Voici la manière dont Mara Canobbio en collaboration étroite avec Elodie Chamboredon, enseignante des CM1B de l’école et en partenariat avec Maxence Descas et sa classe de CM1 de l’école Edouard Vaillant, a mis en oeuvre la réalisation de la carte postale sensible. Un très beau travail d'équipe !!
Le projet que vous allez découvrir a été réalisé dans le cadre d’une collaboration étroite des deux classes de CM1 de l’école tout au long du projet. Seul l’aboutissement du projet a été un peu différent, la réalisation finale, dépendant des propositions des élèves de chaque classe.
Description du projet commun aux deux classes :
- Mon quartier, ton quartier, notre quartier : définir le quartier
Notre toute première demande aux élèves « Sur cette feuille A5, dessine un plan de ton quartier. Tu as le droit au crayon à papier ainsi qu’aux crayons de couleurs » les a placés d’emblée devant une difficulté de taille : définir le quartier. Toutes sortes de questions se sont posées : où mettre l’école ? Combien de rues mettre sur mon plan (les premiers plans étaient souvent très resserrés autour du trajet maison - école) ? Certaines de mes activités fréquentes sont-elles encore dans les limites du quartier ? Habitons-nous tous le même quartier ? Ces questions étaient d’autant plus fortes que notre école se situe au carrefour de différents quartiers de la ville : le quartier Pasteur, le Clos d’Orléans, les Rigollots, le Village.
A partir des premiers plans dessinés par les élèves, que nous avons scannés, nous avons établi un corpus d’images qui permettaient de construire un début d’identité pour notre quartier. Les élèves ont classé, nommé et commenté les images. Des spécificités sont apparues : la présence de petits commerces, l’importance des voies de circulations, le développement des transports en communs, une forte présence du végétal dans les espaces publics mais aussi dans les jardins des zones pavillonnaires, le mélange de pavillons et de petits immeubles, le nombre important d’équipements sportifs et culturels.
A la suite de ce premier travail, nous avons tenté de construire une définition du quartier, plus précisément de notre quartier. Il nous a fallu pour cela abandonner la notion de stricte délimitation géographique ou découpage administratif, pour se déplacer vers l’idée d’une communauté humaine, les habitants, dont l’école serait le centre.
- Un quartier dans la ville
Une fois l’idée de quartier cernée, nous avons donc proposé aux élèves de faire la liste des lieux qu’ils fréquentaient régulièrement en les classant du plus au moins fréquenté. Cette liste des lieux communs nous a naturellement conduits à élargir notre périmètre à la ville et aux communes limitrophes (Vincennes en particulier).
De l’analyse de la fréquentation des lieux communs est apparu l’emploi de l’infinitif qui a permis aux élèves de nourrir la définition de la notion « habiter le quartier ». En effet, quand ils ont commencé à classer ces lieux en fonction des critères de leur choix, nombreux ont été les enfants qui ont eu recours aux infinitifs pour nommer les différentes catégories de leur classement. Une carte heuristique centrée sur l’expression « habiter mon quartier » est alors apparue tout naturellement., ainsi que la mise en place d’un code couleur pour représenter les différentes fonctions des lieux du quartier sur les premiers plans des élèves. Le choix de leurs titres en disait long sur leur façon très personnelle d’appréhender leur quartier. Nous avons par exemple trouvé au milieu des titres : apprendre, se divertir, se cultiver, pratiquer un sport, se déplacer, sortir/se rencontrer ou prier, le surprenant et drôle « attendre » auquel étaient associées la Poste et la Mairie ou l’émouvant « pleurer » qui légendait le cimetière.
Cette analyse des lieux communs nous a aussi conduits à changer d’échelle et à passer du quartier de l’école à la ville. C’est à ce moment qu’un jumelage avec la classe d’une école de Val de Fontenay nous a semblé indispensable, pour que les élèves réalisent qu’ils habitaient une ville à deux visages : un pôle historique proche de l’église médiévale, constitué de petites maisons, d’immeubles bas et riche en commerces de proximité et un pôle d’activité plus récent constitué de grandes tours, d’ensembles d’immeubles hauts, qui s’articulent autour d’un énorme centre commercial, la galerie d’Auchan et d’un pôle de transports, la gare RER de Val de Fontenay, où convergent aussi de nombreuses lignes d’autobus. C’est ainsi que nous avons commencé à échanger avec la classe de CM1 de l’école Vaillant de notre collègue Maxence Descas. Les élèves de sa classe nous ont fait parvenir les dessins et plans de leur quartier en échange des nôtres. Grâce à eux, les élèves des deux quartiers ont été en mesure de mettre en évidence la bipolarité de leur ville. Nous avons prévu de prolonger cet échange initié grâce au projet « Cartographie ton quartier » par une rencontre exposition de nos plans et une visite guidée de l’école et présentation du quartier par chaque classe.
- La visite de terrain
Nous avons conçu, en partenariat avec Mme Bonnefoy, responsable des archives de la ville une sortie de terrain qui permette aux élèves de mieux saisir, en les vivant physiquement, les spécificités de leur quartier.
Il nous a fallu gravir les pentes du Village pour accéder au plateau, au pied de l’hôtel de Ville construit ici en 1971 pour faire le lien entre les deux versants de la ville, à l’endroit où des siècles plus tôt se tenait le château du seigneur de Fontenay.
Puis nous sommes redescendus pour nous arrêter devant l’église, le plus vieux bâtiment de la ville et avons observé les maisons environnantes, saisissant que nous étions vraiment au cœur du centre historique. Nous avons ensuite rejoint l’ancienne Mairie. Pour finir, nous nous sommes rendus devant l’une des 40 fermes Fontenaysiennes encore debout et avons appris à les reconnaître. Nous avons appris que la ville avait un passé agricole très fort, en grande partie liée à son relief et à l’abondance de ses fontaines, et s’était très peu industrialisée ce qui explique l’importance de la présence végétale.
Nous avons aussi éprouvé ces spécificités dans les voies de circulations elles aussi contraintes par le relief : rues étroites, sentiers nombreux, tracés sinueux.
- La « mise en carte »
Pour finaliser notre mise en carte, nous avons eu envie de présenter l’œuvre picturale et architecturale de Hundertwasser aux enfants parce qu’elle entrait en résonance avec ce que nous avions vu : son refus de la ligne droite, son attention aux arbres, nos colocataires, sa théorie des 5 peaux, qui ferait du quartier l’une d’elles ont parlé aux enfants.
La forme de notre texte nous est apparue assez naturellement grâce à l’emploi répété de l’infinitif fixé par la carte heuristique « Habiter mon quartier » qui nous a évoqué le poème Déménager de Raymond Queneau, étudié auparavant.
Avant de passer à la réalisation du projet final, nous avons cherché à définir avec les élèves la notion de carte sensible. Les élèves ont immédiatement associé l’adjectif sensible aux cinq sens, et aux émotions. Nous avons donc commencé à envisager le quartier sur le plan sensoriel. Les élèves ont cherché à associer certains lieux de leur quartier aux différents sens. La vue a, par exemple, souvent été associée au parc des Carrières, situé sur une hauteur de la ville, car il offre une vue imprenable sur le bois de Vincennes et sur Paris, et le conservatoire, les voies du RER et le bois de Vincennes, pour le chant de ses oiseaux, à l’ouïe. Le goût a été associé aux multiples restaurants. En revanche est apparu assez vite, dans ma classe, une sorte de manque, l’envie de dire un 6ème sens propre aux enfants : celui du mouvement qui apparaissait à travers des verbes comme dévaler, zigzaguer, gratter, courir, longer…. Notre projet s’est alors déplacé, et nous avons conçu, à partir des écrits de chacun, une déambulation commune, rêvée.
C’est la carte de Victoria qui a été choisie. Son échelle tout d’abord permettait d’intégrer les différents quartiers de la ville et à chacun de s’y retrouver, la présence végétale y était évidente et les choix de couleurs donnaient vie aux bâtiments.
Nous reste à vous remercier pour ce concours qui a réconcilié nos élèves avec la géographie !