La lunette et les étoiles médicéennes (extrait choisi par Antoine, Maxime C., Hugo et Maxime R.). Quatrième tableau.

Le Mathématicien : Naturellement, vous n’ignorez pas que selon l’avis des Anciens, des étoiles qui tourneraient autour d’un autre centre que la terre ne sont pas concevables,  surtout de ces étoiles qui n’ont pas de support dans le ciel ?

Galilée : Oui.

Le Philosophe : Et, abstraction faite de la possibilité de l’existence de telles étoiles, que le mathématicien (il s’incline dans la direction du mathématicien) semble mettre en doute, je voudrais en toute modestie, en ma qualité de philosophe, soulever la question : de telles étoiles sont-elles nécessaires ? Aristotelis divini universum…

Galilée : Ne devrions-nous pas continuer dans le langage de la conversation ? Mon collègue, monsieur Federzoni, ne comprend pas le latin.

Le Philosophe : Importe-t-il qu’il nous comprenne ?

Galilée : Oui.

Le Philosophe : Excusez-moi. Je croyais que c’était votre polisseur de lentilles.

Andréa : Monsieur Federzoni est un polisseur de lentilles et un savant.

Le Philosophe : Merci, mon enfant. Si monsieur Federzoni y tient…

Galilée : Moi, j’y tiens.

Le Philosophe : L’argumentation y perdra en éclat, mais vous êtes chez vous. Le monde tel qu’il est décrit par le divin Aristote, avec le mystique concert de ses sphères et de ses voûtes de cristal, et le mouvement circulaire de ses corps célestes, et l’inclinaison de l’orbite solaire, et les secrets des tables des satellites, et la profusion d’étoiles du catalogue de l’hémisphère austral, et la radieuse construction du globe uranien, est un édifice d’une telle ordonnance et d’une telle beauté que nous devrions sans doute hésiter à troubler cette harmonie.

Galilée : Et si à travers cette lunette Votre Altesse apercevait maintenant ces étoiles aussi inconcevables qu’inutiles ?

Le Mathématicien : On serait tenté de répondre que votre tube, montrant quelque chose qui ne peut pas être, est un instrument peu digne de confiance, n’est-ce pas ?

Galilée : Qu’entendez-vous par là ?

Le Mathématicien : Il serait pourtant plus profitable, monsieur Galilée, que vous nous donniez les raisons qui vous amènent à supposer que, dans la plus haute sphère du ciel immuable, des astres flottant librement puissent se déplacer.

Le Philosophe : Des raisons, monsieur Galilée, des raisons !

Galilée : Les raisons ? Alors qu’un coup d’œil sur les astres eux-mêmes et mes relevés font apparaître le phénomène ? Monsieur, la discussion devient insipide.

Le Mathématicien : Si l’on était sûr que vous ne vous échauffiez pas encore plus, on pourrait dire que ce qui est dans votre tube et ce qui est dans le ciel peuvent être deux choses différentes.

Le Philosophe : On ne saurait s’exprimer avec plus de courtoisie.