Valentine

Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespérée, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre. Elle regarda autour d’elle mais ne voyait rien d’autre que de la fumée. La seule trace de vie semblait être ce corbeau noir posé sur la carcasse d’une voiture. Perdue, elle ne savait pas quoi faire ni où aller. Sa fille la regarda et lui dit :

« - Maman, on va chercher ma poupée ? 

  - Oui chérie, répondit la mère sans réellement écouter. »

Mais soudain, dans un fracas terrible, un obus tomba à quelques mètres d’elles. Pendant quelques instants, il n’y eut plus rien, plus aucun bruit, plus aucun signe de vie. Tout avait disparu, c’était comme si ce village n’avait jamais existé.Il ne restait plus qu’un nuage opaque qui recouvrait ce qui fut autrefois un village paisible et tranquille. Ce n’était plus qu’un vaste terrain complètement détruit et inexploitable.

 

         Petit à petit, la mère reprit ses esprits. Affolée, elle cherchait sa fille. Elle était terrifiée à l’idée qu’il ait pu lui arriver quelque chose. Elle scrutait les alentours, essayant de percevoir quelque chose, peut-être un signe de vie de son enfant. Puis une petite voix qui hurlait « Maman » se fit entendre. La jeune femme reconnue immédiatement la voix de son enfant. Se laissant guider par son instinct  maternel, il ne lui restait plus qu’à retrouver sa fille afin de partir se mettre à l’abri des obus. Mais cette fumée épaisse ne lui facilitait pas la tache. Les cris étant de plus en plus forts, elle savait qu’elle se rapprochait. Tout à coup, elle sentit un petit être s’accrocher à sa jambe. Elle sut tout de suite que c’était sa fille. Soulagée, elle la prit dans ses bras et la serra fort contre elle. La petite fille était en pleurs, terrorisée. Sa mère la rassura pendant quelques minutes. Lorsque la fillette fut calmée, elle regarda sa mère et lui dit : « Maman, la poupée il faut qu’on la retrouve! Elle doit avoir peur toute seule. » Cependant, la jeune femme lui fit comprendre qu’elles n’avaient pas le temps, que c’était trop dangereux. Alors la petite fille s’arrêta net et rétorqua : « Maman il faut la retrouver, je peux pas l’abandonner ma poupée ! » Désemparée, sa mère ne voulait pas perdre plus de temps, d’autres obus tomberaient sûrement. Hors, sa fille refusait de faire un pas de plus. Elle fut contrainte d’accepter. Elles partirent donc à la recherche de cette poupée. Ne sachant pas où chercher, elles s’éloignèrent un peu plus loin : peut-être que la poupée avait était projetée. Elles scrutaient les environs mais il n’y avait aucune trace de cette poupée. Alors, elles marchèrent encore un peu, elles se trouvaient maintenant loin de leur foyer. Il n’y avait plus aucune chance de la retrouver. La fillette ne voulait pas arrêter les recherches. Après une heure de recherche, la mère avait perdu tout espoir.

 

Rapidement, un vent fort s’installa. Il fit voler la poussière dans tous les sens et provoqua presque une tempête. La mère et la fille allèrent donc s’abriter sous un arbre. Elles s’assirent et la mère prit l’enfant dans ses bras afin de la protéger du mieux qu’elle le pouvait. Lorsque les rafales s’atténuèrent, elles se relevèrent, puis la fillette, folle de joie, cria à sa mère : « Maman, maman, maman ! Regarde c’est ma poupée. On l’a retrouvée! » La poupée poussée par le vent, s’était déposée à quelques mètres d’elles. La petite fille, plus heureuse que jamais, se jeta sur sa poupée. Elle la serra fort contre elle. La jeune mère attendrie, fut elle aussi heureuse d’avoir retrouvé cette poupée. à présent, il leur fallait trouver un refuge car elles étaient bien trop loin de leur maison. Avant de partir, la mère rangea la poupée dans son sac afin de ne plus la perdre.

 

         Mais soudainement, un sifflement aigu parvint à leurs oreilles. Un choc terrible se fit ressentir. Dans un chaos d’horreur, un énième obus vint s’écraser  à quelques centimètres d’elles. Il n’y avait plus rien, juste un grand vide. Puis, la mère reprit ses esprits. Elle se leva, assez étourdie par la violence du choc. Elle était légèrement blessée mais rien de très grave. Elle regarda autour d’elle et eut comme une impression de déjà vu. Elle remarqua qu’elle ne se trouvait pas au même endroit : elle était revenue au point de départ devant sa maison. La jeune femme étonnée chercha la poupée dans son sac mais ne la trouva point. Que se passait-il ? Tout se mélangeait et se brouillait dans sa tête.  Où était sa fille ? Pourquoi n’était elle pas dans ses bras ? Et où était donc cette satanée poupée ?

 

Tout à coup, un détail attira son attention : le corbeau…… il était toujours posé au même endroit, sur la carcasse de la voiture, comme figé dans le temps. Ce n’était pas possible…… Puis une petite voix qui hurlait « Maman » se fit entendre.

 

Et là, elle comprit ! Il n ‘y avait pas d’énième obus…Il y avait juste l’obus….. Elle avait perdu connaissance et tout ceci n’avait été que le fruit de son imagination pendant sa perte de connaissance… Alors il n’y avait plus de temps à perdre; sa fille avait besoin d’elle.