Interview réalisée par Titouan, Vincent et Antoine
G.R. – Aujourd’hui nous sommes en compagnie de Monsieur Charles, le célèbre comédien de l'Illustre Théâtre. Il va nous expliquer comment Molière procède pour rendre une scène comique.
Monsieur Charles – Molière a la « chance » d’être dramaturge mais pas seulement : comme vous le savez sans doute il est également comédien, cela lui permet de mieux ressentir les émotions du public. Il a bien compris qu’à l’heure actuelle c’est le comique de geste qui a du succès, par exemple dans Les Fourberies de Scapin lorsque Scapin assène des coups de bâton à Géronte, cette scène produit son effet à chaque représentation.
G.R. – Il est vrai que Molière manie aussi bien les gestes que les mots, et en parlant de mot, le comique se cache-t-il également dans ces derniers ?
Monsieur Charles – Évidemment de nombreux procédés comiques sont basés sur les mots. Un des comiques préférés de Molière est le comique de mot comme dans Le médecin volant, lorsque Sganarelle répète à neuf reprises le mot « pisseuse ».
G.R. – Je vois, je vois. Qu'en est-t-il des autres procédés comiques ?
Monsieur Charles – On peut aussi accentuer les caractères des personnages que l’on incarne, par exemple, dans la scène de L'Avare, où Harpagon fouille son valet La flèche, son avarice est poussée à l’extrême, Molière fait d'Harpagon une caricature des avares. Harpagon étant totalement dévasté par ce vol, il va jusqu'à fouiller son propre valet. Dans l’acte II scène 2 de Dom Juan, on voit Dom Juan « le beau parleur » en action. Molière accentue volontairement son caractère charmeur.
G.R. – J’imagine que vous gardez vos secrets, également ?
Monsieur Charles – On est souvent copié mais jamais égalé. Mais je vais vous dire une dernière chose, il existe également le comique de situation. On l’utilise beaucoup dans L'Avare notamment dans la scène du quiproquo entre Horace et Arnolphe, lorsque Horace confie à Arnolphe qu'il compte épouser Agnès, cette déclaration à l'effet d'un coup de couteau pour Arnolphe. Comme on le voit dans sa célèbre réplique « Ah ! Je crève ». Cette scène laisse rarement indifférents les spectateurs. Molière a le talent de choisir avec précision l'ordre des répliques de manière à amplifier les procédés comiques.
G.R. – Quel est le rôle du comédien dans tout ça ?
Monsieur Charles – Le comédien est là pour interpréter le texte mais chacun l'interprète à sa manière, personnellement j'engage beaucoup mon corps, certains ont une intonation particulière, c’est ça qui rend une pièce intéressante.
G.R. – Tout ces procédés ont-ils comme simple but de faire rire les spectateurs ou cela va plus loin ?
Monsieur Charles – Évidemment cela va plus loin ; si le spectateur sort de la salle et qu'il a seulement ri nous n'avons pas réussi à faire passer notre message, chaque pièce contient des satires de différents éléments de la société. Que ce soit dans Le médecin volant, L'Avare ou bien encore Le malade imaginaire, la satire est présente partout.
G.R. – Merci pour nous avoir éclairé sur le sujet.
Monsieur Charles – Tout l’honneur était pour moi.
Les Fourberies de Scapin