Le poème "Moesta et errabunda" a un titre en latin, qui signifie "Affligée et errante" si l'on considère que ces adjectifs sont au féminin singulier (s'appliquant à Agathe), OU BIEN "les choses tristes et errantes" si l'on pense qu'il s'agit de neutre pluriel.

Il comporte une expression restée très célèbre : "le vert paradis des amours enfantines". Le spleen ici s'exprime dans l'impossibilité de revivre le temps de l'enfance, présenté comme un paradis, d'où l'affliction et l'errance auxquelles est condamné le poète.

                                            

Dans un autre poème - un des plus beaux pour moi -, "Le Cygne", Baudelaire va même jusqu'à insérer des passages du chant II de l'Enéide. Ce poème a pour thème l'exil. On retrouve l'inadéquation du poète à sa vie et l'aspiration vers un ailleurs, par une comparaison avec un cygne prisonnier d'une ménagerie en plein Paris, et surtout - c'est ce qui m'intéresse ici - par le rappel de la figure tragique d'Andromaque...

Cela nous ramène à la Guerre de Troie. Les Grecs ont mis à sac la ville, et ont emmené les femmes pour en faire des concubines ou des servantes. Le fils d'Achille, Pyrrhus ("le Roux") emmène avec lui Andromaque, la veuve du grand Hector, le champion des Troyens. Arrivé en Grèce, il a la ferme intention de l'épouser, malgré ses fiançailles avec la princesse grecque Hermione. Les Grecs se révoltent contre ce choix et le tue, c'est le sujet très simplifié de la tragédie Andromaque de Jean Racine. Andromaque reste dans la région et épouse un de ses compatriotes, Hélénos, qui devient un petit roi local.

Le petit groupe de Troyens rescapés et errants, sous la direction d'Enée, arrive dans cette région et est bien accueilli par Hélénos et Andromaque. Nostalgiques, leurs compatriotes avaient recréé une sorte de petite Troie, en rebaptisant le petit cours d'eau du nom de "Simoïs", une rivière de Troie. Ils aideront Enée en leur donnant une indication sur la route à suivre.

Dans le même poème, Baudelaire parle de "l'homme d'Ovide". Il faut comprendre que, dans les Métamorphoses, Ovide définit l'homme comme le seul animal qui regarde le ciel, alors que les autres ont les yeux tournés vers le sol.

Voilà, j'espère que ces indications vous aideront à apprécier ce poème, que je vous invite à lire.