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Les étoiles sont ternes

Une nouvelle de Noémie GRENETTE, 1re 2

Bonne lecture.

 

Les étoiles sont ternes.

 

J’ai longtemps rêvé d’un fil rouge qui nous reliait. Alors je regarde par la fenêtre et j’imagine ce lien. Il est rouge, on ne voit que lui dans la ruelle. Il est lumineux, un peu. 

Notre rue est étroite, sombre, les géants de briques nous privent du soleil. Il sont grands jusqu’à Neptune, et même depuis ma fenêtre je ne peux voir ni le sol ni le ciel. Mais je te vois toi, dans le géant d’en face. Ta fenêtre donne sur la mienne, et le soir, alors que la ville nous suit dans les ténèbres, je te vois allumer ta lumière violette.

Chaque soir, j’admire tes lampes de fête et je rêve qu’un jour ce violet me caresse la joue comme il caresse la tienne. Je sais que tu joues à des jeux et que tu lis, je vois ta console et ton impressionnante bibliothèque. Je vois aussi ton lit, collé à ta fenêtre. Sais-tu que je te regarde t’endormir? Tu as un lit pour deux, je pourrais m’y glisser. Sous la couette, nous deux...et la lumière violette n’aurait d’égale que tes caresses. J’y pense souvent : comme nous pourrions nous aimer à en perdre le souffle dans le grand violet. Et quand tu te lèves et que tu éteins ta console, que tu te prépares à te coucher, je détourne le regard, par respect. 

Ton corps est un bijou, et je ne peux me l’octroyer, alors je me dois de le préserver, de le respecter. Je sais que je ne t’aurai jamais. Tu es une personne qu’il faut mériter, et ce n’est pas depuis ma fenêtre, entre les reflets, que tu pourras me remarquer. Je pose ma main sur le verre, et je vois un rond de buée s’y dessiner. Ma gorge est nouée, je retiens mes larmes de perler, je te regarde t’installer dans ton lit. 

La lumière violette disparaît. Je ne suis plus que seule dans le noir, à pleurer comme chaque soir. La lumière est éteinte et le fil coupé et d’un coup, je peux voir le sol de ma ruelle crasse, et je peux voir les étoiles qui brillent. 

 

Elles paraissent si ternes à côté de mon rouge ou de notre violet.