Roger-Pol Droit, La philosophie ne fait pas le bonheur, Édition Flammarion, lu par Caroline Forgit

https://books.google.fr/books/content?id=qPhzBgAAQBAJ&printsec=frontcover&img=1&zoom=1&edge=curl&imgtk=AFLRE70SXMd6SVqXkAfQYv8jPqBbVFPzLCxMQZ2DtbiLQ57fjrLSKjumCmYL3N30mgY-4RYNEUJ_NipGWCz4uz7h1Uqy2PLvzHRX4rsTUrB0BCZ4G0Uld80-JHqrK0IBJL1cmH6sRzMDRoger-Pol Droit, La philosophie ne fait pas le bonheur, Paris, Flammarion, 2015.

Cet ouvrage part d’un constat, et même d’une colère : la philosophie aujourd’hui se préoccupe essentiellement de la question du bonheur, on ne compte plus les ouvrages qui prétendent que la philosophie peut conduire au bonheur. Pour Roger-Pol Droit, « cette rengaine de la philo-bonheur » (p.11) est tout à la fois fausse, dangereuse, et ridicule. Il s’oppose donc, dans cet ouvrage, à cette nouvelle conception de la philosophie, et précise bien que c’est cette image générale qui l’intéresse ; c’est pourquoi il laissera de côté les nuances, les points de détail, les petites divergences pour mieux percevoir un tableau d’ensemble.

Première partie : Bonheur, que ton règne vienne !

 

         Par-delà leurs différences apparentes, tous ces philosophes disent la même chose : le bonheur est à notre portée et la philosophie peut nous y conduire. Roger-Pol Droit remarque que ce discours est relativement nouveau : l’époque n’est pas si lointaine où le bonheur n’était guère une question philosophique. Non seulement le discours a changé mais l’esprit également : ces « philosophes du bonheur » sont les « nouveaux prêtres » d’aujourd’hui : « Parce qu’ils ressemblent fort, quoi qu’ils disent, à ce qu’ils combattent. Tout antireligieux qu’ils se disent, ils font bien office de nouveaux prêtres : ils sont en effet donneurs de leçons, édicteurs de règles, pourvoyeurs de normes » (p. 25). Ils prétendent enseigner comment vivre et comment être heureux, mais ce faisant, ne participent-ils pas à « une immense entreprise de normalisation, de domination, d’asservissement » (p. 28) ?

         Tous ces philosophes disent la même chose : le bonheur dépend de nous, de nos actes et de nos choix. Mais ils oublient –ou feignent d’oublier – qu’à l’origine, pour les hommes de l’Antiquité, l’évidence première était exactement l’inverse, le bonheur était pour eux le fruit du hasard ou du destin. C’est l’idée que le bonheur, comme le malheur, survient brutalement, sans qu’on puisse le prévoir ou l’empêcher. Dans cette conception, nous sommes les jouets d’un destin que nous ne pouvons ni maîtriser ni déchiffrer. À partir de là, deux options philosophiques sont possibles. Soit on décide d’endurer le hasard, de manière stoïque et héroïque, option largement minoritaire dont Nietzsche pourrait être le dernier représentant, avec son amor fati (amour du destin). Soit on s’emploie à déconnecter le bonheur du hasard et du destin, option qui est celle des écoles de sagesse de l’Antiquité (épicuriens, stoïciens, cyniques, sceptiques). Mais les leçons de ces écoles de sagesse peuvent-elles être appliquées telles quelles au XXIème siècle ? On peut en douter.

         Il s’agit donc, pour Roger-Pol Droit, de rappeler combien le bonheur des Anciens diffère de celui des Modernes. La première différence concerne le rapport entre l’individu et le tout. Les Anciens ne conçoivent le bonheur qu’en relation. Le bonheur n’est pas une affaire personnelle et privée mais une inclusion dans un tout (la Cité, le cosmos). Être heureux, ce n’est pas être épanoui isolément, indépendamment du reste du monde, c’est se penser comme inclus dans un tout, c’est pouvoir sortir de soi, se contempler de l’extérieur comme inséré dans cette totalité. Le bonheur n’est ni personnel ni subjectif, il consiste objectivement dans cette insertion. La seconde différence concerne la nature même du bonheur. Dans l’Antiquité, seul le sage peut atteindre un bonheur durable, car il vit « comme un dieu parmi les hommes », selon la formule d’Épicure, c’est-à-dire sans manque, sans peur, sans désir. C’est pourquoi il se moque des coups du sort, des caprices de la Fortune. Ce que l’on appelle « bonheur » dans l’Antiquité est donc bien plutôt une profonde indifférence à l’égard de tout ce qui peut arriver, ou en tout cas à tout ce qui peut frapper l’individu, en tant qu’entité séparée du tout. Ce bonheur du sage n’a donc rien à voir avec ce nous entendons aujourd’hui par « bonheur ». En un sens le sage ne connaît ni bonheur ni malheur, il est dans un état neutre (la grande leçon des sagesses de l’Antiquité étant de nous faire comprendre que la neutralité est déjà un état positif). Le sage n’éprouve plus ni désir, ni sentiment, ni émotion, ou bien, s’il les éprouve, c’est comme s’il les contemplait de l’extérieur, sans y être impliqué. Est-ce cette éradication des désirs, de la sensibilité, que les contemporains recherchent sous le nom de « bonheur » ?

 

         Deuxième partie : Qu’il soit permis de douter …

 

         La « philo-bonheur » repose sur deux présupposés. Premier présupposé : tout être humain désire le bonheur. Or cette idée si répandue ne va pas de soi. En réalité, elle repose sur quatre oublis. Un oubli de l’histoire : certains penseurs n’ont cessé de critiquer ce désir de bonheur, d’en dénoncer le caractère illusoire, et lui préfèrent même parfois le néant (Schopenhauer, Cioran pour ne citer que les plus connus). Un oubli du négatif : Nietzsche et Freud ont montré qu’il existe une forme de négativité dans le désir ou dans le psychisme humain, certains comportements sont clairement auto-destructeurs, certains hommes se complaisent dans le malheur. Affirmer que de tels comportements sont pathologiques ne change rien à l’affaire. Un oubli des cultures : le désir de bonheur n’a rien d’universel. La question du bonheur se pose en de tout autres termes en Chine ou en Inde, ou plutôt, ne se pose pas. Par exemple, la conception chinoise de l’existence n’a guère développé l’idée de finalité, de « but de la vie », elle est plutôt attentive aux processus de transformation internes à la vie même. En Inde, le salut ou le bonheur sont envisagés comme une sortie du cycle indéfini des morts et des renaissances. Le bonheur consiste donc à ne plus renaître, à en finir avec la vie et son éternel recommencement. Un oubli de l’éthique enfin : il est possible, il n’est même pas rare de préférer la justice, la liberté, la dignité, au bonheur. On peut se sacrifier, mourir pour ses idées. On peut également préférer la vengeance, le meurtre, la destruction, au bonheur. Donc non, il n’est pas du tout certain que tout le monde veuille être heureux et place cet idéal au dessus de tout.

         Deuxième présupposé : la philosophie permet d’atteindre le bonheur. Cette idée est partagée par l’immense majorité des penseurs de l’Antiquité et peut être résumée par la formule de Sextus Empiricus : « La philosophie est une activité qui, par des discours et des raisonnements, nous procure la vie heureuse » (p. 95). Il s’agit d’une activité : le bonheur n’est pas reçu des dieux, du hasard ou du destin ; il faut agir pour l’obtenir, il dépend de nous. Cette activité consiste en « des discours et des raisonnements », mais il ne s’agit pas de n’importe quel discours, de n’importe quel raisonnement, ceux-ci doivent être vrais. C’est donc finalement la possession de la vérité qui rend heureux. Or ce qui semble si évident pour les penseurs de l’Antiquité ne l’est plus dans l’histoire récente de la philosophie. On peut très bien penser que la vérité désole et désespère et que seule l’illusion réconforte. Une telle conception n’est pas philosophiquement absurde. Plus encore, ce lien de la philosophie et du bonheur, de la vérité et du bonheur, a fini par se dénouer. Jusqu’à une époque récente, presque personne n’avait ce lien à l’esprit. Pendant des siècles, des philosophes ont élaboré des raisonnements, établi des vérités, sans relier leur activité à une quelconque recherche du bonheur. Ils ne pensaient pas le moins du monde qu’ils pouvaient être transformés par l’activité qu’ils pratiquaient. Que s’est-il donc passé, pour que l’idéal ancien de la recherche du bonheur disparaisse des préoccupations des philosophes ? Et que s’est-il passé, tout récemment, pour que cet idéal réapparaisse ?

 

         Troisième partie : Le bonheur, dans la philosophie, a beaucoup voyagé

 

         Si beaucoup, aujourd’hui, pensent que la philosophie permet d’accéder au bonheur, c’est parce qu’ils se représentent la philosophie comme une sagesse. La figure du sage s’est peu à peu superposée à celle du philosophe. Dans toutes les traditions culturelles, le sage est celui qui est parvenu à trouver le bonheur, c’est-à-dire l’équilibre, la quiétude, la sérénité. À vrai dire, il vit plutôt dans une sorte de neutralité, il échappe aussi bien aux émotions heureuses que malheureuses, mais au moins, il est libéré de l’inquiétude, de l’angoisse, des préoccupations vaines. Aux VIème  et Vème siècles avant JC, dans des cultures très différentes (Chine, Inde, Judée, Grèce), cette figure du sage apparaît. Son trait premier n’est pas d’accéder au bonheur mais au savoir, et c’est ce savoir qui transforme son existence. Ce savoir-sagesse transforme son esprit, ses désirs, ses volontés, son rapport aux autres, son rapport à lui-même, de telle sorte qu’il accède au bonheur, ou du moins échappe au malheur. Il y a loin de cette figure du sage à celle du philosophe, même dans l’Antiquité. Tout simplement parce que son savoir n’est pas rationnel ou conceptuel, il ne repose pas sur une argumentation ou une démonstration, mais bien plutôt sur des expériences, des intuitions, une transmission du maître qui aboutira peu à peu à une transfiguration du disciple. Dans toutes ces traditions, la sagesse n’est pas d’abord affaire de raison, sauf en un lieu, la Grèce classique. Les Grecs ont également connu ces sages illuminés, possédés, inspirés, parlant par énigmes. Mais de nouveaux sages sont apparus, comptant sur la raison, la logique et la vérité démontrable pour atteindre la sagesse. Ces nouveaux sages se font appeler philo-sophos c’est-à-dire simples chercheurs de sagesse, par opposition au sophos, celui qui détient la sagesse. Ces philosophes aiment la sagesse, cherchent à l’atteindre, justement parce qu’ils ne la détiennent pas et ne sont pas assurés d’y parvenir. Et ils cherchent à l’atteindre par le seul chemin de la raison, ce qui est nouveau. Une idée nouvelle apparaît : la raison peut conduire à la vertu, et la vertu au bonheur.

         Avec le christianisme, la figure du sage laisse place à celle du saint. Le christianisme conduit à une inversion des valeurs, notamment dans la manière d’envisager la vie, le bonheur, le corps, la souffrance, le plaisir. La vie terrestre n’est plus essentielle, il ne s’agit plus d’être heureux ici-bas mais de viser le seul bonheur qui vaille : la vie éternelle. Pire, le bonheur terrestre est toujours susceptible d’être un péché, il peut compromettre le salut. Le bonheur change donc de nature. Le bonheur du sage se vivait au présent et résultait des efforts accomplis, de la sagesse acquise. Le bonheur du saint devient infini, ineffable, céleste, éternel, et même incompréhensible puisqu’il dépend de la grâce de Dieu plus que des actions humaines.

         À partir de la Renaissance, la figure du savant remplace peu à peu celle du saint. Le philosophe n’est plus sage ni saint, il devient homme de raison, son ambition est de bâtir un savoir rationnel. L’ancien idéal de sagesse n’a pas totalement disparu, mais l’idéal de la connaissance, tout particulièrement des lois de la nature, s’impose de manière incontestable. La question centrale de la philosophie n’est plus le bonheur mais la vérité. Malgré tout, durant le siècle des Lumières, la question du bonheur refait surface, mais celui-ci n’est pas vu comme une évolution personnelle et intérieure, il est supposé résulter d’un processus d’émancipation collective, grâce à l’éducation, l’instruction, la diffusion des connaissances. La philosophie classique et contemporaine s’est donc de plus en plus désintéressée de la question du bonheur individuel, et ne prétendait plus le procurer. La philosophie s’est construite comme système formel, édifice conceptuel, et non plus comme sagesse. Comment donc expliquer ce retour de la question du bonheur, et de la figure du sage, dans la philosophie actuelle ?

         Nous avons changé d’époque. La figure du savant libérant l’humanité par la connaissance s’est estompée. Nous avons cessé de croire au progrès de la raison et de la liberté. Nous nous sommes mis à douter de la science, de la technique, conscients de leurs dangers potentiels. Les idéaux collectifs ont perdu de leur force. Ils ont été remplacés par un désir de bien-être individuel, personnel.

 

         Quatrième partie : En toile de fond

 

         Trois questions restent en suspens. La première : la philosophie peut-elle vraiment « faire » quelque chose ? A-t-elle une portée pratique ? Peut-elle vraiment modifier notre existence ? Ne serait-ce pas un postulat, une pétition de principe ? Ne serait-ce pas surestimer les pouvoirs de la raison ? Kant, le premier, a montré que la philosophie était impuissante à procurer le bonheur, car ce dernier est « un idéal non de la raison mais de l’imagination » (p. 155), il n’est pas possible d’en forger un concept précis. La philosophie ne peut donc produire aucun savoir exact sur le bonheur et la manière de l’atteindre, elle ne peut transmettre que des conseils pratiques. L’illusion antique, mais aussi classique, fut de croire que la raison pourrait à elle seule réguler nos passions, diminuer nos désirs. Mais pour cela, il faudrait que la raison soit autonome, indépendante des passions. Or la frontière entre passion et raison est ténue. Schopenhauer, Nietzsche, Freud ont montré, chacun à leur façon, que la raison n’était pas indépendante de la vie, du corps, des affects. La raison est soumise, à son insu, à des forces plus puissantes qu’elle, elle n’est pas impérieuse et souveraine. Elle peut en partie les comprendre mais non pas les dominer totalement. Il n’est donc pas du tout certain que la philosophie puisse conduire au bonheur, car la puissance de la raison n’est pas suffisante pour transformer notre existence.

         D’où cette deuxième question : comment se fait-il que la question du bonheur soit redevenue centrale aujourd’hui ? Comment se fait-il que la philosophie prétende encore aujourd’hui nous y conduire, comme si tout ce travail accompli précédemment n’avait pas eu lieu ? Cette question est à double-face. L’une concerne la société, et l’engouement récent pour le bonheur (mais « engouement » est un mot faible, il faudrait plutôt parler d’obsession ou d’injonction). Les massacres du XXème siècle ont détruit la confiance dans les grands idéaux collectifs, dans la culture, le progrès, la raison. Il a été tentant de se replier sur l’existence individuelle et son désir de bien-être. Mais il y a l’autre face de la question : pourquoi tant de philosophes se sont-ils laissés séduire à nouveau par la question du bonheur ? Il faut bien constater un déclin des ambitions philosophiques de jadis, certains penseurs ont fini par donner au public ce qu’il demandait.

         Enfin, dernière question : cette quête du bonheur fait-elle de nous des esclaves ? Curieuse question en apparence, puisqu’il s’agit de devenir maître de soi-même. Et pourtant, derrière cette quête du bonheur, ne peut-on pas déceler une vaste entreprise de normalisation, d’uniformisation ? Qui pourrait refuser d’être heureux ? Qui pourrait oser dire qu’il ne souhaite pas le bonheur ? Alors tous sont sommés de le rechercher, d’éviter les tensions et les conflits, de se libérer de leurs angoisses, de trouver leur épanouissement dans la vie professionnelle, conjugale, familiale, tous doivent être apaisés et sereins. Sommes-nous vraiment « tous maîtres de nous-mêmes … ou bien, finalement, tous esclaves d’une même représentation de l’existence humaine dégraissée, dépassionnée, défigurée ? » (p. 179). Cette injonction au bonheur ne conduit-elle pas à un « totalitarisme soft » ou « radieux » (p. 180) ?

         Et pourtant ce bonheur actuel, édulcoré, est « nauséeux » (p. 182), pour trois raisons. Tout d’abord, il est la négation même de la vie. La vie n’est pas, par elle-même, malheureuse ou heureuse, elle est brute, imprévisible, incompréhensible, surprenante, inattendue, toujours différente de ce que l’on attend. Ensuite, il y a un abîme entre le bonheur philosophique des Anciens et le bonheur actuel. Pour les Anciens, le bonheur est lié à la vertu, à la justice. Le bonheur actuel est plutôt vu comme « une succession de plaisirs, de jouissances, de divertissements, de jeux » (p. 183). Calliclès contre Socrate. Calliclès aurait-il gagné ? Enfin, ce bonheur a un caractère obligatoire, encore une fois nous sommes sommés d’être heureux, épanouis, dans tous les aspects de notre existence, toute tristesse devient une pathologie qu’il convient de soigner. Il y a bien là un totalitarisme : aucun domaine de notre existence n’échappe à cette injonction d’être heureux, aucun repli n’est possible.

 

         Dans son projet de dénonciation de la « philo-bonheur », Roger-Pol Droit assume de pratiquer l’amalgame et la simplification : « C’est pourquoi je laisserai de côté, délibérément, les nuances qui distinguent les uns des autres les actuels thuriféraires du bonheur par la philosophie. Je pratiquerai même volontiers amalgame et simplification, par souci d’honnêteté et de rigueur. Ce n’est paradoxal qu’au premier regard : qui veut parler d’un ensemble doit négliger sciemment les petites différences. Ces auteurs ne sont pas semblables, ils ne disent pas exactement la même chose. Fort bien. Ils dessinent malgré tout, de la pensée comme de la vie, une certaine image. Elle seule m’intéresse et m’irrite » (p. 13-14). On comprend bien la démarche de Roger-Pol Droit. Il ne peut pas entrer dans le détail de ce qui distingue André Comte-Sponville, Michel Onfray, Robert Misrahi, Luc Ferry, Frédéric Lenoir et bien d’autres. Il ne le peut pas et ne le veut pas, ce n’est pas son propos. Mais à trop négliger les « petites différences », on finit par se demander si l’adversaire de Roger-Pol Droit existe bel et bien. Avec cette philo-bonheur, si floue et si vague, Roger-Pol Droit ne se donne-t-il pas un adversaire un peu trop facile à combattre ?

         Roger-Pol Droit dénonce à plusieurs reprises le bonheur actuel : « vivre sans temps morts et jouir sans entraves » (p. 154), « une succession de plaisirs, de jouissances, de divertissements, de jeux » (p. 183), ceci pour montrer que les règles des Anciens ne peuvent plus s’appliquer aujourd’hui. Mais peut-on sérieusement penser que les philosophes contemporains n’ont pas à l’esprit ces divergences de conception ? Seraient-ils à ce point aveugles ou ignorants ? De même, Roger-Pol Droit semble assimiler les philosophes actuels à des coachs qui garantiraient un « bonheur clés en main » (p. 160), mais on se demande bien quel philosophe réellement existant a eu une telle prétention.

         Enfin, on ne peut s’empêcher de penser, en refermant l’ouvrage de Roger-Pol Droit, que celui-ci a voulu dénoncer la vague de la « philo-bonheur », mais qu’il surfe fort à propos sur cette même vague.

 

Caroline Forgit