Hiérarchie et surveillance en Chine

La connaissance la plus utile à acquérir quand on travaille en Chine, c’est la connaissance de la hiérarchie et de « qui fait quoi » sinon, on ne parvient jamais à rien et on reste isolé et désœuvré…

En effet, les tâches sont très compartimentées, et sans doute un étranger en dirait-il autant dans une école en France mais, en France, je n’ai pas l’impression d’être aveugle…

Ainsi donc si vous demandez un renseignement concernant un domaine particulier (intendance, pédagogie, date de vacances, ressources…) à une personne qui n’est pas qualifiée, comme elle ne vous dira jamais qu’elle n’est pas qualifiée, votre requête restera lettre morte. Ce qu’il y a d’embarrassant, c’est que si, par contre, vous ne respectez pas la « chaîne de commandement », vous risquez de froisser et de vous mettre à dos tous ceux dont vous aurez ignoré l’existence sans le savoir.

Et puis il y a la contrainte du nombre et la conception de l’espace mental et géographique. Chaque salarié ne s’occupe que de son secteur d’activité et du temps présent donc, si vous cherchez quelqu’un qui n’est pas dans la sphère de la personne à qui vous demandez, les recherches risquent d’être longues ou fastidieuses, de même si la personne travaille dans un autre bâtiment, chaque « unité de travail » étant considérée comme un univers à part entière avec sa propre hiérarchie et ses propres coutumes, son propre calendrier…

Un autre argument récurrent est celui du temps, en effet mes collègues adorent paraître débordés, c’est très valorisant (comme envoyer des messages professionnels à minuit en France ?) et donc, que répondre à quelqu’un à qui vous demandez un « service » professionnel ou personnel et qui vous répond qu’il n’a pas le temps alors que c’est visiblement une fable ?

La méconnaissance du milieu d’accueil peut aussi rendre légèrement paranoïaque. En effet il y a parmi le personnel de l’école des personnes chargées de surveiller et de rendre compte. On dirait que ça ne dérange personne, mais il est troublant de voir débarquer dans votre classe une personne dont vous ne connaissez ni l’identité ni la fonction, qui « fait un tour », pose quelques questions, et repart… L’enquête sérieuse que vous mènerez par la suite vous apprendra que son rôle est de surveiller élèves et professeurs afin qu’ils ne dérogent pas aux règles (ne pas porter de tenue dénudée, ne pas montrer de film en classe, arriver en avance…). De la même façon, les cours que vous ferez seront supervisés par un(e) collègue chinois(e), et vous aurez la surprise de le/la voir venir assister à votre cours si vous lui avez annoncé que vous allez prononcer le mot « politique » en classe…

J’entends beaucoup de gens parler de la restriction des libertés publiques en France, c’est assez angoissant ; les chinois sont-ils trop nombreux pour qu’on leur permette des « fantaisies », ou bien les considère-t-on comme des enfants ?