Eléna, en quoi consiste votre métier ?

Mon métier, c’est journaliste-réalisatrice. Il consiste à réaliser des reportages qui peuvent aller de 15 à 90 minutes. C’est ce qu’on a fait récemment avec un documentaire sur les femmes de militaires.

C’est en fonction de ce que demande la chaîne ou la production (entité passant la commande, ndlr). Mais pour moi ce n’est pas toujours le cas car c’est un métier qui nécessite un travail en amont et en aval. C’est-à-dire faire l’enquête, trouver les gens qui sont intéressants à filmer, être présente au tournage et au montage pour suivre vraiment du début jusqu’à la fin.
Ce qui permet au final que les gens puissent vraiment se reconnaître dans ce qu’on a tourné et cela permet de ne pas dénaturer le propos des gens.

Je pense que les personnes interrogées en tournage ont plus confiance en nous quand on travaille sur le projet du début jusqu’à la fin. Puis, en tant que journaliste, c’est aussi plus intéressant parce qu’on suit vraiment le projet dans sa globalité.

Y-a-t-il une seule façon de faire du journalisme ?

Non, il y a plusieurs types de journalisme. Il y a le journaliste d’investigations et le journaliste de news. Sur les sujets d’actualité, c’est aux journalistes de news de prendre le relai. Ils arrivent sur un événement en particulier comme les élections présidentielles, ils vont interroger des personnes sur les lieux de tournage et prendre des informations.

Moi, je ne fais pas de news du tout, je fais surtout des témoignages, où on prend plus de temps.
Notre dernier projet portait sur un documentaire sur les femmes de militaires. C’est un 90 minutes, j’ai mis cinq mois à le faire, donc on a vraiment le temps.
C’est un projet qu’on crée : on écrit d’abord le speech, on essaye de le vendre à plusieurs chaînes. Lorsqu’une chaîne accepte de l’acheter, c’est à ce moment-là que commence l’enquête.
On tourne, on monte puis on rend le produit fini à la chaîne. Tout cela peut prendre cinq, six mois voire un an pour certains documentaires un peu plus aboutis.
Et c’est encore un tout autre travail que de faire de l’investigation : c’est ce que font les journalistes d’Enquêtes exclusives, Zone interdite. C’est donc un autre travail.

Travaillez-vous pour une chaîne en particulier ?

Non, je travaille pour la société de production audiovisuelle de Carole Rousseau qui reçoit des commandes de plusieurs chaines de télévision. Donc on peut très bien travailler aujourd’hui pour TMC, ce qu’on est en train de faire. La semaine dernière, on travaillait pour TEVA. Demain, je peux très bien travailler pour TF1 ou pour NT1. C’est complètement aléatoire, c’est en fonction des reportages que l’on vend à telle ou telle chaîne.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier ?

Jean-Luc Delarue !!! Téléspectatrice et comme beaucoup d’adolescentes, j’ai grandi avec ses émissions de témoignages.
Par la suite, je me suis dis « c’est ça que je veux faire ». J’ai souhaité faire un stage dans sa maison de production au début de mes études. Et puis voilà, je suis passée à autre chose, je suis arrivée chez Carole Rousseau mais ça fait 10 ans que je fais du témoignage et c’est vraiment quelque chose… Merci Jean-Luc !!!

Qu’est-ce que vous préférez faire comme documentaire ?

Il y a forcément des thèmes qui m’intéressent plus que d’autres, après, c’est plus une histoire de rencontres.
Au hasard, j’ai trouvé un sujet l’été dernier sur le 35ème anniversaire de la mort d’Elvis Presley organisé à Memphis. J’ai découvert que deux cents fans français devaient y aller. On a proposé le projet et il a été vendu à une chaine de télévision. Je me suis retrouvée dans cette aventure extraordinaire de vivre pendant une semaine avec des fans sur les terres d’Elvis Presley. C’était génial !!!
Ce sont les rencontres faites dans les tournages qui me donnent envie de continuer à faire mon métier.
Je pense que le jour où on n’aime plus les gens, il faut arrêter un métier pareil parce que c’est vraiment le contact humain. C’est s’intéresser aux gens, avoir la curiosité de demander « qu’est-ce qui se passe ».

Autre exemple, au hasard d’une conversation sur internet, j’ai découvert le milieu de femmes de militaires alors que je ne suis pas militaire ; dans mon univers immédiat, il n y a pas de militaire. En m’y intéressant, j’ai découvert des choses passionnantes.
Donc les rencontres humaines restent déterminantes car les idées ou thèmes de reportages peuvent paraître enthousiasmants et s’avérer finalement pas terribles.

Faut-il avoir des compétences spéciales pour devenir journaliste ?

Je pense qu’il faut des qualités indispensables comme le contact humain, la curiosité, le sens de la communication et la capacité d’expression.

Il y a également la « souplesse » au niveau des horaires de travail, parce qu’il arrive souvent de commencer très tôt et de finir très tard. Mais je pense que la qualité principale reste la passion.

Elle est essentielle pour passer 15 jours enfermée dans une salle de montage. On ne peut pas aller 15 jours en reportage, si on n’est pas intéressé par les gens. Si cette flamme s’éteint, il faut arrêter.

Êtes-vous du début jusqu’à la fin du projet ?

Voilà, du début jusqu’à la fin ! Tout, jusqu’au mixage. Ce matin, j’étais présente pour l’enregistrement de la voix.
C’est ainsi jusqu’à la livraison du documentaire, du sujet ou du reportage à la chaîne qui l’a commandé.

Faut-il faire des stages particuliers pour devenir journaliste ?

Non, il y a des écoles plus ou moins connues et reconnues. En fait, il n’y a pas vraiment de formation. Mais je crois que pour le news il y a des écoles agrées qu’il faut faire pour entrer dans l’univers des JT … Enfin moi, je connais moins cela.
J’ai fait une licence de langues étrangères, rien à voir avec ce que je fais aujourd’hui. Après, je pense que c’est plus les rencontres, les stages et faire ses preuves pendant les stages ! Moi, j’ai été prise suite à un stage où l’on m’a proposé de rester et cela fait dix ans que j’y suis.

Est-ce un métier où il y a beaucoup de travail ?

(Rires) Du travail, il y en a toujours. On peut toujours s’en sortir si on est créatif et qu’on arrive à vendre des projets intéressants. Ceux qui sont vraiment passionnés et qui le font avec le cœur peuvent réussir à trouver du travail. Maintenant, ce n’est pas facile parce que la plupart des journalistes sont sur un système d’intermittents du spectacle. Ce qui fait que ce n’est pas forcément sur une longue durée. On peut travailler pendant trois mois et ne plus travailler pendant quatre mois et puis retravailler pendant cinq mois, il faut accepter de prendre ce risque-là aussi.

En plus de préparer et de faire l’interview, faites-vous du montage ?

J’ai un monsieur qui fait le montage à ma place ! (Rires) C’est très prétentieux de dire ça mais je suis le cerveau de l’opération (Rires). En fait, je supervise le contenu.
Par exemple, j’ai une histoire d’une jeune fille, Sabrina, qui est atteinte d’une mucoviscidose et qui a décidé, un jour, d’aller dans Secret Stories. J’ai l’idée, je l’écris, je raconte l’histoire.
Après, j’ai un cameraman qui est là pour m’aider à mettre cette histoire en images et j’ai un monteur ensuite qui m’aide à raconter l’histoire en images.
Mais effectivement les questions, le contenu, comment découper le tournage, parce que là on ne met pas une personne dans un canapé et on lui dit : « Raconte-moi ton histoire ! », parce que sinon, ce serait trop facile.
On suit des événements importants dans la vie des personnes suivies. C’est un vrai travail de plusieurs semaines, à essayer d’organiser les choses, de voir à quoi ressemble sa vie, de filmer des moments de la vie quotidienne, comme un repas avec son fils mais aussi la séance photo qu’elle est en train de faire suite à Secret Stories : elle a été contactée par des marques de bijoux et une égérie d’une marque.

Donc, c’est essayé de raconter ce qu’elle devient. Notre reportage essaie d’en donner un aperçu à travers plusieurs moments de sa vie. C’est quelque chose qui demande une préparation afin de voir comment on peut mettre à l’image telle ou telle séquence.

Ainsi, le cameraman fait en sorte que les images soient belles et qu’elles mettent en valeur la personne que l’on suit.
Le monteur, de son côté, fait en sorte que ces images-là soient bien assemblées, que les accords soient parfaits et qu’on arrive à progresser dans notre façon de raconter l’histoire.

Avez-vous déjà interviewé des célébrités ?

J’ai fait des émissions spéciales téléréalités : j’ai interviewé Cindy de Secret Stories, Sabrina de Secret Stories 5, un jeune rappeur qui s’appelle James Boyle, j’ai fait des gens de mon époque, des leaders de boys band dont Chris pour G-Squad et Quentin d’Alliage. On est parti tourner à New-York.
J’ai tourné avec un monsieur absolument merveilleux, Jean-Luc Azoulay, qui m’a bercée toute mon enfance, avec Fauve Hauto de Danse avec les stars, avec Laurent Ournac qui fait Camping Paradis sur TF1, avec Marc-Emmanuel de Tous ensemble.

Et votre reportage sur les femmes de militaires, quand pourra-t-on le voir à l’écran ?

Je n’ai pas encore la date mais je pense que ce sera début mai sur TEVA.