Bonne nuit, Jérémy.

        A la fenêtre, Jérémy regarde la neige tomber en légers flocons. Tout est silencieux autour de lui. Le réveil indique l'heure d'un rouge transperçant. Presque deux heures. Et depuis cinq heures bientôt, Jérémy n'a pas bougé. Il regarde la neige tomber en légers flocons. La couverture éparse sur le lit, lit où Jérémy ne dort pas, Édouard l'ours parachuté au fond de la chambre, Édouard que Jérémy ne serre pas dans ses bras.

       La lune éclaire son visage fin. Des larmes coulent, Jérémy ne peut s'empêcher de pleurer. La neige peut peut-être apaiser ce feu qui brûle et dévore son visage. Tout cela n'a aucun sens pour un garçon de neuf ans.

       Enfin, neuf ans dans cinq mois, trois semaines et quatre jours, mais c'est amusant de dire aux autres qu'il est plus grand qu'eux. C'est amusant aussi de leur dire qu'il a un bateau de l'armée national pour lui tout seul, que son papa, c'est le plus fort, qu'il a toujours sa maman. On peut vraiment lui faire avaler n'importe quoi, à ce Max ! Même si ces derniers temps, il commence à être trop indiscret pour son jeune âge, ce Max.

      "Si t'as un sous-marin, pourquoi qu'on le voit jamais ? Et si ta maman, c'est une pilote de jet supersonique, pourquoi elle va pas te chercher à la sortie en jet ?"

      Jérémy entend encore les paroles de Max qui résonnent dans sa tête. C'est pas de sa faute si sa maman n'est pas rentrée un soir, si elle est partie au ciel sans lui dire bonne nuit.

     Alors Jérémy se souvient et le feu reprend le dessus. Son père devait venir lui dire bonne nuit quand il rentrerait, c'est lui qui le lui avait dit ce matin. Jérémy espère qu'il n'est pas parti au ciel comme maman.

     Mais son père est bien dans sa chambre, profondément endormi. I l a seulement oublié d'aller embrasser le fiston en rentrant du travail.

    Et à la fenêtre, Jérémy regarde la neige tomber en légers flocons.

Joséphine