Lecture ; L’homme à l’oreille coupée

Extrait 6

Je vous félicite pour votre travail sur Quizinière . Vous avez bien lu , bien compris et bien expliqué vos réponses . Vous pouvez aller voir vos corrections :

Code de l’exercice : AN6W06     plus votre code de correction.

 Vous êtes tous d’accord pour trouver la réaction de la fiancée exagérée . Je suis d’accord avec vous .

Vous êtes nombreux à penser qu’on ne peut pas arracher une oreille avec les dents et que ce n’est pas crédible (=on ne peut pas le croire ; bravo Tonin d’avoir utilisé ce mot ) . Mais si , c’est possible . N’oubliez pas que la fiancée était comme une panthère .

Et non , l’histoire n’est pas finie . De toutes façons , elle ne pouvait pas être finie puisqu’on ne savait pas quelle histoire est vraie .

Aujourd’hui , vous allez découvrir la vérité mais peut-être pas celle que vous croyez .

Vous verrez qu’on parle de Napoléon .

 

Le lendemain il levait les bras au ciel :

« Vous me fatiguez avec cette oreille ! Je vous l’ai dit cent fois.

C’était un soir où j’avais trop bu.

Je me suis endormi contre un poêle

et ça me l’a brûlée.  Voilà ! »

Le lendemain, elle n’avait pas brûlé, mais gelé au contraire :

« J’avais tout juste vingt ans et j’étais soldat.

Mon unité est partie en campagne ce fameux hiver

où la température est descendue à - 60°C,

vous vous rappelez ? Les oiseaux tombaient du ciel, congelés !

Quand on faisait pipi, ça gelait à mesure !

Non, vous ne vous rappelez pas,

vous êtes bien trop jeunes ! Qu’importe.

Une nuit, on nous désigne, un camarade et moi,

pour aller repérer la position de l’ennemi.

On nous met à chacun sur le dos

un de ces grands manteaux de camouflage, tout blancs,

et nous voilà partis dans la neige, pas fiers !

On accomplit tout de même notre mission, tant bien que mal.

Seulement au retour ça se gâte : on est pris dans une tempête.

On se perd, on revient sur nos pas, on tourne en rond

et on finit par se coucher dans la neige,

serrés l’un contre l’autre.

Le vent hurlait tellement qu’on s’entendait à peine.

De temps en temps, on se criait :

– Ça va toi ?

Et l’autre répondait :

– Ça va…

En réalité, on était sûrs d’y rester. Mais au matin on a entendu des voix :

– Oh, les gars ! Vous êtes morts ?

On n’était pas morts. On était juste enfouis sous la neige.

Un des soldats nous avait marché dessus par hasard !

Ils nous ont chargés sur leurs épaules et ramenés au camp.

Le capitaine se pointe, il nous félicite,

et puis il a voulu imiter Napoléon qui pinçait l’oreille de ses grognards

pendant la retraite de Russie. Il avait vu ça sur des images, sans doute.

Bon, il prend la mienne entrele pouce et l’index et la secoue un peu.

Seulement elle était gelée. Ça fait clink !,

comme quand on casse un glaçon sous un toit : clink !

Et l’oreille lui est restée dans les doigts, au capitaine.

Vous auriez vu sa tête !

Ça vous en bouche un coin, non !

Et pourtant c’est la vérité vraie… »

Le jour d’après,

il l’avait perdue à la suite d’un pari stupide dans un port de Java.

Ou bien il l’avait vendue à un milliardaire à qui il en manquait une.

Un ours la lui avait arrachée dans le Grand Nord canadien.

Elle avait été grignotée par un rat pendant qu’il délirait

dans les fièvres du scorbut,  sur un bateau de pêche.

Elle avait été sectionnée par des pirates sanguinaires.

Tranchée par un mari jaloux.

Cuisinée au court-bouillon par une femme folle…

Six années durant le vieil homme raconta chaque soir une histoire différente,

et il le faisait si bien que chaque soir on le croyait. Jusqu’au lendemain…

 

Questions orales

Est-ce qu’on connaît la vérité sur l’oreille coupée ?

Pourquoi le vieil homme raconte-t-il chaque soir une histoire différente ?

Pourquoi les gens continuent-ils de lui demander alors qu’ils savent très bien qu’il va mentir ?

Quelle est ton histoire préférée ?