août 4

"Il n'est pas noir..."

Il n’est pas noir, il n’est pas rouge,

L’enfer, c’est plutôt gris.

C’est un manteau qui n’tient pas chaud

Et qui rappelle le paradis.

 

 

 

Entre les jeans et les costumes

Les têtes rases, les cheveux longs

Y a des idées qui filent le rhume

Des trous du cul en pantalons.

 

 

 

Talons vernis, baskets pourries

J’ai le savoir, j’ai l’expérience.

Robes moirées, jupettes fleuries

On enlaidit, j’ai de l’avance.

 

 

 

Entre les slips et les caleçons

La politique et le social

J’ai un pétard, j’ai le bourdon

Et j’en ricane avec mon ch’val.

 

 

 

Entre polos et chemisettes

J’ai la jeunesse, c’est la mariée…

Des cols roulés, des pulls en V

J’ai la sagesse…Bonjour Pierrette !

 

 

 

J’ai fait des gosses :j’en suis content !

Je suis de gauche, j’vote RPR

Les fonctionnaires ? Des tire-au-flanc…

Bonjour mon père, monsieur le Maire…

 

 

 

Il n’est pas rose, il n’est pas noir,

L’enfer, c’est délavé

Des marionnettes y jouent leur vie

Dans cet imper qui prend la pluie.

"Mon sourire est si las..."

Je suis grave, ô ma mère, j’ai la tristesse des grands

Explorateurs qui ont trop voyagé et vu

Trop de cités pillées et ravagées devant

Leur avancée.

                        J’ai la gravité des malvenus.

 

 

Mon sourire est si las que mes cheveux blanchissent.

Mon œil a la sagesse désabusée des vieilles

Edentées qui ont beaucoup donné et glissent

Du regard devant la vanité, vomissant

                                                              Des merveilles.

 

 

Il n’y a guère que mes doigts qui vivent en se nouant.

Je serre un élastique que je roule et déroule

De manière mécanique, sans décider comment

Il deviendra quand je serai trop saoule.

"Il est parti demain..."

Il est parti demain ; il ne reviendra plus.

Quel sera mon futur baignant dans le passé ?

Désormais une vie frangée de « jamais plus »,

Un pas, encore un pas, dans une immensité ?

 

 

 

Demain je suis vivante, je traîne ma sépulture

Dans un désert de blanc où plus rien ne prend feu ;

La couleur s’est éteinte. Ma robe sera de bure,

Elle n’aura plus d’odeur dans cette éternité.

 

 

 

Un présent chancelant qui n’a pas d’avenir

Sa valeur intrinsèque est son poids en passé.

Pourquoi toujours marcher, pourquoi faut-il tenir

La chandelle à l’endroit ? Je la veux renversée.

 

 

 

Puisque je suis pérenne par rapport à sa vie,

J’inverse les étoiles et le cours des planètes

J’ai un pouvoir immense puisqu’à cette heure j’écris

Que demain j’ai dit non ; et j’ai pris ma baguette…

"Il y avait trois enfants..."

Il y avait trois enfants sur le bord de son cœur

Trois petits galopins qui respiraient par elle

Qui soutenaient sa traîne, étoiles d’or et dentelle

Tout sérieux dans leur rôle de rédempteurs des peurs.

 

 

 

Un amour de diamant, étincelant et dur

Une neige éternelle perdue sur un glacier

L’étendue d’une plaine qui va être moissonnée.

L’écart de ses deux bras pouvait contenir ça.

 

 

 

Une paroi de granit à l’unique fissure

L’immensité d’un ciel éclairé par la lune

Un océan de forces qui bat et qui rassure.

Elle leur était cela, elle était tout et Une.

 

 

 

Alors quand on m’a dit comment elle avait fait

Pour noyer les petits et étrangler le grand…

Quand on m’a raconté quels étaient ses méfaits

Avec deux autres enfants quelque quinze ans avant…

 

 

 

J’ai lavé les endroits où elle était passée

A la javel pure, jusque dedans la cour

Et puis j’ai secoué ce qu’elle avait touché

Afin que disparaisse toute poussière d’amour.

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