Quelques articles critiques sur le spectacle :

  • dans le Monde : Dans Elle brûle, il n'est même pas sûr qu'Emma juge sa vie médiocre. Elle n'arrive tout simplement pas à la vivre. Ce qui l'en empêche ne vient pas d'une mélancolie, mais d'un « rien » qui l'enveloppe tout entière, comme une peau de chagrin dont elle ne sait comment se défaire. D'où ses gestes qui flottent, ses mains qu'elle lave trop, ou qui volettent dans l'espace.

On pourrait la croire simplement distraite, cette Emma dont le mari accepte tout. Sait-il ou ne sait-il pas ? Veut-il se protéger, et protéger sa propre vie, cette femme qu'il aime, cette famille qu'il a voulue ? A chaque mensonge d'Emma, il répond par un « Ah bon » si laconique qu'il vous fend le cœur. Parce que vous, spectateur, vous savez, et vous voyez : Emma avec son amant, Camille avec son baby-sitter qui sort de la chambre de la fillette, vêtu d'un pyjama du père. Et la mère de Charles avec ses longs cheveux blancs, qui arrose ses plantes et se persuade que son mari mort va arriver par le train.

Ce qui est magnifique, dans Elle brûle, c'est à quel point tout est suggéré, dans la succession de tableaux qui composent le spectacle. Ils s'enchaînent si bien que l'on a l'impression de s'immerger, comme on le ferait dans une forêt profonde, dans un paysage imprégné par l'épaisseur du temps qui tisse les drames secrets d'une famille. Cela tient à une longue préparation, deux ans, dont Les Hommes approximatifs se sont nourris. 
Brigitte Salino

Cela tient aussi au talent de Caroline Guiela Nguyen. Cela tient enfin au jeu remarquable des comédiens, qui laissent transparaître, au meilleur sens du terme, ce que les personnages sont : des hommes approximatifs. Comme chacun d'entre nous, dont Elle brûle, qu'on ne saurait trop conseiller d'aller voir, renvoie un miroir, avec une grâce inquiétante. Ou, au choix, une inquiétude gracieuse."

  • http://www.journal-laterrasse.fr/elle-brule/
  • extrait d'une interview du metteur en scène dans la terrasse : « L’écriture de plateau, ça n’a rien de nouveau. Mnouchkine l’a fait bien avant nous et surtout, ça recouvre tout un tas de réalités différentes. En ce qui nous concerne, nous arrivons aux répétitions avec une bible. Comme une bible de scénario, avec le contexte, des fiches de personnage, des photos, etc. Ensuite on démarre les improvisations, et Mariette Navarro écrit des textes avec des mots un peu plus grands que ceux des acteurs,  qu’elle insère dans l’histoire. Dans l’un de ces passages, elle écrit : « ce qu’il y aurait de pire, c’est de ne plus y croire ». Et ça colle à notre projet : ce qu’on demande au spectateur,  c’est d’y croire.

    Décortiquer le réel

    « En fait, Elle brûle raconte l’histoire d’un groupe de personnages, d’une famille. Ça peut paraître ringard, mais l’idée de raconter une histoire, c’est vraiment notre moteur. Une histoire, c’est un fragment du monde qu’on essaye de faire rentrer sur un plateau.  J’ai été marquée par des réalisateurs comme Mike Leigh faisant entendre une langue qui me paraissait si proche, avec des mots comme ceux que j’entendais chez moi. C’est  dans cet objectif qu’on travaille beaucoup par improvisations, et qu’on a souvent l’impression d’avoir de vraies gens sur le plateau. Deux comédiens amateurs s’intègrent d’ailleurs dans la troupe. En fait, on essaye de décortiquer le réel, de trouver quel est le quotidien de cette famille, sa manière par exemple de prendre le petit-déjeuner, de vivre ensemble. Dans ce cadre, un jeu quotidien, ça reste du jeu, et si derrière les personnages, on voit les personnes, le plus important pour nous reste la fiction. »

    Propos recueillis par Eric Demey