Interview d'Olivier

1) En quoi consiste ton métier ?

Mon rôle est de faire en sorte que chaque élève du collège soit mis dans les meilleurs dispositions pour apprendre sereinement et grandir. Il faut donc se montrer disponible et à l'écoute, instaurer un climat joyeux et chaleureux. Veiller à ce que chacun se sente bien au sein du collège.

2) Depuis combien de temps travailles-tu au collège ?

C'est ma quatrième année au collège Genevoix. J'ai d'abord fait une année en tant que secrétaire au service vie scolaire après quoi j'ai été heureux que la direction me propose d'être assistant d'éducation.

3) Comment travailles-tu avec les autres personnes de la vie scolaire ?

Nous sommes des personnalités très différentes et donc complémentaires. Partant de là nous travaillons à ce que chacun d'entre nous puisse mettre ses qualités propres au service de la communauté éducative et des enfants.

4) Qu'aimes tu dans ton métier ?

Echanger chaque jour avec des adolescents:  quand je suis arrivé au collège, cela m'a réconcilié avec le genre humain. Parce que je vous trouve drôles, inventifs et touchants. Et parce qu'avec vous, tout est encore possible, tout peut advenir. Tandis que nous autres, adultes, nous sommes d'une certaine façon des « produits finis ». Donc c'est très rafraichissant de vous voir tous si souvent.

5) Que n'aimes tu pas dans ton métier ?

Commettre une injustice. Et cela arrive forcément. Ou bien être trop débordé et ne pas avoir le temps pour un élève qui aurait besoin.

6) Qu'est-ce qui est fatigant dans ton métier ?

Je suis d'un naturel paisible et j'apprécie le calme alors ce qui me fatigue, c'est le bruit.

7) Quelle serait ta réaction s'il y avait un incendie au collège ?

Ma première réaction serait de me précipiter en salle 203.

8) De qui tu t'occuperais ?

Mais de Mme Vidallet ! S'il devait lui arriver malheur, cela serait une perte incommensurable pour le monde du semi-marathon féminin et je ne me le pardonnerais pas.

Et puisque vous me parlez d'incendie, je voudrais partager avec vous un peu de poésie. J'ai découvert cet été un recueil de poèmes de Mr Jacques Charpentreau intitulé : « Les Feux de l'Espoir » (Mr Jacques Charpentreau a été, entre autre, Professeur de collège. Je vous renvoie à sa page wikipedia). Le poème que je voudrais partager avec vous s'appelle : « Le Gout de l'Amour ».

LE GOUT DE L'AMOUR

 

Mais tous ces hauts-fourneaux

qui rougeoient dans la nuit

comme un gigantesque incendie,

tous ces foyers et ces chaudières

qui explosent parfois, comme hier

à Saint-Denis

et qui ont tué deux gars d'Afrique du Nord ,

ça doit bien emplir des coffres-forts.

Tous ces avions qui franchissent les mers

un feu rouge à gauche, à droite un feu vert,

contre les étoiles, à travers la nuit,

ça doit bien faire

marcher les affaires ;

et chaque cigarette qu'on offre

à un copain,

ça doit remplir des coffres,

c'est certain.

Chaque feu qu'on allume

sous le latex des hévéas,

au cœur des forêts d'Indochine,

de l'Afrique ou du Mexique,

il faut bien que ça augmente

un peu les dividendes.

 

Feu, feu, feu des bonnes affaires

qui brulent le monde jour et nuit,

à la fin cela doit faire

quelque part de gros profits.

 

Ne brulez pas ce monde camarades,

il se consumera bien tout seul.

Il brule déjà d'un train d'enfer

sans autre espoir que son profit

ses bénéfices, ses dividendes,

à travers ses meurtres, ses guerres,

et ses gigantesques incendies

où gronde votre colère

qu'il ne sait pas encor entendre.

 

Tous ces feux, toutes ces chaudières,

et les flammes des réacteurs

au bout des ailes des avions,

contre les étoiles, au-dessus des mers,

tous ces feux, tous ces hauts fourneaux,

et les flammes des feux de bois,

sous le latex des hévéas,

au cœur des forets du Mexique,

pourraient-ils bruler votre espoir,

votre amour et votre amitié ?

Pour vous le monde a déjà un sens,

et rien ne peut vous empêcher

de savoir qu'il va vers la justice,

vers l'amour, la fraternité,

et que vous marchez avec lui,

à travers les forets du Mexique,

les vastes plaines de la Chine,

à travers les rues de Paris

en allant à l'usine,

tout en fumant, chaque matin,

la première cigarette avec un copain.

Pour vous le monde s'achemine

déjà vers la liberté :

il sera ce que vous le ferez.

 

Chaque jour est une victoire,

Chaque jour un pas en avant,

parce que ce monde

a déjà pour vous le goût de l'amour,

comme une saveur de peche

des les premiers jours du printemps.

 

Il y a des gens pour qui le monde

est fait de courbes, de graphiques,

de coupons roses à détacher

sur la feuille des rentes du passé.

Il y a des gens pour qui le monde

tourne au bal des petits lits blancs

sous le pont d'or ou l'escalier d'argent,

un monde tissé de fils et de câbles

de téléphone et de radio,

donnant des ordres aux bateaux

qui transportent du pétrole,

de l'uranium ou des tanks.

Il y a des gens pour qui le monde

s'appelle profit, production,

un monde sans signification,

enfermé dans sa peur du changement,

comme un tas de louis d'or

dans un coffre-fort.

Un monde de sourires et de faux-semblants,

de haine, de méfiance, de surarmement,

un monde qui se brule

aux grands feux qu'il allume.

 

Mais le monde a gardé l'admirable saveur

des promesses des fruits dans les premières fleurs,

jalousement, comme un mystère et un secret

pour ceux qui font le monde,

sans avoir le droit de le posséder.

Ceux qui ont bâti des maisons

qu'ils n'ont pas le droit d'habiter ;

Ceux qui ont cueilli le coton,

et qui ne sont pas habillés ;

ceux qui ont extrait le charbon,

et qui n'en ont pas profité.

Mais le monde a gardé pour nous mes camarades,

l'admirable saveur d'une grande amitié,

comme une cigarette qu'on offre,

à un ami, un camarade,

parce qu'on a pas autre chose

qu'une cigarette à lui donner,

et qu'un peu de tabac roulé dans du papier,

chez nous c'est comme le sel et le pain qu'ailleurs

on offre au voyageur,

c'est comme le signe de l'amitié :

tout ce qui nous reste à donner.

 

Chaque jour est une lutte

pour ceux qu'on aime, pour le monde,

chaque jour est une lutte

pour ceux qu'on aime, pour tous ceux

qu'on ne connait pas,

pour ceux des hauts-fourneaux,

pour ceux des hévéas,

ceux du Mexique, ceux de Chine,

ceux du coton, ceux des maisons,

ceux des rizières, ceux des mines,

ceux des déserts, ceux des prisons.

Chaque jour est une lutte,

pour ceux qu 'on aime, pour tous ceux

qui viendront après,

sans nous connaître, sans savoir

quel fut le prix de leur présent,

quel fut le prix de notre espoir

qui mit en marche ce vieux monde

et nous fit découvrir au fil de notre vie,

à chaque minute, chaque jour,

à travers chaque peine, le goût de l'amour.

 

Jacques Charpentreau

Les Feux de l'Espoir

 

 

Réponses rédigées par Adrien