Les Muses de Racine

 L'aînée, Alice, une belle brune insouciante et douce à la fois, ne s'en préoccupa pas davantage, alors que la cadette, Aria, frêle et quelque peu froussarde, se sentit mal à l'aise face à l'étrangeté de l'hôtel. Ce dernier avait un intérieur vintage, et était absolument désert outre la présence d'une femme à la réception. Une fois les clés obtenues, les sœurs empruntèrent le couloir menant aux chambres. Aria, avant de monter les escaliers, jeta un coup d'œil derrière elle et vit que la dame de la réception n'était plus là. Elles montèrent et allèrent au numéro de chambre que la clé indiquait. Une fois dans cette dernière, toutes deux s'assoupirent, trop épuisées pour déplier leurs bagages ou se soucier de l'aspect désagréable de la chambre. Les lits étaient durs comme du béton et la peinture s'écaillait sur les murs.  La seule fenêtre donnait peu de luminosité sur la chambre minuscule. De plus une odeur étrange planait dans la pièce.

             Après seulement une trentaine de minutes, Aria, qui avait le sommeil léger, se réveilla soudainement à cause de lumières étranges venant de l'extérieur. Elle voulut avoir prévenir sa sœur mais elle n'était plus dans la chambre. Aria se demanda où elle était passée. C’est à ce moment là qu’elle vit une maigre silhouette s’approcher vers elle, dans la pénombre. Mais ce n’était pas Alice ! Cette personne semblait squelettique et difforme, son dos était bossu et ses grands bras remuaient tels des tentacules. Mais elle avait surtout un air menaçant, puisqu’elle commençait à tendre ses mains vers la jeune femme. Cette dernière aperçut ses ongles crochus et ses doigts osseux qui se rapprochaient d’elle ! Terrifiée par cette apparition, elle poussa un cri en sautant du lit et s’enfuit de la chambre en courant.

              
           Une fois dans le couloir, Aria, affolée, chercha de l’aide, mais l’étage semblait inoccupé. Elle entendit alors des bruits perçants qui ressemblaient à des alarmes, mais d’où venaient-ils ? La jeune femme voulut descendre à la réception, mais elle avait pris le mauvais couloir, qui était sans issue ! Coincée, elle se retourna et vit que la chose l’avait suivie et s’approchait d’elle. Aria remarqua alors que ses yeux étaient aussi vides que des trous noirs, et qu’elle avait un visage pâle comme celui d’un cadavre. Puis elle aperçut que la créature portait un collier qui lui semblait familier. Puis un deuxième monstre apparut ! Aussi terrifiant que le premier, son corps était immense et décharné. Il s'avançait vers Aria d'un air menaçant. Elle semblait les entendre l'appeler mais ne pouvait comprendre les mots qu'ils prononçaient.

          Ne voyant pas d'autre solution, elle se jeta entre les deux monstres et les poussa pour courir jusqu'aux escaliers. Aria les descendit à toute allure pour rejoindre la réception. Mais une fois à l'étage, un autre monstre bloquait le passage. Prise au piège, elle n'eut pas d'autre choix que de descendre au sous-sol. Il y avait une chaufferie dans laquelle elle se précipita pour aller s'enfermer. Aria eut soudain  une migraine épouvantable à cause des mêmes sons de toute à l'heure. Les monstres l'avaient rattrapée et tambourinaient la porte en continuant de l'appeler d'un ton qui lui faisait froid dans le dos. La jeune femme voulait retrouver sa sœur, qui avait disparue. Terrifiée, Aria cherchait une sortie de secours quand vit un conduit d'aération, elle se faufila à l'intérieur. C'est à ce moment là qu'elle entendit les monstres entrer dans la salle. Aria, affolée, rampa à toute allure.  

       Tout à coup, elle tomba hors du conduit d'aération et s'écroula par terre. Elle était arrivée hors de l'hôtel. A bout de forces, elle ne pouvait plus se relever. Aria ne voyait plus rien; elle était coincée dans un cauchemar. Elle sentit des mains l'agripper et entendit des voix mais ne pouvait les comprendre. Elle crut entendre la voix d'Alice lors de son sommeil.

          Aria se réveilla soudain, allongée sur un lit d'hôpital. Alice était assise à son chevet. Quand elle remarqua qu'elle était réveillé, elle serra sa sœur dans ses bras, rassurée. Aria se souvenait vaguement de ce qui s'était passé.

« Pourquoi je me trouve ici ? demanda la plus jeune.

- Je suis partie faire un tour pendant que tu dormais dans la chambre. Plus tard en revenant, la femme de la réception m'a appris qu'il y avait une fuite de gaz dans les chambres, alors je suis tout de suite venue te chercher pendant que les secours arrivaient. Quand je suis entrée dans la chambre, tu t'es réveillée brusquement et tu t'es enfuie. Je ne comprenais pas, alors j'ai essayé de te rattraper, mais tu ne voulais pas t'arrêter. J'ai essayé de te parler, mais tu ne me répondais pas. Un secouriste est arrivé mais tu étais toujours autant affolée, nous t'avons même rattrapée à la chaufferie mais tu avais disparu. Les secours t'ont retrouvée derrière l'hôtel, tu avais fait un malaise à cause du gaz. Les pompiers t'ont ensuite emmenée aux urgences. »

Aria n'en revenait pas. Serait-ce le gaz qui provoquait ses hallucinations ? Elle  avait donc vu le secouriste et sa sœur en créatures affreuses après avoir respiré l'air toxique pendant son sommeil.  Mais quelque chose n'était pas logique. Alice était elle aussi dans la chambre lors de la fuite de gaz, et elle n'avait pas eu de telles hallucinations.

« Alice, pourquoi ne t'est-il rien arrivé ? »

Alice ne répondit pas. L'infirmière arriva, une seringue à la main, et un sourire au coin des lèvres.

Mathilde Gaubert et Loève Le Roy