"Je ne suis pas fragile !"406

Peu à peu, je fis place à quelqu'un d'autre dans ma vie: l'anorexie...

Une larme coula le long de ma joue et alla se loger sur le drap blanc qui recouvrait son corps inanimé. La seule personne qui me comprenait et qui m'aidait...Je pleurais maintenant depuis trois heures et mes yeux commençaient à me brûler, mais peu m'importait. J'avais perdu mon seul repère, ma seule confidente, ma mère...

Lorsque le médecin me réveilla, je pensais que tout ce qui c'était passé n'était qu'un cauchemar, mais son discours me ramena vite à la réalité...

« Toutes mes condoléances pour votre mère Mlle Liya, m'annonça-t-il. Je peux vous fournir le compte-rendu maintenant, mais je pense que vous avez grand besoin de sommeil.»

Pas bien réveillée, je bredouillai quelques mots incompréhensibles mais le médecin répondit parfaitement à ma question:

«Il serait plus convenable de retourner chez vous, vous ne pourrez pas rester éternellement.

-Je n'ai...plus de chez moi..., rétorquai-je en réprimant difficilement mes larmes.

-Vous avez un oncle, répondit le médecin impassible.

-Oui, mais...

-Vous avez une tan...

Je plongeai mon visage dans mes mains. Pourquoi fallait-il que ça tombe sur moi? Pourquoi moi ? Pourquoi Elle ? Pourrai-je vivre avec Elle ?... Non ! C'est impossible ! Je ne pourrais pas!

J'entendis une porte claquer et je sombrai dans un sommeil agité.

Maman...

Lorsque j'ouvris les yeux, je vis une silhouette s'avancer vers moi quelque chose dans la main.

J'étais dans un champ d'herbes hautes, parsemé de fleurs sauvages. La silhouette se rapprocha et je pus la distinguer.

«Mam...maman, c'est toi ? je couru vers elle en tendant les bras.

-Il ne faut jamais désespérer ma Choupette, me rassura-t-elle en m'embrassant sur le front, je suis toujours là pour toi et je le serai à jamais...

-Je te croyais morte.

-Je suis morte, Naure .

-Comment ça ?

-Tu l'as vu par toi-même, je suis morte.

-Mais, tu es là, devant moi.

-Non, répondit-elle d'un ton froid.»

Soudain, son visage se brouilla et des yeux bleus apparurent. La voix de ma tante retentit dans mon esprit.

«Je sais tout, Naure, et tu sais pourquoi ? Parce que je suis à l'origine de tes malheurs!

-NON! hurlai-je.

-Tu le sais bien, voyons.

-ARRÊTE !

-C'est moi qui ai tué ta mère

-LAISSE MOI!

-J'ai pris un malin plaisir à le faire.

-ARRÊTE, s'il te plaît...»

Je relevai les yeux vers elle pour découvrir un sourire sadique.

«Pourquoi...? lui demandai-je d'une voix brisée.

-De la pure vengeance.

-Qu'ai-je fait pour mériter cela?»

Le démon en face de moi éclata d'un rire faux.

«Qu'est-ce que tu as fait?! QU'EST-CE QUE TU AS FAIT ?! Je vais te le dire...»

 

 

«Naure, il faut que tu te réveilles.»

Je senti des bras m'entourer et mon corps quitter le sol. Quelqu'un me portait mais encore trop épuisée, je ne pouvais pas distinguer son visage. Un souffle glacial me caressa la joue puis je fus entièrement plongée dans le froid. Après un court trajet en voiture, je reconnus la douceur des draps propres, et je renonçai à toute tentative d'ouvrir les yeux. Je ne me senti pas repartir dans un énième sommeil de plomb.

Je m'éveillai enfin avec l'impression d'avoir dormi cent ans. Je me sentais vide, ni joyeuse ni triste. La lumière du jour filtrait à travers les volets de la chambre où j'étais, je pus voir vaguement le lieu où j'avais dormi. C'était la chambre d'amis de la maison de mon oncle, je connaissais cet endroit en détails et c'est ici que je resterai jusqu'à mes 18 ans maintenant que mes parents sont partis. Rien que d'y penser, je senti un nœud se nouer dans ma gorge. En me dirigeant vers la salle de bain, j'entendis des voix familières au rez-de-chaussée:

«Ne compte pas sur moi pour l'aimer comme ma fille !

-Je le savais...»

Je m'engouffrai dans la salle de bain et tombai face à face avec mon visage. Dans le miroir, je vis une jeune fille pâle et fatiguée. Mes yeux sombres contrastaient parfaitement avec mon teint et mes cheveux longs entièrement blancs.

Je pensais que ma fine bouche rosée ne dévoilerait plus jamais mes dents blanches. Cependant, quand mon regard tomba sur ma fine silhouette, je crus voir une esquisse de sourire de satisfaction, durant une milliseconde, sur mes lèvres. Ce sourire disparut aussitôt lorsqu'un éclat de voix retentit de la cuisine.

«Non mais ça ne va pas ! Elle va rester combien de temps ici ?hurla ma tante.

-Jusqu’à ces 18 ans...répondit mon oncle d'une voix hésitante.

-JE NE LA SUPPORTERAI PAS DEUX ANS !

-EH BIEN TU PEUX FAIRE UN EFFORT PEUT-ÊTRE, TU ES UN PEU MATURE, NON ?!

-TU VOIS CE QU'ELLE TE FAIT DIRE, CETTE FILLE EST UN DÉMON!

-ELLE TE REND FOLLE TU VAS ME DIRE !

-OUI!

-Non tu l'es de nature.»

Un bruit de claque se fit entendre et c'est à ce moment que je décidai de faire mon apparition dans la cuisine. Je fixai ma tante d'un air de défi pendant que mon oncle me prenait dans ses bras.

«Tu nous a fait une de ces frayeurs. Tu vas mieux ? me pressa-t-il.

-Oui ça va, merci.

-Tu veux déjeuner ? me demanda ce dernier.

-Non merci, je n'ai pas très faim.»

Ma tante me jaugea d'un œil mauvais. Je commençai à remonter quand mon oncle m'interpella:

«Si ça ne te dérange pas je pense que c'est important qu'on en parle.

-Je...oui, je pense aussi.

-Alors, j'ai entendu dire qu'elle était décédée à cause d'un poison mortel, affirma ma tante.

-Non, on ne sait pas de quoi elle morte, répliquai-je comme si sa phrase était tout à fait normal.

-Oui je me demandai juste...je ne sais pas.

-En tout cas tu es ici chez toi, me précisa mon oncle sous l’air offensé de sa compagne.

-Merci.»

En me retrouvant seule, je repensai à cette discussion. Soudain, une pierre invisible me tomba sur la tête, cette phrase...: «Alors, j'ai entendu dire qu'elle était décédée à cause d'un poison mortel.» Elle le savait, car c'est de sa faute. Je revis mon rêve, elle l'avait dit. Non c'est impossible, ce n’était qu'un rêve. Elle a juste émis une hypothèse. L'angoisse commençait à monter. Mais la discussion précédente me fit pleurer de plus belle. J'avais mal, j'avais peur, j'eus des nausées et ma gorge se serra encore plus. Une douche, j'avais besoin d'une douche pour me laver de toute frayeur et de toute tristesse.

«J'ai trop pleuré, je ne suis pas fragile», me persuadai-je

 

 

Je ne suis pas fragile!

 

Les semaines passèrent, jusqu'à un soir où, je faisais une insomnie comme souvent, en allant aux toilettes j'entendis une discussion qui avait l'air sérieuse au rez-de-chaussée entre mon oncle et ma tante:

«Tu penses qu'elle va s'en douter, interrogea la voix féminine.

-Je ne sais pas...», répondit l'autre personne.

Le dialogue se termina ainsi et les lumières s'éteignirent dans la maison. Je ne sus quoi penser. D'un coup, j'eus mal, très mal, partout et longtemps. Je regagnai ma chambre en sueur et la douleur cessa. Puis, je m'endormis avec cette désagréable sensation d'incompréhension.

 

Le 25 juillet 2018, mon meilleur ami Siaam me donna rendez-vous au café où on avait l'habitude de se voir. Ce dernier n'était pas au courant pour ma mère et je comptais sur cette occasion pour lui en parler et me confier à lui. J'en avais besoin. Je quittai chez moi pour me rendre sur le lieu de rendez-vous lorsque mon regard tomba sur un papier abandonné au sol. Je le ramassai et je lu:

«Ne lui dit rien, elle ne doit pas savoir!»

De peur, je jetai le papier comme si celui-ci m'avait brûlé et je décidai de l'oublier. Cependant, mes efforts étaient vains car plus je cherchais à effacer de ma mémoire ces mots plus ils revenaient dans mon esprit. Je savais pertinemment qui avait gravé ces mots : Elle.

Quand je retrouvai Siaam, je me laissai tombé dans ses bras et me mis à pleurer comme une enfant. Après m'être calmée, je lui racontai tout, du début à la fin, en détails. Il fut un ami génial, à l'écoute et attentionné. J'avais juste besoin de ce réconfort. L'après-midi passa à une vitesse hallucinante et il fut bientôt l'heure de rentrer chez moi. La séparation fut douloureuse et lorsque je le perdis de vue tous mes soucis, toutes mes craintes et tous mes doutes me retombèrent dessus et un fardeau d'une tonne se posa sur mes frêles épaules.

 

Je ne suis pas fragile!

 

Des discussions étranges, à propos d'une personne qui ne devait rien savoir, étaient de plus en plus fréquentes entre mes deux tuteurs légaux. Je savais de qui ils parlaient même si j'essayais de paraître naïve. En revanche, ces échanges ne me préoccupaient pas grandement, en tout cas moins qu'un nouveau souci : la chute magistral de mon poids. Avec la peau sur les os, je pesais 45 kilogrammes pour un mètre soixante-neuf à la place de 55 kilogramme pour un mètre soixante-dix.

 

Je ne suis pas fragile!

 

«C'était une erreur, je n'ai pas fait exprès! rétorqua ma tante, après une phrase inaudible prononcée par mon oncle.

- C'est impossible de ne pas avoir fait exprès, tu sais ce que c'est du poison ?!

-Oui je le sais...»

Encore un échange inachevé. Pour ma part, je ne m'en souciai plus tellement après un commentaire que ma tante m'a fait sur mon poids pourtant normal. Pourquoi m'a-t-elle donc dit ça si c'est faux? Une seule réponse s'offrait à moi: c'est la vérité. J'étais trop grosse! Alors je pris la décision de ne plus manger qu'une feuille de salade par jour. Mes tuteurs légaux ne voyaient aucun changement car ils ne me remarquaient plus et mon meilleur ami Siaam était en Thaïlande. Peu à peu, je fis place à quelqu'un d'autre dans ma vie: l’anorexie. Je passai de 45 à 40 à 35 à 30 kilogrammes pour un mètre soixante-cinq. Siaam rentra de Thaïlande et me donna rendez-vous comme au bon vieux temps, cependant tout était différent. Quand je me pointai devant lui, il n'en crut pas ses yeux et m'emmena d'urgence à l’hôpital. Durant le trajet, ma courte vie me repassa devant les yeux et une évidence se créait, petit à petit : Ma tante avait assassiné ma mère au poison. On me posa sur un lit et je fus hospitalisée immédiatement. Malheureusement, un combat bien trop compliqué m'attendait et je décidai, devant mon oncle et ma tante dans ce lit blanc, que mon destin serait le même que ma mère et mon père juste avant elle. Je lâchai prise et au moment où je sombrai pour de bon, ma tante se pencha au-dessus de moi et m'embrassa le front comme ma mère avait l'habitude de le faire. Ce fut mon dernier bon souvenir.

 

Je suis fragile...

 

 

 

 

Morale: peu importe votre physique et votre style, peu importe les critiques que vous subissez, gardez la tête haute et passez outre parce que le jugement des gens ne doit jamais avoir de répercussions sur vos goûts et sur votre manière de vous voir.

Une larme coula le long de ma joue et alla se loger sur le drap blanc qui recouvrait son corps inanimé. La seule personne qui me comprenait et qui m'aidait...Je pleurais maintenant depuis trois heures et mes yeux commençaient à me brûler, mais peu m'importait. J'avais perdu mon seul repère, ma seule confidente, ma mère...

Lorsque le médecin me réveilla, je pensais que tout ce qui c'était passé n'était qu'un cauchemar, mais son discours me ramena vite à la réalité...

« Toutes mes condoléances pour votre mère Mlle Liya, m'annonça-t-il. Je peux vous fournir le compte-rendu maintenant, mais je pense que vous avez grand besoin de sommeil.»

Pas bien réveillée, je bredouillai quelques mots incompréhensibles mais le médecin répondit parfaitement à ma question:

«Il serait plus convenable de retourner chez vous, vous ne pourrez pas rester éternellement.

-Je n'ai...plus de chez moi..., rétorquai-je en réprimant difficilement mes larmes.

-Vous avez un oncle, répondit le médecin impassible.

-Oui, mais...

-Vous avez une tan...

Je plongeai mon visage dans mes mains. Pourquoi fallait-il que ça tombe sur moi? Pourquoi moi ? Pourquoi Elle ? Pourrai-je vivre avec Elle ?... Non ! C'est impossible ! Je ne pourrais pas!

J'entendis une porte claquer et je sombrai dans un sommeil agité.

Maman...

Lorsque j'ouvris les yeux, je vis une silhouette s'avancer vers moi quelque chose dans la main.

J'étais dans un champ d'herbes hautes, parsemé de fleurs sauvages. La silhouette se rapprocha et je pus la distinguer.

«Mam...maman, c'est toi ? je couru vers elle en tendant les bras.

-Il ne faut jamais désespérer ma Choupette, me rassura-t-elle en m'embrassant sur le front, je suis toujours là pour toi et je le serai à jamais...

-Je te croyais morte.

-Je suis morte, Naure .

-Comment ça ?

-Tu l'as vu par toi-même, je suis morte.

-Mais, tu es là, devant moi.

-Non, répondit-elle d'un ton froid.»

Soudain, son visage se brouilla et des yeux bleus apparurent. La voix de ma tante retentit dans mon esprit.

«Je sais tout, Naure, et tu sais pourquoi ? Parce que je suis à l'origine de tes malheurs!

-NON! hurlai-je.

-Tu le sais bien, voyons.

-ARRÊTE !

-C'est moi qui ai tué ta mère

-LAISSE MOI!

-J'ai pris un malin plaisir à le faire.

-ARRÊTE, s'il te plaît...»

Je relevai les yeux vers elle pour découvrir un sourire sadique.

«Pourquoi...? lui demandai-je d'une voix brisée.

-De la pure vengeance.

-Qu'ai-je fait pour mériter cela?»

Le démon en face de moi éclata d'un rire faux.

«Qu'est-ce que tu as fait?! QU'EST-CE QUE TU AS FAIT ?! Je vais te le dire...»

 

 

«Naure, il faut que tu te réveilles.»

Je senti des bras m'entourer et mon corps quitter le sol. Quelqu'un me portait mais encore trop épuisée, je ne pouvais pas distinguer son visage. Un souffle glacial me caressa la joue puis je fus entièrement plongée dans le froid. Après un court trajet en voiture, je reconnus la douceur des draps propres, et je renonçai à toute tentative d'ouvrir les yeux. Je ne me senti pas repartir dans un énième sommeil de plomb.

Je m'éveillai enfin avec l'impression d'avoir dormi cent ans. Je me sentais vide, ni joyeuse ni triste. La lumière du jour filtrait à travers les volets de la chambre où j'étais, je pus voir vaguement le lieu où j'avais dormi. C'était la chambre d'amis de la maison de mon oncle, je connaissais cet endroit en détails et c'est ici que je resterai jusqu'à mes 18 ans maintenant que mes parents sont partis. Rien que d'y penser, je senti un nœud se nouer dans ma gorge. En me dirigeant vers la salle de bain, j'entendis des voix familières au rez-de-chaussée:

«Ne compte pas sur moi pour l'aimer comme ma fille !

-Je le savais...»

Je m'engouffrai dans la salle de bain et tombai face à face avec mon visage. Dans le miroir, je vis une jeune fille pâle et fatiguée. Mes yeux sombres contrastaient parfaitement avec mon teint et mes cheveux longs entièrement blancs.

Je pensais que ma fine bouche rosée ne dévoilerait plus jamais mes dents blanches. Cependant, quand mon regard tomba sur ma fine silhouette, je crus voir une esquisse de sourire de satisfaction, durant une milliseconde, sur mes lèvres. Ce sourire disparut aussitôt lorsqu'un éclat de voix retentit de la cuisine.

«Non mais ça ne va pas ! Elle va rester combien de temps ici ?hurla ma tante.

-Jusqu’à ces 18 ans...répondit mon oncle d'une voix hésitante.

-JE NE LA SUPPORTERAI PAS DEUX ANS !

-EH BIEN TU PEUX FAIRE UN EFFORT PEUT-ÊTRE, TU ES UN PEU MATURE, NON ?!

-TU VOIS CE QU'ELLE TE FAIT DIRE, CETTE FILLE EST UN DÉMON!

-ELLE TE REND FOLLE TU VAS ME DIRE !

-OUI!

-Non tu l'es de nature.»

Un bruit de claque se fit entendre et c'est à ce moment que je décidai de faire mon apparition dans la cuisine. Je fixai ma tante d'un air de défi pendant que mon oncle me prenait dans ses bras.

«Tu nous a fait une de ces frayeurs. Tu vas mieux ? me pressa-t-il.

-Oui ça va, merci.

-Tu veux déjeuner ? me demanda ce dernier.

-Non merci, je n'ai pas très faim.»

Ma tante me jaugea d'un œil mauvais. Je commençai à remonter quand mon oncle m'interpella:

«Si ça ne te dérange pas je pense que c'est important qu'on en parle.

-Je...oui, je pense aussi.

-Alors, j'ai entendu dire qu'elle était décédée à cause d'un poison mortel, affirma ma tante.

-Non, on ne sait pas de quoi elle morte, répliquai-je comme si sa phrase était tout à fait normal.

-Oui je me demandai juste...je ne sais pas.

-En tout cas tu es ici chez toi, me précisa mon oncle sous l’air offensé de sa compagne.

-Merci.»

En me retrouvant seule, je repensai à cette discussion. Soudain, une pierre invisible me tomba sur la tête, cette phrase...: «Alors, j'ai entendu dire qu'elle était décédée à cause d'un poison mortel.» Elle le savait, car c'est de sa faute. Je revis mon rêve, elle l'avait dit. Non c'est impossible, ce n’était qu'un rêve. Elle a juste émis une hypothèse. L'angoisse commençait à monter. Mais la discussion précédente me fit pleurer de plus belle. J'avais mal, j'avais peur, j'eus des nausées et ma gorge se serra encore plus. Une douche, j'avais besoin d'une douche pour me laver de toute frayeur et de toute tristesse.

«J'ai trop pleuré, je ne suis pas fragile», me persuadai-je

 

 

Je ne suis pas fragile!

 

Les semaines passèrent, jusqu'à un soir où, je faisais une insomnie comme souvent, en allant aux toilettes j'entendis une discussion qui avait l'air sérieuse au rez-de-chaussée entre mon oncle et ma tante:

«Tu penses qu'elle va s'en douter, interrogea la voix féminine.

-Je ne sais pas...», répondit l'autre personne.

Le dialogue se termina ainsi et les lumières s'éteignirent dans la maison. Je ne sus quoi penser. D'un coup, j'eus mal, très mal, partout et longtemps. Je regagnai ma chambre en sueur et la douleur cessa. Puis, je m'endormis avec cette désagréable sensation d'incompréhension.

 

Le 25 juillet 2018, mon meilleur ami Siaam me donna rendez-vous au café où on avait l'habitude de se voir. Ce dernier n'était pas au courant pour ma mère et je comptais sur cette occasion pour lui en parler et me confier à lui. J'en avais besoin. Je quittai chez moi pour me rendre sur le lieu de rendez-vous lorsque mon regard tomba sur un papier abandonné au sol. Je le ramassai et je lu:

«Ne lui dit rien, elle ne doit pas savoir!»

De peur, je jetai le papier comme si celui-ci m'avait brûlé et je décidai de l'oublier. Cependant, mes efforts étaient vains car plus je cherchais à effacer de ma mémoire ces mots plus ils revenaient dans mon esprit. Je savais pertinemment qui avait gravé ces mots : Elle.

Quand je retrouvai Siaam, je me laissai tombé dans ses bras et me mis à pleurer comme une enfant. Après m'être calmée, je lui racontai tout, du début à la fin, en détails. Il fut un ami génial, à l'écoute et attentionné. J'avais juste besoin de ce réconfort. L'après-midi passa à une vitesse hallucinante et il fut bientôt l'heure de rentrer chez moi. La séparation fut douloureuse et lorsque je le perdis de vue tous mes soucis, toutes mes craintes et tous mes doutes me retombèrent dessus et un fardeau d'une tonne se posa sur mes frêles épaules.

 

Je ne suis pas fragile!

 

Des discussions étranges, à propos d'une personne qui ne devait rien savoir, étaient de plus en plus fréquentes entre mes deux tuteurs légaux. Je savais de qui ils parlaient même si j'essayais de paraître naïve. En revanche, ces échanges ne me préoccupaient pas grandement, en tout cas moins qu'un nouveau souci : la chute magistral de mon poids. Avec la peau sur les os, je pesais 45 kilogrammes pour un mètre soixante-neuf à la place de 55 kilogramme pour un mètre soixante-dix.

 

Je ne suis pas fragile!

 

«C'était une erreur, je n'ai pas fait exprès! rétorqua ma tante, après une phrase inaudible prononcée par mon oncle.

- C'est impossible de ne pas avoir fait exprès, tu sais ce que c'est du poison ?!

-Oui je le sais...»

Encore un échange inachevé. Pour ma part, je ne m'en souciai plus tellement après un commentaire que ma tante m'a fait sur mon poids pourtant normal. Pourquoi m'a-t-elle donc dit ça si c'est faux? Une seule réponse s'offrait à moi: c'est la vérité. J'étais trop grosse! Alors je pris la décision de ne plus manger qu'une feuille de salade par jour. Mes tuteurs légaux ne voyaient aucun changement car ils ne me remarquaient plus et mon meilleur ami Siaam était en Thaïlande. Peu à peu, je fis place à quelqu'un d'autre dans ma vie: l'anorexie. Je passai de 45 à 40 à 35 à 30 kilogrammes pour un mètre soixante-cinq. Siaam rentra de Thaïlande et me donna rendez-vous comme au bon vieux temps, cependant tout était différent. Quand je me pointai devant lui, il n'en crut pas ses yeux et m'emmena d'urgence à l’hôpital. Durant le trajet, ma courte vie me repassa devant les yeux et une évidence se créait, petit à petit : Ma tante avait assassiné ma mère au poison. On me posa sur un lit et je fus hospitalisée immédiatement. Malheureusement, un combat bien trop compliqué m'attendait et je décidai, devant mon oncle et ma tante dans ce lit blanc, que mon destin serait le même que ma mère et mon père juste avant elle. Je lâchai prise et au moment où je sombrai pour de bon, ma tante se pencha au-dessus de moi et m'embrassa le front comme ma mère avait l'habitude de le faire. Ce fut mon dernier bon souvenir.

 

Je suis fragile...

 

 

 

 

Commentaires

1. Le 14 janvier 2019, 16:04 par Clémence et Malia 406

Génial ! C'est magnifique bravo à l'auteur.

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