La mort d'Atala
Par Sheriff Axel ♂ le 13 avril 2010, 09:02 - Réflexions sur la mort d'Atala - Lien permanent
La mort d'Atala de Chateaubriand.
Atala au tombeau peint par Girodet en 1808; Musée du Louvre.
CHATEAUBRIAND:
Dès sa jeunesse, F.R. de Chateaubriand eut l'idée de décrire les moeurs des "sauvages", en les encadrant dans une trame historique. Le massacre de la tribu rebelle des Natchez, commis par les Français en Louisiane en 1727, lui sembla un bon sujet. Et au retour de son fameux voyage en Amérique, il devait réaliser son rêve de jeunesse dans ATALA, simple épisode de son livre sur les Natchez, de même que René. De ces deux récits, ajoutés comme exemples au Génie du Christianisme, Atala fut publié à part avant le reste de l'ouvrage. Cette "anecdote", écrite "dans les déserts et sous les huttes des sauvages", n'entend pas seulement affirmer la théorie de la beauté du christianisme, surtout dans la partie relative à la poésie de la religion, mais elle révèle un grand amour de la nature et une richesse sentimentale qui devaient rendre l'écrivain célèbre parmi les romantiques. L'oeuvre méritait bien le succès qu'elle a eu dans la littérature romantique à laquelle Chateaubriand donna une impulsion décisive....
Le Beau.
Que de fois, durant son sommeil, j’avais supporté sur mes genoux cette tête charmante !
Mais à présent aucun bruit ne sortait de ce sein immobile, et c’était en vain que j’attendais le réveil de la beauté !
[…]comme une blanche vestale qui vient pleurer sur le cercueil d’une compagne. Bientôt elle répandit dans les bois ce grand secret de mélancolie, qu’elle aime à raconter aux vieux chênes et aux rivages antiques des mers
La peinture de Girodet
- Il y a beaucoup de luminosité, l’éclairage est très doux, le corps de la jeune femme ainsi montré en valeur.
- Le cadavre de la morte donne l’impression qu’elle est endormie.
- Dans Le Tableau, tous les personnages du texte sont présents. ( Son fiancé,qui est aux pieds de la morte ainsi que le vieil ermite)
- Il y a deux croix dont une sur le corps du cadavre et au dernier plan.
- La tombe est déjà creusée, la jeune femme prête à être enterrée.
- La jeune femme est habillée en blanc ce qui signifie la pureté , la virginité.
L'embellissement de la mort dans le texte.
- « Vers le soir , nous transportâmes ses précieux restes […] »
- « On voyait dans ses cheveux une fleur de magnolia fanée[…] »
- « Ses lèvres,comme un bouton de rose ceuilli depuis Deux matins,semblaient languir sourire.Dans ses joures d’une blancheur éclatante,on distinguait quelques veines bleues.Ses beaux yeux étaient fermés,ses pieds modestes étaient joints[…]
- « Elle paraissait enchantée par l’Ange de la mélancolie, et par le double soleil de l’innocence et de la tombe. »
- « Je n’est rien vu de plus céleste. »
Les Citations de Chateaubriand
«Le grand tort des hommes, dans leur songe de bonheur, est d’oublier cette infirmité de la mort attachée à leur nature.» Chateaubriand
«Il est dans les extrêmes plaisirs, un aiguillon qui nous éveille, comme pour nous avertir de profiter de ce moment rapide ; dans les grandes douleurs, au contraire, je ne sais quoi de pesant nous endort.» Chateaubriand
«Qu’il est faible celui que les passions dominent ! Qu’il est fort celui qui se repose en Dieu !» Chateaubriand
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Le religieux ne cessa de prier toute la nuit. J’étais assis en silence au chevet du lit funèbre de mon Atala. Que de fois, durant son sommeil, j’avais supporté sur mes genoux cette tête charmante ! Que de fois je m’étais penché sur elle, pour entendre et pour respirer son souffle ! Mais à présent aucun bruit ne sortait de ce sein immobile, et c’était en vain que j’attendais le réveil de la beauté !
La lune prêta son pâle flambeau à cette veillée funèbre. Elle se leva au milieu de la nuit, comme une blanche vestale qui vient pleurer sur le cercueil d’une compagne. Bientôt elle répandit dans les bois ce grand secret de mélancolie, qu’elle aime à raconter aux vieux chênes et aux rivages antiques des mers. De temps en temps, le religieux plongeait un rameau fleuri dans une eau consacrée, puis secouant la branche humide, il parfumait la nuit des baumes du ciel. Parfois il répétait sur un air antique quelques vers d’un vieux poète nommé Job ; il disait :
J’ai passé comme une fleur ; j’ai séché comme l’herbe des champs.
Pourquoi la lumière a-t-elle été donnée à un misérable, et la vie à ceux qui sont dans l’amertume du cœur ?
Ainsi chantait l’ancien des hommes. Sa voix grave et un peu cadencée, allait roulant dans le silence des déserts. Le nom de Dieu et du tombeau sortait de tous les échos, de tous les torrents, de toutes les forêts. Les roucoulements de la colombe de Virginie, la chute d’un torrent dans la montagne, les tintements de la cloche qui appelait les voyageurs, se mêlaient à ces chants funèbres, et l’on croyait entendre dans les Bocages de la mort le chœur lointain des décédés, qui répondait à la voix du Solitaire.
Cependant une barre d’or se forma dans l’Orient. Les éperviers criaient sur les rochers, et les martres rentraient dans le creux des ormes : c’était le signal du convoi d’Atala. Je chargeai le corps sur mes épaules ; l’ermite marchait devant moi, une bêche à la main. Nous commençâmes à descendre de rochers en rochers ; la vieillesse et la mort ralentissaient également nos pas. À la vue du chien qui nous avait trouvés dans la forêt, et qui maintenant, bondissant de joie, nous traçait une autre route, je me mis à fondre en larmes. Souvent la longue chevelure d’Atala, jouet des brises matinales, étendait son voile d’or sur mes yeux ; souvent pliant sous le fardeau, j’étais obligé de le déposer sur la mousse, et de m’asseoir auprès, pour reprendre des forces. Enfin, nous arrivâmes au lieu marqué par ma douleur ; nous descendîmes sous l’arche du pont. Ô mon fils, il eût fallu voir un jeune Sauvage et un vieil ermite, à genoux l’un vis-à-vis de l’autre dans un désert, creusant avec leurs mains un tombeau pour une pauvre fille dont le corps était étendu près de là, dans la ravine desséchée d’un torrent ! [...]
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