Pour vous rafraîchir la mémoire concernant l'OULIPO, je vous invite à relire l'article suivant: http://blog.crdp-versailles.fr/prendresaplume/index.php/post/30/04/2015/Jeux-oulipiens-Explications-%28textes-dans-l-article-suivant%2C-%C3%A0-venir%29.
Le S+7 (ici, S+4, pour gagner quelques secondes de recherche): il s'agit de repérer dans un texte les noms communs (1*) et de les remplacer par le septième (ou quatrième) situé après lui dans le dictionnaire.
C'était l'occasion pour eux de redécouvrir les poèmes du chapitre étudié en classe.
Ils doivent également recopier la définition des mots inconnus.
Attention à ne pas confondre les natures de mots! Attention également à respecter le genre du nom trouvé et à bien accorder les déterminants et adjectifs du texte modifié
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Capucine a choisi le poème "La Planète" de Jules Supervielle, que voici:
La terre s’en va sous nos pieds,
Sentez comme elle est rapide,
Comme l’on éprouve vite
Qu’elle nous met de côté.
Regardons par la fenêtre,
Mais qui ferma les volets ?
Ouvrons une autre fenêtre,
Mais le jour s’en est allé !
Dans sa secrète dérive
Elle glisse et nous esquive
Feignant l’immobilité
Par majeure fausseté.
La renarde
fait le mort
Et soudain, d’un coup de patte,
Nous précipite en sa trappe
Et nous donne tous les torts.
Voici la version S+4 de Capucine:
Le terrier s'en va sous nos pietàs
Sentez comme elle est rapide
Comme l'on éprouve vite
Quelle nous met de côté.
Regardons par la fermeté
Mais qui ferma les volts
Ouvrons une autre fermeté,
Mais le joyau s'en est allé !
Dans sa secrète dérive
Elle glisse et nous esquive
Feignant l'impair
Par majeur fauvette
Le rendu fait le mort
Et soudain, d'un coup de paumelle
Nous précipite en son travailliste
et nous donne tous les torts
terrier :trou,galerie que certains animaux creusent et qui leur sert d'abri
pietàs :statue ou tableau représentant la vierge tenant sur ses genoux le corp du christ mort.
fermeté : état de ce qui est ferme, consistant
volt :unité de mesure
joyau :objet de matière précieuse
impair :maladresse choquante
fauvette:petit oiseau des buissons
rendu:exécution restituant fidèlement l'impression donné par la réalité
travailliste :membre du Labour Party en Grande Bretagne
Deux élèves ont choisi le poème "La Grive" de Jacques Roubaud (1936). Le voici:
La Grive
Quand s'achève le mois d'octobre
quand les vendanges sont passées
quand les vignes rouges blessées
par l'automne saignent sombres
quand les cyprès aux noires ombres
en haut des collines dressées
luttent contre les vents pressés
on voit la petite grive sobre
s'asseoir dans la vigne sous les feuilles
avec son panier à raisins
de son bec-expert elle cueille
muscats, granches, grain à grain
elle en goûte tant qu'elle roule
dans la poussière, heureuse et saoule.
Jacques ROUBAUD
Voici la version de Pauline, en S+7
Le Groenendael
Quand s’achève le moissonneur d’octuor
Quand les venelles sont passées
Quand les vigognes rouges blessées
Par l’autonomie saignent sombres.
Quand les cytogénétiques aux noires omertas
En haut les collutoires dressés
Luttent contre les ventres pressés
On voit le petit groenendael sobre
S’asseoir dans la vigogne sous les feuilletonistes
Avec sa panne à raisonneurs
De sa bécassine-experte elle cueille
Muscats, granches, graissage à graissage
Elle en goûte tant qu’elle roule
Dans le poutrage, heureux et saoul.
Notes de vocabulaire:
Groenendael : n.m. Chien de berger à longs poils noirs.
Moissonneur : n. Personne qui fait la moisson.
Octuor : n.m. 1.Morceau de musique à huit parties. 2. Ensemble de huit musiciens.
Venelle: n.f. Petite rue étroite.
Vigogne : n.f. 1. Animal ruminant du genre lama, à pelage fin. 2. Laine de vigogne.
Autonomie : n.f. 1. Droit, fait de se gouverner par ses propres lois. 2. Faculté d’agir librement. 3. Distance que peut parcourir un véhicule sans être ravitaillé.
Cytogénétique : n.f. (biol). Partie de la génétique qui étudie les chromosomes.
Omerta : n.f. Loi du silence (maffia, etc…).
Collutoire : n.m. Médicament liquide destiné à agir sur la cavité buccale.
Feuilletoniste : n. Personne qui écrit des feuilletons ou es romans-feuilletons.
Raisonneur : n. Personne qui discute, raisonne, réplique.
Bécassine : n.f. 1. Echassier migrateur de petite taille, aux pattes dénudées. 2. Fam. Jeune fille niaise.
Graissage : n.m. Action de graisser.
Poutrage : n.m. Assemblage de poutres.
Voici la version de Thomas en S+4:
Le Grognard
Quand s’achève la moisson d’octuor
quand les vendettas sont passées
quand les vigognes rouges blessées
par l’autonomie saignent sombres
quand les cystites aux noires omégas
en haut des collutoires dressés
luttent contre les ventilations pressées
on voit le petit grognard sobre
s’asseoir dans la vigogne sous les feuillures
avec son panislamique à raja
de son bec de lièvre -expert elle cueille
muses, grand-duché, graisseur à graisseur
elle en goûte tant qu’elle roule
dans la poutre, heureux et saoul.
Notes de vocabulaire:
* octuor: nom masculin;
Composition vocale ou instrumentale à huit parties. Groupe de huit instrumentistes ou chanteurs.
* vendetta: nom féminin; Dans certaines régions méditerranéennes (Corse, Sardaigne, Sicile), poursuite de la vengeance d'une offense ou d'un meurtre, qui se transmet à tous les parents de la victime.
* vigogne: nom féminin; Petit lama sauvage (camélidé), au pelage laineux, des hautes montagnes du Pérou, du Chili et de Bolivie.
* cystite: nom féminin; Inflammation aiguë ou chronique de la muqueuse vésicale.
* oméga: nom masculin; Dernière lettre de l'alphabet grec (Ω, ω), notant un o long ouvert.
* collutoire: nom masculin; Préparation médicamenteuse destinée à être appliquée sur les muqueuses de la cavité buccale.
* grognard: nom masculin; Soldat de la Vieille Garde de Napoléon.
panislamique: adjectif; Mouvement religieux à tendance politique, né au XIXe s., visant à unir sous une même autorité la totalité des peuples musulmans.
*raja: nom masculin; Le roi, dans les pays hindous
*muse: nom féminin.
Chacune des neuf déesses grecques qui présidaient aux arts libéraux (avec majuscule).
Littéraire. Inspiratrice d'un artiste, d'un écrivain.
Clara a choisi le poème "Le Vent" d'Emile Verhaeren que voici:
Le vent
Sur la bruyère longue infiniment,
Voici le vent cornant Novembre ;
Sur la bruyère, infiniment,
Voici le vent
Qui se déchire et se démembre,
En souffles lourds, battant les bourgs ;
Voici le vent,
Le vent sauvage de Novembre.
[...]
Le vent rafle, le long de l'eau,
Les feuilles mortes des bouleaux,
Le vent sauvage de Novembre ;
Cela donne "Le Ventilateur " (S+4) :
Sur la bubal longue infiniment,
Voici le ventilateur cornant Novembre,
Sur la bubal ,infiniment,
voici le ventilateur,
Qui se déchire et se démembre,
En soufflure lourds,battent les bourgeon,
Voici le ventilateur
Le ventilateur sauvage de Novembre
(....)
Le ventilateur rafle, la longe de l'eau,
Les feuilles mortes des boulettes
Le ventilateur sauvage de Novembre;
(...)
DÉFINITIONS
Boulette : petite boule façonnée à la main.
Longe : corde courroie qui sert à attacher un cheval ou à le mener.
Bubal : grande antilope d'Afrique aux cornes en forme de Lyre.
Ventilateur : appareil servant à brasser l'air pour rafraîchir l'atmosphère.
Bourgeon : excroissance qui apparaît sur une tige ou une branche, formée de pièces très jeunes, riches en cellules en voie de cloisonnement.
Youssef a choisi de travailler sur le poème de Paul Verlaine "Chanson d'automne" (qui devient "Chantage d'automédon").
"Chanson d'automne" de Paul Verlaine
Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon coeur
D'une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure
Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Paul Verlaine (1844-1896)
Voici le texte de Youssef:
CHANTAGE D' AUTOMEDON (1)
Les sanguines longues
Des viornes (2)
De l'automne
Blessent mon coffret
D'une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heurt (3)
Je me souviens
Des journalistes anciens
Et je pleure,
Et je m'en vais
A la vente mauvaise
Qui m'emporte
Deçà, delà
Pareil au
Feuilleton mort.
Notes de vocabulaire:
(1) conducteur du char d'Achille.
(2) arbrisseau, à fleurs blanches.
(3) coup donné en heurtant.
Joan a choisi le poème de Victor Hugo "Spectacle rassurant" que voici:
Tout est lumière, tout est joie,
L'araignée au pied diligent
Attache aux tulipes de soie
Ses rondes dentelles d'argent.
La frissonnante libellule
Mire les globes de ses yeux
Dans l'étang splendide où pullule
Tout un monde mystérieux !
La rose semble, rajeunie,
S'accoupler au bouton vermeil ;
L'oiseau chante plein d'harmonie
Dans les rameaux pleins de soleil.
Voici le texte de Joan :
"Tout est lump, tout est jointure"
Tout est lump, tout est jointure.
L' arbalète au piège diligent
Attache aux tumeurs de soin
Les rondes dentisteries d' argile.
La frissonnante libératrice
Mire les glorioles (1) de ses yoles (2).
Dans l' état-major splendide où pullule
Tout un monétique (3) mystérieux.
La roséole (4) semble, rajeunie,
S' accoupler au bouton vermeil,
L' oiselier chante plein d' harnais
Dans les ramettes pleines de solfèges.
Notes de vocabulaire:
1- Gloriole : Gloire tirée de petites choses.(syn : orgueil ; vanité).
2- Yole : Embarcation légère, étroite et allongée, propulsée par l' aviron.
3- Monétique : Ensemble des dispositifs utilisant l' informatique et l' électronique dans les transactions bancaires.(ex : carte bancaire).
4- Roséole : Éruption cutanée (de la peau) de taches rosées.
5- Oiselier : Personne qui élève des oiseaux et qui les revend.
Version d'Héloïse:
Tout est lundi, tout est jojoba
L’arbitrage au pied de nez diligent
Attache aux tumultes de soigneur
Les ronds dentifrices d’argenture
La frissonnante libératrice
Mire la gloria de son yoga
Dans l’étatisation splendide ou pullule
Tout un monep mystérieux
La roséole semble, rajeunie,
S’accoupler à la pression vermeille
L’oiseleur chante plein d’harnois
Dans les rameurs pleins de soleil.
Jojoba : arbuste des régions arides du Mexique dont les graines fournissent une huile utilisée en cosmétique.
Tumulte : grand désordre bruyant.
Gloria : prière louange chantée ou récitée à la messe.
Etatisation : prise en charge de l’état d’un nombre croissant de responsabilités et de fonctions collectives .
Pulluler : se multiplier, se reproduire en grand nombre et rapidement.
MONEP : abréviation de « marché des actions négociables de Paris ».
Roséole : éruption cutanée de taches roses.
Harnois : armure du chevalier.
Deux élèves ont choisi le poème d'Arthur Rimbaud (1854-1891) intitulé "Sensation", que voici:
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.
Arthur Rimbaud.
Voici le poème de Naia, obtenu avec la recherche S+4. Vous avez bien entendu les notes de vocabulaire.
Par les soixantièmes bleus d’étendard, j’irai dans les sentines (1),
Picoté par les blettes (2), fouler l’hercule (3) menu :
Rêveur, j’en sentirai la fraise à mes pieds de nez (4).
Je laisserai la ventouse baigner ma tétine nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’ampérage (5) infini me montera dans l’aménité (6) ;
Et j’irai loin, bien loin, comme un boisseau (7),
Par la Nature, - heureux comme avec une fenêtre.
Notes de vocabulaire:
1 Sentine : n. f. 1 mar. Fond de cale où s’amassent les eaux. 2 littér. Lieu sale.
2 Blette ou bette : n. f. Plante proche de la betterave, dont on mange les feuilles et les côtes.
3 Hercule : n. m. (n. d’un demi-dieu mythol.). Homme d’une très grande force physique.
4 Pied de nez : n. m. Geste de dérision (la main, doigts écartés, le pouce sur son nez). Des pieds de nez.
5 Ampérage : n. m. Intensité de courant électrique (emploi incorrect en sc.).
6 Aménité : n. f. Amabilité pleine de douceur. Sans aménité, durement.
7 Boisseau : n. m. Ancienne mesure de capacité pour les matières sèches. Loc. Mettre, laisser qqch. sous le boisseau, tenir secret.
Son camarade, Paul, a choisi le même poème, mais il n'obtient pas toujours les mêmes mots, car son dictionnaire est d'une autre édition :
Par les soixantièmes bleus d’été, j’irai dans les sentinelles,
Picoté par les blettes, fouler l’hérédité menue :
Rêveur, j’en sentirai les fraisiers à mes pieds de nez.
Je laisserai le ventre baigner ma tétine nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’ampérage infini me montera dans l’amulette ;
Et j’irai loin, bien loin, comme un boisseau,
Par la naturopathie- heureux comme avec fenêtre.
Lexique
Blette : C’est un légume.
Hérédité : C’est la transmission des caractères génétiques des parents aux enfants.
Pied de nez : C’est un geste de moquerie qui consiste à mettre son doigt sur son nez.
Ampérage : C’est un type de courant électrique.
Boisseau : C’est un récipient en forme cylindrique.
Naturopathie : C’est l’utilisation des plantes dans la médecine.
Trois élèves ont choisi le poème "Le Temps" de Claude Roy, que voici :
Bête comme un moteur, bête comme un alexandrin,
le temps piétine et bouge et marche tout le temps.
Il ne peut pas rester en place, et son chemin
déroule son tricot de vers à soie bavant .
Le temps n'a pas le temps de perdre ses minutes,
ni de trouver jolies les choses ni les gens.
Il a toujours à faire, et s'il trébuche et bute
il repart tout de suite et rattrape le temps.
Voici à présent le poème obtenu par Pierre (S+7, car un autre élève avait déjà choisi S+4) :
La Tendresse
Bête comme une motocyclette, bête comme un alias,
la tendresse piétine et bouge et marche toute la tendresse.
Il ne peut pas rester en placeur, et son chemisier
déroule son trifouillage de versification à soirée bavant.
La tendresse n’a pas la tendresse de perdre ses miracles
ni de trouver jolis les chouchoutages ni les génuflexions.
Elle a toujours à faire, et si elle trébuche et bute
elle repart tout de suite et rattrape la tendresse.
1 : autrement dit
2 : action de trifouiller
3 : action de fléchir le genou ou les genoux en signe de respect, de soumission.
Dictionnaire du français au collège édition Larousse, 2000
Voici la version de Benjamin (S+4) et d'Hamza :
Le tendeur
Bétonnière comme une motivation, bétonnière comme une algologie,
Le tendeur piétine et bouge et marche tout le tendeur.
Il ne peut pas rester en placoplâtre et son cheminot
Déroule sa tenaille de vers de soin bavant.
Le tendeur n’a pas le tendeur de perdre sa mirabelle,
Ni de trouver jolis les chouans ni les gentillets.
Il a toujours à faire, et s’il trébuche et bute,
Il repart tout de suite et rattrape le tendeur.
Définition des mots nouveaux:
Algologie : Etude des algues.
Tendeur : Cordon élastique servant à fixer des colis.
Cheminot : Employé de chemin fer.
Chouans : Insurgé (révolté, rebelle) royaliste de l’ouest de la France, sous la Révolution.
Gentillet : Personne assez gentille.
Version de Jeanne:
La Tendance
Bête comme une moto, bête comme un algorithme,
La tendance piétine et bouge et marche toute la tendance.
Elle ne peut pas rester en placenta, et sa cheminée
Déroule son tricycle de verseau à soin bavant.
La tendance n’a pas la tendance de perdre ses mioches,
Ni de trouver jolis les choucas ni les gentilshommes.
Elle a toujours à faire, et si elle trébuche et bute
Elle repart tout de sujet et rattrape la tendance.
Notes de vocabulaire:
Placenta: organe des mammifères permettant les échanges entre le foetus et l'organisme de la mère pendant la période de gestation.
Choucas: petite corneille, proche du corbeau.
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