Le sonnet

Au XIXe siècle, les poètes apportent des modifications à cette forme, dont ils ne suivent plus toutes les règles.
- Les poètes du Parnasse voient dans le sonnet une forme brève qui leur permet de mettre en oeuvre une écriture virtuose.
- Les poètes symbolistes y verront aussi la possibilité d'exprimer en peu de mots des impressions mystérieuses.
Voici un sonnet de Baudelaire, "Recueillement", extrait de son recueil Les Fleurs du mal (1857).
- La disposition des rimes dans les quatrains n'est pas régulière.
- Le thème du crépuscule y est développé à travers plusieurs personnifications qui créent autour du poète un paysage urbain qui confine à la vision fantastique.
- Georges Perec a réécrit ce sonnet sans employer la lettre e ("Sois sage, ô mon souci").

Tristan Corbière, dans "Le crapaud" (Les Amours jaunes, 1873), détourne les règles du sonnet dans un poème parodique :
- Il inverse l'ordre des tercets et des quatrains.
- Il renverse le motif du chant du poète en assimilant ce chant au coassement du crapaud.
- Il retourne le scénario merveilleux du prince transformé en crapaud en abandonnant le poète-crapaud à son triste sort de mal-aimé : né crapaud, il restera crapaud...

Au XXe siècle, le groupe de L'OuLiPo s'intéresse au sonnet, et réinvente cette forme.
L'OuLiPo est "l'Ouvroir de Littérature Potentielle" : un atelier qui réunit écrivains, mathématiciens, créateurs de tous bords qui se donnent pour but d'inventer de nouvelles contraintes d'écriture. Leur idée est de remplacer l'inspiration de l'artiste par une règle qu'il s'impose et qui donnera une forme singulière à son oeuvre.
Jacques Bens écrit un recueil de Sonnets irrationnels (1965) : les sonnets s'y construisent selon le nombre irrationnel Pi : 3,1415. La première strophe aura un seul vers, la deuxième en aura quatre, la troisième un seul, la cinquième en aura cinq. Le compte donne bien quatorze vers (3+1+4+1+5 = 14), mais dans une disposition inattendue.

Jacques Roubaud, dans son recueil Signe d'appartenance (1967) a l'idée du sonnet en prose : seule la longueur relative des paragraphes rappelle la disposition originelle en quatrains et en tercets. Le sonnet est considéré ici comme une forme plastique, malléable, qui peut suivre les contours de l'invention de l'auteur.
- Chaque paragraphe produit une unité de sens - mais l'écriture, toute en images poétiques, reste mystérieuse.
- Des espaces blancs entre certains mots segmentent le discours et servent de ponctuation : ils rappellent la construction des strophes en plusieurs vers.

monsieurteste