Il accueille les arts premiers d'Asie, d'Afrique, d'Océanie et des Amériques. Sa ligne architecturale est le fruit du travail de Jean NOUVEL. Il a ouvert ses portes en 2006 et vient compléter la liste des musées nationaux.
Du 12 octobre 2013 au 26 janvier 2014, il accueille l'exposition sur le peuple de Nouvelle-Calédonie : "Kanak : l'art est une parole".
Le titre de cet événement rappelle combien le langage est au cœur des civilisations : moyen de communication, porteur de messages, véhicule des coutumes et des souvenirs. L'exposition insiste sur l'importance de l'acte de la parole dans une société orale, son pouvoir créateur, sa capacité à raconter les mythes, à transmettre le savoir ; chaque objet présenté devient à son tour doté d'une signification.
La Nouvelle-Calédonie se trouve dans l'Océan Pacifique, à l'est de l'Australie et au nord de la Nouvelle-Zélande. C'est en fait un archipel regroupé autour d'une île principale : Grande Terre. Les premiers peuplements remontent à environ 1000 ou 1500 avant notre ère. Lorsque le capitaine britannique James COOK (1728-1779) découvre les terres, elles lui font penser à son Écosse natale dont l'ancien nom était la Calédonie, c'est pourquoi il nomme l'île qu'il vient de découvrir Nouvelle-Calédonie. Le peintre William HODGES (1744-1797) qui accompagnait la deuxième expédition en a fait un tableau en 1775 qui annonce la peinture romantique et l'enthousiasme à l'égard des paysages.
Les commentaires des premiers observateurs concernant les peuples rencontrés sont plutôt positifs et permettront d'alimenter le mythe du "bon sauvage" dont parle le philosophe français Jean-Jacques ROUSSEAU (1712-1778).
Les habitants se nomment eux-mêmes les Kanak, l'histoire du mot est intéressante :
Insulte que même le capitaine Haddock adopte dans les albums Tintin (par exemple : Le Trésor de Rackham le Rouge, p. 29 de HERGÉ).
La culture de l'igname, un gros tubercule dont les feuilles sont un type de lianes, a une importance capitale dans la culture kanak. C'est elle qui permet de rythmer le temps de la vie ; de nombreux rites y sont associés. Les indications données au musée nous apprennent par exemple que lorsque les propriétaires terriens vont au champ sacré, ils ne doivent parler à personne pendant qu'ils travaillent la terre. Quand ils ont fini ils s'écrient "Hip, hip, hip, hure!", une formule qui rappelle quelque chose...
Les différents objets des peuples natifs de l'archipel témoignent d'une grande maîtrise de la sculpture du bois ou de la pierre. Les masques, les sagaies (=lances), les bambous ornés, les statuettes, les bijoux, les têtes de monnaie sont de vraies œuvres d'arts.
C'est en 1853 que la France prend possession officiellement de la Nouvelle-Calédonie. Le grand chef Ataï mènera vainement une insurrection (=révolte) contre le gouverneur français, avant d'être tué puis décapité en 1878. L'histoire de sa tête perdue puis retrouvée a gâché les relations entre la France et la Nouvelle-Calédonie jusqu'à nos jours.
La période coloniale entraîné des situations dépassant les limites de la raison. Lors de l'exposition universelle de 1889 en France - celle qui a vu naître la Tour Eiffel - un village avait été construit et on y avait placé des kanak comme des bêtes de foire. Ils étaient alors sujets à toutes sortes de moqueries de la part des visiteurs qui voyaient la confirmation de tout le mal qu'on avait pu leur dire. Une propagande colonialiste avait été menée pour présenter les Kanak comme des sauvages ridicules...
ou des cannibales dangereux...
Cet état de fait sera dénoncé notamment par le romancier français Didier DAENINCKX (né en 1949) dans son court roman Cannibale (1998) parfois étudié en classe de 3e. Le travail de réhabilitation est long et prend des chemins parfois originaux. C'est le cas dans cette série de bande dessinée Hauteville-House (démarrée en 2002) de Fred DUVAL et Thierry GIOUX dont les 7e et 8e tomes se déroulent dans la Nouvelle-Calédonie d'un XIXe siècle imaginaire.
Jusqu'à l'époque contemporaine, des conflits ont visé à retrouver l'indépendance. Le nom de Jean-Marie TJIBAOU (1936-1989), un des leaders du mouvement, assassiné en 1989, reste associé à cet esprit. La prise d'otages par des indépendantistes kanak dans une grotte à Ouvéa en 1988, à la veille de l’élection présidentielle, se termine mal. Les circonstances mal élucidées desservent la cause indépendantiste aux yeux de l'opinion publique. Le réalisateur français Mathieu KASSOVITZ (né en 1967) a donné sa vision dans le film L'Ordre et la Morale (2011). De son côté, le jeune slameur kanak Paul WAMO (né en 1981) milite, dans ses textes, pour une indépendance raisonnée, responsable et réfléchie.
Aujourd'hui, la Nouvelle-Calédonie est en chemin pour gagner son indépendance, un vote sera organisé entre 2014 et 2018 pour qu'elle obtienne son autodétermination.
Mise à jour 4 novembre 2018 : Suite au référendum prévu de longue date, la Nouvelle-Calédonie vient de voter non à l'indépendance à 56,4% pour une participation de plus de 80%.
N. THIMON
Commentaires
O-)
...Très intéressant , bonne continuation pour la suite de votre blog!
Jean@Jean :Je vous remercie. En espérant que le reste vous plaira tout autant.
N.T.