Préparer l'entretien oral 1ère STMG 11
Par Muriel Tostivint (lycée Marie Laurencin, Mennecy (91)) le 10 novembre 2017, 09:18 - Lien permanent
Vous trouverez les travaux faits en classe qui vous permettront de réviser l'entretien oral.
Par Muriel Tostivint (lycée Marie Laurencin, Mennecy (91)) le 10 novembre 2017, 09:18 - Lien permanent
Vous trouverez les travaux faits en classe qui vous permettront de réviser l'entretien oral.
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Objets pour le texte de Frémin:
- calculatrice: pauvres malheureux / Frémin = richesses. Le testament = argent légué par le curé Thivet. La calculatrice symbolise l'importance de l'argent dans le texte. L'argent divise les personnages. Chacun fait ses comptes: les pauvres crient à l'injustice pendant que Frémin, lui, est satisfait sans se soucier des autres. L'inégalité est au coeur du texte.
- la feuille morte: avant de savoir que le testament est pour Frémin, le texte = une feuille verte, espoir et vie pour les pauvres. L'injustice transforme le texte et lui donne une ambiance qui devient morbide (= feuille morte). D'ailleurs, les pauvres ont des pulsions de mort: les femmes veulent s'arracher les "mamelles", veulent tuer leurs enfants et les hommes veulent déterrer le cadavre de Thivet. La mort domine le début du texte.
Les pauvres également habitent dans la rue comme la feuille. C'est le père de Diderot qui doit les loger dans le village.
- le scotch: les personnages sont choqués par la nouvelle: le père ne sait plus quoi dire face à la froideur de Frémin. Frémin lui-même reste muet devant les pauvres qui ne disent rien non plus devant lui. Le silence est important à la fin du texte.
- salière: vérité revenue à la surface (c'est bien Frémin qui hérite) comme le sel quand la mer est asséchée. Les rouleaux des vagues qui détruisent tout sur leur passage symbolisent la violence des personnages et les dégats causés par les hommes à cause de leur acharnement.
Souffrance présente dans le texte: bruit de la salière désagréable.
Forme de sablier = le temps qui passe.
Le sel est un produit cher (impôt: la gabelle) qui renvoie à la richesse de Frémin. Cet impôt frappe les pauvres.
- la cuiller: le métal fait penser à la clé que prend Frémin.
Effet de miroir comme quand on se regarde dans le dos d'une cuiller. Une image déformée. Le père se souvient de cette scène, il nous la montre en nous la racontant. Effet d'hypotypose: montrer une scène vivante sous les yeux du lecteur comme s'il y assistait en direct.
L'image des pauvres est déformée par le chagrin (exagération de la caricature).
Pas d'idéalisme: tous les personnages sont négatifs (sauf le père de Diderot). la cuiller est un objet sans grâce, sans noblesse et sans beauté comme l'humanité telle qu'ellee st évoquée dans le texte.
Les mises en scène du texte d'Antigone avec un accessoire:
- la casquette: Antigone peut représenter une adolescente rebelle qui ne respecte pas l'autorité des adultes représentée par Créon qui est une sorte de père.
- la grande écharpe: un symbole royal. Créon la porte au début du texte. C'est même Antigone qui lui met, comme si c'était une domestique. on voit la puissance de Créon qui est le roi de Thèbes. Il a tout pouvoir sur ses sujets et sur Antigone en particulier. cependant, on peut imaginer qu'Antigone lui arrache l'écharpe pour s'en parer: elle prend ainsi symboliquement le pouvoir.
- Téléphone portable: Antigone n'écoute pas ce que dit Créon, elle ne fait qu'écouter son portable car elle obéit à une autre loi qui n'est pas celle des Hommes. Elle passe le portable à Créon qui "boit ses paroles": il est dépendant d'elle.
- la boîte de lunettes: symbolise le cercueil, la mort. Pourtant Polynice est justement celui qui n'a pas de cercueil et Antigone veut recouvrir son corps. L'objet annonce égaleemnt le mort prochaine d'Antigone: on peut faire clquer le couvercle à des moments précis qu texte qui annoncent que le destin d'Antigone est la mort.
- Les fermetures éclair qui ferment mal: pour symboliser les problèmes de communication entre les deux personnages.
Que peut-on retenir du spectacle « Songe d'une nuit d'été » de Shakespeare ?
1) les décors et les costumes
- un décor mouvant : des panneaux roulants noirs qui symbolisent les arbres de la forêts qui contrastent avec la façade de la maison au début. Dans ces panneaux, on peut se cacher. Comme ces panneaux bougent, il y a une perte de repères pour les personnages qui sont perdus. Cela est une image de la condition humaine et de la variété des sentiments.
- les costumes font la différence entre les Athéniens et les personnages merveilleux de la forêt, au costumes riches et bariolés, alors que les costumes des Athéniens est ternes.
2) la musique et la danse
Des personnages toujours en mouvements : une mise en scène très dynamique car les personnages ne cessent de se poursuivre. C'est une sorte de chasse. La danse apparaît comme une pause dans toute cette agitation.
De même, la musique, harmonieuse, est un moment de paix qui rompt avec les cris des personnages. Le chant s'oppose à la dispute des humains.
3) la scène de combat.
Une scène surprenante qui modernise la pièce car le metteur en scène introduit les arts martiaux. La dispute des couples augmente de manière excessive ce qui produit un effet comique d'exagération. Les personnages féminins ne sont pas les dernières à se battre !
4) le personnage de Puck.
C'est le personnage principal, qui tient le rôle du bouffon de Obéron. C'est avec lui que démarre l'action. Son quiproquo est une péripétie essentielle. Il fait le lien antre les personnages du monde merveilleux de la forêt et les personnages mythologiques. Sa métamorphose en âne ajoute encore du comique à la pièce, renforcé par le fait que la reine des fées, Titania tombe amoureuse de lui, malgré son origine aristocratique.
5) les relations entre les personnages
L'amour est au centre des préoccupations. Il y a un parallèle entre les Athéniens et le couple Obéron/Titania qui ne s'entend pas au départ. La thématique de cette pièce est bien le reflet ou l'illusion : le monde des fées est le reflet du monde des Athéniens ; le monde rêvé est le reflet du monde réel ; le théâtre est le reflet du monde des spectateurs.
On remarque en effet que la pièce est encadrée par des séquences de sommeil et de réveil: des Athéniens, mais aussi de Titania. On peut se demander dans quelle mesure le spectacle n'est pas le reflet de leur rêve.
Si Antigone était un sport...Ce serait:
- le golf: c'est un sport réputé réservé aux "riches", ce qui pourrait faire penser à l'origine aristocratique des personnages, Créon étant roi de Thèbes et Antigone, princesse, fille d'Oedipe.
La balle serait Antigone: Créon tente de la pousser dans le trou sans y parvenir en un seul coup. Cependant, le destin d'Antigone est de mourir, il n'y a pas d'autre choix possible comme le dit le prologue au début. La balle terminera fatalement dans le trou.
Le trou peut faire penser à la prison que l'on construit autour d'Antigone, qui se referme lentement sur elle. C'est une image de la mort et de la tragédie.
- le basket: les adversaires se disputent la balle comme Créon et Antigone qui ne cessent de lutter entre eux.
C'est également un sport d'équipe. On a le sentiment que chaque capitaine entraîne ses coéquipiers dans sa trajectoires. Les décisions de Créon entraînent la mort de son fils et de sa femme. Les choix d'Antigone influencent également sa soeur Ismène qui tente de l'imiter à la fin de la pièce.
A la fin, les personnages morts sont comme des joueurs qui déclarent forfait. Créon se retrouve seul, il a perdu.
- la boxe: les coups représentent la lutte verbales entre Créon et Antigone.
Les corps blessés des boxeurs rappellent également les corps blessés d'Antigone malmenée par les gardes qui lui font des bleus aux bras par exemple. De même son frère n'est que de la chair à vif.
Le ring rappelle aussi une scène de théâtre dans laquelle les personnages s'affrontent sans pouvoir s'échapper. ils doivent lutter jusqu'au bout. La nourrice d'Antigone apparaît comme son soigneur. Le prologue qui conseille les personnages ou qui les rappelle à l'ordre fait penser à une sorte d'arbitre.
- l'équitation: Antigone ressemble à un cheval farouche et indomptable que Créon a du mal à domestiquer. Ce cheval court vite, tente d'échapper aux gardes quand Antigone se fait prendre en train de vouloir enterrer son frère. Le cheval est une image de la liberté et de la fierté, ce qui correspond à Antigone. Créon serait peut-être un cavalier qui tenterait de diriger ou de dompter ce cheval qui le ferait tomber à chaque obstacle.
La mise en scène de N. Briançon (extrait de la vidéo disponible sur internet à 1.06 minutes).
- les costumes:
- les décors: très sobre et dépouillé. Peu de meubles. Mais une estrade. Les portes se referment devant Antigone pour symboliser son destin tragique, elle est condamnée à mourir. Il n'y a pas d'échappatoire pour elle. La scène est disposée en arc de cercle avec au centre une lumière qui peut rappeler l'atmosphère sacrée qui régnait dans les premiers théâtres de l'antiquité. Cette forme arrondie peut faire penser aussi à un ring de boxe: les personnages se harcèlent, cherchent à se fuir sans pouvoir s'échapper. Ils sont obligés de se battre.
- le positionnement des personnages: Antigone est debout, dans une attitude assez raide. Elle semble très émue, son visage est bouleversé, on a l'impression qu'elle pleure. Elle crie. L'intonation de sa voix n'est pas du tout monotone. Son visage est très expressif et vivant alors qu'elle va mourir. Elle surplombe Créon car elle se trouve sur l'estrade, ce qui montre sa puissance et sa force par rapport au tyran.
Créon, quant à lui, est en contrebas: il est assis. Il tourne le dos à Antigone. Sa posture trahit sa défaite.
Les photographies de mise en scène Antigone.
Quel est le rapport des personnages à la loi?
Texte Bisséi/Moi: Le docteur est dans le respect de la loi (le serment d'Hippocrate). Pour lui, il faut soigner tout le monde. Le criminel est avant tout un patient qui a droit à la vie comme n'importe qui. Le docteur ne prend pas en compte les croyances, le passé ou l'identité de son patient. Il fait preuve de tolérance et se présente comme un homme des Lumières.
Moi (Diderot) lui oppose le non respect de la loi: si on soigne un criminel, c'est la société toute entière qui risque d'en pâtir. Il faut selon lui obéir à cette loi qui veut protéger les citoyens des menaces qui existent contre la République.
Texte Frémin: Frémin respecte la dure la loi de l'héritage. Il est discrédité car il ne prend pas en compte le côté humain du problème en ne faisant aucune preuve de générosité face aux pauvres. Les pauvres sont eux des victimes de l'injustice que l'on ressent en tant que lecteurs. Cependant, ils tentent d'apitoyer Frémin avec une attitude un peu hypocrite. Le père de Diderot a fait respecter la loi mais il semble le regretter. En tous cas, cela lui pose un problème de conscience bien des années après cette scène. Il tente de fléchir la loi incarnée par Frémin sans succès.
Texte Antigone: Antigone ne respecte pas la loi des Hommes. Elle désobéit en enterrant son frère Polynice. Elle obéit à une loi supérieure, qui dépasse celle de Créon. Créon, lui, est du côté de la loi et il est discrédite à cause de cela. Il semble soumis dans le texte: en obéissant à la loi, en acceptant malgré lui d'être roi, il devient un anti-héros.
Mise en scène de la scène d'exposition par P. Kerbrat.
A retenir:
1) Le personnage de Marc se présente dans la pénombre au début pour son monologue. Il apparaît froid, insensible, avec une diction mécanique. On pourrait presque penser qu'il est inquiétant. Il est dans l'ombre car il masque encore ses sentiments qu'il va dévoiler par la suite. Les traits de son visage sont difficilement perceptibles par le spectateur. Son rejet du tableau ne se manifeste que par une légère teinte d'ironie dans le mot "art".
2) le tableau va projeter la lumière sur la scène. C'est une sorte de nouveau soleil qui va éclairer les relations entre les personnages et montrer ce qui était caché.
Le décor est à l'image du tableau: tout blanc, une uniformité sur laquelle se détache les personnages vêtus de noir.
Le nom du peintre "Antrios" a une consonance grecque et rappelle ainsi les dieux de l'Antiquité qui présidaient au destin des humains. C'est comme si le tableau était un personnage spectateur qui allait influencer la vie des autres personnages.
3) importance du silence dans cette mise en scène: le moment sans mots montre les oppositions entre les personnages qui ne se regardent jamais:
Serge semble amoureux de son tableau: il sourit d'un air béat comme s'il montrait sa nouvelle conquête.
Marc en revanche prend ses lunettes pour examiner le tableau comme un expert. Il ne voit pas que Serge attend son assentiment, Serge est dépendant du jugement de son ami alors que Marc commence à être jaloux du tableau. Un malentendu de départ.
Mise en scène de P. Kerbrat (dénouement).
Ce qui peut attirer notre attention:
* La scène de nettoyage arrive après la réplique d'Yvan. Yvan apparaît donc très isolé, ne participant pas à la sortie chez Emile. Son aparté se transforme en monologue. Il est en dehors de la relation entre Marc et Serge qui eux nettoient le tableau ensemble. Yvan ne participe pas au nettoyage du tableau. Il apparaît encore plus qu'avant comme la victime de la pièce.
* Yvan fait rire le public alors que son monologue peut être considéré comme triste: un personnage pathétique et comique. Il récite son monologue très vite, sans pleurer, sans émotion apparente.
* le metteur en scène n'a pas respecté le texte: moins de produits de nettoyage dans la mise en scène. La scène de nettoyage est raccourcie. Le nettoyage est expédié plus rapidement. Cependant, Serge nettoie avec exagération le tableau avec un grand chiffon.
* le personnage de Serge: il sourit alors qu'on pouvait imaginer son énervement à la lecture du texte. Dans la mise en scène, Serge exprime sa malice et sa mauvaise foi, une sorte de plaisir de jouer un bon tour à son ami. Il est complice non pas avec ses amis mais avec le public qui rit d'ailleurs de cette farce.
* Marc nous regarde, contrairement à ce que le texte nous indique. Il apparaît moins inquiétant qu'au début de la pièce. Il fait un geste qui mime le skieur qui glisse et disparaît.
mise en scène de P. Kerbrat: les trois monologues.
1) Des différences par rapport au texte de Reza:
- Inversion des monologues de Serge et de Marc. C'est le monologue de Serge qui termine le passage pour lui donner le plus d'importance et pour lui donner le mot de la fin. L'extrait se termine sur une déclaration de guerre: "je l'emmerde" alors que le monologue de Marc était plus conciliant, se terminant par "gentiment"
- Deux monologues sont transformés en apartés: Marc est tout le temps présent sur scène, quoique dans l'ombre. Lorsque Yvan et Serge parlent, Marc est présent sur le canapé. C'est une sorte de présence absence: il semble "planer" sur les autres personnages, ce qui montre son influence et la place qu'il peut prendre dans la pensée des autres alors qu'ils sont censés être seuls.
2) le rire du public.
- Le public rit à deux reprises: lors de la réplique d'Yvan et de la réplique de Serge. Pourtant, on aurait pu penser qu'Yvan pouvait susciter plutôt de la compassion. Mais, ces personnages deviennent caricaturaux: cela crée un comique de caractère.
- Le public ne rit pas pendant la réplique de Marc: c'est le seul qui est capable d'évoluer et de tenter de se remettre en cause, ce qui annonce son changement lors du dénouement.
3) le rôle de la lumière sur scène:
- La lumière est colorée sur Serge: cela reprend le lexique des couleurs qu'il utilise. Il est victime d'une sorte d'hallucination, on peut croire qu'il a vu une apparition quasi mystique.
- Marc est souvent dans l'ombre, comme il l'était déjà dans la scène d'exposition. On a l'impression que c'est un personnage très important de la pièce mais qu'il est encore caché à lui-même et aux spectateurs (il se révélera au dénouement).
Synthèse: le rôle du monochrome dans la pièce:
- Le tableau est ce qui déclenche le conflit entre les personnages: Serge et Marc s'opposent radicalement à son sujet. Il semble être le 4ème personnage de la pièce. Marc le présente dès le début avec sa couleur, ses mesures, etc, comme il présente son ami (âge, profession, etc). Il est personnifié car Serge dit par exemple qu'il est "très pâle". Marc est jaloux de ce tableau qui lui prend toute l'attention de son ami: le tableau révèle des tensions entre les personnages.
- Le tableau est ce qui permet de différencier les différents lieux de l'action. Il tient lieu de décor (le monochrome signifie qu'on est chez Serge). Il déteint sur le reste du décor qui est blanc.
- Il va révéler les obsessions des personnages, ce qu'ils sont vraiment et faire apparaître les hypocrisies. Serge est littéralement amoureux de son tableau. Il en parle comme si c'était une quasi divinité. Cependant, dans le dénouement, il a complètement oublié son tableau. Marc en revanche a besoin de le "détruire" symboliquement en dessinant le skieur en forme de graffiti pour ensuite l'aimer et se projeter à l'intérieur en utilisant une parole poétique et profonde.
- Le nom du peintre "Antrios" a une consonance grecque et rappelle les Dieux grecs qui décident de la destinée des hommes. Le tableau symbolise peut-être la présence invisible de ces dieux qui mènent les personnages vers la fin de leur amitié. Ce serait une image de la fatalité.
- Le tableau est enfin un reflet du théâtre lui-même qui révèle les comportements du public sur scène. L'achat du tableau blanc va provoquer des révélations et des confidences, comme la pièce va être une occasion de révéler les défauts des humains et les montrer au grand jour.
Pour l'entretien de la séquence "art", il est possible que l'examinateur vous pose des questions sur votre interprétation quand vous avez joué les deux premiers textes devant vos camarades.
Il faudrait que vous vous fassiez une fiche sur cette expérience pour avoir des choses à dire le jour de l'oral si besoin:
1) pourquoi avez-vous choisi d'interpréter tel ou tel personnage?
2) comment avez-vous travaillé avec vos autres camarades?
3) quel choix de mise en scène ou de jeu avez-vous fait pour mettre en valeur votre personnage?
4) quelle difficulté avez-vous éprouvé lors de cet exercice? que vous a-t-il apporté?
5) quel texte avez-vous préféré jouer? la scène d'exposition ou le dénouement? Pourquoi?
Document complémentaire: la photographie de la mise en scène de P. Kerbrat et les deux affiches de la pièce. Les deux affiches montrent la dimension internationale de l'oeuvre qui a été traduite dans plusieurs langues. Succès mondial.
- la photographie de la mise en scène:
Yvan au centre entre les deux amis opposés qui sont assis. Yvan est le seul personnage debout. Il tente de faire le lien entre Serge et Marc mais Marc ne le regarde même pas. Il semble las et blasé. Yvan a l'air découragé et indécis. Il est à la fois le médiateur mais aussi le bouc-émissaire, celui vers qui vont se tourner tous les conflits. Il s'expose, y compris dans cette image.
Les costumes noirs se détachent sur le décor blanc, à l'image de l'Antrios.
Le tableau est posé derrière Yvan, comme si c'était un personnage qui regardait la scène derrière les personnages. C'est un grand oeil blanc. Il est le reflet du spectateur sur scène. On peut aussi penser au regard d'un Dieu qui suivrait le moindre des faits et gestes des personnages, comme s'il les surveillait.
Dans les deux affiches en dessous, on remarque qu'il manque les guillemets du titre qui suggéraient une prise de distance critique et ironique de la part de Marc.
Document 2:
Absence des personnages.
La teinte rose domine alors que le monochrome est blanc. Ce rose peut suggérer le mauvais goût (y compris de l'intérieur symbolisé par le décor). Ce rose peut aussi suggérer l'amitié ou aussi faire allusion à la réplique de Serge qui voit des couleurs différentes dans son tableau, témoignant d'un amour aveugle pour son tableau, proche de l'hallucination. C'est aussi le rose des bons sentiments, d'une amitié de façade où l'on fait semblant d'être poli et attentif à l'autre alors qu'on le critique derrière son dos.
Le tableau est posé comme un miroir dans le décor. Il révélerait ainsi non seulement les personnages mais aussi les spectateurs dans leurs défauts et leur hypocrisie.
L'affiche est traversée d'un faisceau blanc qui peut rappeler la couleur du monochrome qui séparerait les amis: cela symbolise une rupture, une séparation entre deux camps opposés.
Document 3:
Les trois personnages sont présents et le tableau est absent. Cependant, la couleur blanche domine l'affiche et déteint sur les personnages. On pourrait considérer que l'affiche elle-même est le monochrome.
Les trois lettres du titre se détachent car elle sont en couleur: elles peuvent symboliser le graffiti (le skieur) fait par Marc car elles détonent sur l'affiche. Les couleurs peuvent aussi être interprétées comme la traduction d'un sentiment attribué à un personnage de la pièce: le rouge pour la colère de Marc, le vert pour l'enthousiasme de Serge et le jaune pour Yvan, entre ses deux amis. On remarque qu'il y a trois lettres et qu'il y a trois personnages également.
L'identification des personnages n'est pas évidente: ils nous regardent avec des attitudes différentes, comme si nous étions le monochrome. Cela montre aussi que la pièce et le théâtre en général regardent l'humanité des spectateurs et la montrent sur scène. Le personnage de droite peut être Serge car il a un visage enjoué. Le personnage de gauche peut être Yvan: il a l'air désespéré. Le personnage central peut être Marc: il est mis en avant. C'est le personnage le plus important comme le montre le dénouement. Il a l'air de réfléchir: il se pose beaucoup de questions sur le tableau, mais son visage est serein comme il le montre à la fin de la pièce où on voit qu'il s'est réconcilié avec l'Antrios.
Lecture cursive: Huis clos de Sartre (1944).
- Un huis clos: les personnages sont réunis pendant un certain temps dans un lieu fermé dont ils ne peuvent sortir. Autre expression: un procès en huis clos: se déroule en l'absence de tout public.
L'action réside dans les rapports de force qui vont être révélés avec des effets de surprise ou des rebondissements car le jeu des rapports de soumission ou de domination peut s'inverser ou changer. Cela crée une forte tension dramatique sur le plan psychologique: le spectateur est amené à s'identifier mais aussi à jouer le rôle de voyeur. L'action consiste dans l'évolution des discours et dans les rapports d'influence et e manipulation.
- On a souvent une intervention extérieure invisible qui met en scène et intervient dans l'action pour faire réagir les personnages perçus comme des cobayes. Dans la pièce de Sartre, cet extérieur est incarné par le personnage du "garçon" au début. De même, la sonnette qui fonctionne ou non ou la porte ouverte ou fermée sont des éléments qui semblent décidés par une force invisible à travers laquelle on peut voir éventuellement une intervention divine.
On a l'impression que le but est de donner une vision négation de l'Homme, dépourvue d'idéal et qui va chercher à anéantir son semblable.
Sartre est à l'origine de ce concept qui a un grand succès dans les séries ou dans les films aujourd'hui.
- les rapports avec "Art" de Y. Reza:
Dans les deux pièces, il y a trois personnages. Cependant, dans la pièce de Sartre, il y a un homme et deux femmes d'où une rivalité supplémentaire. Le personnage d'Inès homosexuel brouille encore plus les cartes.
Dans les deux pièces, les personnages sont enfermés dans un lieu: on peut considérer par ailleurs une scène de théâtre comme un huis clos. Cependant, les personnages de "Art" ne sont pas enfermés: ils changent de lieu (symbolisé par le tableau accroché). De même, Garcin peut sortir du salon Empire. Pour finir, Yvan et Garcin reviennent dans leur "prison".
Les personnages ne cessent de chercher des alliances entre eux pour isoler un tiers: dans la pièce de Reza, c'est Yvan qui devient le bouc émissaire. Mais, il est aussi l'allié que Serge et Marc convoitent pour se faire valoir. Dans la pièce de Sartre, la séduction amoureuse est un moyen artificielle pour se rapprocher (Garcin avec Estelle et Inès avec Estelle) et rendre l'autre jaloux (surtout Inès). Les personnages cherchent constamment à se nuire: les deux pièces montrent un certain sadisme dans les comportements humains. Les deux pièces illustrent la citation célèbre de Sartre: "l'enfer, c'est les autres": tous les personnages des deux pièces dépendent du regard d'autrui. Serge cherche l'adhésion de Marc à son tableau, Marc cherche l'admiration de Serge, Yvan ne cesse de parler de ses amis à son psychanalyste. Garcin, Inès et Estelle sont eux aussi très dépendant du jugement que les vivants peuvent porter sur eux et leur punition en enfer est justement d'être constamment sous le regard des autres personnages réunis dans le salon Empire.
Analyse de l'image: l'autoportrait de Charlotte Salomon, 1940.
1) un visage de jeune femme triste et mélancolique. Elle semble déprimée. On le voit à travers l'expression des yeux un peu tombants et aussi de la bouche serrée qui ne rit pas. Elle semble un personnage malheureux, pathétique car la jeunesse est traditionnellement synonyme de joie et d'élan vers l'avenir. Or, elle semble proche des larmes ici.
2) un visage qui nous fixe: elle regarde intensément le spectateur. Elle est de trois quart car elle regarde un miroir quand elle se peint. Le spectateur est comme son miroir, ce qui favorise l'empathie. On est amené à s'identifier à elle. Elle paraît presque nous appeler à témoin, elle nous sollicite du regard et on est obligé de participer au tableau. Elle nous suit du regard.
3) Le contexte est important: le tableau a été peint en 1940, au début de la deuxième guerre mondiale. Sans forcément savoir que Charlotte Salomon est d'origine juive, on peut deviner cependant qu'elle peut être affectée par la situation politique qu'elle traverse. Elle est jeune et elle est déjà confrontée à la violence et à la mort. Cela lui donne un côté sage et lucide sur elle-même mais aussi sur la société qui l'entoure. Elle nous regarde en nous jugeant aussi, peut-être avec du mépris, rendant ses contemporains responsables de la situation de cette époque. On peut dire aussi qu'elle sent l'approche de la mort (elle mourra trois ans après d'ailleurs). On peut dire que c'est un tableau d'adieu ou un tableau testament. Elle nous livrerait une dernière image d'elle alors qu'il s'agit d'un de ses premiers tableaux. Cela renforce la dimension tragique du personnage.
4) elle se représente de façon honnête, sans maquillage, sans bijoux. Elle ne cherche pas à s'embellir. Cela donne d'elle une image de simplicité et de naturel. Le spectateur peut être justement sensible à sa beauté: elle a des traits réguliers. Cependant, elle n'est pas coquette, elle ne cherche pas à plaire mais à donner une image d'elle-même vraie. Elle n'est pas très féminine, presque androgyne.
5) enfin, il s'agit d'un autoportrait: Charlotte Salomon est peintre, la peinture est très importante pour elle. Son tableau peut être considéré aussi comme un manifeste esthétique, c'est à dire qu'elle nous montre sa conception de l'art (même si ces tableaux futurs ne ressembleront pas vraiment à cet autoportrait): le trait est simple. Elle ne cherche pas le détail, ni le réalisme: la couleur jaune de sa peau le montre. Les couleurs ne sont pas nuancées, elles ne sont pas très nombreuses mais elles sont tranchées comme le bleu, le jaune. Il n'y a pas de petites touches mais des surfaces pleines de couleurs unies. Les couleurs sont intenses comme sa personnalité.
Les deux gouaches de Vie? ou Théâtre? de C. Salomon.
1) La mère et l'enfant.
- des couleurs vives et apaisantes: le rose, le bleu et le blanc.
- une symbiose entre la mère et l'enfant qui se regardent intensément. Une image de l'amour maternel qui rappelle la Vierge à l'enfant. Rapport fusionnel.
- la mère a un visage doux et épanoui: elle sourit à son enfant. Elle semble totalement dévouée et en admiration face à son enfant qu'elle protège (voir la main en bas de l'oeuvre). Elle forme d'une sorte de cocon protecteur.
= ce serait la mère de Charlotte, Fransizka avec Charlotte sans ses bras. Cette image idyllique contraste avec l'atmosphère du texte qui commence par "Charlotte a appris à lire son prénom sur une tombe". Sa mère n'est pas la figure bienfaitrice qui apparaît sur le tableau puisqu'elle transmet une fatalité tragique à sa fille. Elle est à la fois porteuse de vie mais aussi porteuse de mort.
- on pourrait aussi voir l'image de la tante suicidée, la première Charlotte tenant symboliquement dans ses bras sa nièce, Charlotte Salomon. Il existe un rapport de symétrie entre les deux visages, l'un se reflétant dans l'autre comme Charlotte Salomon voit sa propre destinée dans celle de sa tante.
De même, l'enfant représenté n'est plus un nourrisson mais peut ressembler à la jeune Charlotte lisant son nom sur la tombe de sa tante.
Sa tante serait donc comme une allégorie de la mort, un visage doux de la mort qui plane sur la vie de Charlotte Salomon.
2) Le suicide de Charlotte.
- un article de journal au centre qui ressemble à une pierre tombale. L'article s'oppose au roman de Foenkinos car il comporte des points d'exclamation. Le journaliste veut créer une sensation en racontant un fait divers sordide et en étant voyeur face au drame familial privé. Le suicide de Charlotte semble alors partagé par tout le monde. Un regard malsain sur un événement que Charlotte Salomon n'a pas vécu mais qu'elle reconstitue comme s'il s'agissait de son véritable acte de naissance.
- Charlotte: elle semble dormir, apaisée. Elle est en haut de l'image, comme sublimée, touchant le ciel. Elle sourit. Elle est habillée d'une robe rouge. Un homme dont on ne voit pas le visage vient la voir, peut-être son père qui vient reconnaître sa fille à la morgue ou bien le journaliste curieux.
- en bas de l'image, trois personnages représentant la famille de Charlotte: le père est séparé du groupe des femmes. Les deux femmes sont recroquevillées sur elle-mêmes. Ils semblent noyés dans le fleuve dans lequel Charlotte s'est suicidée. Le chagrin les submerge tant qu'on a l'impression qu'ils sont morts eux-mêmes.
Gouaches de Charlotte Salomon: Alfred.
Première gouache:
- Le visage d'Alfred est multiplié à l'infini. Son discours est reproduit en allemand: une sorte de monologue rempli de références culturelles. Charlotte n'y a pas sa place.
- L'artiste semble fascinée, voire obsédée par Alfred qui la hante alors qu'elle est en exil en France. Elle est capable de reproduire mot pour mot ses paroles. Alfred est une muse pour elle. Grâce aux mots présents dans sa peinture, elle fait vivre Alfred (on pourrait presque l'entendre), ce qui rappelle le titre de son oeuvre: Vie? ou Théâtre? Alfred devient un personnage de théâtre, essentiellement défini par son langage.
- Les expressions du visage (les mimiques) d'Alfred changent d'un portrait à l'autre: même si on a l'impression que cette oeuvre est répétitive, les portraits saisissent tous une émotion originale.
Deuxième gouache:
- Charlotte est en présence d'Alfred mais son discours est beaucoup moins développé. Il se résume à une seule question qui offre ses dessins.
- bien que Charlotte soit debout, elle occupe une place soumise. Elle ferme mes yeux, ses bras sont croisés dans une attitude religieuse d'offrande: elle donne ses dessins à Alfred. La couleur bleue de sa robe rappelle aussi les vêtements de la Vierge.
- Alfred est muet: il contemple les dessins. il semble embarrassé par la somme du travail accompli symbolisé par l'amas de gouaches en désordre sur la table.
- Il a les mains croisées, le regard baissé, il porte des lunettes: il semble réfléchir, à la manière d'un juge ou d'un professeur. Son costume lui donne un air sérieux.
L'atmosphère est apaisante: les couleurs sont vives mais sans violence. On sent que les deux personnages sont proches, même s'ils ne se regardent pas. Leur communication implicite et pudique passe par l'oeuvre de Charlotte. On devine qu'elle est complètement dévouée à Alfred. Son expression contraste avec l'autoportrait étudié au début de la séquence.
Points communs et différences entre Charlotte de D. Foenkinos et Un secret de P. Grimbert.
Les points communs:
- les deux narrateurs font une enquête: ils font des recherches. Ils écrivent leur propre histoire en écrivant celle des autres. Foenkinos se met en scène en disant qu'il part sur les traces de Charlotte Salomon et Grimbert parle de son enfance. Il y a une grande dimension autobiographique dans ces romans. Les narrateurs ne sont cependant pas les personnages principaux de leur oeuvre mais le personnage dont ils parlent a souvent le rôle de double pour eux: Foenkinos voit en Charlotte Salomon une âme soeur et Grimbert parle de son demi-frère comme d'un double réconfortant et gênant aussi.
- importance du contexte historique: la deuxième guerre mondiale et l'extermination du peuple juif. La mort est omniprésente dans les deux oeuvres. Elle sépare les familles: Charlotte meurt alors qu'elle est enceinte, ses parents eux survivent. Hannah et Simon meurent alors que Maxime survit. On a le sentiment que les personnages ne peuvent échapper à leur destin tragique: pour Hannah, elle provoque même ce destin en se dénonçant elle-même.
Le suicide est un événement qui revient dans les deux romans: plusieurs membres de la famille de Charlotte se suicident (sa tante, sa mère, sa grand-mère...). Le père du narrateur de Un secret saute par la fenêtre, entraînant sa femme devenue handicapée.
- importance du thème de la famille, comme source de malheurs. Le narrateur de Un secret souffre du secret qui pèse sur sa famille (la mort de Simon et de Hannah que ses parents lui ont toujours cachée) et Charlotte est élevée dans le deuil de sa tante. Elle a appris à lire son nom sur sa tombe.
Dans les deux oeuvres, il y a des enfants sacrifiés: Simon, l'enfant que porte Charlotte ou bien Charlotte elle-même.
- les personnages tentent de dépasser leur impuissance et leur souffrance ou leur faiblesse, leurs malheurs par l'art ou le sport, des activités qui font qu'ils dépassent leurs limites.
Des différences aussi:
- l'écriture des deux romans est très différente: le texte de Foenkinos s'assimile à un poème. Chaque phrase est isolée sur la page comme un vers, ce qui permet une respiration pour affronter tous les drames de la vie de Charlotte. Cela donne aussi à la lecture un rythme lent. Pour le roman de Grimbert, on remarque des chapitres courts.
- Pas d'oeuvre picturale dans Un secret qui évoque cependant des photos. L'art est moins important dans Un secret alors que Charlotte est aussi le récit d'une oeuvre: Vie? ou Théâtre? on peut aussi penser à l'art lyrique de Paula la belle-mère de Charlotte. L'art est primordial dans la famille de Charlotte.
- Les personnages de Charlotte appartiennent à un niveau social plus élevé. Le père de Charlotte est un grand chirurgien, Paula connaît beaucoup d'intellectuels de son époque et occupe une place importante dans la haute société berlinoise de cette époque. Le grand-père de Charlotte est amateur d'antiquités. On voit que le niveau culturel est assez élevé. Alfred cite Kafka. Les parents du narrateur de Un secret sont vendeur de vêtement de sport dans un quartier populaire. Cependant, on sait que le narrateur deviendra psychanalyste.
Comment expliquer la façon dont écrit Foenkinos?
L'écriture du roman peut surprendre le lecteur: chaque phrase est isolée sur une ligne et peut rappeler le vers d'un long poème dédié à Charlotte Salomon.
- cela introduit une lenteur dans la lecture, parallèle à la lenteur qui atteint la tante de Charlotte comme un poison.
- cela permet à Foenkinos de jouer sur les rimes pour mettre des mots en valeur comme dans l'incipit: "pleure", "douleur", "coeur" ou dans l'épilogue: "coeur" avec "intérieure" et "meurt" ou "exposition" et "Charlotte Salomon". On comprend que Charlotte est devenue une peintre de renom grâce à ses oeuvres réunies dans une exposition ou qu'Alfred offre sa mort à Charlotte.
Cela peut permettre aussi à Foenkinos d'isoler des mots pour les rendre importants comme "pourquoi?" dans l'incipit qui témoigne de l'incompréhension de la soeur, dans un état de sidération suite au suicide de la première Charlotte ou le "Et..." dans l'épilogue qui joue sur l'effet d'attente et le suspens dans le texte.
- Foenkinos explique son style poétique par le fait qu'il voulait introduire une respiration dans son texte. Les événements dont il parle sont très durs (les suicides successifs, la guerre, la déportation de Charlotte...) et il a eu besoin de mettre des silences entre chacune de ses phrases pour ne pas se laisser emporter par les émotions. De même, le lecteur peut avoir le temps de "digérer" les passages tragiques qu'il lit. Cela peut permettre d'aborder l'histoire de Charlotte avec la pudeur qui caractérise les personnages. C'est une façon de les respecter et de leur rendre hommage sans tomber dans le sentimentalisme.
Comment peut-on expliquer le titre de l'oeuvre de Charlotte Salomon: Vie? ou Théâtre?
- Deux points d'interrogation dans le titre: l'artiste laisse planer le doute, elle ne donne pas de réponse. Ce sont les questions que peut se poser le spectateur de ses oeuvres. Elle laisse la question ouverte.
C'est aussi une question que Charlotte peut nous poser à nous-même: notre vie est peut-être un théâtre où chacun jouerait des rôles.
- une opposition entre la "vie" qui renvoie à une réalité et "théâtre" qui relève du domaine de la fiction, c'est une histoire inventée.
Cependant, Charlotte recompose sa vie avec son art. Il y a une dimension autobiographique dans son oeuvre mais les scènes qu'elle peint sont issues de son propre imaginaire personnel (ses gouaches ne sont pas du tout réalistes). Ce sont des sortes de rêves sur sa vie.
- le terme "théâtre" peut s'expliquer par l'importance des mots sur les gouaches de Charlotte: des discours entiers sont reproduits comme celui d'Alfred. Parfois, c'est un article de journal ou parfois ce n'est qu'une seule question. Les visages et les attitudes des personnages sont tellement expressifs que les mots sur les gouaches semblent leur donner la parole. Le spectateur/lecteur croit les entendre. Ces mots donnent vie à ces personnages morts pourtant depuis longtemps. Charlotte Salomon peut s'assimiler à Orphée qui tente de redonner vie aux morts grâce à son art.
Document complémentaire 3 : Napoléon le petit, Victor Hugo (1852)
Hugo a pris part à la résistance parisienne au coup d’Etat du 2 décembre 1851 qui a ouvert la voie au rétablissement de l’Empire. Expulsé du territoire français, il entreprend l’écriture de Napoléon le petit, violent pamphlet qui dresse un portrait charge de Napoléon III, médiocre copie du premier empereur.
Louis Bonaparte est un homme de moyenne taille, froid, pâle, lent, qui a l’air de n’être pas tout à fait réveillé. Il a publié, nous l’avons rappelé déjà, un Traité assez estimé sur l’artillerie, et connaît à fond la manœuvre du canon. Il monte bien à cheval. Sa parole traîne avec un léger accent allemand.
Si on le juge en dehors de ce qu’il appelle « ses actes nécessaires » ou « ses grands actes », c’est un personnage vulgaire, puéril, théâtral et vain. Les personnes invitées chez lui, l’été, à Saint-Cloud, reçoivent, en même temps que l’invitation, l’ordre d’apporter une toilette du matin et une toilette du soir. Il aime la gloriole, le pompon, l’aigrette, la broderie, les paillettes et les passequilles, les grands mots, les grands titres, ce qui sonne, ce qui brille, toutes les verroteries du pouvoir. En sa qualité de parent de la bataille d’Austerlitz, il s’habille en général.
Peu lui importe d’être méprisé. Il se contente de la figure du respect....
Avant le 2 décembre, les chefs de la droite disaient volontiers de Louis Bonaparte : C’est un idiot. Ils se trompaient. Certes, ce cerveau est trouble, ce cerveau a des lacunes, mais on peut y déchiffrer par endroits plusieurs pensées de suite et suffisamment enchaînées. C’est un livre où il y a des pages arrachées. Louis Bonaparte a une idée fixe, mais une idée fixe n’est pas l’idiotisme. Il sait ce qu’il veut, et il y va. A travers la justice, à travers la loi, à travers la raison, à travers l’honnêteté, à travers l’humanité, soit, mais il y va.
Victor Hugo (1802-1885), Napoléon le Petit, I, VI.
Document complémentaire 1
1851.
2 décembre.
Coup d'Etat de Louis-Napoléon Bonaparte. Par affiches, le président1 annonce qu'il dissout l'Assemblée, proclame l'état de siège et rétablit le suffrage universel. Plusieurs députés et généraux républicains sont arrêtées. Les députés de droite se réunissent à la mairie du Xème arrondissement, proclament la déchéance de Louis-Napoléon, puis sont arrêtés. Les députés de gauche appellent à la lutte armée et forment un Comité de résistance clandestin. La police ne trouve pas Victor Hugo à son domicile.
3 décembre.
Hugo et les autres membres du comité, malgré la passivité évidente du peuple parisien que l'Assemblée a combattu en juin 1848 et qu'elle n'a cessé de décevoir, poursuivent la résistance. Le peuple élève quelques barricades. Hugo multiplie les proclamations.
4 décembre.
Saint-Arnaud, commandant, et Magnan, ministre de la Guerre, font donner l'assaut aux barricades. Dans l'après-midi, la troupe mitraille la foule des promeneurs et des curieux sur les boulevards Montmartre et Poissonnière. Les exécutions sommaires commencent à Paris et dans le reste de la France.
11 décembre
Avec le passeport d'un camarade, Lanvin, V. Hugo part pour Bruxelles.
14 décembre.
V. Hugo commence la rédaction de ce qui sera l'Histoire d'un crime.
21 décembre
Un référendum ratifie le coup d'Etat.
1852.
9 janvier.
Décret expulsant du territoire V. Hugo et soixante-cinq autres représentants.
17 janvier.
V. Hugo écrit qu'il a rencontré Hetzel, éditeur, comme lui proscrit2. Il songe à "construire une citadelle d'écrivains et de libraires d'où nous bombarderons le Bonaparte".
14 juin.
V. Hugo abandonne l'Histoire d'un crime.
31 juillet.
V. Hugo quitte Bruxelles pour Jersey, via Anvers et Londres.
22 octobre.
La rédaction des Châtiments commence, ininterrompue jusqu'en juin 1853.
1853.
21 novembre.
Publication des Châtiments à Bruxelles.
Guy ROSA, extrait de la chronologie historique, édition des Châtiments.
Document complémentaire 2:
Dans cet extrait d'une lettre qu'il écrit en réponse à son éditeur Hetzel – lui-même exilé en Belgique -, Victor Hugo précise le rôle que doit jouer, dans Les Châtiments, l'écriture poétique.
Ce livre-ci sera violent. Ma poésie est honnête mais pas modérée.
J’ajoute que ce n’est pas avec de petits coups qu’on agit sur les masses. J’effaroucherai le bourgeois peut-être, qu’est-ce que cela me fait si je réveille le peuple ? Enfin n’oubliez pas ceci : je veux avoir un jour le droit d’arrêter les représailles, de me mettre en travers des vengeances, d’empêcher, s’il se peut, le sang de couler, et de sauver toutes les têtes, même celle de Louis Bonaparte. Or, ce serait un pauvre titre que des rimes modérées. Dès à présent, comme homme politique, je veux semer dans les cœurs, au milieu de mes paroles indignées, l’idée d’un châtiment autre que le carnage. Ayez mon but présent à l’esprit : clémence implacable.
Les deux caricatures de Napoléon III.
Document 1: "C'est son chapeau, sa redingote..."
- Napoléon III seul dans l'image: il n'y a pas de fond. il fait le vide ou le désert autour de lui; il n'a pas de soutien ni d'allié. On peut dire aussi qu'il n'a rien construit: il n'a pas de passé glorieux ni de futur ambitieux. Enfin, sa solitude est aussi une façon de dire que personne ne l'arrête dans son exercice absurde du pouvoir: personne n'est là pour lui dire d'arrêter ou pour le stopper. Seul, le caricaturiste, en se moquant de lui, représente un contre-pouvoir.
- Napoléon III s'est affublé des attributs traditionnels de Napoléon Ier conquérant militaire: les bottes, le manteau, le chapeau (des symboles de pouvoir et de puissance) ainsi que la longue-vue (symbole de projet d'avenir et d'ambition politique). Cependant, on remarque que la longue vue est dirigée à l'arrière, elle reste dans le dos du personnage, elle est inutile. De plus, le chapeau lui tombe sur les yeux, ce qui montre son aveuglement, son absence de lucidité sur sa capacité à gouverner et aussi sur l'incertitude du chemin qu'il fait prendre au pays qu'il semble mener au hasard. On a l'impression qu'il peut aussi trébucher en se prenant les pieds dans le manteau.
- les vêtements sont trop grands pour lui: comme un enfant, il s'est déguisé en prenant les habits de son oncle prestigieux. Cela sous entend qu'il a volé, qu'il a usurpé l'identité d'un autre qu'il tente tant bien que mal d'imiter (il reprend aussi la gestuelle de Napoléon Ier avec la main glissée sous le gilet). Le caricaturiste l'accuse de puérilité: pour lui, gouverner s'assimile à un jeu d'enfant, à un amusement. Mais, la barbe de Napoléon III montre qu'il ne s'agit nullement d'un enfant. Le caricaturiste a la même démarche que V.Hugo: il cherche à démasquer Napoléon III et à montrer qu'il est "petit" par rapport à son oncle dont il veut utiliser la légende à son profit.
Document 2: "la grenouille et le boeuf"
- Ici, le caricaturiste reprend une fable connue de La Fontaine (XVIIème siècle): "La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf":
Une Grenouille vit un Boeuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n'était pas grosse en tout comme un oeuf,
Envieuse, s'étend, et s'enfle, et se travaille,
Pour égaler l'animal en grosseur,
Disant : "Regardez bien, ma soeur ;
Est-ce assez ? dites-moi ; n'y suis-je point encore ?
- Nenni. - M'y voici donc ? - Point du tout. - M'y voilà ?
- Vous n'en approchez point. "La chétive pécore
S'enfla si bien qu'elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages."
On reconnaît Napoléon III animalisé en grenouille, dans une posture ridicule et humiliante: accroupi, regardant Napoléon I avec avidité, le torse bombé, mais incapable de se lever.
A l'opposé, Napoléon Ier , massif et imposant, occupe la majeure partie de l'image:
- il ne porte même pas son regard sur Napoléon III comme V. Hugo qui ne daigne même pas nommer son adversaire dans son poème.
- il est en déséquilibre sur sa chaise et ses bottes semblent pouvoir facilement écraser l'animal à ses pieds.
- il apparaît calme et serein. La cocarde de son chapeau et les quatre pieds de la chaise peuvent faire penser à un bœuf.
A l'inverse du document 1,
- on repère un arrière-plan qui est un rappel du passé épique et glorieux des batailles de Napoléon Ier (que l'on retrouve dans les premiers vers de chaque strophe de "Chanson").
- présence de deux personnages: Napoléon Ier tenant sa longue vue dans le bon sens, de l'avant. Il tient Napoléon III en respect.
- Napoléon III est déshumanisé, ce qui rappelle aussi le poème qui appelle Napoléon III "singe"
Hugo : comment apparaît-il dans les 3 poèmes étudiés ?
Napoléon III : comment apparaît-il dans les 3 poèmes étudiés ?
Il n'apparaît jamais directement en disant « je » mais il est omniprésent indirectement.
- c'est un proscrit, un exilé : Dans « tout s'en va », il est solidaire des bagnards. On croit entendre sa plainte déchirante « Ô France ! Je m'enfuis et je pleure ». Il fait entendre les cris des opprimés qui ont peur (« Le Sacre ») ou qui sont emprisonnés (« Tout s'en va »).
- c'est un résistant malgré son exil : dans « Tout s'en va », son mépris « reste ».
- c'est le gardien des valeurs fondamentales : dans « Tout s'en va », les personnages représentent V. Hugo et dressent indirectement son portrait : il est garant des valeurs morales comme « la raison » ou « l'honneur », des idées littéraires comme « la pensée » ou « la poésie »…
- c'est un prophète qui prédit l'avenir :
* la dernière strophe de « Chanson » prévoit la chute imminente de Napoléon III qui se noiera « dans la fange ». Il a le rôle d'un juge et d'un justicier.
* il est proche de Dieu à travers le personnage de la foudre dans « Tout s'en va » : la foudre s'apprête à tomber.
* c'est un être supérieur qui se permet de tutoyer Napoléon III et de lui donner des ordres comme à un domestique : « viens boire »...dans « Chanson ».
- un animal :
* ridicule : un perroquet dans « Tout s'en va », de la volaille dans « Chanson » : « Petit, petit », un « singe » dans « Chanson ». On a le ton de la satire, de la caricature.
* inquiétant : un perroquet charognard dans « tout s'en va », ivre de « sang » dans « Chanson », un rat qui vient des égouts dans « Tout s'en va ».
- un criminel immoral, sans foi ni loi :
* les criminels le reconnaissent comme puissant (« Tout s'en va ») et veulent l'imiter dans « Le Sacre ».
* il aime le vice : il fréquente les « filles » dans « Chanson », il vole, c'est un traître : « roi félon » dans « Tout s'en va ». Il est dangereux et violent. C'est un tyran sans pitié.
- c'est un usurpateur, un manipulateur qui utilise la légende de son oncle : il l'imite de façon médiocre comme un « singe » ou un « perroquet » mais il est démasqué par l'aigle dans « Tout s'en va » et par le poète dans « Chanson ». C'est un anti-héros. Il est « petit », sans charisme et sans envergure.
- c'est un fléau pour la France qui va régresser à cause de lui : dans « tout s'en va », c'est un « homme funeste » qui empêche la liberté d'expression. Il porte le chaos et la terreur : à cause de lui, Paris tremble dans « Le Sacre ».