Le théâtre d'objets ?

Un « objet » tel que nous l’entendons, c’est petit. Ça tient dans la main, c’est souvent en fer ou en plastique, c’est brillant, lisse et froid. Quand on le tourne et le retourne, on a conscience de son prix. Ça vaut quelque chose et c’est un objet de convoitise. On a envie de l’avoir et il est manufacturé et tout le monde l’a déjà. On a le même désir que tout le monde. Un jouet entre parfaitement dans cette définition de l’objet. Un objet est fait pour être manipulé, sa taille est faite pour la main. La petitesse de la voiture, de la poupée, du Lego fait d’eux des objets propres à la rêverie. Bachelard nous montre qu’ « il y a de la grandeur dans la miniature ».

Le manque de personnalité de l’objet, reproduit à des milliers d’exemplaires, en fait le support idéal pour justement le remplir de notre propre histoire. Dans le théâtre d’objet, le spectateur reconnaît les objets pour les avoir lui-même possédés, pour avoir rêvé avec eux. Le spectacle se déroule, et l’imagination des uns et des autres vagabonde, va et vient au gré de ses propres fantasmagories : l’objet, support à la rêverie. Le policier et la victime et l’assassin… Je dis ça à dessein, le théâtre d’objet permet au même comédien d’être trois personnages à la fois.

Christian Carrignon

Directeur artistique de la compagnie Théâtre de Cuisine

 

Pour parler du théâtre d’objet, il faut d’abord remonter à ses origines : la marionnette. Lorsque l’on évoque les marionnettes il vient à l’esprit de la plupart des gens les techniques traditionnelles pratiquées en Europe : Guignol en premier lieu (marionnettes à gants*), les marionnettes à fils*, Polichinelle etc. On oublie ou on ignore souvent les formes contemporaines et celles venues de l’étranger : le Bunraku japonais*, le théâtre d’ombres* et les innombrables variations des techniques traditionnelles. En effet les marionnettes sont en pleine évolution, elles sont incroyablement variées, elles combinent toutes sortes de techniques et ne cessent de surprendre un public toujours plus vaste pour qui les marionnettes ne sont plus cet art désuet et strictement réservé aux enfants. 

Le théâtre d’objet est un des avatars modernes de la marionnette. Il consiste à utiliser des objets de la vie courante et à les faire vivre comme on le ferait avec des marionnettes. En effet, les objets que créent les hommes ont tous quelque reste de l’humanité qui les a engendrés. La symétrie par exemple se retrouve aussi bien dans le corps humain que dans un robinet, une chaise et même un arbre ou les nervures qui structurent ses feuilles. L’usage qu’en fait l’homme aussi définit l’objet et le munir de manettes par exemple, c’est y laisser l’empreinte humaine. Ainsi, si l’on observe avec attention un robinet on peut lui trouver une physionomie, un masque et une sorte de personnalité. Reste ensuite à trouver un thème qui convienne au genre d’objet que l’on utilise et qui tout en les justifiant leur donne matière à jouer.

Compagnie Tabola Rassa

Pour compléter votre approche du spectacle, pour pourrez consulter les pages suivantes:

- pour découvrir le travail de Philippe genty, le site de sa compagnie :

http://www.philippegenty.com/index.htm

- un texte critique sur "la pelle du large":

http://rhinoceros.eu/2012/07/avignon-off-2012-la-pelle-du-large-de-philippe-genty-et-une-odyssee-d-irina-brook/

- en video, quelques images d'un autre spectacle de P. Genty "Voyageurs immobiles" :

http://www.youtube.com/watch?v=-TJaeYBkljw