Cette activité me rappelait mon passé, où je travaillais le bois dans les grandes usines. Sculpter était une de mes passions. J’étais très sensible à tout ce qui se rapportait à l’art. J’aimais aussi enquêter et observer. Avec ma petite taille, je pouvais me faufiler et me cacher dans les endroits les plus étroits. Durant ma jeunesse je m'étais promis de garder ces passions et c’est ce que je fis. Étant devenu commissaire, je me gardais des moments pour jouer avec le bois mais ceux-ci étaient rares et brefs. Ce qui me mettait par dessus tout hors de moi c'était qu’on me dérange dans mes activités.

Justement, j’entendis la sonnerie retentir et j’allai donc, un peu énervé, ouvrir la porte derrière laquelle se tenait mon adjoint Eric.

Bonjour Mr Eden, lui dis-je, que venez-vous faire à ma porte à cette heure-ci?

Bonjour Commissaire Legaden, j’ai reçu dans ma boite aux lettres une lettre l'Angleterre qui vous était destinée. Alors, je suis venu vous l’apporter car nous ne pouvons pas savoir ce que cela peut être. Et s’il s’agit d’une enquête, c’est peut-être urgent…

Eric me tendit la lettre et je l’ouvris.

C’est de la part de la police de Londres, m’écriai-je, cela doit être important.

 

Bonjour Monsieur Legaden,

 

La couronne de notre reine a été volée. Celle-ci étant très précieuse,

nous devons la retrouver au plus vite. Les deux suspects identifiés

ont pris hier aux aurores, un bateau pour la France. Nous les avons suivis

et ils sont à présent à Larmor Baden, votre ville natale. Pouvez- vous

continuez de mener l’enquête?

 

Cordialement,

La police de Londres.

 

Humm… intéressant, m’écriai-je. Par contre nous n’avons aucun indice… As-tu entendu des rumeurs, des plaintes ou d’autres choses depuis ce matin ?

Non, rétorqua Eric. En tout cas, si les suspects sont dans cette ville, ils ne doivent pas en sortir !

Assurément Mr Eden, je propose qu’on envoie des policiers à tous les coins de rue.

Je pris immédiatement le téléphone et composai le numéro du commissariat. Une fois en ligne, j’ordonnai d’envoyer des policiers partout à Larmor Baden.

Merci, monsieur, au revoir… Oui, nous allons nous rendre sur les lieux… oui… Au revoir.

Et je raccrochai le téléphone. J’expliquai la situation à Eric : il y avait eu, ce matin, un homme suspect qui rôdait autour de l’église. Un autre policier avait repéré un homme avec des attitudes bizarres.

Rendons-nous tout de suite sur la place en question pour les observer, rétorquai-je.

Nous arrivâmes sur la place de l’église. Il y avait de beaux grands arbres et de belles fleurs colorées. A côté de la boulangerie, des dizaines de gens attendaient le bon pain chaud du boulanger. De l’autre côté du trottoir on pouvait voir la queue de ceux qui allaient chercher le journal. Nous aperçûmes les deux hommes en question. Il y avait un grand blond qui marchait devant la mairie et un petit brun qui était assis à côté de la boulangerie. Le grand blond se retourna et quand il nous vit, il se mit à courir et prit la fuite. Nous partîmes à sa poursuite mais nous ne parvînmes pas à l’attraper. Grâce au talent de photographe d’Eric, nous avions maintenant une photo.

Je propose qu’on interroge l’autre suspect. Il est assis là-bas à côté de la boulangerie. De toute façon l’homme ayant pris fuite tombera entre les mains des policiers rôdant dans le quartier. Nous n’avons pas de soucis à nous faire.

Assurément. Notre suspect nous jette des regards en biais depuis notre arrivée.

Bonjour monsieur, dis-je au suspect, quel est votre nom ?

Je m’appelle M. Hanss, dit-il.

Nous aimerions vous poser quelques questions.

D’accord... mais pourquoi donc ?

Peu importe, fis-je. Où étiez-vous hier? Et que faisiez-vous ?

Je ne me rappelle plus, vous savez, j’ai une très courte mémoire, je crois bien que j’ai Alzheimer.

Allez, faites un petit effort... et puis l’Alzheimer à cet âge, ce n’est pas possible !

Je vous assure monsieur, et puis ma vie est très monotone et répétitive, donc si je ne me rappelle pas ce que j’ai fait hier c’est qu’il ne s'est rien passé d’important.

Avez-vous voyagé récemment ?

Oui, je suis allez chez ma grand-mère à Londres pour lui faire un petit coucou. Ah, je me rappelle, je suis rentré hier matin, oui, c’est ça…

Bon, très bien, ça ira comme ça, bonne journée…

Nous partîmes et rentrâmes chez nous. Mais soudain, en passant dans la petite route fleurie à côté du marais de Pen en Toul, sur le chemin du retour, nous aperçûmes l’homme ayant pris la fuite quelques minutes plus tôt. Nous l'interrogeâmes et obtînmes quelques informations supplémentaires. Il était boulanger à Baden et avait une fille nommée Huguette. Le suspect n’avait pas dit un mot de plus.

Y a-t-il des caméras de surveillance dans la boulangerie ? dis-je à mon adjoint.

Je crois, il me semble en avoir vu l’autre jour, rétorqua Eric.

Dans ce cas, on pourrait aller voir l’historique des caméras pour vérifier si notre boulanger était présent hier et avant-hier…

Excellente idée ! Je propose qu’on y aille demain matin aux aurores.

Et c’est ce que nous fîmes. Nous remarquâmes que le suspect s’était absenté deux jours et qu’il était revenu hier au petit matin.

C’est exactement les éléments qu’il nous fallait. C’est sûr que c’est lui qui a volé la couronne ! s’écria Eric.

Assurément !

Après un deuxième interrogatoire, notre boulanger nous dit que son absence des jours passés était liée au petit rhume qu’il avait eu. Nous allâmes donc voir son médecin pour vérifier l'information et il nous dit effectivement que monsieur le boulanger avait été malade.

Mais qu'est-ce qui expliquerait sa fuite d’hier ? s'interrogea Eric.

J'en ai aucune idée, mais j'ai peut-être une solution…

Nous allâmes interroger sa fille pour avoir des explications. Elle nous raconta que son père avait été traumatisé petit par des policiers qui avaient attaqué un voleur. Depuis, le boulanger avait la phobie des policiers et prenait fuite au premier regard. Nous en conclûmes qu'il était innocent et que c'était donc monsieur Hanss le coupable.

Nous pouvons aller demander à Paulette, la vieille dame qui surveille les entrées à Larmor-Baden, pour savoir si monsieur Hanss s’est absenté récemment, proposa M. Eden.

Oui, très bonne idée, appelons-la.

Je composai le numéro et parlai avec Paulette. Elle avait vu monsieur Hanss partir et revenir la veille vers six heures trente du matin, l’heure où elle ouvrait habituellement ses volets, avec un sac qui avait l'air lourd et qui scintillait. J'en ai directement conclu que nous avions assez d'éléments pour l'arrêter. Eric a proposé d'envoyer une lettre à Monsieur Hanss de la part d’un soi-disant vieil ami qui voulait le rencontrer sur l’île de Berder.

Et sachant qu'à marée basse nous pouvons y accéder et qu’à marée haute le passage est recouvert d’eau, c’est en fait une presqu'île, nous fixerons le rendez-vous à seize heures. C’est de toute évidence la dernière heure où nous pouvons passer. De ce fait, le coupable sera bloqué sur l'île et nous pourrons l'arrêter.

Je finis mon explication et j'allai rapidement déposer la lettre chez Monsieur Hanss. Tout se passa comme prévu et nous parvînmes à l’arrêter. Monsieur Hanss, trop prudent et fier de lui, avait apporté la couronne. J'allai donc la rapporter en Angleterre, en main propre à la Reine. Elle me félicita et me remit un diplôme de détective professionnel de Londres ce qui me ravit car c’était mon plus grand rêve…

Camille PERCHE, 4°4