Témoignage d'André BERKOVER
Par Anais MELANE le 26 janvier 2016, 12:55 - Témoignages - Lien permanent
André Berkover a été déporté avec sa mère et son frère. C'est le seul des trois qui est revenu.
André Berkover vivait dans une famille de cinq personnes, sa sœur, son frère, sa mère, son père et lui. Ils avaient une petite vie tranquille, son père était artisan maroquinier. La famille vivait dans un HBM (habitat bon marché). André allait au lycée Voltaire, dans le 11e arrondissement de Paris.
Il vivait sous le gouvernement de Vichy, avec le maréchal Pétain à sa tête. Ce dernier utilisait les méthodes du régime nazi, comme le tampon "JUIF" sur les cartes d'identités lors du recensement, les interdictions de rentrer dans les lieux publics, les squares, de posséder un vélo, une radio, l'obligation d'aller dans les derniers wagons...
Un jour de mai 1944, son frère est allé prendre une douche aux bains publics. Deux SS l'attendaient à sa sortie. Il avait sûrement été dénoncé. Le soir, il fut transféré au Palais de Justice. Il y resta huit jours, puis fut transféré à Drancy.
La famille décida d'aller se réfugier chez une tante à Bagnolet, avec un peu d'affaires.
Le 28 juin 1944, André et sa mère ont dû retourner chercher des affaires dans leur appartement. Alors que sa mère était partie faire des courses, deux SS tapèrent à la porte et firent asseoir André sur une chaise. Ils ont attendu que sa mère revienne pour les emmener en camion à Drancy. Sa mère et lui sont restés deux jours à Drancy.
Le 30 juin 1944, ils furent déportés à Auschwitz-Birkenau, en Pologne. Ils ont voyagé dans des camions à bestiaux, à 85 par wagons, avec une seule fois à boire, pas de nourriture, pas de sanitaires. Le voyage a duré trois jours et demi.
Une fois arrivé au camp, André retrouve son frère. Il y avait deux rangées, une avec les enfants (moins de seize ans), les femmes et les inaptes au travail qui allaient directement mourir dans les chambres à gaz ; l'autre avec les personnes capables de travailler. André avait quatorze ans, mais est allé dans la rangée des plus de seize ans pour être avec son frère.
Au camp, les SS faisaient travailler les prisonniers inutilement, comme porter des briques du train à un mur... Ils étaient 200 par baraques, avec des "lits" à trois étages. Ils avaient peu à boire et peu à manger. Le matin et le soir ils devaient se ranger en file pour l'appel. Les nazis les appelaient par leur numéro de matricule, en allemand. Pour André c'était le "16572". Si les prisonniers avaient le malheur de fumer, de s’asseoir... pendant leur travail, ils recevaient 25 coups de matraque sur les reins ou ils étaient pendus. André n'était pas dans le même kommando de travail que son frère, donc il le voyait le soir.
Le 18 janvier 1945, André a été levé à 5h du matin, ce qui était habituel. Il ne le savait pas mais il allait vivre sa première marche de la mort suite à l'approche de l'Armée Rouge. Il faisait extrêmement froid, entre -15°C et -20°C. André et 10 000 autres déportés commencèrent à marcher dans la forêt en direction de l'Allemagne. Ils étaient pieds nus dans la neige.
Les SS ont commencé à tirer sur ceux qui ralentissaient le pas car les Soviétiques arrivaient. En entendant les coups de feu, André se mit à courir dans la forêt. Il sentait les balles passer à côté de lui. Il croyait mourir.
André a hésité à faire le mort mais il est allé se réfugier dans un coffre au sein d'une ferme appartenant à une famille polonaise. Il croyait qu'ils allaient le dénoncer, mais au lieu de ça, ils l'ont hébergé pendant 15 jours. Ensuite, ils l'ont remis aux Soviétiques. Ces derniers l'ont fait rapatrier en France, à Marseille, le 10 mai 1945.
Il a retrouvé sa sœur et son père le 11 mai 1945 dans leur appartement.
Désormais, André Berkover a une fille, un fils et des petits enfants. Il s'est marié en 1952. Il n'a pas la haine contre les Allemands mais contre les nazis.
Il fait partie des 2500 survivants sur les 76000 déportés juifs de France.
Anecdote: Un jour quand il travaillait, un kapo lui demanda de le suivre. Le kapo se fit un tartine devant André. Puis le kapo lui tendit la tartine. André l'accepta mais le kapo a commencé à lui faire des attouchements. André a gardé la tartine et il est parti en courant.
Commentaires
Un récit très informé sur l'histoire de M. Berkover.