Politiques et journalistes : Des couples à la scène comme à la ville
Par Carole Bonnay le 07 janvier 2016, 16:12 - Lien permanent
Politiques
et journalistes : Tour d'horizon des perceptions de ces couples
qui ne laissent pas indifférents
Confidences sur l'oreiller, conflits d 'intérêt, affaires de corruption ... Comment les relations intimes entre des politiques et des journalistes et leurs conséquences sont-elles perçues en France et dans d'autres pays ? Quelle confiance peut-on leur accorder ?
En France, un simple état de fait
Les exemples français ne manquent pas : Kouchner-Ockrent, Baroin-Drucker, Borloo-Schönberg, Montebourg-Pulvar, Hollande-Trierweiler. Béatrice Schönberg arrête provisoirement la présentation du journal télévisé en février 2007 pour éviter toute polémique durant la campagne pour l'élection présidentielle puisqu'elle est l'épouse du ministre Jean-Louis Borloo, puis se retire définitivement avec la nouvelle nomination de Borloo comme ministre. Stratégie politique et carrière journalistique sacrifiée : ce couple a fait un choix difficile et honorable.
Début 2010, la presse people révèle la relation d'Audrey Pulvar avec le socialiste Arnaud Montebourg, alors député et président du Conseil général de Saône-et-Loire. A quelques semaines des élections régionales françaises, le groupe Canal + décide de ne pas l'écarter de l'antenne d'i>Télé, tant que son compagnon n'exerce pas de mandat gouvernemental. Quand celui-ci devient ministre, Pulvar est écartée successivement d'i˃Télé, de France Inter et de France 2. La journaliste a donc payé le prix fort de sa relation avec un ministre. Le couple s'est séparé en 2012.
Après l'élection présidentielle de François Hollande, sa compagne Valérie Trierweiler voit son contrat prolongé chez Paris-Match, ce qui surprend particulièrement l'opinion française. De plus, son bureau est désormais à L'Elysée et ses collaborateurs payés par le contribuable. Situation inédite. La First Lady française se cantonne aux articles de presse pour la rubrique « culture », et d'après Libération du 7.06.2012, elle ne voit absolument pas pourquoi on pourrait l’accuser de «délit d’initié», ni de conflits d’intérêts alors qu'elle appartient bel et bien au pouvoir.
Charte éthique du New York Times
«Stay away from power» est la règle de la presse américaine. Toujours d'après Libération du 7.06.2012, Valérie Trierweiler a cru bon s’emparer de la biographie d’Eleanor Roosevelt pour faire avaler l’idée que même outre Atlantique le pouvoir et la presse pouvaient faire bon ménage. Grave erreur. Car en s’appuyant sur l’exemple de l’épouse du président Roosevelt, elle a annoncé la couleur : elle s’autorisera tous les commentaires, y compris politiques, qui viendront à son esprit journalistique.
Aux Etats-Unis, un journaliste politique doit demander à changer de secteur si un membre de sa famille se présente à une élection. Cette notion de conflit d'intérêts si impérieuse outre-Atlantique n'a pas de réalité tangible en France. La chasse aux conflits d'intérêts n'est pas une priorité quand on évoque les devoirs déontologiques des journalistes.
Italie, Autriche et Allemagne : des visions également opposées
En Italie, ce sont les hommes politiques qui placent leur épouse à des postes de journalistes ou de présentatrices à la télévision. Nul ne peut alors nier les affaires de corruption et de contrôle de la presse. C'est le cas de Barbara Palombelli, la femme de l'ancien maire de Rome, ou la femme d'Italo Bocchino, député du parti de Gianfranco Fini. Silvio Berlusconi a débuté en politique en tant que propriétaire de la totalité des chaînes nationales de télévision privée. Depuis plusieurs années, ses enfants ont des rôles clés dans les médias italiens.
En Autriche, d'après Die Presse du 29.03.2014, le « Ça reste entre nous » n'est plus valable. L'émancipation est nécessaire. Les rapprochements et les familiarités sont mal perçus.
Comme le dit Tissy Brun interviewé par l'hebdomadaire allemand Die Zeit le 26.05.2010, nul ne peut être immunisé des influences des hommes ou femmes de pouvoir, il faut être honnête avec soi. La rupture de confiance entre journaliste et politique est, affirme t-il, consommée.
Sources :
- Wikipédia
- Nouvel obs « Couple journaliste/politique : la France, un cas à part » (13.12.2010)
- « Non, Valérie Trierweiler n'est pas « normale » (7.06.2012)
- Die Presse : «Politiker und Journalisten : Ziemlich beste Feinde » (29.03.2014)
- Die Zeit : « Gefährliche Nähe zwischen Politik und Medien » (26.05.2010)