Qu'attendre d'un croquis de géographie ?  Qu'est-ce qu'un raisonnement géographique ? Que faut-il attendre des élèves en classe de géographie ? L'évaluation est un moment privilégié pour le saisir. Cela reste cependant souvent réservé à l'enseignant, qui seul dispose de la totalité des copies et donc d'une vision d'ensemble. Rapidement rangées, parfois honteusement cachées, les copies d'élèves sont rarement partagées avec le reste de la classe. Seul le voisin, parfois, au hasard d'un coup d'œil clandestin, aperçoit ce que son camarade a écrit. Elles sont plus rarement encore exposées. Pourquoi le faire d'ailleurs ? Quel intérêt peut présenter ce texte brut, avec ou sans les annotations du professeur ? Comment le faire aussi ? La copie, souvent composée de plusieurs pages, recto et verso, est avant tout un objet, qui se manipule, se tourne, se retourne et se prête peu à l'exposition.

"Qui a corrigé mes croquis de géographie" est une tentative pour rendre visible cette matière première. Pour cela, elle a été travaillée, mise en scène, en s'inspirant du livre « Qui a piqué mes contrôles de français ? » de N.de Hirsching et F.Joly (2011)*. Dans cet album de jeunesse, les auteurs mettent en scène 23 rédactions, corrigées par la maîtresse puis dérobées et livrées au regard de tous. 23 rédactions dans lesquelles les enfants racontent une après-midi avec leur grand-mère. 23 rédactions dont la graphie varie, belles écritures rondes ou maladroites, tout comme la maîtrise de l'orthographe et de l'expression écrite. 23 rédactions corrigées par la maîtresse, avec humour souvent, humeur parfois. Un dialogue s'instaure alors, encre rouge de la maîtresse versus encre bleue des élèves, dans une temporalité multiple, le temps du récit, celui de la rédaction, celui de la correction, celui de la lecture.

Sur le même principe, huit croquis de géographie, extraits d'une évaluation réalisée quelques jours auparavant, ont été soumis à la correction d'une classe de Première ES. Enfin presque sur le même principe, puisqu'ici ce sont les élèves eux-mêmes qui ont corrigés leurs copies, invités, à la manière de Fanny Joly, à forcer le trait, à exagérer, à caricaturer. La fiction était la suivante : « 18h12, je rentre chez moi, je m’apprête à corriger mes croquis de géographie, quand soudain je m’aperçois qu’ils ont disparu … mais qui a fait ça ? Et surtout pourquoi ? ». Pour résoudre cet énigme, le spectateur doit observer les copies, traquer les indices … Posts-its et stylos rouges sont à sa disposition pour qu’il devienne à son tour correcteur, qu'il donne son avis sur les copies de Jean Hémar, Ines Péré, Cécile Hencieux, Andy Rect ...

L'objectif

L'objectif de ce travail était double : d’abord faire réfléchir les élèves à la nature du raisonnement géographique et à son évaluation. Puis exposer ce travail, pour partager cette réflexion avec d'autres. Pour ces deux raisons, le choix du croquis s'imposait : il impose en effet aux élèves de présenter leurs arguments de manière synthétique, autour d'une légende organisée ; réalisé sur une page ou une double page, il facilite l'exposition. 

Le résultat ?

En ce qui concerne les élèves, si les fautes d’orthographe et les bonnes notes attribuées au croquis les dévoilent (difficile de noter ses camarades), ils ne s’en sont pas moins montrés des correcteurs avisés, traquant non seulement les fautes d’orthographe et les maladresses d’expression écrite, mais aussi les incohérences du raisonnement géographique … Vous en trouverez quelques exemples ci-dessous (cliquez sur les images pour agrandir) :

La copie de Sarah Croche, seule copie laissée intacte

        

Légendes :

Cécile Hencieux                    Andy Rect              Hanna Konda

               

L'exposition

L’exposition quant à elle a eu lieu à l’Hôtel de Ville de Boulogne-Billancourt, en avril 2015. Elle a été prolongée par une exposition virtuelle, accessible dans la rubrique « explorer » de ce blog.

Le résultat obtenu est imparfait, et révèle, en creux, la fabrique de cette mise en scène : les scans successifs, la numérisation ont altéré la qualité des copies, et rendent la lecture parfois difficile. Reste la démarche …

Merci à la professeur de lettres et à la documentaliste du collège Molière à Paris de m'avoir fait découvrir ce livre.