oct. 31

Soleil

 

A cheval sur ton dard une épée à la main

Comme un nouvel Icare je transperce les airs

Le soleil fait de l’œil et caresse mes seins

Mes cuisses sont humides, j’ai oublié la terre.

 

 

 

Je ne tomberai pas, je sais bien m’accrocher

Le soleil me sourit et me verse l’oubli

Des anges décapités pleuvent de tous côtés

Mais ils ne peuvent rien lorsque je cours vers Lui.

 

 

 

Sa chaleur m’éblouit, je n’ai plus de regard

Je ne suis pas phalène moi c’est plutôt l’hybris

Je sais que j’y arrive et qu’il n’est pas trop tard

J’y ai planté mon glaive quand j’ai entendu : « peace ».

"J'ai mis un pull trop grand..."

J’ai mis un pull trop grand pour mes frêles épaules

Bien trop long, bien trop large, mais c’était un cadeau

Que je trouvais parfait. Tricotez, Marie-Paule,

En point mousse, en marine, en amour bien au chaud.

 

 

 

Il avait la souplesse des vagues de mes étés

Le côté non poli de mes jours de sauvage

Et l’odeur d’un grand large que j’ai toujours cherché,

Quelque chose d’un noyé au-dessous du naufrage.

 

 

 

A force de m’y complaire, d’y rentrer jusqu’aux pieds

D’y enfoncer mon nez même au cœur de l’été

Mon pull est devenu un vieux tronc d’olivier

Au pied duquel, démence, je me suis échouée.

 

 

 

Quand les branches ont fleuri j’ai reçu en échange

Un tout petit bout d’homme qui s’est blotti au chaud

Sous le pull, contre moi, contre le tronc étrange.

Un deuxième, un troisième, un énième marmot…

 

 

 

Ils sont tous venus sous le pull avec moi.

Mais les branches grossissent et les rameaux grandissent

Et des lambeaux de laine s’effilochent et pourrissent

Au sommet du vieil arbre qui se meurt sans moi.

 

 

 

Il me reste le rouge pour mes larges épaules

Le choix de l’acrylique fabriqué en Corée.
Il n’y aura plus d’amour ma chère Marie-Paule,

Et un pull étriqué sera mon bouclier.


 

août 4

Parler d'L

 

 

 

Elle a souvent rêvé de défier tous ceux-là

-Elle a connu la lutte et le sang sur ses mains-

D’être celle qui jamais ne perdit et gagna

D’être enfin la première à dire Non à demain.

 

 

 

Mais celle qui connaissait le sourire des combats

Le goût du sang séché et l’odeur des grands rois

Un matin a dit non à sa belle cuirasse

Au matin a dit « passe. Il n’y a plus de chasse. »

 

 

 

Ce fut le soir, je crois, qu’agenouillée et nue

Devant le grand Tiba, à côté de l’entrée,

Elle a baissé la tête pour dire : « je n’en puis plus »

Et ses bras sont tombés devant cett’ vérité.

 

 

 

« Ce soir,

Je suis prête à subir les tout derniers outrages

Vaincue par leur présence maint’nant qu’ils ne sont plus

Regarde, mes mains, mon œil éteint t’encouragent

Mon glaive ne tient plus droit, j’ai l’orgueil abattu. »

"Elles ont vidé le fil..."

Elles ont vidé le fil qui attachait ma vie.

Je pouvais m’éloigner ou bien le remonter

J’étais rivée à lui, il était ma survie

Mes hiers-aujourd’hui, mon seul laissez-passer.

 

 

 

Il a fallu du temps pour qu’il se coupe enfin

Cesse de me nourrir et me laisse échouée

Dans cet ailleurs aride que je ne voyais point

Au milieu de ces folles au sourire édenté.

 

 

 

C’est mon crâne sans poils et cette main ridée

Lourde comme un gibet ne saisit que du vide,

Je n’ai rien à broyer sinon des fleurs fanées.

 

 

 

Quand je ferme les yeux parfois je sens le fil

J’ai son goût dans la bouche avec le manque en plus

J’accouche d’un squelette en fixant mon nombril.