"L'ombre d'un doute" (Adèle Hoarau)
Par L. Bueno-Lahens (lycée Hoche, Versailles (78)) le 16 mars 2016, 12:23 - Nouvelles réalistes à chute - Lien permanent
C'était un dîner très convivial, durant cette chaude soirée d'été qui s'annonçait agréable. Les convives semblaient s'amuser, et même le bout de table était complètement déjanté. La jeune Marine, fiancée au beau Dorian, était assise entre la grand-mère et l'oncle Jacques. Seulement, elle ne connaissait personne. Elle s’ennuyait. Un rat mort. La dinde? Elle ne l'aimait pas. Le vin? Bien trop bouchonné. Elle se leva discrètement et alla s'appuyer contre l'arbre du jardin, un cerisier grand comme la maison du fond, d'ailleurs à peine perceptible derrière le lierre, sombre et envahissant. Elle s'assit, sentit l'herbe fraîche sous ses mains et devina les constellations à travers le feuillage.
La jeune femme observait la maison du fond, quand elle entendit des pas se rapprocher derrière elle. C'était le jeune Rémi, fils de monsieur Maurel, l'hôte de la petite fête. Il s'approcha et s'assit aux cotés de la jeune Marine : « Mademoiselle...
-Marine, répondit-elle.
-Enchanté, Rémi. Vous me semblez ennuyée... »
En effet, la jeune Marine n'était pas à son aise. Rémi commença donc à lui parler du temps, de la verdure, mais la jeune femme ne bronchait pas, Rémi lui proposa donc de venir avec lui chercher une bonne bouteille de vin à la cave de la maison du fond, et cette proposition éveilla en Marine une vive curiosité. Cette maison était si intrigante... Elle ne put refuser la proposition.
Rémi l'aida à se lever et ils partirent en quête d'un bon vin, qui changeait sûrement des nombreuses piquettes que les invités avaient ingurgité. Ils traversèrent le jardin et arrivèrent devant la porte en bois massif de la maison. Rémi dégagea les quelques branches de lierre qui obturaient le passage, et il ouvrit la porte. L'intérieur de l maison était sombre et inquiétant, sels quelques rayons de lune traversaient les carreaux et donnaient à la pièce une atmosphère grise. L'odeur qui s'en dégageait était une odeur de poussière t de moisissure. Le jeune homme expliqua que personne ne rentrait régulièrement dans cette maison, seul le sous-sol était occupé par des bouteilles de vin et des conserves de nourriture, le rez-de-chaussée ne servait qu'à monsieur Maurel pour entreposer son bois et ses outils. Mais même, pour la jeune fiancée, la maison paraissait clairement abandonnée. Les deux jeunes entrèrent dans la maison, tentèrent d’allumer la lumière, mais elle ne fonctionnait pas et longèrent le petit couloir qui menait à l’escalier pour descendre à la cave. « C’est étrange, remarqua Rémi, le couloir était moins poussiéreux qu’il ne l’était la dernière fois que j’y suis passé, Quelqu’un a dût entrer dans la maison….Mais qui ?
-Oh, sûrement votre père, rétorqua Marine.
-Et pour quoi faire ?
-Et bien, pour chercher du vin, dit-elle avec évidence.
-Impossible, ce ne sont que des grands crus que nous sortons rarement.
-Alors, pour y prendre du bois.
-En plein été ? Certainement pas, je ne vos pas l’utilité de faire du feu avec cette chaleur, répondit-il. »
Ils descendirent doucement les escaliers de peur qu’une marche ne s’effondre douleur poids. L’éclairage de la lune ne leur suffisait plus. Arrivés au sous-sol, Rémi alluma la lumière : l’ampoule grésillait. Elle éclairait la cave d’une lumière inquiétante. Ils avancèrent lentement dans la pièce mal rangée où étrangement traînaient des couteaux par terre. Des couteaux … tachés de sang. Rémi ne voulait rien voir. Il avait peur. Marine, elle, inspectait la salle dans tous ses recoins. Il y avait des ateliers avec des outils, tachés d’un liquide par endroit… Le jeune Rémi s’était dirigé vers les bouteilles de vin, qu’il inspectait afin de savoir laquelle il allait amener. Marine, quant à elle, s’était arrêtée en plein milieu de la pièce et semblait réfléchir. Ou plutôt sentir quelque chose… L’ampoule grésillait de plus en plus. « Il manque des bouteilles », remarqua Rémi. « Une odeur de pourriture… » chuchota Marine. « Mais où est mon bon vin ? » Une drôle de tension montait, une pesanteur dans l’atmosphère. Rémi paniquait, il pensait qu’on lui avait volé ses meilleures bouteilles. Pendant ce temps, Marine reprit son inspection. Elle avançait petit à petit, de peur de tomber sur un objet tranchant. La jeune femme sentait de plus en plus cette odeur, et surtout ressentait de lus en plus cette pression qui montait. Elle passa à coté d’une petite table et remarqua une petit lampe. La lumière e l’ampoule au plafond était à présent très faible, alors Marine alluma la torche. Elle éclaira le sol en premier, où coulait un filet de liquide rouge. Elle poussa un petit cri. Rémi se retourne brusquement et vit ce sang au pied de la jeune femme. Il courut vers elle, lui prit la lampe des mains et la releva pour éclairer devant eux. Malheur. Ils poussèrent un cri. L’ombre d’un buste pendu au plafond se dessinait sur le mur poussiéreux et humide. Les deux jeunes se mirent à courir. Rémi trébucha sur un couteau qui le coupa à la cheville. Ils montèrent à toute vitesse les escaliers et coururent vers la porte. Elle ne s’ouvrait plus. Rémi tirait de toutes ses forces, tandis que Marine criait. Après plusieurs efforts, ils réussirent à l’ouvrir, se précipitèrent dehors et coururent jusqu’à la grande table. Les invités les regardaient avec des grands yeux, et le père Maurel se leva. Il demanda ce qu’il se passait et vit la main de Rémi : « Oh ! Ma bouteille ! Ma bonne bouteille ! » Rémi regarda sa main : il ne tenait plus que le goulot, la bouteille avait dû se casser contre un mur. Le jeune lança :
« -Papa ! Qu’as-tu fait ?
-Mais, de quoi parles-tu ? Vous, qu’avez-vous fait, pourquoi tout ce chahut ? Et ma bouteille ?
-Tu as tué quelqu’un ! Ne nous mens pas ! hurla Rémi,
-Mais, comment est-ce possible… Je n’ai rien fait ! Et ma bouteille !
-Alors comment expliques-tu que nous ayons vu…
-Un corps, cria Marine, pendu ! Nous avons vu son ombre terrifiante sur le mur ! »
Un silence de mort régna sur la tablée, tous les regards étaient tournés vers Maurel, et même, horrifiée par l’acte terrible de l’hôte, la grand-mère s’évanouit. Et c’est à ce moment là que Maurel aborda un sourire espiègle et une expression rassurée.
Les invités étaient paniqués, certains rangeaient déjà leurs affaires et s’apprêtaient à partir, mais d’autres restaient figés devant monsieur Maurel. Ce dernier criait que ce n’était qu’un affreux malentendu, il répétait sans cesse ces mots : « Venez ! Venez donc ! Vous allez comprendre les amis… » Certains se refusaient à aller voir un buste pendu, ce qui est normal après tout, mais d’autres, plus curieux, se révélèrent intéressés par l’histoire. Maurel avança donc d’un pas décidé vers la maison du fond avec la lampe torche qu’il avait arraché brutalement aux mains de son fils. Il ouvrit la porte brutalement et se retourna : « Allons bon ! Venez ! Vous verrez bien ! » De plus en plus de convives se rassemblaient dans a maison pour découvrir ce qui se tramait au fond de cette cave. Ils descendirent, Le père Maurel en premier. Quand tous les courageux furent en bas, Rémi et Marine fermant la marche, le père Maurel tâta dans la noir le tiroir de l‘établi et en sortit une deuxième lampe, pour bien éclairer la pièce. Il émit un petit rire et alluma les deux lampes en même temps. Deux rats prirent peur et s’enfuirent, laissant derrière eux les deux bouteilles de vin cassées qui laissaient couler leur liquide rouge sur le sol, laissant derrière eux également le gros jambon pendu au plafond que Maurel avait mis à sécher.
Commentaires
Alors tout d'abord, tes deux première phrase m'ont beaucoup plu ! On dirait des vers !!
J'ai bien apprécié l'intrigue également qui débouche finalement sur une drôle de chute !! Il est vrai que, à cause du titre, on ne s'attendait pas à ce que ce soit un corps qui soit pendu, mais bon je pense que le fait que ce soit un jambon est pas mal déroutant tout de même !!
Pour conclure : super nouvelle policière !!