Eléments d’analyse « beau Monstre de nature », Tristan L’hermite.

§1 :

-adresse à la femme

- « beau monstre »= prodige de la nature. Pas tout à fait oxymore, mais on peut considérer effet de surprise à cause de la manière dont on définit la beauté à cette époque : il faut correspondre à des canons-> il est donc surprenant qu’une femme hors des canons soit qualifiée de « belle » → cette expression suscite la curiosité chez le lecteur.

(canons= règles qui définissent la beauté)

Pb de la césure qui tombe sur un e muet, donc enchaîné avec le « il » ; renforce idée d’un décalage, de qq chose hors de la norme. + psce d’un louchement : instabilité propre au baroque.

On s'aperçoit que dans ce poème, la rigueur des règles du sonnet est mise à mal par des jeux intérieurs qui viennent troubler le rythme.

« ton » visage : familiarité de la 2ème pers du sing : pers inférieure ? Ou intimité ?

Visage= introduit blason+ rime féminine

est noir : enjambement : mouvement encore.

Série d’expressions pour dire intensité forte des caractéristiques de la femme : «  au dernier point », « beau parfaitement »

opposition soulignée par le « mais » → il souligne la surprise face à cette beauté non canonique.

Adj « beau » place réflexion dans le domaine de l’esthétique.

« Parfaitement » mis en valeur par position à la rime

v3 noblesse du matériau. Reprise du motif du noir poli : travail de la matière (l’ébène)qui suggère à la fois la douceur, la sculpture, la noblesse.

« Te sert »: comme si la femme utilisait le noir

« ornement » : reprise du thème baroque du paraître/ importance des apparences. Un ornement est utilisé pour rendre plus beau.

V4 : hiérarchie : domination indiscutable : puissance renforcée par l’emploi du superlatif : le plus blanc. Beauté du noir plus forte que le plus fort représentant du blanc.

Les deux éléments comparés, ivoire et ébène, sont tous deux des matériaux précieux et renvoient à l’Afrique. Donc cette Femme africaine est précieuse.

On remarque que les rimes féminines enferment les rimes masculines, comme pour rappeler que la femme domine l’homme ici.

Sur les vers 1 et 4, le « e » muet est mis à l'hémistiche (milieu du vers) et rend donc la césure quasi invisible, donnant au vers une grande fluidité, un mouvement plus ample: instabilité baroque.

§2 : O vocatif : apostrophe adressée à la femme par périphrase élogieuse qui renforce aussi son mystère.

Merveille rejoint le vocabulaire hyperbolique qui était instauré dans la première strophe.

Hiatus cette fois au centre du vers : depuis le XVI siècle, les poètes essayent d'éviter les hiatus, même si on en trouve quand même ; doit-on penser que le poète introduit des bizarreries poétiques pour souligner la bizarrerie esthétique de la beauté dont il nous parle ici ?

On remarque que le poète respecte les règles du sonnet en reprenant dans cette deuxième strophe les rimes de la première.

« notre »=> poète s'inclut dans un groupe.

Vers 5-6 peuvent poser pb : le « que » introduit une proposition qui vient expliciter le mot merveille.

Ainsi, dans la proposition introduite par ce « que », le poète évoque des phénomènes surprenants à travers des oxymores, renforcés par l'emploi d'un adverbe, lui-même renforcé par un autre adverbe d'intensité.

Objet ténébreux luise (oxymore)

clairement renforce l'oxymore

si renforce clairement

Jeu qui consiste donc à marquer la force de la beauté.

« Objet ténébreux » et « charbon éteint » sont aussi des métaphores pour évoquer la femme_> cela signifierait -il que cette femme n'éprouve pas d'amour, manque d'amour ?..

UN charbon : un seul

on remarque que le singulier (un charbon), l'emporte sur des pluriels (les objets qui entretiennent l'usage de la flamme). Là encore, cette métaphore pourrait désigner les femmes qui font tout pour que l'on brûle pour elles.

On pourrait donc interpréter ces vers comme une référence à une esclave qui ne fait rien pour qu'on l'aime, et qui est aimée plus que d'autres femmes.

On remarque que souvent les adverbes sont mis à la rime : insistance donc sur l'intensité de la lumière.

§3 :

« entre »: rappelle la disposition des rimes. Le poète est « entre » les mains de la femme, comme les rimes masculines sont entre les rimes féminines.

On remarque encore le passage d'une image physique à une image spirituelle :

Entre ses noires mains je mets ma liberté

Ce vers renoue encore avec le topos amoureux (topos= une idée que l'on retrouve souvent en littérature ; on dit aussi « lieu commun ») de la soumission du poète à la femme.

Le terme « dompte », renvoie aussi au cliché (cliché= métaphore très utilisée) du combat amoureux.

V10 Moi : forme tonique (c'est-à-dire que lorsque l'on lit, on va naturellement accentuer le mot) du pronom qui pose le poète comme une personne. A l'autre bout du vers se trouve le mot « Beauté », comme pour bien marquer la distance qui se trouvait entre le poète et les autres femmes. « moi qui » est une forme forte pour souligner que le poète est sujet d'un verbe d'état, comme pour souligner sa constance.

« fus » est un passé simple ; il souligne donc que cet état invincible est révolu.

Cette distance s'oppose avec la proximité entre la femme et le poète dans le vers suivant (v11), et où le poète est cette fois désigné par un pronom de forme atone (sur lequel on ne mettra pas l'accent), qui souligne davantage le fait qu'il est soumis. Ce « m' » est collé au sujet, et objet de l'action.

Dans ce vers, on remarque que les deux hémistiches sont construits parallèlement pour insister sur la domination de la femme.

Les mots qui qualifient la femme dans cette strophe commencent tous par une majuscule

Dernière §

changement de destinataire : adresse au Soleil.

Le poète donne un ordre au Soleil, il est donc plus puissant que lui (bien se rappeler que cette puissance vient de l'art du poète, car ces textes traversent le temps). Pour renforcer cette domination, le soleil est tutoyé.

Les sonorités deviennent plus dures : des [k] et des [d] (dentales)

deux interprétations possibles pour la honte du soleil :

-soit parce qu'il a fait souffrir la femme en lui tannant la peau

-soit parce qu'il n'est que l'astre du jour, alors que la femme est à la fois astre du jour et de la nuit.

Cette dernière opposition souligne le contraste entre noirceur de la peau (= apparence)et éclat du regard (yeux= miroirs de l'âme). On retrouve donc le thème de l'être et du paraître qui s'opposent.

Attention, cherchez quelques éléments pour bâtir votre introduction!

Pbtique proposée: dans quelle mesure l'auteur renouvelle-t-il l'exercice poétique qu'est le blason?

Attention à ne pas voir ici trop non plus une leçon de morale de la part de L'Hermite ; il y a toujours en premier lieu une volonté du poète de surprendre l'auditoire en proposant un poème original.