Solène se met à la place du peintre endeuillé : un voyageur au-dessus de la mer des nuages
Dans : CONCOURS
Par Estermann le 03 mars 2014, 21:44 - CONCOURS - Lien permanent
LE VOYAGEUR AU-DESSUS DE LA MER DES NUAGES- Caspar-David Friedrich
« J’ai parcouru montagnes, fleuves, mers, continents solitairement. Suis-je enfin arrivé ? Est-ce là le bout du monde ? Mon voyage n’a pourtant pas de fin, je n’ai ni destination ni point d’attache. Je voudrais arrêter ce nomadisme incessant, me reposer, avoir une terre où me reposer, moi voyageur infatigable. J’essaye vainement de m’accrocher à un paysage connu, aimé, au visage d’une femme aimable. Mais une force irrésistible me pousse à continuer mon chemin. Mon seul adage est : se contenter de l’instant présent, Carpe Diem. Qui sait de quoi demain sera-t-il fait ?
Je suis seul face à cette immensité et de mon piédestal de rochers, j’admire ce royaume de vide, de vent et d’éther. Je ne vois pas le soleil mais je sais qu’il est là : il vient de se lever. A mes pieds, les nuages sont si nombreux que j’ai envie de m’y plonger et d’y nager comme dans un océan sans fin. Ils sont légers et semblent sucrés comme les pâtisseries fondantes que ma mère m’achetait à Greifswald, dans mon enfance. Le ciel déteint sur eux et leur couleur, ordinairement immaculée, est une palette d’aquarelle allant du bleu profond au dégradé intense de jaunes comme l’explosion radieuse de l’aurore.
Je ne suis qu’un intrus dans ce paysage. Je ne suis ni une marmotte, ni un
aigle. Je ne resterai pas plus longtemps que le temps d’embrasser encore une
fois ce paysage, de le colorer dans ma mémoire. Une force me pousse à partir,
encore une fois, insatisfait, malgré la beauté du monde à mes pieds.
Mais avant, je veux immortaliser ce paysage pour qu’il en reste une trace de mon éphémère passage. Je rajouterais ma frêle et conquérante silhouette comme témoin de la fugacité de la vie. Je m’imagine de dos, les pans de ma redingote flottant au hasard du vent, plongé dans la contemplation des nuages. Pour combattre le temps, ce temps destructeur, où tout redevient nécessairement poussière. Ma mère, mes sœurs et mon frère, un par un, sont morts, déjà, fauchés dans l’épanouissement de leur vie. Leur souvenir s’éteindra dans la brûlure de ma douleur, de ce deuil qui essore ma vie et que je fais claquer dans le vent qui emporte mon désespoir.
Je m’appelle Caspar-David Friedrich, je suis l’artiste, éternel insatisfait, qui peint l’Immortel, je suis le voyageur au-dessus de la mer de nuages.
Commentaires
Whaou c'est très impressionnant ! Ton texte, beau et poétique, met en valeur le tableau avec une grande maîtrise de la langue. Et j'adore la chute du texte :-D
J'ai adoré ce texte . Il est très bien construit et l'on peut sentir le fait que la personne qui l'a écrite s'est très bien renseigné sur son sujet ; Caspar-David Friedrich.
Il y a beaucoup de détails personnels très originaux et l'on se demande réellement si l'auteur et le narrateur ne sont pas la même personne !
De plus , j'ai trouvé ce texte très poétique par son vocabulaire me faisait penser à une analyse psychologique !!
J'ai donc vraiment bien aimé ce texte ! Félicitations !
suuuuper texte j ai adore !!! ton monologue nous fait vraiment rentrer dans la peau de ce Caspar-David Friedrich auquel tu as apporté beaucoup de renseignements.
c est tres poétique et tres bien écrit et toutes ces descriptions font vivre le texte
Magnifique texte ! J'adore comment tu l'as écrit, avec de belles descriptions et un vocabulaire varié, ça a du te prendre beaucoup de temps! :-)
whaouh ! Tu nous en mais plein la vue 8-O
J'adore ta description du paysage et ton analyse du tableau. De plus, tu te places à l'intérieur de l'image avant de nous annoncer à la fin que tu n'es que l'artiste qui a peint cette image.
Un grand bravo pour ta recherche et ton travail ;-)
Il s'agit d'un très beau récit. J'ai adoré la lecture qui m'a semblé si limpide et qui met en avant de très belles descriptions.
Ton texte est très émouvant et très poétique. Le vocabulaire est riche et recherché. ;-)
On ressent la solitude et la tristesse d'un homme seul face à l'immensité et la beauté de la nature.
C'est un peu angoissant mais j'aimerais connaître la suite, ce que cet homme va faire, ce qu'il va devenir quand il va descendre de ce rocher!
Bravo! :-D
Ton texte est tellement poétique , bien écrit et très recherché. J'adore car il est vraiment complet et renforcé par le travail de recherche que tu as fait.
Bravo Solene tu écris vraiment tres bien,ton texte est tres beau, on dirait qu il sort touut droit d un livre. Je me suis également demandé si l auteur et le narrateur étaient la même personne <3 encore bravo ;-)
On te reconnait bien dans ce texte, la volonté d'une vie imprévisible et sans attaches... La note d'insatisfaction m'étonne plus, mais donne une ampleur plus profonde à ton texte, et laisse apercevoir la complexité des sentiments dépeints ; l'attente, la liberté, la solitude qui se mêlent et empêchent le personnage de prendre une décision. La chute est intéressante également.
Incroyable comme ce tableau inspire des textes différents. A propos, gare au faux pas, Herr Friedrich, il ne faudrait pas tomber dans les nuages, sous peine d'aller rejoindre votre famille plus vite que prévu.
Bravo à l'auteure pour cet interprétation de l'identité du voyageur !