Treizième volume de la grande fresque des Rougon-Macquart, erminal, publié d’abord en 1884 en feuilleton, puis en mars 1885 en volume, et qui fut un véritable succès, est écrit entre le 2 avril 1884 et le 25 janvier 1885 par Emile Zola ; Son ouvrage préparé par une enquête détaillée, montre l'affrontement des forces naturelles, soumises aux circonstances et à l'environnement social, qui gouverne le destin des personnages, des mineurs dans le roman Germinal.
Germinal expose la vie des mineurs entre mars 1866 et avril 1867. On peut y voir les conditions de vie des mineurs condamnés à une grande misère. La révolte des mineurs, grâce au personnage d'Etienne Lantier principalement, leur permet d'ouvrir une caisse de prévoyance. Tout finit par une grève contre la baisse de leurs salaires. Cela devient un vrai saccage, un massacre, que plus personne ne peut contrôler, allant jusqu'à la dégradation et à la casse de certaines fosses, jusqu'à la mort de beaucoup de personnes, sans pour autant voir, au bout du compte, leurs conditions s'améliorer. De plus, nous pouvons voir que dans la mémoire historique et culturelle, Germinal est un mois du calendrier révolutionnaire. Il est donc lié, bien entendu, au printemps, à la germination, à l'espoir, au renouveau, à l'avenir.

Nous pouvons nous demander dans quelle mesure Germinal est un roman social et politique.
Pour y répondre, nous verrons dans un premier temps que Germinal traite en grande partie du social, avec la violence, la misère, la condition de vie ouvrière au XIXème siècle, et la formation de leur caisse de prévoyance. Dans un deuxième temps, nous étudierons les rapports avec
l’évolution des idées politiques sous le Second Empire, ainsi que la naissance des mouvements socialistes et ouvriers.

Tout d'abord, Germinal est un roman social. En effet, Zola l'écrit lui-même : « Le vrai socialiste n'est pas celui qui dit la misère, les déchéances fatales du milieu, qui montre le bagne de la faim dans son horreur ? », « Le peuple est en bas, dans l'ignorance et dans la boue, et c'est de là qu'on doit travailler à le tirer ».
Pour commencer, nous pouvons alors voir que la misère est grande, du fait des conditions de vie très difficiles. Nous pouvons le voir à travers tout le roman notamment parce que les logements sont étroits et inconfortables : les mineurs sont « parqués en tas » et n'ont aucune intimité. Chaque famille, peu importe le nombre de personnes, qu'ils soient quatre ou dix, dispose d'une petite parcelle de terrain avec un petit jardin qui sert de potager, et une maison ; Prenons l'exemple de la famille Maheu, composée du père, de la mère, la Maheude, de leurs sept enfants, et du grand-père ; trois lits sont dans la chambre, et dans chaque lit, deux personnes dorment ensemble, et dans le couloir du palier, le quatrième lit et le berceau sont installés, pour les parents et le bébé. Le grand-père, quant à lui, dort le jour dans un des lits des enfants. Mais ce n'est pas seulement lorsqu'ils dorment qu'ils sont entassés, puisque même quand ils se lavent, par exemple, c'est toujours les uns devant les autres :

Ensuite, nous voyons déjà au début de l'histoire que les mineurs ont du mal à « joindre les deux bouts » : la Maheude va chercher de l'aide chez les bourgeois de la Piolaine, et demande une fois de plus un crédit à Maigrat. Ainsi, lorsque la grève éclate, les mineurs comme la famille Maheu ont encore plus de mal et ressentent d'autant plus la misère que la grève éclate en plein hiver, où il fait donc très froid.. Mais il n'y a pas que les conditions de vie qui sont difficiles.

Les conditions de travail sont effroyables. Le travail des enfants est possible dès l'âge de huit ans en manufacture, et douze dans la mine. Avant de descendre dans le puits, « tous venaient prendre et emporter dans leur peau un bon coup de feu, pour braver l'humidité », qui est un des éléments les plus difficiles à supporter, avec à certains endroits, « la température [qui monte] jusqu'à 35°c ». De plus, ils ne sont pas toujours dans des positions très confortables pour travailler, puisque par endroits, ils doivent passer dans « des trous larges de trente centimètres », et être allongés pour creuser, ou agenouillés, le dos courbé ; . A cela s'ajoute l'obscurité entière au fond, et des dangers comme le grisou, les éboulements ou les infiltrations d'eau. Le travail pénible provoque un taux de mortalité supérieur dans la classe ouvrière que dans les autres classes sociales. Les mineurs ont le droit aussi à leurs propres maladies. Et leur salaire dépend de leur emploi dans la mine, de leur âge, ce qui permet au père de gagner plus que la femme et les enfants.

Enfin, la misère est aussi présente dans les rapports humains ; tout le monde exploite tout le monde. Dans les rapports amoureux, le mariage est une chose importante uniquement sur le plan financier. La sexualité est violente et vue comme une chose sans romantisme et douceur. Zola dépeint la sexualité des mineurs au XIXème siècle comme bestiale. On s'aperçoit alors dans le roman que la génération de Catherine va connaître la même misère que ses parents si certains éléments ne changent pas, car le destin se répète ; Seulement, la grève qui aurait pu éventuellement tout changer, a échoué. Zola montre tout de même que rien n'est définitivement perdu.
Comme l'a dit Zola, il y a aussi les déchéances fatales du milieu, avec la montée de la violence, qui est en partie due à une sorte de vengeance, de réaction des mineurs face à leur impuissance, puisque leur (sur)vie dépend de leur travail ; mais aussi à l'aggravation de la situation, qui provoque le mécontentement de la population. De plus, la mauvaise paie entraîne le désespoir et la colère du coron tout entier.

Tout le monde arrive au bout de ses limites à un moment où un autre du roman. La violence est à la fois collective et individuelle. Même certains enfants sont violents : Lydie et Bébert sont sous les ordres de Jeanlin, qui tuera le petit soldat Jules qui montait la garde au Voreux pendant la grève. Mais cette montée de la violence aboutit à son déferlement. Ainsi, les violences collectives sont plutôt présentes lors des réunions, comme celle au Plan-des-dames, où la violence des Hommes est comparée à celle de la nature. Lorsque les mineurs de Montsou vont détruire les autres fosses, ils s'en prennent aussi aux hommes. Ce déferlement de violence est une action de masse, les uns entraînent les autres. Etienne n'arrive plus à les contrôler. On retrouve alors l'une des principales caractéristiques des romans de Zola : la violence (sociale et économique) entraîne la violence physique (des mineurs).

Ces malheureux, à qui une étincelle pourrait rendre leur dignité d'homme, se partagent entre l'alcool et les femmes, d'après la vision sombre que nous propose Zola.
L'auteur a aussi évoqué le bagne de la faim dans son horreur. En effet, la nourriture que peuvent acheter les mineurs est assez restreinte. Les aliments le plus souvent sont du gros pain, du sel, du sucre (par exemple la petite Alzire Maheu qui suce du sucre quand sa mère ne peut rien lui donner d'autre à manger), du beurre, du fromage, et quelques légumes pour la soupe. Ils ne mangent jamais de viande. Leurs boissons se réduisent à l'eau, l'eau de vie de grain, la bière (car le vin est trop cher), et le café qui a une couleur rouille. Dans la mine, ils emportent des « briquettes », composées différemment selon les membres de la famille : le père, qui ramène plus d'argent, aura une plus grosse part, mais toutes seront faites de deux tranches de pain, du fromage et du beurre ; ils n'ont dans leur gourde que du café, parfois encore tiède. Lorsque la grève éclate, la misère et la faim sont réellement présentes. Les mineurs crient : « du pain! du pain! du pain! ». Chez les bourgeois au contraire, la nourriture est très variée. Ils ont assez d'argent pour pouvoir se payer du poisson, de la viande, des légumes, des fruits et dégustent de grands vins, tout cela à volonté. La nourriture accentue donc beaucoup la différence entre les bourgeois et les mineurs, les riches et les pauvres.
Enfin, « le peuple est en bas, dans l'ignorance et dans la boue ». L'ignorance des mineurs est très grande. En effet, même Etienne se documente et lit beaucoup de livres, ouvrages et magazines sur la société, car il a « honte de son ignorance ». Pourtant, c'est un des plus cultivés, puisque c'est lui qui fait en partie réagir les autres sur les diminutions de salaires, les caisses de prévoyanc
e. L'inculture des mineurs les amène à croire tout ce qu'on leur dit ; ainsi, que la caisse de prévoyance soit ou non une bonne chose, il suffit de leur donner quelques arguments positifs pour qu'ils soient d'accord. Ils ne chercheront pas à trouver de raisons contre. De plus, la plupart des mineurs sont illettrés, puisque certains finissent par donner leurs lettres à écrire à Etienne, en échange d'une rémunération.
L'évocation de la misère, des déchéances fatales du milieu, du bagne de la faim dans son horreur, de l'absence d'éducation, contribuent à tirer l'œuvre du côté du roman social.


Germinal est aussi un roman politique. En effet, le Second Empire voit une bourgeoisie corrompue et indifférente diriger l'économie avec la bénédiction d'un clergé réactionnaire. La bourgeoisie est la nouvelle noblesse du régime: elle est maîtresse des lieux dans Germinal et reconnait son monarque, favorise son culte (la compagnie offre des portraits de l'Empire et de l'Impératrice aux mineurs habitant le coron). Bref, elle réagit comme la noblesse devant le roi. Le Second Empire est un régime qui censure, et la censure abolit obligatoirement la liberté. Mais qui utilise aussi la force. On le voit faire preuve d'autorité en dépêchant des hommes en armes dès que les choses tournent mal ou risquent de menacer le régime. D'autre part, l'action dans Germinal commence vers 1865, en plein Empire autoritaire.

En 1865 est fondée l'Internationale en Angleterre. C'est dès cette époque que se créent les mouvements socialistes et qu'éclatent des grèves. Enfin, Napoléon III fait entretenir en France le culte de sa famille. Ainsi, on trouve comme décoration, collés aux murs couleur vert pomme, « les portraits de L'Empereur et de L'Impératrice ». Cependant c'est la compagnie qui a offert ces portraits destinés à entretenir un culte de la personnalité impériale. Bref, on constate que les mineurs se plaignent de leur situation, mais en aucun cas de leur gouvernement qui pourtant les manipule. Depuis le milieu du Second Empire, les charbonnages du Nord et du Pas-de-Calais fournissaient, aux alentours de 1880, la moitié de la production française de houille. En 1884, les mineurs se mettent en grève. C'est la misère, la famine. Les ouvriers voulaient un monde nouveau, du pain pour se nourrir et des conditions de vie meilleures. Zola décide d'écrire le roman de la mine , c'est-à-dire la lutte du Capital et du Travail.
. Le noir se retrouve jusque dans la signification politique, du fait de son association au XIXème siècle, mouvement anarchiste. Ensuite, le rouge est souvent lié au thème de la violence issue de la souffrance : c'est une couleur rouge de menace. Dans ce roman, le rouge peut alors représenter « les feux des fours à coke », le signe du malheur des hommes, du travail ininterrompu et de l'exploitation. La révolte des mineurs apporte la couleur rouge au sang de Maigrat, au sang des fusillés qui va jaillir sur les deux enfants de Zacharie et Philomène comme un signe de malédiction. De plus, « le rêve de la révolte, de la vengeance, est un rêve rouge ». Le drapeau des insurrections révolutionnaires est lui aussi de couleur rouge, associé à l'image des têtes guillotinées sous la révolution française. Enfin, lorsque l'espoir renaît, à la fin du roman, Etienne quitte Montsou pour s'engager dans la lutte syndicale. Le rouge est associé à la violence individuelle et collective. Le rouge et le noir ont tous les deux un sens politique avec l'anarchisme et la révolution, Zola associe le personnage de Souvarine à la couleur noire. Mais nous pouvons constater que la dernière page du roman apparaît comme un nouvelle couleur, le vert, avec le thème de la germination, présent dans le titre. Seul ce thème permet de réunir les trois couleurs, le noir devenant le sol où germe le grain, le rouge représentant la chaleur et le soleil, conditions indispensables pour que surgisse le vert, l'espoir et la vie.

Pour conclure, nous pouvons confirmer que Germinal est une œuvre à la fois politique et sociale et psychologique. La misère, la violence, la faim, l'ignorance, les conditions de vie misérables des mineurs, la condition féminine, la dénonciation de la bourgeoisie, tout s'y trouve...
Ainsi, avec la crise actuelle (licenciements, chômage, fermetures d'usine), le roman a pris aujourd'hui une forte signification. Même si les conditions de travail et les conditions de vie des mineurs ont évolué, le roman reste d'actualité.

 

C. M.