Un site sur Melquiot, son travail : http://www.fabricemelquiot.fr/

Sur ce site, vous trouverez des extraits videos d'interviews de Fabrice Melquiot : sa découverte du théâtre, le rapport à l'écriture etc : http://www.theatre-contemporain.net/biographies/Fabrice-Melquiot/videos/

Une video de quelques extraits d'une mise en scène de la pièce par Virginie Fouchault, 2011 http://www.youtube.com/watch?v=teaOVQ3avx4

A lire, ce texte qui présente la pièce et ses enjeux :

Marcia Hesse, « cachée derrière chacun des mots » trois générations s’apprêtent à réveillonner Le 31 décembre, dans la maison au bord de la mer, est réunie la famille avec quelques amis. Trois générations préparentle souper,bavardent, s’apprêtent à réveillonner. Et surtout–on l’apprendra progressivement – à reconstituer très précisément le rituel du soir où, voilà juste un an, Marcia Hesse disparut dans la terrible tempête qui, comme aujourd’hui déferlait. On ne parle pas tout de suite de la jeune fille, mais tout de suite elle semble « cachée derrière chacun des mots », courtes phrases codées apparemment sans importance, conversations décousues coutumières chez ceux qui se connaissent trop pour espérer se surprendre, qui s’aiment trop pour vouloir se faire mal.

Sur le thème “dîner de famille”, on pourrait craindre le déballage plus ou moins sanglant des haines longtemps réprimées et des secrets honteux, il n’en est rien. Tout juste quelques disputes, des semi-vérités et demi-mensonges, des blagues internes, des moqueries, des révélations éventées. Rien que de très normal quand on se retrouve entre soi après quelques mois. la pièce fouille les équivoques dela tendresse, elle emporte vers le fantastique. La pièce de Fabrice Melquiot creuse la gêne, les incertitudes et les inquiétudes de ces moments qui devraient se vivre dans la gravité d’un événement exceptionnel, mais où tout est trop familier pour casser les habitudes. Elle fouille les équivoques de la tendresse. Elle emporte vers le fantastique, menée par le fantôme souriant de la jeune morte qui traverse les mémoires, attise les souvenirs, les anecdotes, les histoires, les regrets, les émotions, pousse aux confidences. Invisible aux habitants de la maison, Marcia Hesse apparaît, regarde, et puis disparaît, revient, finit par se trouver seule en scène à prolonger ses rêveries. Seule dans cette maison dont il est si dangereux de sortir, ne fut-ce que pour fermer les volets. Dehors, c’est la mer déchaînée, la tempête.Sait-on ce qu’il y a réellement dehors ? Sait-on si l’on pourra jamais revenir ? Pourtant, parents et amis, tous vont partir. Ils ne vont pas à la rencontre de Marcia Hesse dans la mort. Ils veulent lui laisser la place, sa place à elle qui ne fait plus partie d’eux, au souper d’une fête qui n’aura pas lieu. Ils lui laissent la maison..« Il s’agit avant tout de raconter une histoire fracturée, faite de trous, de dislocations, de fausses pistes. Les personnages se connaissent suffisamment pour ne pas avoir besoin de tout expliquer tout de suite. Les répliques ne se répondent pas directement, n’arrivent pas en continuité, mais en constellations, en éclatements. » « J’aime les zones de mystère à démasquer, les secrets à débusquer » Emmanuel Demarcy-Motta

Alors il s’agit de donner à cette histoire une évidence scénique. La maison est là, avec ses chambres, ses chaises, ses livres que l’on feuillette et dont on cite quelques phrases, comme pour se donner une contenance, éviter les paroles trop précises, et finalement aborder un terrain d’entente. Dans la maison-banquise, rien n’est définitif. Le plancher blanc se fissure, s’ouvre parfois sur le noir des gouffres, les murs s’écartent, se perdent dans l’inconnu, se confondent aux rideaux qui enserrent des espaces rétrécis et les embrument, et derrière lesquels les vivants semblent des ombres.« J’aime les zones de mystère à démasquer, les secrets à débusquer. Monter, démonter, mettre en marche les mécanismes cachés des actions, des conduites est passionnant. J’aime qu’apparaisse la façon dont l’imaginaire se met au travail chez les personnages. Les comédiens doivent retrouver leur violence sous-jacente, leur force qui est grande, en particulier chez les femmes, et aussi les lois qui régissent leur mental. Eux aussi appartiennent aux trois générations. Pour la plupart, ils ont déjà travaillé ensemble, ils peuvent partager et faire partager leurs expériences.« se retrouver seul face au vide de la mort, au deuil à accomplir » « Il ne s’agit pas de psychologie, plutôt de manière d’être, de réagir, et la place d’où ils parlent devient essentielle. Selon qu’ils se trouvent loin ou près les uns des autres, selon qu’ils se regardent ou non, la tension entre eux évolue. En fait, sans arrêt ils essaient de se rassembler, mais n’y parviennent jamais. Ils ne se fuient pas, au contraire. Simplement, toujours quelque chose intervient, les en empêche. Et puis, en dernier recours, ils s’en vont, tous et ensemble. Mais ensuite, obligatoirement, chacun va devoir se retrouver seul face au vide de la mort, au deuil à accomplir. »

Colette Godard

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En annexe, vous trouverez le dossier pédagogique de la mise en scène de Emmanuel Demarcy-Motta à la Comédie de Reims : note d'intention, interview