L’invention de nos vies/Les choses humaines de Karine Tuil.

Quels sont les points communs entre ces deux romans ?

 

L'invention de nos vies est un roman de Karine Tuil publié en 2013. C'est l'histoire de Samir, un grand avocat ayant menti sur son identité pour construire sa vie. Il croise le chemin de Nina et Samuel, et un triangle amoureux compliqué va se créer.

Les choses humaines, paru en 2019, raconte l'histoire d’Alexandre Farel, un jeune homme brillant, avec des parents connus, accusé de viol. Cette accusation va bouleverser leurs vies.

 

Ces deux livres possèdent de nombreux points communs.

 

Le premier point commun concerne la structure des romans. Dans ces deux livres, l'intrigue principale du roman n'arrive qu’au milieu de l’histoire. Au début de l'histoire l’auteure raconte la vie des personnages, comment ils en sont arrivés là, mais aussi la vie de leurs proches, ou alors de personnages qui ont fait partie de leur vie, et qui l’ont changée, en apportant du bonheur, ou du malheur. Par exemple l’intrigue des Choses humaines est l’accusation de viol d’Alexandre, qui change absolument sa vie et celle de ses parents. Et dans le livre L’invention de nos vies, c’est le retour de Samir dans la vie de Nina et de Samuel qui chamboule tout. Nina se rend compte qu’elle est amoureuse de Samir, et à partir de ce moment-là, tout change. Mais ces intrigues ne forment pas tout le roman, le roman raconte le quotidien de ces personnages, leurs problèmes, leur entourage et leur vie, qui va changer radicalement.

 

 

Il y a beaucoup de personnages secondaires dans ces deux romans. Ils permettent de mieux comprendre l’intrigue principale, mais aussi les personnages principaux. L’histoire de François, le demi-frère de Samir, dont le père est un grand homme politique, est importante. En effet, François est un islamiste radical et il a failli commettre un attentat. Il fait malgré tout partie de la vie de Samir même s’il ne veut pas se l’avouer. On connaît aussi l’histoire de Ruth, la femme de Samir, qui reste un personnage secondaire mais qui fait partie de la vie d’un des personnages principaux. Dans Les choses humaines, la vie d’Adam, le nouveau compagnon de Claire Farel et le père de Mila, est assez bien décrite, on connaît le début de son histoire avec Claire, sa relation avec son ex-femme. Cela peut passer pour des petits détails, mais ces histoires secondaires restent importantes pour mieux comprendre l’intrigue principale et la suite.

 

Le deuxième point commun est le problème identitaire. Jean Farel s’appelle en réalité John Farel, il modifie son nom car il trouve ça plus élégant, et cela ne montre pas le milieu modeste d’où il vient. Quant à Samir, il modifie aussi son prénom, pour cacher ses origines arabes, car lorsqu’il était étudiant et cherchait du travail, lorsqu’il mettait Samir Tahar, il ne trouvait pas d’emploi, mais lorsqu’il a mis Sam Tahar, il dit avoir tout de suite vu une différence, les employeurs l’acceptaient en grand nombre.

Ces deux personnages ont en fait changé de prénoms pour être mieux acceptés dans la société, pour cacher d’où ils viennent. C’est la pression sociale de la réussite qui a pu les inciter à effectuer cela. Samir a fait de nombreuses années d’études, et a beaucoup travaillé pour devenir brillant. Il s’aperçoit qu’avec ce prénom, il n’est pas embauché, après avoir envoyé des centaines de C.V., du moins selon sa perception des choses. Jean Farel n’a fait aucune étude, est parti de rien, il vient d’un milieu très modeste. Il a été élevé par une famille d’accueil après la mort de sa mère quand il avait neuf ans (on apprend qu’elle a été tuée par son père alors qu’il a toujours dit qu’elle était décédée d’une overdose) et l’incarcération de son père. Malgré cela, il a réussi à devenir un grand interviewer politique.

 

Le troisième point commun est que ces deux romans soulèvent des problèmes de société, comme par exemple la place des femmes dans la société. En effet dans L’invention de nos vies, Nina paraît indépendante, mais elle dépend en fin de compte beaucoup de Samir. En effet, lorsque, Samir, l’amour de sa vie revient dans sa vie vingt ans après, elle part du jour au lendemain avec lui. Lorsqu’elle vit à New York avec Samir, dans l’appartement qu’il loue pour elle, elle ne dépend que de lui, elle est tout le temps à sa disposition lorsqu’il rentre du travail, ils ne sortent jamais dehors, elle n’a pas d’amis. La femme de Samir est peu indépendante aussi, elle est reconnue uniquement pour être la fille de son père, un grand politicien, Mr.Berg. Elle ne travaille pas et ne s’occupe que de ses enfants et de Samir.

Dans Les choses humaines, un des problèmes dénoncés est celui du viol, et le livre interroge la notion du consentement. Alexandre dit qu’il n’a pas violé Mila car elle n’a pas dit « non », Alexandre dit ne pas avoir vu son opposition à ce rapport sexuel alors qu’elle dit qu’elle était terrifiée, que ça se voyait, et que son corps exprimait son opposition. A quel moment peut-on donc déclarer qu’un rapport sexuel est un viol, lorsque le présumé agresseur affirme qu’il n’a pas vu de clairs signes d’opposition et que la victime, elle, se sent violée ?

 

 

Le quatrième est la présence de personnages de confession juive. En effet, Samir, dans L'invention de nos vies, est un personnage qui se fait passer pour un Juif mais pas tout à fait volontairement. Il a en effet modifié son nom sur son C.V., en mettant seulement Sam Tahar, car avec son prénom initial à consonance arabe, personne ne l’embauchait, et après cette modification tout a changé. Son employeur l’a pris pour un Juif, et il n’a pas dit que c’était faux, en fait il est musulman. Tout son entourage est juif, sa femme, ses enfants, ses collègues. Lorsque Samir s’est mis en couple avec Ruth, sa femme, elle était persuadée qu’il était juif, sinon elle ne l’aurait pas épousé. Samuel est aussi un personnage juif, dans le même roman. Quant au roman Les choses humaines les personnages juifs ne sont pas les principaux mais sont très importants dans le roman. Par exemple Adam, le compagnon de Claire Farel, est juif, et son ex-femme aussi, elle est une juive très pratiquante, et ses filles aussi, dont Mila qui est la victime du viol. Cela a une place importante dans l’affaire du viol de Mila, car sa mère l’a reniée depuis cet acte et est sortie de sa vie, car elle est très croyante et voulait que sa fille reste vierge jusqu’au mariage.

 

Le dernier point commun est la présence de personnages connus, assez influents dans les deux romans. On peut parler de Jean Farel, le père d’Alexandre, qui est un présentateur de télévision qui interviewe des personnalités politiques très influentes, sur une grande chaîne et depuis longtemps. Claire Farel, la mère d’Alexandre, est aussi dans ce milieu, elle écrit des essais pour un journal, et fait des conférences dans des universités. Samir, dans L'invention de nos vies est un grand avocat, très réputé pour ses qualités d'avocat.

Ces deux livres abordent des thèmes qui ont une place importante dans la société comme le problème identitaire, les problèmes de société, la place de la religion, la présence de personnages influents. Ils sont construits de la même façon avec l’intrigue principale qui arrive au milieu du roman.

 

A lire aussi : la critique de L'insouciance de Karine Tuil, par Jade.

 

Elise