janv.15
En attendant Bojanglès : sur un air de Nina Simone , quand imagination et folie se rencontrent ..
dans la catégorie le livre du mois
Deux citations précèdent le récit : l'une de Bukowski "certains ne deviennent jamais fous : leurs vies doivent être bien ennuyeuses " et la seconde inventée par l'écrivain " Ceci est mon histoire vraie avec des mensonges à l'endroit à l'envers , parce que la vie c'est souvent comme ça " . Il sera donc question , en étudiant ce roman, du rôle la folie et de ses relations avec la réalité et du rôle des mensonges qui nosu font voir la réalité autrement . Le titre fait référence à une chanson douce et triste , un air lancinant sur lequel danse le couple amoureux des parents du narrateur. Les paroles de cette chanson racontent l'histoire d'un vieux vagabond en cellule, inconsolable depuis la mort de son chien 20 ans plus tôt, qui est devenu alcoolique , obligé de travailler dans des bars miteux avec ses chaussures usées et ses cheveux grisonnants mais à qui on demande de temps en temps de danser encore . Il saute alors très haut , jusqu'à toucher les étoiles , et retombe dans son vieux pantalon, dans sa prison . Les paroles de cette chanson illustrent la vie de la mère , prisonnière de sa folie te tentant d'y échapper en dansant. Interprétée par Sammy Davis Junior ( dont vous trouverez la vidéo à la fin de l'article ) Nina Simone et plus récemment Robbie Williams, cette chanson débute par des sifflotements et montre que danser permet d'oublier les misères d'une vie.
L'originalité du récit : on peut distinguer une originalité structurelle avec l'alternance des deux points de vue, celui du père et du fils ; mais on est avant tout frappé par l'usage original des mots , notamment des jeux de mots . (chiffre -tease, gym tonic, on était souvent pliés en quatre pour faire nos bagages en deux temps trois mouvements ) . Les personnages emploient des expressions inventées ou prennent parfois celles qui existent au pied de la lettre . Ce qui peut également nous surprendre, c'est l'originalité des points de vue choisis sur le mensonge notamment et bien sûr, le regard porté sur la folie. Le roman est constitué de 11 chapitres de longueurs inégales et qui ne suivent pas tous l'ordre chronologique.
Chapitre 1 : le cadre et la famille
Chapitre 2 : la rencontre ( point de vue du père )
Chap 3 : la fin de l'école et les vacances en Espagne
Chapitre 4 : la vie quotidienne du couple ( point de vue du père )
Chapitre 5 : la métamorphose de Maman et l'incendie
Chapitre 6 : L'hospitalisation et l'enlèvement
Chapitre 7 : La fuite en Espagne
Chapitre 8 : Les carnets secrets du père : progrès de la maladie ( point de vue du pèr e)
Chapitre 9 : c'est bientôt la fin : les adieux
Chapitre 10 : une famille endeuillée
chapitre 11 : une promesse tenue ( carnet du père ) : je te suivrai partout mon amour ..
La double narration : elle est reconnaissable grâce à l'emploi de caractères typographiques différents qui facilitent le repérage des points de vue . Le chapitre un ouvre le récit avec le point de vue du narrateur enfant et le chapitre deux représente une première incursion dans les carnets du père . Ensuite le récit respectera une alternance entre les deux narrations mais le point de vue de l'enfant est largement dominant. Les paroles de la mère ne sont entendues qu'à travers les dialogues et jamais directement . C('est le regard de l'enfant qui tente de saisir le monde des adultes , te la complewioté de la vie de se parents avec une sorte de naiveté touchante par moments et infiniment de tendresse.
Une rencontre originale : dans un cadre plutôt conventionnel, une réception dans palace de la côte d'azur, il s'agit , en fait , d'une parodie de coup de foudre au bal. "Les gens ici sont tous parfumés à l'ennui alors faites moi-rire," lui demande-t-elle lors de leur rencontre. Ses yeux sont pourtant légèrement déments ; indice de sa folie et elle cherche un homme riche qu'elle surnomme " mon assurance-vie " : soit pour la protéger soit pour lui fournir l'argent dont elle a besoin pour vivre . La raison aurait du m'inciter à la fuir commente alors le narrateur, indice, cette fois , de la tragédie à venir. Elle ressemble à un oiseau et il l'observe longuement dans un état "ébrieux = néologisme formé sur ébriété ) Ils passent leur journée à refaire le monde , à coups de conversations loufoques en s'inventant des liens de parenté "nous avions l'un et l'autre rivaliisés d'absurdités, de théories fumeuses et définitives .. le narrateur arrive alors ,après de nombreuses coupes de champagne et autant de scotchs, à un moment où il sent son destin basculer ; il voit bien qu'elle danse follement pour oublier ses tourments et qu'elle n'avait pas toute sa tête. Lui aussi, pris dans le cul de sac de ses mensonges la voit alors plonger dans l'eau chlorée et conclut " le temps d'un cocktail, d'une danse, une femme folle et chapeautée d'ailes m'avait rendu fou d'elle en m'invitant à partager sa démence. ( p 46 ) : déclaration pour l emoins originale qui esra ensuite complétée, au chapitre 11 par leurs serments de mariage. Ce coup de foudre est qualifié de pétaradant mais il laisse présager qu'"elle faisait toujours mine d'ignorer la réalité d'une façon charmante" ( 64 )
Un couple soudé: son comportement extravagant avait rempli toute ma vie, précise le narrateur père et : cette folie je l'avais accueillie les bras ouverts; Il poes sur sa femme aux mille prénoms un regard admiratif et manie à merveille les oxymores. " Pour elle, le réel n'existait pas, elle avait réussi à donner un sens à ma vie en la transformant en bordel perpétuel ". (65 ) peu à peu l'inquiétude devient plus précise et de nombreux présages parsèment le récit "j'étais conscient que sa folie un jour pouvait dérailler .. à la fin du récit, dans ses carnets , il semble pourtant ne rien regretter de "cette douce marginalité, ces pieds de nez perpétuels à la réalité ,ces bras d'honneur aux conventions, aux horloges, aux saisons, ces langues tirées aux qu'en dira-t-on " ( 133) Après le suicide de la mère, le père décide de mettre fin à ses jours pour la rejoindre : ce qui peut être considéré comme une ultime marque d'amour.
Les personnages principaux
Le personnage du père : chasseur de mouches au harpon , Georges a fait fortune en ouvrant des centres de contrôle technique lorsque la loi a imposé l'obligation pour les automobilistes de produire un justificatif de l'état de leur véhicule automobile. "Il travaille tard pour pouvoir s'arrêter tôt " Son portrait physique est original : son fils mentionne un grand fumeur de pipes, une ressemblance avec un cavalier prussien, des yeux bleu légèrement globuleux et des orbites légèrement creuses. Il est affublé d' un grand corps sec et il passe son temps à chantonner (mal ) . Il raconte à son fils des histoires à dormir debout qui chassent son sommeil mais seulement les rares soirs où ils ne reçoivent pas d'invités. Le dimanche, il pratique la gym tonic ( soulever des haltères minuscules en écoutant du jazz) . C'est un personnage original, au comportement excentrique . Sa fortune faite, il se met à écrire des livres refusés par les éditeurs . Il fait croire à son fils qu'il a fabriqué le barrage près de leur maison en Espagne mais ce dernier a du mal à le croire car il ne voit pas d'outils dans la maison . Il a l'habitude de s'inventer des vies et des filiations extraordinaires lorsqu'il s'ennuie, simplement pour tuer le temps . Au début, on le voit qui ment par jeu pour monopoliser l'attention des gens. Lorsque sa femme est hospitalisée, il s'occupe de leur fils mais ne peut dissimuler la tristesse qui le ronge et lorsqu'il se met à pleurer en plein jour , cela alerte l'enfant qui remarque alors "pleurer en plein jour, c'est un autre niveau de tristesse" . Après l'enlèvement de sa femme à la clinique, il loue une Limousine pour partir en Espagne et se consacre exclusivement à sa vie familiale. Il s'occupe d'elle et de leur fils et choisit de la suivre son amour jusque dans la mort .
Le personnage de la mère : aime changer de prénom chaque jour, passe son temps à boire et promène une grue avec une laisse en perles ; "Elle tutoyait les étoiles" signe que son imagination est très fertile, qu'elle plane au dessus des réalités contingentes, qu'elle est même un peu "perchée" . Toutes ces expressions traduisent les représentations que se fait la société des gens à l'imagination débordante Elle s'énerve souvent mais jamais longtemps et la voix de son mari a un effet calmant sur elle. Souvent d'humeur joyeuse, elle sautille, picore son fils de baisers et trouve tout follement divertissant. Elle est longuement comparée à son oiseau de compagnie : une grue baptisée Mademoiselle Superfétatoire. Elle est décrite par le père comme un mélange de comportement enfantin et de tenues extravagantes, parfois provocatrices . Excentrique et décalée, elle est en fait bipolaire . Fâchée avec les horloges, elle est très hospitalière et son comportement peut s'apparenter parfois à de la séduction . Elle connaît les paroles de la chanson Mister Bojanglès et c'est sa chanson préférée . la première fois que son mari la voit, elle danse comme un oiseau avec sa tête emplumée . Insensiblement mais inexorablement , sa santé mentale se dégrade : elle devient plus nerveuse et boit de plus en plus. Après la vente de l'appartement qu'elle a en partie, fait brûler, elle passe très vite d 'une colère lourde à une tristesse sourde. " Elle avait de drôles de fous rires malheureux " ( 74 ) Son mari tente alors de l'apaiser mais cela peut prendre du temps et ils ne savent plus sur quel pied danser, emploi ici amusant de l'expression figurée. Elle se lance sans cesse dans des projets inconséquents : entreprend , par exemple, d'écrire un roman mais jette feuilles et crayons. Le problème c'est qu'elle perdait complètement la tête même si la partie visible demeurait sur ses épaules . Un jour, elle met le feu à l'appartement en voulant brûler leurs souvenirs afin que les impôts ne puissent pas les saisir, jeu de mots encore une fois sur la saisie matérielle des objets parce qu'ils vont être saisis par le fisc.. Personne en peut s'emparer des souvenirs .Elle est alors hospitalisée et devient la patronne du second étage de l'institut psychiatrique; Sa chambre est un musée miniature et un foutoir géant; Un vendredi soir, elle organise un bal à la clinique et décide que son traitement est terminé. Déguisés en cambriolleurs avec des bas sur la tête , son fils complètement ivre et son mari , mort de peur, réalisent son vrai -faux enlèvement . Cet épisode, comme beaucoup d'autres dans le roman, peut être qualifié de rocambolesque. Elle se cache quelques semaines sous un faux nom Liberty Bojanglès , dans un hôtel miteux fréquenté par des prostituées, et se réjouit d'être en cavale comme une star de cinéma.
La relation mère-fils : un lien très fort unit la mère et son enfant. On le découvre mieux dans le chapitre 8 grâce à la lecture des carnets du père ; la naissance de l'enfant a, dans un premier temps, ralenti la course de la folie qui s'est muée en extravagance mais l' éducation de ce dernier a subi un certain nombre d'aménagements : il participait , notamment , aux nombreuses fêtes qui se déroulaient chez lui donc n'allait pas à l'école le matin ; Ses parents inventaient des "bobards délirants " pour justifier ses absences à répétitions. Et le jeune garçon pensait que sa mère jouait la comédie. Mais le jour de l'incendie de leur appartement , quand il a appris que sa mère allait être internée, il a compris qu'elle souffrait d'un mal particulier qui la rendait triste sans raison ou sans transition, totalement hystérique et délirante. Sa narration ne sombre jamais dans le pathétique grâce à ce point de vue enfantin , faussement naïf,adopté par l'auteur
L'enfant du couple; est donc le principal narrateur du récit :son point de vue est amusant car il reflète ,en partie , la naïveté de l'enfance ; Il évoque ainsi un salon "dingue" ; Il ne comprend pas certains jeux de mots de son père comme la référence à la mort du chanteur Claude François, dont la photo sert de cible pour un jeu de fléchettes, "EDF a mis fin à tout ça" allusion à la mort tragique du chanteur survenue par électrocution en 1978 alors qu'il n'avait que 39 ans; Le regard qu'il porte sur sa mère est tendre: il pensait, par exemple qu'elle confiait ses plats cuisinés à un traiteur; en réalité, le réfrigérateur toujours vide montre qu'elle ne fait jamais à manger . Le mensonge ici adoucit le réel. Elle ne s'occupe pas non plus de la maison au sens courant de l'entretien. Il lui arrive parfois d'oublier de nourrir son fils : alors elle pleure avec son odeur de cocktail . En Espagne, le paradis pour lui, il pense que la vue donne soif à ses parents qui "buvaient du vin avec des fruits dedans ; Il ignore ici le nom de la sangria; A l'école, c'est difficile pour lui car il veut plaire à la maitresse qui lui reproche de manquer souvent l'école pour partir en vacances avec ses parents donc à son retour, il dénonce tout ce qui se passe dans la classe quand la maitresse a le dos tourné : ce qui ne lui plait pas du tout et elle évoque la délation durant la seconde guerre mondiale : allusion que l'enfant ne comprend pas . Elle finit par les traiter de famille de cinglés et le narrateur est retiré de l'école ; le voilà désormais "en retraite anticipée" "j'avais quitté sans regret ma classe , mon institutrice à la coiffure tourmentée et son faux cancer de la manche " . Il a remarqué qu'elle glissait un mouchoir dans sa manche . Le romancier joue en permanence avec ce qu'il sait et ce qu'il ignore . Le jeune garçon comprend pourtant que son père lui ment à l'envers en affirmant que sa mère va être rapidement complètement guérie. Face à la folie de sa mère , il emploie parfois des termes évocateurs comme "déménagés du ciboulot " ou les décapités mentaux : dans leur esprit ne reste que de la folie et du vent. ( 87 ) : c'est une image originale qui transforme l'expression "ne plus avoir toute sa tête " Le déménagement est une étape importante du récit et l'auteur fait un parallèle entre le déménagement du cerveau de sa mère et celui de leur appartement; Ils emménagent dans un petit appartement sinistre et c'est le début des vrais ennuis.
Quelques personnages secondaires
Le sénateur : appelé tendrement l'Ordure, c'est le meilleur ami du couple; Il adore un cocktail à base de vodka de citron vert qu'il réclame dès qu'il arrive dans l'appartement : le petit garçon pense qu'il s'agit du prénom de sa petite amie russe Caïpirowska; D'ailleurs il aime beaucoup les femmes et saute sur toutes les occasions , en demandant d'ailleurs au petit garçon d'enivrer les invitées afin de pouvoir les entrainer dans uns chambre . "L'Ordure est mon ami le plus cher car son amitié n'a pas de prix " Il va travailler au Palais du Luxembourg (le petit garçon s'étonne d'ailleurs qu'il porte ce nom, à Paris " qui est le véritable siège du Sénat à Paris depuis 1979. Le sénateur sera toujours là dans les moments difficiles : "il venait partager notre peine et finalement il était venu avec la sienne " ; Cette citation montre que le chagrin est avant tout individuel même si , le partager peut le rendre plus supportable .
Les malades de l'hopital : Sven, qui parle des dizaines de langues dans sa tête et passe son temps à chanter ; Bulle d'air qui ne parle plus, prend son traitement au moyen d'une perfusion et qu'on soupçonne d'être une ancienne criminelle, une décapitée mentale à temps plein. ; Yaourt surnommé ainsi car il déborde de partout ; il se prend pour un président et fait des discours en permanence ;.... on peut ajouter également la maîtresse d'école du petit garçon et le curé lors de l'enterrement; Ces personnages ont presque tous des fonctions comiques .
Un roman anticonformiste ?
Le sujet principal du roman ; c'est bien le récit d'une histoire familiale bouleversée par la maladie mentale de la mère mais l'auteur évoque, à certaines occasions, le regard moral réprobateur de la société sur les moeurs de cette famille; ou parfois, à l'inverse, la réprobation de certains faits sociaux On peut voir, par exemple,
- La critique de certaines habitudes comme la Saint-valentin : ils sortent diner , exprès au restaurant le lendemain , 15 février, soir de la Saint Georgette.
- La télévision dans le salon est affublée d'un bonnet d'âne pour la punir de diffuser de mauvais programmes et personne ne la regarde .
- Du lierre pousse sur les meubles, un oiseau sauvage vit à leur domicile..
- Le tourisme est dénoncé comme vulgaire de leur point de vue ( des gens qui polluent les plages et se mettent du gras pour bronzer.)
- Lors d'un séminaire sur le commerce , les conférenciers sont présentés comme de savants cloportes aux visages chiffonnés par le savoir et les données : vision bien négative des scientifiques .
- le travail est considéré comme une ânerie ou simplement un moyen de gagner de l'argent : embauchée chez un fleuriste, la mère refusait que les clients paient les bouquets qu'elle préparait et elle sera donc renvoyée; d'une manière générale, dans le roman, elle ne tient pas absolument pas compte de l'argent qu'elle dépense sans compter comme lors de leur escapade en Espagne ; Le père tousse en regardant le montant de la note de l'hôtel..
- Les parents ne respectent pas les vacances scolaires et la relation se dégrade avec la maîtresse dont le portrait est caricatural ; la mère critique également la nature de ce qui est enseigné à l'école qui lui paraît très ennuyeux pour son fils
- ils ne payent pas non plus leurs impôts
- Le sénateur lui donne des conseils farfelus comme d'éviter les végétariens,parce qu'ils ont du être cannibales dans une vie antérieure et les cyclistes professionnels p 57 )
- J'aurais du épouser un enfant dit-elle au lieu d'épouser mon grand-père. Mais c'est mal , très mal, lui précise le père et "c'est interdit par la loi et la morale "
- L'épisode de la culotte enlevée à table parce qu'un invite disait sans cesse "je parie mon slip" est aussi résolument choquant : l'extravagance de la mère prend des allures dramatiques et c'est le sénateur qui parvient à faire rire les invités de cet épisode mais du rire aux larmes, parfois, il n'y a qu'un pas à franchir. Un matin, elle sort nue de l'appartement avec juste une chapka sur sa tête car son mari lui a demandé de se couvrir ;( 76 ) Elle lui a donc obéi en mettant un chapeau sur sa tête alors qu'il lui demandait de mettre des vêtements.
- Le père juste avant l'enlèvement fait fumer une cigarette et donne un gin -tonic à son fils, comme le font les gansters. ( 108) et cela le rend malade ; il se met à vomir dans la clinique.
- Lorsqu'ils arrivent dans le palace qui surplombe la mer , le petit garçon fait remarquer que c'est plus confortable que l'hotel où la mère se cachait après son "évasion " mais moins vivant car c'était un hôtel fréquenté par des prostituées sympathiques .Le père fait remarquer que, dans ce grand hôtel, les "putes sont plus discrètes et plus sages pour se fondre dans le paysage"; Le petit garçon va alors passer sa soirée à les chercher.. Ce soir là, pour fêter leurs retrouvailles et ce nouveau départ, Ils commandent toute la carte et à la fin du repas , le narrateur voit des étoiles et des putains partout. Le lendemain, ils sont malades dans la voiture ; On devine que la mère a beaucoup trop bu mais le petit garçon ne sait pas analyser les signes d'une gueule de bois comme par exemple, l' intolérance aux bruits qu'elle manifeste.
- Au cours de l'enterrement, le père et le sénateur se moquent de la mèche de cheveux du curé et se mettent à rire aux éclats. "une vague de rire et de gaieté pas vraiment appropriée "
Le thème du mensonge : il est central dans le roman et accompagne celui de la folie. On y ment souvent et pour de multiples raisons . On y ment pour ne pas faire de peine, on y ment pour es rendre complice , pour voir la vie autrement et tourner le dos à la réalité et aux ennuis. On y ment aussi pour le plaisir et pour faire rire ; Voici quelques exemples de mensonges.
- L'allure parfaite de la mère les soirs d'anniversaire était un splendide mensonge : maquillée, après des heures d'essayage, elle reçoit ses invités comme si elle s'était réveillée dans cet état.
- L'enlèvement est le plus beau mensonge inventé : "un mensonge de toute beauté, dit le personnage du père , le plus gros des bobards; un mensonge préparé aux petits oignons, une véritable oeuvre d'art ( 107 ) "Vous faites dans le haut de gamme, avait chuchoté Papa qui s'y connaissait en mensonge comme personne. Lui et son fils sont des hommes d'expérience , question mensonges.
- Le père est , selon son fils, capable de faire de beaux mensonges par amour comme à propos du pin en Espagne; Il raconte à son enfant que le pin va servir à devenir le mat d'un bateau pirate et va voyager autour du monde ; Les pirates l'avaient contacté pour lui dire qu'ils allaient venir le chercher; ( 147 )
- Certains mensonges valent pourtant mieux que la vérité , selon le petit garçon qui comprend que sa mère est morte mais qu'elle garde les yeux ouverts pour ne pas faire de peine à son mari. Le père ment à son file en évoquant une noyade accidentelle alors qu'il a compris qu'on "ne mangeait pas une boîte entière de somnifères pour dormir alors qu'on vient de se réveiller" ( 160)
La folie : c'est le thème central du récit
le roman a choisi d'aborder le thème de la folie de manière directe en préparant le lecteur à une fin tragique et à une dégradation de cette ambiance de fantaisie. Lorsque la maladie progresse, le regard de l'enfant, notamment sur l'asile psychiatrique , contribue à dédramatiser la maladie mentale dont souffre sa mère . Lors de l'enquête de police qui suit le faux enlèvement à la clinique, l'enfant narrateur précise " on n'était pas fous au point de nous dénoncer quand même " ; Lorsqu'il s'agit d'évoquer la maladie mentale dont souffre le personnage, la métaphore du déménagement de son cerveau est la plus utilisée. Rire de la folie te de se manifestations est sans doute une forme de victoire partielle sur la maladie , pourtant présentée comme impitoyable. le roman pose la question des bornes et des degrés de la folie te de son acceptation par la société
Un dénouement tragique attendu ?
A partir de l'évasion, le lecteur se doute d'une fin tragique car la maladie risque d'empirer. Ses doutes se précisent après la lecture des carnets du père au chapitre 8 . Le déménagement du cerveau de la mère s'accélère et elle devient de plus en plus souvent paranoiaque; Elle alterne crise d'hystérie et chagrins profonds suivis de moments de déprime mais le roman a choisi de ne pas s'attarder sur une description pathétique des états pathologiques du personnage et les narrateurs évoquent allusivement les traitements chimiques, l'enfermement et la violence qu'ils subissent à cause des crises.. Lorsque la folie la gagne, la mère dit qu'elle doit combattre ses démons, elles fait enfermer dans le grenier en attendant que les crises passent. Elle renonce également , en grande partie, à l'alcool. Le soir de la fête de San José, le couple danse longuement et à la nuit tombée, la mère vient rejoindre son petit garçon pour lui chuchoter qu'elle a trouvé "une solution pour régler cette malédiction " et qu'ils vont retrouver leur vie d'avant la folie ( 157); le lecteur averti a alors compris que le dénouement se prépare. Après le suicide de sa mère, le père s'enferme pour écrire et le sénateur s'occupe du petit garçon, L'épitaphe sur la tombe précise la force de cet amour fou " A toutes celles que vous avez été, amour et fidélité pour l'éternité " ( 167 ) Et le père disparaît pour rejoindre son amour. Il laisse à son fils un roman qui raconte leurs vies .. le dernier très court chapitre est un extrait de leurs promesses échangées lors de leur mariage : "je jure que toutes les personnes que je suis vous aimeront éternellement ...je promets d'aimer et de chérir toutes celles que vous serez, jour et nuit, de vous accompagner partout où vous irez..partout..oui vraiment partout .