Les Muses de Racine

Apeuré mais voulant tout de même en savoir plus, j’ouvris la porte sans prévenir. Les bruits cessèrent d’un coup et mon frère se retourna alors vers moi. Je lui demandai s’il n’avait pas entendu ces bruits étranges provenant de sa chambre, mais il semblait n’avoir rien entendu. Perplexe, je quittai sa chambre en m’excusant du dérangement, oubliant totalement le but premier de ma venue. 

Cela faisait maintenant une semaine qu’Arthur était rentré d’Irak. Lorsque nous étions ensemble, il semblait ailleurs et ne répondait pas à mes questions et chaque soir il partait pour ne rentrer qu’au petit matin. Mais où pouvait-il bien se rendre? Mon frère m’inquiétait, cette guerre l’avait changé et je le voyais bien! Alors qu’un soir le sommeil tardait à venir, je l’entendis descendre discrètement l’escalier et sortir de la maison. Je décidai de le suivre pour découvrir où il se rendait chaque nuit. Mais le brouillard était bien trop dense et je le perdis rapidement  de vue. Je rentrai alors chez moi, mais sur le chemin du retour, j’entendis à nouveau les hurlements ! Cette fois-ci ils venaient du vieux cimetière de la ville ! Mon sang se glaça. Je jetai alors un coup d’œil, tout en ne franchissant pas les portes du cimetière, histoire de laisser une distance entre moi et ces bruits effrayants. C’est alors que je distinguai une silhouette mi loup, mi humaine ! Elle semblait tout droit sortie d’un de ces films à vous faire faire des cauchemars ! C’en était trop pour moi. Je pris mes jambes à mon coup et rentrai en vitesse chez moi, en sécurité.   

Une semaine plus tard, je me rendis au bar de mon village pour réfléchir sur les hurlements que j’avais entendus auparavant. Quand je sortis du bar, il était plus de 23 heures et il faisait nuit noire. Alors que je rentrais chez moi, j’entendis les mêmes hurlements venant d’une petite ruelle sombre éclairée par un seul lampadaire. Elle était là, cette créature terrifiante que j’avais aperçue l’autre soir au cimetière ! Je me cachai rapidement derrière une poubelle pour l’observer sans être vu. Rien encore ne m’avait paru si effrayant que cette créature ! Elle était mi-loup mi-humaine et se tenait sur ses deux pieds. Sa silhouette était hâve au point de penser qu'elle était malade. Pourtant, sa posture m’intimidait ! J’avais l’impression que la bête aurait pu se jeter sur moi à tout instant ! J’étais effrayé et bien conscient qu’il aurait été plus sage de m’en aller au plus vite, mais ma curiosité me poussa à me rapprocher d'elle pour mieux la voir. Je fis tomber la poubelle qui me servait de cachette. Celle-ci tomba dans un fracas assourdissant et la créature se retourna d’un coup vers moi ! Mon sang se figea, j’étais incapable de bouger ! Elle s’avança vers moi et je pus clairement voir son visage à la lueur du lampadaire. Elle était horriblement laide et effrayante ! Ses oreilles étaient celles d’un loup. Elles étaient grandes et poilues. L’une d’entre elle était déchiquetée. J’aperçus ses yeux qui me fixaient. Ils étaient tout ce qu’il y a de plus humain mis à part leur couleur jaune. Sa truffe était écrasée. On distinguait très bien ses crocs. Ses canines étaient longues et pointues et d’une couleur jaunâtre. Un filet de sang sortait de sa bouche! Ses mains, comme ses pieds, étaient immenses et très poilus! Ce n’était pas des ongles que je vis au bout de ses doigts, mais des griffes acérées !

Le peu d’habits qu’elle portait étaient sales et déchirés.Tout son corps et son visage formaient un ensemble effrayant et repoussant. Néanmoins, ce qui me marqua davantage, ce fut cette cruauté qui émanait d’elle ! Alors qu’elle me fixait, j’aperçus une petite et inoffensive souris qui passait à côté de nous. La créature l'avait saisie d’un seul coup et avait pris un malin plaisir à la déchiqueter petit à petit, tout en ne me lâchant pas du regard. J’en eus mal au cœur et je détournai rapidement les yeux !  Soudain, on entendit des bruits de pas qui s’approchaient et le loup garou s’enfuit dans l’obscurité. Je restai bien là cinq minutes sans bouger, ressassant dans ma tête les derniers événements. Puis je me dépêchai de rentrer chez moi.

Un autre soir, je partis courir le long de la rivière près du village. Après dis minutes environ, je fis une pause et m'assis sur un banc. La nuit tomba rapidement et je cherchai le chemin le plus court pour rentrer. Soudain, je les vis, ces deux yeux jaunes reconnaissables entre tous! Je décidai de partir le plus vite possible. Je me mis à courir et me retournai pour m'assurer que je n'étais pas suivi. Elle m'avait pris en chasse, la créature de l'autre soir! Mais pourquoi s'acharnait-elle à me poursuivre? Peu importait. Plus nous avancions, plus elle gagnait du terrain. Elle était maintenant si proche de moi qu'il me semblait sentir sa respiration dans ma nuque. J'étais terrifié! Je ne sentais plus mes jambes mais je continuais d'avancer! Puis, je tournai à gauche sur la rue principale du village, éclairée de mille feux. Je me retournai mais à ma plus grande surprise, j'étais maintenant seul! Elle ne m'avait pas suivi! Je rentrais alors chez moi le plus vite possible, toujours perplexe.  

Après cette soirée, Je ne parlai à personnes de ce qui m'était arrivé. Qui m'aurait cru de toute façon? Des amis me proposèrent d'aller faire du camping en forêt. Nous partîmes à la nuit tombée. Nous installâmes notre campement et un ami décida de nous raconter une histoire. Je partis, les histoires je n'aimais pas vraiment ça. Je prétextai que j'allais chercher du bois pour le feu. Je m'enfonçai dans la forêt. Tout à coup, le loup garou me sauta dessus !!! Tout, alors, se passa si vite ! Il se tenait debout devant moi tandis que j’étais à genou à ses pieds.J’étais mort de peur, incapable de crier ! J’étais  pétrifié et tremblant, juste capable de le regarder. Alors, il se pencha sur moi, me montra ses canines tranchantes. Le scénario était déjà écrit dans ma tête, je vivais mes derniers instants ! Alors que sa mâchoire allait se refermer sur ma gorge, je trouvai la force de saisir l'arme de mon frère dont je ne me séparais jamais et lui tirai une balle dans l'épaule droite! Il poussa un cri de douleur et partit en courant. Je fis de même et je rejoignis le campement. Mes amis accoururent puis tout devint noir et je m'évanouis.

Je me réveillai dans une chambre d'hôpital. Autour de moi, tout le monde s'agitait. J'interrogeai alors un médecin pour savoir pourquoi j'étais ici. Il m'expliqua que je m'étais évanoui une fois arrivé au campement. Ils m'avaient aussitôt emmené aux urgences. Le docteur me posa alors des questions sur mon agression de la veille. Le problème, c'était que ce dont je me souvenais paraissait, maintenant, tellement absurde et impossible! Le docteur avait raison, je n'en doutais pas. Tout ceci était un rêve. Après des derniers contrôles, je pus enfin rentrer chez moi.

          Deux mois s'étaient écoulés depuis mon accident. Un soir, je regardais la télévision. Dehors la lune était pleine, il n'y avait pas un nuage. Je montai à l'étage pour prendre une douche. J'ouvris la porte de la salle de bain. Mon frère se changeait. Je m'excusai et j'allai repartir quand, juste avant qu'il n'enfila son tee-shirt, je pus voir une blessure par balle dans son épaule droite! Je n'étais pas un grand connaisseur, mais il me semblait que la blessure datait de quelques mois seulement.             

Nolwenn et Julie