L'évidence (Minata)
Par Marion VAILLANT (Collège de la Clef de Saint-Pierre, Elancourt (78)) le 25 mars 2014, 11:13 - Concours Etonnants Voyageurs - Lien permanent
L’évidence
Et elle partit, tenant sa fille dans ses bras à la recherche, folle mais pas désespéré, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée de chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre (...)
Émeline voyait sa tendre et jolie petite fille, Éva, avec de scintillantes larmes qui lui coulaient le long de ses joues roses. Des larmes scintillantes, certes, mais qui ne signifiaient que tristesse. Émeline ne savait où aller, il n'y avait que désastre autour d'elle: sa maison en feu, sa petite fille en larme, son chère époux au front, elle ne sait s’il est en vie ou non... Que faire? Pour elle, il était évident qu'elle et sa fille ne retrouveront jamais cette simple poupée, mais qui ne voudrait pas faire le bonheur de sa fille? Alors elle s'en alla à cette recherche peut-être sans fin.
Émeline marchait continuellement. Des heures et des heures s'étaient écoulées déjà et elle ne savait pas où elle était. Éva ne cessait de répéter à sa pauvre mère: «Maman, quand est-ce qu'ont arrive? Je suis épuisée!». Mais comment peut-elle expliquer à une enfant d'à peine cinq ans qu'elle ne sait pas où elles sont? Où vont-elles loger? Où vont-elles survivre? Cela est bien dur à expliquer à une enfant. Alors Émeline ne fit que dire: «Bientôt, mon ange, bientôt». La nuit commençait à tomber, Éva s'endormit, Émeline était épuisée et perdait de plus en plus d'espoir, elle se mit à pleurer, elle savait très bien qu'elles étaient perdues, et cela l’attristait vraiment car elle ne voulait pas décevoir sa fille.
Mais,au bout d'un moment, elle aperçut une lumière jaunâtre au loin. Elle s'en approcha et découvrit une auberge, elle se nommait «AUBERGE VILIET». Elle resta immobile un certain temps, sans savoir si elle devait y rentrer ou non. Après quelques minutes de réflexion, elle y entra et vit une grande foule: des femmes dansaient avec des hommes ou servaient, et des hommes buvaient ou dansaient. La musique était si forte qu'Éva fut réveillée.
-« Maman?
- Oui ma chérie, répondit Émeline.
- Sommes-nous chez tante Suzanne? Ça sent la quiche ici!
-Non, non!, ria Émeline, Nous sommes dans une auberge.
-Ooh, j'aurais aimé être chez tant Suzanne…
-La vie n'est pas facile ma belle...»
Une homme assez grand et fort, au regard dur, vint les voir.
-« Qu'est ce qui vous amène ici madame? dit-il curieusement.
-Je…
-On cherche ma poupée! répliqua Éva.
- Il n'y a pas de poupée ici ma p'tite fille!» dit un groupe d'ivrogne en riant.
Émeline, outragée, ne dit plus un mot puis repris.
-« Excusez moi, mais où sommes-nous?
-On est à Briey ma p’tite dame! Une petite ville juste à côté de Verdun, vous connaissez? répondit l’homme assez fort.
- Oui, je connais, j’y vis même, enfin j’y vivais.. Pourrai-je loger quelques temps dans votre auberge?
-Quel est votre nom et celui de votre fille?
-Je me nomme Émeline, et ma fille Éva, et vous? Mais vous n’avez pas répondu à ma question .
-Robert, Robert Viliet, Oh, excusez moi, mais cela est assez compliqué.
-Allons Robinou! Hébergeons les quelques temps, ça nous fera de la compagnie! dit vivement une femme. Je me nomme Corinne Viliet, je suis la femme de Robert.
-Enchantée Madame et Monsieur Viliet
-Bon, Ok, c’est d'accord… repris Robert. Corinne vous emmènera en haut pour vous montrer votre chambre.»
De suite, Émeline et Éva suivirent Corinne qui leur présenta la chambre dans laquelle elles allaient loger.
-Voilà votre chambre! Installez-vous bien puis descendez dîner, le temps qu’on se débarrasse de ces ivrogne! Ah ah.
-Merci, merci beaucoup, répondit Émeline.»
La mère et la fille se reposèrent un instant, réfléchissant à ce qu’elles allaient devenir, ou faire. C’est une simple poupée de chiffon qui a entraîné beaucoup de choses en même temps… Émeline se demanda pourquoi sa fille tenait tant à cette poupée. Son père lui avait offert le jour où il partait au front, elle se dit que peut être cette poupée comptait beaucoup pour sa fille. Alors elle n’y renonça pas, et se dit que dès demain elle repartirait.
Elle descendit en bas avec Éva et s’installa à table.
-Alors Émeline, qu’est ce qui vous amène ici? dit Corinne.
-Je suis à la recherche de la poupée de ma fille, nous venons de Verdun, nous sommes épuisées, j’ignorais que j'avais marché si longtemps…
-Encore cette histoire de poupée?! ria Robert.
-Oh je vois! dit Corinne, demain matin ont ira la chercher!
-Oui, justement, je voulais vous parler de cela, je pars demain, seule, avec ma fille
-A pied? Non, ma femme et moi vous accompagnerons! Dit Robert
-Très bonne idée! On fermera l’auberge pendant quelques temps. dit Corinne.
-Merci beaucoup.»
Le lendemain matin, ils se réveillèrent très tôt pour partir à la recherche de la fameuse poupée.
A quatre dans une voiture, s’arrêtant de temps en temps pour chercher aux alentours, puis camper tout les soirs, mais Émeline sentait une présence, comme si quelqu’un la touchait, mais il n’y avait rien. Au bout d’une semaine, ils n’avaient rien trouvé, Éva était très mécontente, elle voulait encore et encore chercher cette poupée mais cela était impossible. Alors ils retournèrent à l’auberge.
-On aurait aimé retrouver cette poupée, vous pouvez en acheter une autre? dirent les aubergistes
-NON, NON, je n’en veux pas une autre! dit furieusement Éva.
-On retournera demain à Verdun. dit tristement Émeline.
-Robert vous y déposera demain. dit Corinne»
Elles passèrent la nuit tranquillement puis repartirent le jour suivant à Verdun. Cela n'enchantait pas du tout Émeline et Éva :que faire là-bas? Il n’y a que désastre… Mais cette courageuse mère ne perdit pas espoir et voulut essayer de reconstruire sa vie, elle y pensa tout le long du trajet. Arrivées, Robert leur dit un dernier au revoir et partit en laissant Émeline et Éva seule au milieu de cette guerre.
Émeline ouvrit son sac, fouilla et vit la poupée, c’est là qu’elle se rappela qu’elle ne l’avait jamais donné à sa fille, mais qu’elle lui a dit qu’elle allait la lui donner.
Fin