Le trajet, d'une trentaine de minutes environ, nous mène une fois de plus le long de ces berges que nous connaissons si bien. Pour nous servir de guide, nous avons avec nous l'un des professeurs de français du lycée allemand.

La ville de Wertheim, comme beaucoup de celles que nous voyons en Bavière et en Franconie, a su garder un charme médiéval qui n'est pas pour nous déplaire. Dans la vieille ville, il nous faut passer dans d'étroites ruelles, admirer les maisons à colombages, repérer les enseignes ouvragées des commerçants, contempler les édifices tels qu'au Moyen Âge...

Nous avons le plaisir d'entrer dans l'église collégiale (Stiftskirche) aujourd'hui protestante. Cette basilique gothique dispose d'un clocher, construit au XVe siècle, qui se repère de loin. Elle abrite trois nefs très éclairées ainsi qu'un orgue moderne et monumental.

Nous nous dirigeons ensuite vers le Musée du verre. Marianne, notre guide, nous explique les différents types de verre que l'on peut trouver (optique, de laboratoire, etc.). Les étages exposent en vitrine de nombreuses réalisations en verre. Certaines sont purement artistiques, d'autres sont insolites, toutes sont colorées, d'autres ne sont pas transparentes. Nous découvrons également les différents traitements du verre dans notre quotidien et à travers les temps : les thermomètres et les baromètres, les verres de lunette et de microscope, la laine de verre pour l'isolation, le verre sous forme de dent, les miroirs, les ustensiles de cuisine, les bijoux contemporains ou antiques, les premières versions de la marque Thermos, les fibres optiques.... Nous écoutons également le son de la cloche de verre : des tubes de verre en rotation, dans lesquels tombe un fil de fer ; le son amplifié s'apparente à celui d'une cloche traditionnelle.

Une partie du musée est consacrée aux abeilles dont la vie est observée minutieusement par des caméras minuscules intégrées à des fibres très fines issues du verre.

Le clou du spectacle réside sans aucun doute dans la présentation de Ralph, le souffleur de verre. Il réalise sous nos yeux,,et avec l'aide de deux élèves volontaires, un petit poisson, puis une boule de Noël - qu'il leur offrira ensuite pour les remercier. Son chalumeau lui permet de chauffer à 1000 degrés des tiges de verre qu'il doit tourner sans cesse pour éviter que le verre fondu ne tombe. Il modèle les formes pendant que le verre rougeoyant est liquide et souffle légèrement pour gonfler la partie principale de l'objet. Avec une pince, il fait d'autre formes plus fines ou plus larges. Le verre, hors du feu, se solidifie très vite, d'où la nécessité de le modeler rapidement. Attention néanmoins, car parfois, alors qu'on ne voit aucun rougeoiement, le verre est encore brûlant. Mieux vaut attendre quelques minutes avant de toucher quoi que ce soit qui se trouve sur le plan de travail de l'artiste. L'exercice demande de la patience et de l'habileté. Ralph, qui fait cela depuis une trentaine d'années, s'attire sans mal l'admiration des élèves et de leurs accompagnateurs.

Les yeux encore tout pleins d'étincelles, nous quittons les lieux pour monter au château qui surplombe la ville. Cet imposant édifice du XIIe siècle était autrefois le siège des Comtes de Wertheim. Bien qu'il soit en ruines d'un côté et en rénovation de l'autre, il continue d'exercer une incroyable fascination. En effet, il ressemble aux vestiges que se plaisaient à peindre Caspar Friedrich et les peintres romantiques allemands du XIXe siècle (voir DÉPEINDRE LES QUATRE ÉLÉMENTS 1 et 2a) .

Son avantageuse position lui permet de voir toute le cité et au-delà. Magnifique panorama que nous prenons en photo sans réserve. Le Main qui coule en contrebas sert ici de frontière entre la Bavière et le Bade-Wurtemberg (Baden-Württemberg).

Autre fait marquant, l'histoire rapporte que c'est là que le poète allemand Wolfram von Eschenbach a composé son récit le plus important : Parzival, qui sera mis en musique par Richard Wagner au XIXe siècle. Nous expliquons aux élèves qu'il s'agit du récit de Perceval, déjà raconté par Chrétien de Troyes, quelques années plus tôt. Ce jeune chevalier naïf, élevé à l'écart du monde par sa mère qui voulait le protéger, finit par se lancer dans la quête du Graal, le plus important de tous les mythes littéraires (voir SOUS LE HEAUME DES CHEVALIERS 2/4 : La Quête du Graal). Pour rendre le tout encore plus crédible, des dalles sont disposées en spirale sur le gazon et portent les noms de Parzival et de tous les personnages principaux (on y retrouve notamment Artus - le roi Arthur - ou encore Gawan – Gauvain).

Face à un tel paysage, dans un tel lieu, comment ne pas être transporté par le souffle épique des héros d'autrefois ? Toute la grandeur du Moyen Âge reprend vie le temps de cette visite.

Nous redescendons ensuite vers le centre de la ville. Nous prenons une glace près de l'amusant Puits de Anges (Engelsbrunnen) construit en grès rouge. Nous observons aussi la maison des Quatre Couronnés avec ses colombages pittoresques et sa peinture jaune ; nous faisons également un détour près d'une maison peinte en bleu, signe extérieur de richesse pour les habitants médiévaux, car le bleu était une couleur très chère.

En retournant à la gare, nous prenons le temps de voir d'autres éléments typiques de la ville, d'autres fontaines, d'autres ruelles, d'autres enseignes... Malgré de nombreux travaux, nous avons le sentiment d'avoir passé quelque temps dans une autre époque.

L'arrivée à la gare - et à la réalité ! - nous oblige à penser à notre retour. Ce soir, il faut faire ses bagages pour rentrer en France le lendemain. Vous comprendrez que de nombreux élèves aient envie de prolonger leur séjour...

 

A. POT, G. DAUZERES, N. THIMON