Un jour de novembre 1916 (Axelle)

Un jour de novembre 1916

 

 

        Et elle partit, tenant sa fille dans  ses bras à la recherche, folle mais pas désespéré, d’un simple jouet d’enfant, d’une toute petite poupée en chiffon, dans ce monde cruel et obscur qu’était la guerre.

    

   Malgré le vacarme des canons qui faisait rougeoyer l’obscurité, Louise et Rose avancèrent timidement là où pouvait survenir à tout moment le prochain obus qui serait peut-être fatale. Le paysage était un décor d’apocalypse.

      

    Comment allaient-elles faire pour survivre ?

Louise sera dans sa main la petite main potelée de sa fille et décida de rejoindre la petite place du marché. Il fallait simplement convaincre Rose que sa poupée se trouvait là-bas.

Louise n’avait rien pu sauver lorsque l’obus avait fait exploser sa maison. Munis de leurs simples vêtements, et d’un petit bonnet pour Rose, elles avaient très froid et faim. Louise déposa quelques petites choses à manger dans ses poches et décida qu’il était temps de partir. Peut-être qu’en s’enfonçant dans les rues de la ville quelqu’un pourrait venir à leur secours.

Rose pleurait, elle avait soif, les gens criaient, couraient dans cette ville de Verdun réduite en cendres. La nuit allait bientôt tomber. Au loin, un grondement se faisait entendre pour se faire de plus en plus proche. Encore un obus qui tombait non loin de là…

 

    Louise pensait à son mari, le père de Rose, qui était parti à la guerre, il y avait déjà deux ans. Tout le monde pensait que la guerre n’allait pas durer et pourtant des jours, des semaines, des mois s’étaient écoulés sans qu’aucune nouvelle de son mari ne puisse parvenir jusqu'à elle.

Louise essayait de ne pas penser à la mort, elle ne pouvait s’imaginer son mari mort. Louise n’avait pu se résigner et n’avait rien dit à sa fille de don inquiétude.

Elle avait économisé, vendu tout ce qu’elle avait pu et avait acheté cette poupée, elle avait dit à Rose que son papa lui avait fait parvenir ce joli cadeau afin qu’elle pense toujours à son père…

Louise décida de se refugier dans l’église afin qu’elles soient à l’abri pour la nuit. Dehors il régnait un vent de panique. Rose était en larmes et réclamait toujours sa poupée. Louise faisait ce qu’elle pouvait pour la rassurer, elle s’avait que son mari était mort et qu’il ne reviendrait jamais. Rose semblait percevoir la détresse de sa mère.

-« Maman je veux ma poupée elle me fait penser à Papa, je veux ma poupée »

Elles finirent par trouver un endroit tranquille près de l’office. Non loin d’elle, des femmes toutes de noir vêtues, munies d’un chapelet, priaient. Rose s’était endormie dans les bras de sa mère qui s’efforçait de  rester éveillée mais bientôt elle s’effondra à son tour, emportée par la fatigue.

 

    Soudain une petite voix arriva près d’elle :

-« Maman, Maman réveille- toi, c’est moi Rose »

Louise regarda autour d’elle, cela faisait des années qu’elle était prostrée dans cette chambre d’hôpital où le temps, pour elle, c’était arrêté un jour de novembre 1916.