Par Marotine Marielle (Collège Les Châtelaines, Triel-sur-Seine (78)) le 16 juin 2022, 15:22
Bonjour M. Marcastel,
Nous revoilà, après un lundi de Pentecôte chômé, donc sans club-lecture !
Merci, une fois encore, pour vos réponses. On a eu l'impression de rentrer un peu dans l'arrière-boutique de vos œuvres, c'est très intéressant, riche, et ça donne des idées pour se lancer soi-même !
Voici nos questions pour cette semaine. :
- À partir de quel moment avez-vous décidé de faire de l'écriture votre métier à plein temps ?
Je voulais en faire mon métier à plein temps depuis mes 12 ans, mais c’est en 2003 seulement que j’ai pu « franchir le pas ».
Cette année-là, je n’avais pas de remplacement dans le métier d’enseignant que j’exerçais jusqu’alors et ma première série, « Louis le Galoup » commençait à bien ,marcher, alors j’ai décidé de tenter le tout pour le tout et de me consacrer entièrement à ma passion.
- Quand vous étiez petit, qu'est-ce qui vous a donné envie de devenir écrivain ?
Et bien ça s’est passé comme ça…
Un jour où je dormais chez ma grand-mère, ma tante (elle a trois ans de plus que moi, c’est un peu comme ma grande sœur, oui j’ai une « famille chat ») m’a raconté, au petit déjeuner (tartines de beurre et chocolat râpé, un délice) un rêve qu’elle avait fait. Il y avait un temple qui sortait de mon jardin, des robots s’en échappaient et nous attaquaient… c’était loufoque et décousu, comme souvent les rêves, mais rigolo.
La semaine, retourné chez moi, j’ai eu l’idée d’utiliser son rêve et d’écrire une petite histoire où, avec nos cousins, on entrait dans ce temple et on combattait les robots pour bloquer une invasion (et on finissait par gagner, bien sûr).
C’était une petite histoire de quelques pages, mais je l’ai agrafée pour faire comme un petit livre (j’ai même dû faire un dessin pour la couverture).
Le week-end suivant, quand je suis revenu chez ma grand-mère, j’ai lu l’histoire à ma tante. Elle a trouvé ça super, et m’a demandé : « Tu ne voudrais pas en écrire une autre ? » Alors je lui en ai écrit une autre, cette fois entièrement inventée.
Après, comme dans ma famille (j’ai une grande famille) nous nous réunissions deux fois par an, pendant les grandes vacances d’été et à Noël, j’avais pris l’habitude, pendant les six mois où nous ne nous voyions pas, d’écrire des histoires où je nous mettais en scène, mes cousins, ma tante et moi… quand nous nous retrouvions je leur lisais ces histoires en épisodes.
C’était extra, et pour plusieurs raisons :
D’abord, je m’inventais plein d’aventures extraordinaires qui ne me serait jamais arrivées dans la réalité. J’étais un héros, j’affrontais des robots, des monstres, je pilotais des vaisseaux extraordinaires, je visitais d’autres planètes, je rencontrais des amis imaginaires fabuleux et héroïques et une merveilleuse princesse de mars tombait amoureuse de moi.
À cet âge-là, j’avais l’impression que tout le monde me donnait des ordres : mes parents, les enseignants… mais dans mes histoires, c’était moi le maître après Dieu à bord du navire… Non, mieux que ça… C’était moi, Dieu.
En deux lignes, avec un stylo et une feuille, je pouvais détruire la terre… et la reconstruire en dix lignes, comme je voulais.
Si un emm…. m’agaçait dans la cour de récré, le soir, dans mon histoire, je me vengeais… Par exemple quand j’avais besoin de quelqu’un à faire bouffer par un abominable monstre, qui y avait droit ? Et l’agonie pouvait durer longtemps (suivant si j’étais plus ou moins énervé).
Et comme j’étais timide, si je tombais amoureux d’une de mes petites camarades de classe… et bien, à qui ressemblait, dans mon histoire, la princesse guerrière de Mars ( ou de Cassiopée ou d’Aldébaran) qui tombait amoureuse de moi ? Elle devenait l’héroïne de mon histoire.
Bref, j’embellissais la réalité ou la « corrigeait » comme je voulais quand elle me semblait trop moche ou pas comme je voulais.
Écrire était pour moi aussi une évasion et un soutien, quand la réalité devenait trop dure, et un défouloir.
Mes petits cahiers sont devenus des gros cahiers, puis des livres… arrivés à un certain âge, j’ai décidé d’arrêter de me mettre en scène et de me cacher derrière des héros, mais finalement, c’est encore moi…
Et j’ai continué. Quand j’étais en première, j’avais deux heures d’étude le soir, obligatoires. C’était dans une grande salle où plusieurs classes étaient réunies et où, comme le surveillant était très sévère, on entendait voler les mouches.
Moi j’y écrivais mes histoires… Dont une « Le Dernier Hiver » où je nous mettais en scène, mes copains et moi. Comme ils voulaient connaître la suite de nos aventures et qu’ils étaient eux aussi dans la salle, je leur faisais passer les feuilles au fur et à mesure que je les écrivais… c’était amusant.
Ce livre a été publié chez Hachette bien des années plus tard (je l’ai réécrit bien sûr, mais c’est bien lui).
Et puis un jour, il m’est arrivé un évènement très important dans la vie de chaque auteur :
J’ai acheté un livre en librairie (je ne dirais pas lequel même sous la torture) j’ai commencé à le luire et là je me suis dit : « Non, franchement, c’est pas génial, et ce n’est vraiment pas très bien écrit. J’écris mieux que ça. Alors, si cette personne est publiée, pourquoi pas moi ? »
Du coup, je me suis laissé dire que ce que j’écrivais était assez bon pour être publié, et j’ai commencé à envoyer des livres chez les éditeurs… et là a débuté une nouvelle aventure.
- Quel est le livre que vous avez le plus aimé écrire et pourquoi ?
Je les ai tous aimé, pas un plus que les autres. Mais il y a des passages, parfois, que je préfère à d’autres.
Après, j’ai un rapport particulier avec « Louis le Galoup » car je l’ai écrit pour mon fils à sa naissance (il s’appelle Louis) ce qui le met un peu à part de tous mes autres romans. C’est un livre où j’ai voulu lui transmettre, à travers une histoire, un conte, celui d’un garçon qui se découvre, dans une France médiévale parallèle, le terrible pouvoir d’être Galoup (loup-garou), des choses importantes qu’il me semblait avoir compris de la vie et certaines valeurs qui me paraissent essentielles.
J’espère y être parvenu. En tout cas, il l’a beaucoup aimé, et c’est le principal.
- Et vous, quel genre de livres aimez-vous lire, et quel lecteur êtes-vous ? :-)
J’aime lire toute sorte de livres, des études sur les animaux, l’astrophysique, les dinosaures, les dernières découvertes scientifiques, jusqu’aux romans jeunesse en passant par la bande dessinée, etc.
Je suis le genre de lecteur qui n’a plus assez de temps pour lire et qui continue d’acheter des livres par passion pour ces merveilleux parallélépipèdes de papier, mais qui ne sait plus ou les ranger… J’ai inventé un concept : L’isolation par les livres. J’en mets sur tous les murs.
Et pour être un peu sur un pied d'égalité, comme nous avons pu vous voir par le biais de la vidéo, on s'est dit que ce serait bien que vous ayez une photo de notre groupe !

Merci pour cette jolie photo. Ravi de vous découvrir.
Très bonne semaine à vous aussi.
Bien à vous.
Jean-Luc Marcastel