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Ça y est il y était, pour l’instant il se sentait serein mais il savait que ça ne durerait pas, il ne pouvait pas faire marche arrière.
Les mains crispées sur son pantalon il repensait à la réaction de sa femme et de ses enfants lorsqu’il le leur avait annoncé, leurs visages baignés de larmes qu’il ne savait pas comment consoler.

À présent il avait peur, il était terrifié, personne ne pouvait le comprendre. Durant les derniers mois beaucoup de monde était revenu vers lui, des amis, de la famille qui soudain se rapprochaient comme s’ils avaient toujours été là pour lui et comme s’ils ne l’avaient délaissé. Pourtant des années entières s’étaient écoulées depuis leur dernière rencontre.

Son corps lui échappait, il filait à travers l’obscurité, seul, sans personne et il ne pouvait plus rien contrôler, pour la première fois de sa vie ce n’était plus lui qui décidait, c’était le destin, peut-être cela marcherait, peut-être cela ne marcherait pas.

Il se sentait tellement seul. Ces derniers temps lorsque tous ces inconnus étaient revenus, lui se sentait seul, il y avait pourtant beaucoup de monde, beaucoup d’animation, mais il savait que ces personnes n’étaient pas là pour lui, pas pour ce qu’il était mais pour ce qu’il allait devenir. Alors lui se forçait à faire des sourires, à dire bonjour et à organiser des cocktails pour que ses “amis” pussent le voir. Son corps était comme une étoile tombée du ciel, comme un coquillage dans un salon, il ne se sentait pas à sa place comme un intrus dans le paysage si parfait qui l’entourait.

Soudain son rythme cardiaque s’accéléra, la peur montait en lui comme de l’eau en ébullition.  Il était terrorisé, il ne voulait plus, cette idée le pétrifiait. Son corps était secoué de violents frissons, jamais il n’avait ressenti cela. Il planait dans l’obscurité, terrifié, il ne bougeait pas, n’osait plus et resta plusieurs minutes comme cela.

Il commença à l’apercevoir quelques heures plus tard. Enfin tout était fini, cette lumière blanche qu’il avait tant attendue… il posa un premier pied sur la lune puis un deuxième et savait que des millions de gens le regardaient derrière leur poste de télévision. À présent il n’était plus seul.

Manon (3è5)

Commentaires

1. Le 12 novembre 2014, 21:08 par Perissinotto

Bravo Manon !

2. Le 12 novembre 2014, 22:39 par acollias

:-) Comme le lecteur est bien mené par le bout du nez!