Le triptyque est formée de  deux parties autobiographiques encadrent le récit du mythe mais ce dernier se scinde en deux : une partie imaginaire qui recrée l'avant-mythe et une partie qui imite le déroulement de la pièce de Sophocle.

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Le prologue (11 minutes ) est le volet freudien du film : il recrée dans l'Italie des années 30 les souvenirs d'enfance de Pasolini; On y voit en images la force du lien mère/fils (épisode de la tétée au pré) et la haine du père (épisode du bébé soulevé par les pieds et des regards du père ) . l'enfant es voile les yeux face à la scène primitive (ses parents qui font l'amour ) .  L'enfant pleure sur le balcon  et ses pleurs peuvent être mis en relation avec le bruit du feu d'artifice qui restera associée dans son esprit à l'intimité de ses parents . La violence du père est mise en évidence et formulée  au moyen d'un insert qui, à la manière des films muets des années 30, reproduit les paroles des acteurs sur des cartons.  

La partie centrale du film présente donc un caractère de symétrie : les 45 premières minutes reconstituent l'abandon dans le désert et l'adoption d'Oedipe avec deux ajouts importants qui ne figurent dans aucune version du mythe : la scène où Oedipe triche au jeu  et est accusé par un de se camarades (ce qui déchaîne sa violence)  et la présentation ainsi que le refus de la jeune femme lors de la cérémonie du mariage (cet épisode peut être interprété comme le renoncement à la femme comme objet de désir et donc l'illustration et la revendication  du choix conscient de l'homosexualité, assumée par Pasolini ) . Cette part d'invention  nous amène vers une  interprétation personnelle   du mythe très éloignée de la pièce de Sophocle .

Le second moment de la partie centrale  d'une durée de 40 minutes coïncide avec les événements récités dans la tragédie : Oedipe est apostrophé par le grand-prêtre au seuil de son palais : "  Devant le palais d' Oedipe. Un groupe d'enfants  est accroupi sur les degrés du seuil.  Chacun d'eux a en main un rameau d'olivier. Debout au milieu d'eux est le prêtre de Zeus" Ces didascalies initiales de rapièce de Sophocle sont reprises et Pasolini en personne interprète le rôle du prêtre . Il se place ainsi au centre de l'oeuvre et instaure une sorte de face à face avec lui-même. Ces 40 minutes reproduisent fidèlement la trame des événements de la tragédie jusqu'au drame final; le départ d'oedipe les yeux crevés avec le messager. Le dénouement est quelque peu différent : la figure du messager remplace celle d'Antigone pour guider les pas de son père. La dimension familiale a été ici écartée au bénéfice d'une dimension plus personnelle: en effet, Oedipe suit le messager qui est interprété par le compagnon de Pasolini dans la vie.

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L'épilogue d'une durée de 5 minutes  retrouve le décor  et la dimension autobiographique du prologue; Oedipe vieilli est désormais un mendiant aveugle : poète décadent aux marches de la cathédrale de Bologne qui remplace le palais d'Oedipe du mythe, il se projette également en poète marxiste qui joue un air révolutionnaire à la sortie des usines ; Ces edu faces qui composent les deux versants de l'oeuvre du Pasolini trouvent leur aboutissement dans une mort symbolique mise en images par le retour au pré originel, celui de la naissance. L'insert indique éclairement la signification des images : "la vie finit comme elle commence" 

Prologue et épilogue sont ainsi complémentaires alors que le versant central nous emmène dans un monde mythique aux couleurs du désert marocain, une sorte de monde protohistorique.