Ce sont des émaux cloisonnés (cernés) sur faïence. Leur histoire commence il y a environ 200 ans dans la ville de Longwy (département de Meurthe et Moselle)…

En 1798, Charles Régnier, fonctionnaire originaire de Metz fonde une faïencerie à Longwy. Les différents propriétaires produisent jusqu’en 1875 surtout des services de table, dont certaines pièces remarquées par Napoléon 1er figurent aujourd’hui dans les collections du Musée national de la céramique de Sèvres.

Vers 1875, les deux frères d’Huart, propriétaires de la faïencerie et diplômés de l’école centrale de Paris réfléchissent à une nouvelle production pour satisfaire à la grande mode du japonisme (intérêt pour ce qui vient du Japon) et de l’orientalisme (style ou plutôt climat qui apparait au 17° siècle). En hommes d’affaires avisés, ils veulent aussi lutter contre les importations massives d’objets d’art et de céramique en provenance du Japon. Ils vont développer la technique des émaux cernés sur faïence. Ils développeront cette technique vers 1875 environ.

Cette production a connu 2 âges d’or :

-La fin du 19e siècle d’environ 1875 à 1895 :

Pour ces pièces, Longwy a abordé toutes les influences stylistiques :

la Chine, (la Chine est représentée par le dragon.)

Le Moyen-Orient, ici le moyen orient est représenté autant dans les couleurs

                                                                                                                                                                                                que dans la forme (Turquie),

Le Japon (ici représenté par la branche de cerisier du Japon).

Le Japonisme qui est arrivé en Europe grâce à, entre autres, Katsuchika HOKUSAI (1760-1849). Il est l’auteur des 36 œuvres qui représentent le Mont Fuji, le volcan japonais (voir DÉPEINDRE LES QUATRE ÉLÉMENTS : 1/4 Un homme à la mer !). Cet artiste a donc eu une influence certaine sur les émaux de Longwy.

-La période Art Déco d’environ 1914 à 1930

Juste avant la première Guerre Mondiale, Longwy révolutionne son répertoire de formes et de décors pour épouser pleinement la vague Art Déco : des lignes droites, des décors géométriques et une palette de couleurs réduite (à l’inverse de l’Art Nouveau, composé de courbes et de beaucoup de couleurs…)

(pièce signée par l’artiste Art Déco Oliesewicz.)

A cette époque, Longwy entame une collaboration avec les grands magasins parisiens : les Galeries Lafayette, Bon Marché, les magasins du Louvre et surtout le Printemps avec son Atelier d’Art Primavera.

Longwy, fait alors appel à de grands artistes qu’on appellerait aujourd’hui designers. Claude Lévy (1895-1942) est une des plus grandes artistes de cette période. Elle fut formée à l’école des arts décoratifs, et récompensée du prestigieux prix Blumenthal (prix distribué de 1919 à 1954 par la fondation Florence Bluementhal à des peintres, sculpteurs, graveurs, décorateurs…). Les pièces de Claude Lévy sont très rares ; en voici quelques unes : 

Ces deux périodes sont les meilleures car c’est à ces moments-là qu’il y a eu le plus de créativité, la meilleure qualité de production et les meilleurs artistes !

La technique de fabrication de ces pièces uniques n’est pas commune : elle consiste à séparer les gouttes d’émail par de fins traits.

On commence par créer la barbotine (mélange d’argile, de kaolin et d’eau), on la moule pour donner la forme du Longwy, on laisse sécher environ 24 heures et on cuit. On obtient alors le biscuit (une terre cuite blanche). On va ensuite, grâce à une technique de calque poser le trait noir qui donnera le décor du Longwy. On remplit ensuite au goutte à goutte avec l’émail (on ne peut pas peindre car l’émail sèche instantanément au contact de l’air, ce qui donne un effet relief à l’émaillage. L’émail est fabriqué avec une algue appelée Fucus. On fait ensuite une deuxième cuisson : cuisson durant laquelle le biscuit se fissure en chantant (lorsque le Longwy se fissure, il fait un bruit particulier qu’on appelle « le chant du Longwy »). La dernière étape est de recouvrir le Longwy de terre de Sienne pour rendre les craquelures visibles !

Chaque forme et chaque décor sont référencés, certaines pièces ont été fabriquées à très peu d’exemplaires ce qui les rend rares et très recherchées sur le marché de l’art.

Cette production continue encore aujourd’hui : actuellement les décors et les formes des émaux sont plus contemporains car les influences stylistiques varient au cours du temps, comme dans tous les domaines artistiques.



Un grand merci à Monsieur B. grand collectionneur français, qui a accepté de faire figurer les pièces de sa collection dans cet article.


Victorine BUECHER