leur chemin Malgré les conseils de l'homme, mais la

femme lui demanda s' il pouvait les aider à retrouver la poupée. Il répondit

que cela était de la folie et qu'il n'irait pas sacrifier sa vie pour retrouver

une poupée. Elle reprirent leur route, mais l'homme avait peur tout seul. Il

décida donc de les accompagner dans leur quête insensée .

Sur le chemin, l'homme râlait toute les cinq minutes , il se plaignait d'une

douleur à la jambe , alors ils s'arrêtèrent plusieurs fois . Après une

longue heure de marche la petite fille cria , et manifesta un grand cri de joie .

Elle était toute excitée parce qu'elle avait vu la poupée . La femme demanda à la

fille si elle était bien sûre , si elle avait vu une ombre ou si son esprit lui jouait

des tours. Alors ils partirent vérifier si la petite fille avait raison, mais ils ne

trouvèrent rien. La petite fille cria encore pour dire qu'elle avait vu la poupée .

Ils marchèrent plusieurs heures dans ce champ de bataille sans rien trouver,

avec la petite fille qui croyait voir sa poupée quand une fois tout le monde dit

l'avoir vue il se dirigèrent vers la poupée mais la petite fille dit qu'elle n'était pas

à elle . L'homme, fou de rage, s'énerva contre la petite fille en disant qu'elle

était capricieuse .

La femme calma l'homme en disant que ce n'était qu'une petite fille mais

il ne l'entendit pas de cette oreille et alla se calmer plus loin. Quant il revint il

dit qu'il fallait se séparer pour trouver la poupée. A un moment, les deux

groupes se retrouvèrent sur une falaise ils voyaient tout le champ de bataille les

obus , les avions et les chars. Les tirs provenaient de partout. La petite fille

pleurait, l'homme et la femme étaient tétanisés par cette bataille. Ils voyaient

les Allemands et les Français se battre pour leur pays c'était une vrai boucherie.

Il n'y avait plus rien après le passage des obus . L'homme affirma que c'était

trop dangereux de rester à cet endroit et ils reprirent leur recherche un peu plus

loin . La fille dit alors qu'elle voyait la poupée. L'homme et la femme

demandaient si elle était bien sûre. Folle de joie , la fille courut vers

la poupée. D'un coup, la fille s'arrêta elle ne bougea plus d'un centimètre alors

l'homme et la femme s'approchèrent eux aussi. La fille tenait la poupée entre ses

mains quand, tout à coup, la poupée sourit et regarda la femme puis elle regarda

le ciel , la femme regarda le ciel à son tour et vit un obus arriver sur

eux et là plus rien . La femme se réveilla d'un coup, sa fille dans ses bras. Elle

ne comprenait pas et là , la fille dit :

- « On va chercher ma poupée ? ».

Elinor et la poupée (Inès)

Elinor et la poupée

 

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre.

La petite avait l’air paniquée et, dans les bras de sa mère, elle balançait sa tête de gauche à droite et de droite à gauche, à la recherche de Julie, la poupée de chiffon mais à la tête, aux mains et aux pieds de porcelaine. Elinor s’endormait, bercée par les mouvements de la course de sa mère, la tête dans le cou de cette dernière, le visage mouillé par les larmes de la tristesse d’une enfant, au milieu de la guerre qui avait perdu son doudou et sans lequel sa vie changerait à tout jamais. C’était son doudou, son confident celui à qui elle disait tout : ses secrets, ses peines, ses peurs mais aussi ses bonheurs.

Dans l’obscurité, Maria cherchait une précieuse poupée du nom de Julie, qui était de petite taille et vêtue de rouge. Elle n’avait jamais déçue sa fille et ce n’était certainement pas le moment où elle allait commencer. Elle chercherait la petite sœur muette imaginaire de sa fille, même au milieu des obus éclatants de toutes parts.

Dans sa maison en ruines, elle cherchait une poupée. Elle trouvait de tout, un téléphone, des couverts, des assiettes, des bouts de fauteuils, des fleurs recouvertes de cendres, des draps salis, des jouets et encore pleins d’autres affaires mais aucune poupée.

La guerre avait été dure mais pas autant que ce jour où elle risquait de décevoir sa fille. Elle courait partout en cherchant la poupée mais elle ne la trouvait nulle part. Elle posa sa fille sur son lit dans sa chambre sans toit et elle continua sa course folle à travers les éclats d’obus.

 

Elle échappa de peu à un obus dont l’impact la projeta au sol. Lorsqu’elle se releva, elle crut voir la poupée Julie mais lorsqu’elle s’approcha pour l’attraper, elle disparut aussitôt. « C’était un mirage. » se dit-elle.

Et, dans l’espoir que la poupée réponde elle l’appela :

-         « Julie ! Julie ? »

La folie la rattrapait, elle ne voulait pas décevoir sa fille mais il semblait qu’il n’y avait plus d’espoir. Tout comme l’espoir de la fin de la guerre s’estompait, l’espoir de retrouver la poupée l’avait quitté. La poupée blonde était, d’après les souvenirs de la mère, dans un recoin de la maison, mais impossible de se souvenir où. Peut-être était-ce dans le salon, dans la cuisine, ou bien dans la chambre d’Elinor…elle n’en avait plus aucune idée.

 

La nuit tomba après cette première journée de recherches sans résultat. Pendant la nuit, elle dormit par terre dans la chambre de sa fille et rêva qu'Elinor partait dans sa robe blanche, la poupée à la main et les yeux d'un rouge étincelant comme une meurtrière. Elle se réveilla en sursaut, face à elle un petit muret au ras du sol qui dessinait les contours d’une maison détruite. Elinor était debout dans la pièce à côté la tête en direction du ciel, bleu, pour la première fois, depuis la guerre mais cela ne dura pas car rapidement des nuages vinrent l'assombrirent. Maria s’approcha d’Elinor et lui dit :

-         « Elinor, te rappelles-tu où étais la dernière fois que tu as joué avec Julie ? »

Elle secoua la tête en signe de négation et à ce moment là, la pluie commença à tomber doucement, la boue n’avait même pas eu le temps de sécher depuis la veille, mais étant donné qu’elle était dans sa maison, sans toit, elle enleva ses chaussures et les posa. Ensuite elle alla avec sa mère dans le sous-sol et toutes les deux, elles cherchèrent où est-ce que la poupée avait été oubliée. Ne l’ayant toujours pas trouvée, Maria se dit que peut être Elinor l’avait oubliée chez ses grands-parents, à deux pâtés de maisons.

Elinor alla chercher ses chaussures et les remit. Elle avait les pieds trempés mais cela ne l’importunait aucunement. Le soleil était revenu et la journée semblait démarrer dans le calme, mais alors qu’elle s’apprêtait à mettre le premier pas dans la boue, un sifflement vint du ciel, et sans réfléchir, Maria plaqua sa fille au sol en la protégeant. Dix minutes après l’explosion, Elinor toussa et se retira de dessous sa maman, qui elle, ne bougeait plus.

-         « Maman ! Réveille-toi Maman ! » cria Elinor.

Elle l’appela plusieurs fois, en vain. Après une vingtaine de minute, Maria revint à elle mais difficilement. Lorsqu’elle reprit ses esprits, elle vit sa fille unique qu’elle serra de tout son cœur.

Après des émotions aussi fortes, elles se remirent en route. Maria surveillait souvent le ciel, Elinor, avec ses yeux perçants comme un aigle, cherchait des cachettes pouvant leur être utiles pour se protéger : derrière des meubles, des débris, etc...

Marcher dans la boue, où s’enfonçait des cadavres, des armes, des éclats d’obus était un calvaire. Après trois heures et quart de marche éprouvante, elles  arrivèrent chez les parents de Maria.

Là-bas, un cauchemar les attendait, deux cadavres étaient à terre, les visages déformés par la terreur, les yeux grands ouverts. Maria commença par aller voir son père, puis sa mère. Il n’y avait plus rien à faire, ils étaient morts, probablement touchés par les éclats  d’obus, peut être de l’avant dernière explosion. Elinor restait, sans émotions visibles, à la porte, ou du moins ce qu’il en restait.

Après ce moment douloureux, Maria voulait recommencer tout de même la recherche de Julie, la poupée de sa fille mais avant il leur fallait se reposer.

Après ce repos bien mérité, elles reprirent les recherches et trouvèrent enfin la poupée, dans l’ancienne chambre de Maria, mais il manquait encore une chose. Il manquait la présence du mari de Maria à leurs côtés, il les attendait dans leur maison et elle marcha pour aller le retrouver, Elinor dans ses bras.

 En arrivant, elle fit descendre Elinor et marcha vers son mari. Il avait l’air perdu :

-          « Qu'est-ce qu’il y a » ? demanda-t-elle.

-          « Tu es là ! J'ai cru que tu étais morte. »

-          « Tu ? NOUS sommes là ! »

-          « Quoi ? Il y a quelqu'un avec toi ? »

-          « Oui, notre fille, tu as perdu la mémoire et la vue » ?

-          « Chérie, je ne vois personne à part toi. »

Elinor pleurait, elle était fatiguée, mais heureuse à la fois. Ce n'était pas des larmes de tristesse mais des larmes de joie : Elinor, sa petite fille avait retrouvé sa petite sœur muette et elle ne la lâcherait plus jamais. Une enfant de 3 ans, pleurait de joie, sur un champ de bataille, au milieu d'éclats d'obus, de tirs ennemis, elle pleurait de joie parce qu'elle avait avec elle, sa poupée de chiffons rouge, aux mains, aux pieds et à la tête de porcelaine.

-          « Chérie, je te répète que tu es seule avec moi et que nous devons à tout prix nous mettre à l’abri ».

-          « Mais tu ne vois pas Elinor ?... Elinor ? Elinor ?!! »

Elinor avait disparu comme par magie.

-          « Oh, non ça recommence ! »

-          «  Quoi ? »

-          « Tes troubles psychologiques ».

-          « Des... troubles psychologiques ? »

Maria ne comprenait pas mais Elinor n'existait pas, elle n'avait jamais existé, Maria était simplement une femme désespérée qui, ne pouvant, pas avoir d'enfant, en avait inventé un, un enfant du nom d'Elinor. La poupée, elle, existait bien, c'était celle de Maria étant petite, un souvenir d'enfance.

Maria avait imaginé tout çela, elle avait passé deux jours à chercher une poupée pour quelqu'un qui n'existait pas. Elle avait passé deux jours à …

-        « Ma chérie je suis désolé mais Elinor n'existe pas. Tu ne peux pas avoir d'enfant. Tu es stérile... »

-        « Je ne comprends pas je l'avais dans mes bras... »

Lucien la prit dans ses bras et dans ce paysage qui était tout sauf romantique, ils s'enlacèrent. Maria pleurait, elle voyait Elinor qui lui disait au revoir et qui souriait, la poupée à la main. Elle avait la tête penchée et ses nattes volaient au vent, tout comme sa robe, dans ce paysage sombre et obscur de la guerre.

 






 

 



Inès LE GUILLOU 3²

 
 

Annelyse

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche folle mais pas désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre. ( … )

   C’est ainsi qu’une mère portait sa fille, en titubant, dans la rue encore abasourdie par la destruction de sa maison renfermant tant de souvenirs. Elle tentait de lutter contre le peu volonté qu’il lui restait. Elle devait rester forte. Oui, elle le devait pour sa fille. Si le monde perverti qu’était la guerre la rongeait de l'intérieur, elle ferait tout pour que ces horreurs ne parviennent pas  à cet être innocent et pur.

   Elle avançait, les paupières à moitié fermées, le regard cherchant la poupée. Elle tenait fermement sa fille contre sa poitrine et rien ne lui ferait lâcher son enfant.

   Tout autour d'elles, la panique était totale. Pourtant, elles restaient indifférentes. Comme si le monde dans lequel elles marchaient était opposé à celui dans lequel elles se trouvaient actuellement. Un monde où une mère et sa fille marchaient dans une direction précise, vers un virage qui paraissait si loin... La poupée était une obsession pour la mère. Plus rien d'autre ne l’intéressait, plus rien d'autre n'avait d’intérêt sauf le jouet de sa fille.

   Une personne affolée les bouscula et ne se retourna même pas pour s'excuser. A croire qu'elles étaient invisibles au milieu de cette pagaille. La mère prit le choc sur son dos pour protéger au mieux la fillette et se releva avec difficultés devant porter deux poids au lieu d'un seul. Ses jambes tremblaient, sans doute de froid, de peur ou simplement de fatigue. La petite fille sanglotait. Inquiète, la mère demanda :

-         «  Quel est le problème Eliza ? »

 Eliza se força à parler en articulant le plus possible :

-          « Maman... elle renifla et reprit : ton cou... saigne beaucoup ».

   La mère tâta sa nuque et sentit une crevasse. Elle passa son doigt sur la fente qui se terminait à quelques centimètres de sa trachée. Le sang abondait. Elle se contenta de sourire pour la rassurer et répondit :

-          « C’est une simple plaie, rien de grave, ne t'inquiète pas ».

 

Les larmes lui montaient aux yeux, le temps lui était compté. Elle allait mourir et laisser sa fille sans rien. A ce moment précis, quelque chose dans son cœur se brisa : l'estime envers les autres, l'espoir de reconstruire sa vie et la joie de vivre.

   Elle détestait la guerre, les gens qui ne pensaient qu'à eux-mêmes, elle venait de radicalement changer de caractère. Elle qui était si calme et tolérante, était à présent prête à tout pour  protéger sa fille, même s’il fallait pour cela,  être odieuse envers les autres et les blesser.

   La ville brûlait de tous les côtés. On ne voyait que le chaos et des habitants perdus, c’était un véritable tableau d'horreur. Au milieu de la rue, deux êtres avançaient, ignorant la détresse des autres. Le bruit des bâtiments qui s’effondraient, étaient parfois recouverts par des cris et des pleurs. Les gens se bousculaient, se piétinaient les uns les autres pour fuir. C'était lors de ces situations que la cruauté humaine et l'égoïsme des gens ressortaient le plus.

   Un cadavre jonchait le sol et son sang se répandait rapidement entre les jointures du pavé. Les proches ne semblaient pas avoir encore acceptés sa mort et tentaient de le sauver bien qu'il fût déjà trop tard. Une jeune femme agrippait la jambe des passants en les suppliant, le bras gauche amputé :

-         « Pitié ! Sauvez-le ! Sauvez mon mari, Aidez-moi ! »

 Certains passants gardaient la tête détournée de la blessée pour ne pas affronter son regard plaintif tandis que d'autres la fixaient avec compassion et répondaient un timide : désolé.

   Cette scène exécrait la mère au plus haut point. Pour elle, il semblait évident que l'homme était mort alors, pourquoi continuer à chercher de l'aide ? Elle passa tout de même son chemin mais la pauvre femme l'agrippa à son tour et dit d'une voix tremblante :

-          « S'il vous plaît... Je suis désespérée... »

 La mère lui lança froidement :

-          « Comment peut-on être aussi stupide ? Il est mort. Alors fuyez au lieu de faire perdre du temps aux autres. »

 La jeune femme s’arrêta net et tourna lentement sa tête vers son mari immobile et au fur et à mesure qu'elle le regardait, elle réalisa qu'il n'était plus vivant. Son visage se décomposa, ses yeux s'écarquillèrent et on put entendre un « «Non... » qui montait d'un ton à chaque fois qu'il était prononcé à nouveau. Puis, elle se mit à hurler et se tint la tête entre les mains. La mère repartit laissant la femme crier de désespoir. Ses cris, étrangement, retentissaient à peine dans toute cette agitation.

   Brutalement, les cris cessèrent, la femme se redressa et s'époumona :

-         «  Un jour, votre manque d'humanité vous coûtera cher ! Et ce jour-là, vous prierez le ciel en demandant pourquoi ! »

 La mère ignora ses propos, elle était condamnée alors pourquoi avoir pitié ?

 La fillette se blottit contre sa mère :

 -«  Maman, cette dame me fait peur… »

 La mère lui caressa délicatement les cheveux. Leur errance continua ainsi jusqu’au bout de la rue qui semblait interminable. Elles prirent le virage et quelques mètres plus loin, elle apparut.

   Une modeste poupée, un simple bout de chiffon faisait sourire Eliza et sa mère. La petite fille se mouvait dans les bras de sa mère, trépignant d’impatience de courir récupérer son bien. Sa mère ne la retint pas et la posa. Aussitôt, l’enfant se précipita vers son jouet. La mère, elle, demeura, en arrière, en souriant. L’innocence de sa fille lui rendait son côté humain. Mais ses forces la quittaient et elle chancelait de temps à autre. Sa vue se troublait par moment, c’était bientôt la fin. Tout se passa si vite… Un mot résonna :

 - « ELIZABETH ! »

 La petite fille, la poupée dans les bras, se retourna brusquement, en fixant sa mère inquiète. Elle n’eut le temps de dire que «  Maman », avant qu’un obus ne s’abatte sur la maison à sa droite et explose violemment. Une nuée de fumée noire s’éleva dans les airs. Une frêle silhouette se dessina vaguement dans l’épais nuage. Elizabeth, dont la robe était auparavant blanche, était à présent rouge de sang. Un bout de bois pointu  transperçait son estomac et annonçait une mort douloureuse et lente. Elle pleurait et dit avec peine :

 -  « J’ai…si mal… Maman… »

 Son corps s’inclina sur le côté, la cheville se tordit et la petite chuta, tendant sa main vers sa mère pour qu’elle la rattrape mais celle-ci était trop loin.

   Le choc du corps sur le pavé provoqua une ouverture du crâne et une mort immédiate. C’en était trop… La mère ne pouvait plus encaisser. Elle se traîna avec ses forces restantes jusqu’à sa fille de huit ans décédée et s’agenouilla auprès d’elle. Elle hurla sa rage, cria son prénom pour qu’elle lui revienne. Son ange maintenant couvert d’une couleur écarlate, couvert de saleté, tordu de douleur, la poupée tachée de sang dans les bras, ne sourira plus jamais. La mère leva la tête vers le ciel gris et maussade et s’exclama :

 - « POURQUOI ?! Pourquoi m’as-tu pris la seule qui me restait ? La seule chose qui comptait pour moi ? »

  Elle semblait devenir folle à crier contre le vent, espérant inlassablement qu’on lui réponde. Finalement, elle se résigna à vivre le peu de temps qui lui restait. Elle essuya son visage, prit son enfant dans ses bras, la serra contre elle et se laissa mourir.

 

   La Guerre détruit, la Guerre tue, la Guerre n’est que violence et aujourd’hui deux personnes l’ont vécu. Personne n’est épargné.

 Une personne éplorée s’avança vers deux corps inertes. L’un était celui d’une adulte, l’autre celui d’une pauvre enfant qui tenait une poupée de chiffon dans ses bras. L’individu les regarda, prit la poupée, la jeta au feu et ajouta :

-         « J’avais bien  dit que ça vous retomberait dessus ».

 

FIN

Romain

Depuis qu'il était dans sa cellule, il n’arrêtait  pas de songer à sa soit disant victoire contre le régime monarchique qui régissait le pays, mais il en était sûr, dehors, tout n'allait pas bien. Même s’il n'y avait pas de vitre dans sa cellule, il pouvait entendre les discussions des gardiens après leur journée ou durant la pause du midi, et de ce qu’il entendait : tout n'était pas calme. Des voitures explosaient, il y avait des manifestations tous les deux jours contre tout et n'importe quoi. C'était presque le chaos, depuis le jour où il avait tué François-Ferdinand,  rien n'avait changé. L'autre jour, les gardiens parlaient d'une tension entre la plupart des pays et pas seulement en Autriche-Hongrie. Il n'avait pas peur mais presque. Pour se rassurer et pour se donner du courage, il se disait qu’au moins dans sa prison, il ne risquait rien.

 

Je passais des jours heureux dans ma cellule C12, une cellule spéciale pour les déficients mentaux. J’étais dans une petite cellule avec des murs blancs et sans aucune fenêtre.

Je n'avais le droit à aucune sortie, seuls les médecins venaient pour me faire parler de mon passé, que j’avais presque oublié. À force de faire semblant, mon esprit avait effacé tous les souvenir de mon passé de tueur. Cela fait quelques jours, j'ai appris que ma maison avait été brûlée dans des circonstances plutôt troubles.

Une semaine après, j'ai reçu du courriel. On m’a dit que la lettre venait du gouvernement, il cherchait à recruter des personnes pour former une armée, pour une guerre vraisemblablement. Alors, finalement, les injures et les menaces de morts se sont transformées en déclaration de guerre !

Deux jours plus tard, on entendait au loin le chant festif de la marche des soldats dans leurs uniformes soyeux. La guerre était bien déclarée et tout le monde était dehors que ce soit les plus aisés, le bas-peuple dans leurs habits du dimanche et même mes médecins. D'ailleurs, une chose incroyable est arrivée, le gouvernement a décidé de relâcher tous les détenus contre leur participation en tant que soldat dans cette guerre. Bien sûr, tous mes acolytes sont partis. Je suis désormais seul dans ma cellule C12  car l’État pense que je serai incontrôlable.

Quelques jours plus tard, des souvenirs de mon passé me sont revenus, et, contrairement a ce que je pensais, ils sont venus me hanter.

Je ne dors plus, je ne mange plus, je ne vis plus... Je me pose de plus en plus de questions sur mon état, cette sensation qui ne m est pas du tout familière, les médecins on diagnostiqué cela comme du regret. Moi, regretter ? Ils se sont trompés...

Dehors, la guerre fait rage, les odeurs de sang et de poudre emplissent mon nez d'une douce mélancolie, je crois. Je ne suis plus sûr, en fait, de rien. Cette sensation qui essaye de pénétrer mon cœur gagne du terrain, mais je bataille. Plus les jours passent, plus cette sangsue s'agrippe à mon âme pour faire de moi ce qu’elle désire, ce fléau, un jour j’y ai succombé. Oui, j'ai regretté le jour où le roi est mort, ou alors je suis fou... Je ne sais plus. Les médecins me fournissent des calmants pour mon mal de tête permanent, je refuse.

Alors que dehors la ville se fait assiéger, mon état empire ou s'améliore, je ne sais même plus,  mon esprit est fatigué d'essayer de reprendre sa place dans ma tête. Du coup, je pleure sans arrêt et j'ai honte de mes actes passés. J'ai peur ...

Dans un soir de déviance, luttant pour son idéal, Gavrilo Princip meurt dans une explosion d'obus. Cette explosion est dû à sa plus grande réussite la Première Guerre Mondiale ( répercussion au meurtre du roi)... C'est le chasseur qui se fait chasser !

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