Collectif, Esthétique et philosophie de l’art, De Boeck 2014, lu par Alain Ricci
Par Jérôme Jardry le 03 juillet 2018, 06:00 - Esthétique - Lien permanent
Collectif regroupé sous le nom d'Atelier d'esthétique, Esthétique et philosophie de l’art - Repères historiques et thématiques, collection L'Atelier philosophique, De Boeck, 2014 (524 p.). Lu par Alain Ricci.
Esthétique et philosophie de l’art « repères historiques et thématiques », est la seconde édition parue en 2014 d’un précédent manuel. Ce recueil a été réalisé par une douzaine de professeurs et chercheurs, presque tous issus des universités belges, qui ont contribué chacun, selon leur spécialité, à la rédaction des chapitres.
Cet ouvrage de 524 pages se présente comme un vaste champ de recherches où tous les domaines et toutes les époques de l’histoire de l’art et de l’esthétique sont abordés, des origines à nos jours. Par le biais d’une table des matières très précise, le lecteur pourra consulter directement le chapitre qui l’intéresse, sans que cela nécessite la lecture de ce qui précède ou de ce qui suit. Esthétique et philosophie de l’art s’adresse principalement à un public d’étudiants de premier cycle universitaire mais nombre de ses chapitres peuvent aussi s’avérer très utiles et adaptés à des lecteurs plus aguerris.
Le manuel est divisé en deux grandes parties. La première que l’on pourrait qualifier, « d’historique », propose une chronologie (à quelques rares exceptions près) d’auteurs et de thèmes, de l’Antiquité grecque jusqu’à nos jours. La seconde, « thématique », aborde l’esthétique par le biais de notions qui transcendent à la fois les époques et les frontières entre les domaines artistiques.
La partie historique :
Elle se divise elle-même en trois chapitres dont le premier commence à Platon, le deuxième, à la Renaissance italienne et le troisième à la critique nietzschéenne. Rédigés par des auteurs différents, la plupart du temps les chapitres se succèdent sans transitions. Chaque philosophe est présenté par le biais de quelques notions qui sont les plus importantes sur le plan esthétique. Dans le chapitre sur Aristote par exemple, l’auteur développe les thèmes de la mimèsis, de la katharsis ainsi que de l’imagination. Certains chapitres ou sous chapitres sont présentés comme des points d’histoire, apparaissant comme indispensables à la compréhension de la chronologie esthétique : c’est le cas par exemple d’un chapitre sur « la théologie de l’image. Entre Orient et Occident ». D’autres chapitres font appel à des auteurs contemporains incontournables pour éclairer des thèmes : c’est le cas de la thèse de Panofsky sur l’architecture gothique. Enfin, il est à noter que bien souvent les auteurs présentés et développés le sont bien au-delà de leur angle esthétique. Les chapitres sur Kant et Heidegger nous montrent à quel point l’esthétique traverse toute leur philosophie, y compris dans des domaines où on ne l’attendait pas.
Cette première grande partie s’achève avec une série de thèmes et de théories de l’art qui apparaissent bien souvent sous la forme de discours liés à l’art contemporain. Comme l’on peut s’y attendre, cette fin de partie rencontre la difficulté d’embrasser un champ esthétique très hétérogène mais aussi sur lequel les auteurs n’ont que peu de recul. Par son aspect théorique, cette fin de première partie annonce la deuxième grande partie.
La partie thématique :
Faisant se succéder une série de notions phares de l’histoire de l’art et de l’esthétique comme la mimèsis, l’image, la représentation, le sublime, le déconstructivisme, ou encore la technique, cette deuxième partie aborde la question du beau sous des formes très classiques. Les auteurs se succèdent sans réelle transition. Chacun d’entre eux traite une, voire deux ou trois notions fondamentales qu’il développe souvent sans réel parti pris, de manière narrative.
Les chapitres 4, 5 ,6, pourront être déjà familiers au lecteur car ils traitent de périodes, de thèmes et de concepts assez classiques. Il sera par exemple question du « beau classique », de la Grèce antique ou encore du concept récurrent de mimèsis qui traverse les âges et se décline aussi bien en peinture qu’en musique. Le chapitre 6 se termine sur une réflexion très pertinente et toujours d’actualité entre pouvoirs esthétiques et pouvoirs. Les derniers chapitres du livre 7, 8, 9, sont des passages plus techniques où la philosophie et l’esthétique croisent les domaines de l’architecture, de l’industrie, ou encore de l’économie moderne. Il est ici souvent question d’appréhender le domaine de l’esthétique dans sa forme la plus contemporaine mais aussi parfois la plus opaque. A ce titre, ces trois derniers chapitres ont pour ambition de permettre au lecteur une approche plus claire de ces problématiques.
Esthétique et philosophie de l’art « repères historiques et thématiques », est une introduction complète aux questions de philosophie de l’art. Il faut ajouter à cela un index très précis et d’une rigueur universitaire, ainsi qu’une bonne bibliographie où figurent tous les incontournables de l’esthétique et de l’histoire de l’art.
Le manuel peut sembler parfois hétérogène de par les approches qu’il propose mais aussi de par la palette très large d’auteurs qui y participent. Toutefois, dans cette large et vaste entreprise, il n’y a presque jamais de redites ni d’auteurs dont les thèmes ou les champ de compétences se croisent : preuve en est que l’ouvrage a été très bien coordonné et ordonné en amont. Sans doute ici que la deuxième édition a encore contribué à améliorer une entreprise déjà bien maîtrisée.
Cet ouvrage peut donc paraître très complet sauf si bien sûr le lecteur aspire à des recherches très précises et approfondies dans certains domaines. Ainsi, Esthétique et philosophie de l’art aborde beaucoup de thèmes et d’auteurs, n’en oublie presque aucun mais de ce fait il les traite souvent rapidement et doit être lu avant tout comme une propédeutique.
Enfin, si cet ouvrage est très bien écrit et des plus sérieux dans son entreprise, nous pouvons tout de même déplorer l’absence d’illustrations qui très souvent contribueraient à éclairer un lecteur qui peine à faire travailler son imagination, en particulier dans les chapitres où il est question d’art contemporain.
Alain Ricci (15/06/2015).