Les phénomènes électriques et magnétiques ont toujours fasciné l’espèce humaine. La foudre, fantastique et violente décharge électrique à travers le ciel nous impressionne toujours autant qu’elle devait impressionner les premiers humains. Les pierres aimantées ou aimants qui attirent avec force d’autres objets en fer a toujours suscité l’étonnement et développé la curiosité de beaucoup de personnes. Ces phénomènes électriques et magnétiques naturels ont tout d’abord été observés, vénérés, puis, il y a quelques siècles seulement, ont commencés à être compris, maitrisés, théorisés. De plus, ce n’est qu’au début du XIXème siècle que le scientifique a découvert que l’électricité et le magnétisme étaient deux phénomènes liés entre eux.                                        

 

Electricité et magnétisme dans l'antiquité

L'ambre jaune.

Dans l’antiquité, certains grecs (dont Thalès) remarquent qu’un matériau qu’ils appellent ambre jaune (ήλεκτρον : êlectron) possède la propriété d’attirer certains objets. Aujourd’hui ce phénomène est appelé électricité statique : lorsque l’on frotte un peigne ou une règle en plastique avec de la laine, ces objets attirent d’autre objets, les cheveux par exemple. D’autres phénomènes électriques avaient déjà été observés par d’autres peuples et civilisations comme la foudre tout simplement et les poissons « électriques » comme la torpille. Tous ces phénomènes naturels n’apparaissent pas du tout reliés entre eux et les humains les attribueront à l’âme des objets ou aux dieux.

La magnésie.

Un autre objet ayant la particularité d’attirer des morceaux de fer est découvert en Asie mineure dans l’antiquité. Cette « pierre d’aimant » originaire plus précisément de la région de la Magnésie est appelée alors « magnésie ». Celle-ci sera utilisée d’abord pour prédire l’avenir par des devins chinois, puis jouera un rôle essentiel quelques temps plus tard avec l’invention de la boussole. Cet instrument, inventé au Ier siècle de notre ère par les chinois,  se sert des propriétés magnétiques de la pierre aimantée de magnésie pour guider les navigateurs et les voyageurs. La boussole arrivera en Occident au Moyen Age par l’intermédiaire de la civilisation arabe.

              La renaissance et la naissance de l'électricité

Gilbert

A la fin du XVIIème siècle, un médecin anglais réputé, William Gibert (1540-1603) s'intéresse à l'attraction électrique et magnétique.

De son étude sur les phénomènes magnétiques, celui-ci conclut que les aiguilles aimantées des boussoles ("doigts de dieu" comme il les appelle) ne s'orientent pas par rapport au ciel et aux étoiles comme tout le monde croyait à l'époque. Celui-ci pense plutôt que l'orientation de ces "doigts de dieu" est dûe au globe terrestre. Gilbert est ainsi l'un des premiers scientifiques émettant l'hypothèse que la terre est un aimant géant possédant en plus de deux pôles géographiques, deux pôles magnétiques.

 

Celui-ci compare les propriétés électriques et magnétiques. Il montre notamment que la magnésie ou un aimant n’attire que le fer alors que l’ambre jaune frottée attire divers matériaux légers. Il découvre aussi qu’il n’y a pas que l’ambre jaune qui possède une telle particularité. Le verre, la paille, la résine, s’ils sont frottés peuvent aussi attirer les mêmes corps légers. Cette propriété est à l’origine du mot électrique. Gilbert qualifie les matériaux susceptibles d’attirer des corps légers de «  matériaux électriques » contrairement aux autres matériaux comme le bois ou les os qui sont qualifiés de « anélectriques ». Une deuxième observation intéressante est le fait que les matériaux électriques nécessitent d’être frottés pour attirer des objets légers contrairement aux aimants qui agissent naturellement. De plus l’interaction magnétique n’est pas stoppée par un écran de papier contrairement à l’interaction électrique.

Gilbert publie en 1600 tous ses résultats d’expériences ainsi que ses conclusions dans le traité « De Magnete » (De l’aimant). C’est lui qui a été le premier à utiliser le mot « électrique » et c’est lui qui a été à l’origine du développement de l’électricité expérimentale du XVIIIème siècle.

 

                 Essor de l'électricité au siècle des lumières

L'électricité, une science d'abord expérimentale

Le XVIII ème siècle est le siècle où se développent les penseurs, philosophes et scientifiques en Europe. Beaucoup vont s’intéresser aux propriétés électriques et magnétiques étudiées quelques années plus tôt par Gilbert. Les expériences, instruments, machines électriques, observations et idées se succèdent au cours de ce siècle. 

Gray et Dufay

Stephen Gray (1666-1736), teinturier puis physicien anglais s’intéresse aux phénomènes d’attraction et de répulsion des corps électrisables. C’est au cours d’une expérience qu’il découvre par hasard que « les effluves électriques » (l’électricité) peuvent être transmises et communiquées par certains matériaux contrairement à d’autres. Il montre en effet qu’un tube de verre frotté peut attirer ou repousser une boule d’ivoire par l’intermédiaire d’une corde de chanvre. La corde de chanvre peut donc « communiquer les effluves électriques » du tube de verre à la boule d’ivoire. Au début celui-ci pense que c’est la finesse du matériau utilisée qui entraine la communication des effluves électriques. Mais il répète ces expériences avec différents matériaux ce qui l’amène à formuler une autre conclusion : il existe deux catégories de corps ; tout d’abord les métaux, le chanvre, l’eau mais aussi le corps humain conduisent l’électricité. Ce sont des conducteurs de l’électricité. D’autres matériaux comme le bois sec, les résines, le verre et la soie ne transmettent pas ou ne conduisent pas l’électricité : ce sont des isolants. Les termes conducteurs et isolants ne sont pas utilisés par Gray mais quelques années plus tard par le physicien Desaguliers en 1740. De plus, Gray fait la démonstration que le corps humain est conducteur : le corps d’un enfant est mis en contact avec un tube de verre frotté. Cet enfant est suspendu au dessus d’objets légers qu’il attire. Cela signifie que l’électricité du verre frotté passe à travers le corps de l’enfant et attire alors les objets légers placés en dessous celui-ci.

Jusqu’ici on différenciait les corps par leur capacité à attirer ou à repousser les corps légers. Grâce à Gray, tous les objets peuvent être différenciés par une nouvelle propriété : « l’électrisation par communication » appelée aujourd’hui la conduction électrique. A partir de cette époque, tous les objets et matériaux peuvent être classés selon leur caractère conducteur ou isolant ce qui constitue une avancée importante.

Charles François De Cisternay Dufay (1698-1739) est un physicien français qui s’intéresse aux travaux de Gray et étudie plus précisément la répulsion et attraction entre corps électrisés. Il montre entre autre qu’une simple feuille d’or est attirée par de l’ambre frottée mais est repoussée par un tube de verre frotté. Répétant cette expérience avec différents matériaux, il montre que la feuille est attirée par certains matériaux mais repoussée par d’autres, ce qui l’amène à postuler une théorie basée sur ses observations : il y a deux sortes d’électricité, une électricité vitreuse et une électricité résineuse. Ces deux électricités se repoussent elles-mêmes et se repoussent l’une et l’autre. Ainsi, un objet possédant une électricité résineuse repousse tous les autres corps et objets possédant l’électricité résineuse et attire les objets possédant l’électricité vitreuse.

Dufay est aussi l’inventeur d’un instrument important : l’électroscope.

Aujourd’hui, la théorie de Dufay sur les deux types d’électricité est bien évidemment fausse mais elle a amené d’autres physiciens à se poser des questions sur ce phénomène et à proposer d’autres conclusions et théories de plus en plus justes.

 

L'abbé Nollet.

Jean Antoine Nollet ou abbé Nollet (1700-1770), ancien assistant de Dufay est un physicien français qui a contribué à l’avancée des connaissances scientifiques sur l’électricité mais aussi à leur expansion en Europe. En effet, grâce à ses talents d’orateur et de vulgarisateur, l’abbé Nollet va susciter la curiosité et l’intérêt des populations et des cours royales des pays européens pour l’électricité. Certaines expériences électriques sont ainsi présentées dans des conférences et expositions sous forme de spectacles ludiques et amusants ce qui ne manque pas d’attirer les foules et d’intéresser les rois et la noblesse. La physique expérimentale devient alors « un plaisir d’amateurs et un divertissement à la mode ». Cet engouement pour les sciences l’électricité grâce à l’abbé Nollet marque le développement de l’électricité expérimentale ainsi leur enseignement dans toute l’Europe.

Louis XV va même aller jusqu’à lui offrir un cabinet de physique au château de Versailles pour que Nollet y fasse ses expériences dans les meilleurs conditions possibles.

On retiendra une expérience historique impressionnante qu’a réalisée Nollet au palais des glaces devant la cour royale et le roi lui même. Le savant, à l’aide d’une machine électrostatique, va faire subir une décharge électrique à un garde placé dans une chaine d’environ deux cent gardes tous reliés par les mains. Tous les gardes vont alors se faire traverser par la même décharge électrique et ressentir une légère secousse ce qui ne manquera pas d’impressionner et d’amuser fortement la galerie et le roi.

La bouteille de Leyde.

En ce siècle des lumières, les machines électrostatiques se développent de plus en plus.

Celles-ci, fonctionnant comme de petits générateurs, produisent des décharges électriques nécessaires aux nombreuses expériences d’électricité menées aussi bien par des savants expérimentés que par des amateurs curieux.

En 1745, l’allemand Von Kleist et le néerlandais  van Musschenbroek, professeur de physique a l’université de Leyde réalisent une machine électrostatique capable d’accumuler de l’électricité (charge) puis de la restituer sous forme d’une décharge électrique pouvant être beaucoup plus violente que de simples machines électrostatique. Cette nouvelle machine, une simple bouteille appelée alors bouteille de Leyde créé alors une mini révolution dans le monde de l’électricité. C’est la première fois qu’une  quantité importante « d’électricité » peut être stockée. Les savants de tous horizons vont alors s’intéresser à cette bouteille et vont essayer de la perfectionner en augmentant sa capacité à stocker de « l’électricité ». 

Au fil des années, la bouteille de Leyde va devenir un dipôle électrique bien connu et très utilisé : le condensateur. La capacité que possède un condensateur à stocker de l’énergie électrique représente d’ailleurs une grandeur physique appelée capacité électrique notée C. L’unité de la capacité est le Farad (F).

 

Benjamin Franklin

Benjamin Franklin (1706-1790) est un écrivain, homme politique et scientifique du XVIIIème siècle. Il est aussi bien connu pour ses découvertes en électricité que pour son rôle joué dans l’indépendance des Etats Unis d’Amérique et dans sa lutte contre l’esclavage.

Cet américain, passionné de sciences est un des premiers à considérer que l’électricité est constituée d’une matière soit positive soit négative. Pour lui, contrairement à d’autres scientifiques, l’électricité ou « le fluide électrique » ne surgit pas de nulle part. Lorsqu’on frotte un tube de verre, « le feu électrique » ou « la matière électrique » ne se créé pas toute seule, elle est arrachée au tube en verre. Par convention, Franklin attribue un caractère positif à la matière électrique arrachée au verre. Pour lui, de la matière électrique positive repousse d’autres matières électriques positives, de la matière électrique négative repousse d’autres matières électriques négatives et des matières électriques positives s’attirent avec des matières électriques négatives. Ainsi Franklin remplace les termes d’électricité vitreuse et d’électricité résineuse utilisée par Dufay, par les termes « électricité positive » et « électricité négative ». Plus tard avec Coulomb, on parlera de charges électriques positives et négatives. De même le « fluide électrique » sera appelé courant électrique.

 

Jusqu’à Benjamin Franklin, peu de personnes reliaient la foudre  à un phénomène électrique. C’est en 1752 que Benjamin Franklin, persuadé que la foudre est un phénomène naturel de nature électrique, effectue l’expérience du cerf volant. Celui-ci, un jour d’orage, fait voler dans le ciel menaçant un cerf volant accroché à une corde de chanvre humide dont l’autre extrémité est reliée à une clef métallique. Au premier coup de foudre sur le cerf volant, les effets électrostatiques (étincelles, décharges électriques) auraient alors été observées sur la clef. On ne sait pas vraiment si Franklin a vraiment réalisé cette expérience. En tout cas, il faut souligner le danger énorme de celle-ci. Il ne faut jamais faire voler de cerf volant un jour d’orage ! Franklin, supposant la foudre de nature électrique, savait évidemment qu’il fallait utiliser des fils légèrement conducteurs (corde de chanvre) sous peine d’être électrocuté. Il aurait ainsi démontré à la communauté scientifique que la foudre, jusqu’alors assimilé à du feu jaillissant des nuages, est bien de nature électrique. A cette époque, où que l’on se trouvait, dans les petits villages ou dans les grandes villes, la foudre représentait un réel danger, responsable de nombreux incendies et de nombreuses victimes. Comme la peur engendre l’ignorance et l’adhésion à des croyances absurdes, certains villages avaient alors pris pour habitude de faire sonner les cloches de l’église à l’arrivée d’un orage pour éloigner la foudre !

Connaissant la nature électrique des nuages et de la foudre, Franklin a alors l’idée d’utiliser une grande tige conductrice traversant une habitation du sol jusqu’à son toit, la pointe dirigée vers le ciel. Selon Franklin et d’autres scientifiques, les pointes attirent et émettent plus facilement les charges électriques que d’autres objets plus arrondis dont la courbure est moins accentuée. En physique on appelle ce phénomène le pouvoir des pointes ou effet de pointe. Ce phénomène est courant lorsque l’on subit une décharge en touchant une voiture. En effet, la carcasse métallique de la voiture, sous l’action des frottements de l’air, a accumulé des charges électriques qui ne peuvent se décharger dans le sol (les pneus de la voiture sont isolants). Lorsque l’on tend les doigts vers la portière pour l’ouvrir, nos doigts vont alors faire office de pointes et les charges électriques stockée par la carcasse électrique de la voiture vont alors se décharger dans notre corps par l’intermédiaire de nos doigts, les pointes, causant une légère électrisation et une sensation désagréable.  

Par ce phénomène, la foudre sera alors principalement attirée par la pointe de la tige, les charges électriques traverseront celle-ci, sans faire de dégâts autour, puis se répandront dans le sol.

 

Grâce à cette invention géniale de Franklin, appelée « paratonnerre », la foudre est alors maitrisée et ne représente plus un danger important.Outre le caractère pratique de cette invention, on retiendra aussi que le paratonnerre, plus efficace qu’une sonnerie de cloche, est le symbole de la prédominance de la science en ce siècle des Lumières sur les croyances obscurantistes et mystiques du Moyen âge.

 

Mathématisation et modélisation de l'électricité

L'empirisme en sciences

Jusqu' à présent, les lois électriques et magnétiques formulées par les scientifiques du XVI, XVII et XVIIIème siècles sont entièrement empiriques c'est à dire qu'elles sont basées uniquement sur l'observation des expériences. Par exemple, lorsque l'on a découvert, par l'expérience, que tous les métaux conduisaient l'électricité, on a pu en déduire une loi empirique : tous les métaux conduisent l'électricité. Ainsi toutes les lois empiriques n'expliquent en rien les phénomènes associés et n'établissent aucune relation de cause à effet compréhensible. Au XVIIIème siècle, on sait d'après les expériences que tous les métaux conduisent l'électricité car sur les milliers expériences réalisées, à chaque fois, les métaux ont conduit le courant électrique. Cependant, rien n'explique comment les métaux conduisent l'électricité. Autrement dit une loi empirique n'est pas démontrable.

Pour certains, la loi de Murphy, loi de l'emmerdement maximum est une loi fantaisiste qui stipule que lorsque vous faites tomber une tartine de confiture, celle-ci tombera inévitablement côté confiture sur le sol. Il s'agit d'un loi empirique, basée sur nos observations au petit déjeuner, qui n'explique pas comment se fait-il que la tartine tombe ainsi sur le sol. 

En revanche, une théorie universelle ou modèle universel propose d'expliquer un phénomène d'une manière abstraite c'est à dire d'une façon qui n'est pas basée uniquement sur l'expérience. Cette théorie fondamentale ou universelle, va pouvoir expliquer un phénomène, le relier à d'autres phénomènes et surtout prédire de nouveaux phénomènes ou observations. En général, un loi universelle est décrite par des équations mathématiques rigoureuses et bien définies. On peut ainsi démontrer une loi jusqu'alors empirique grâce à un modèle universel. Cette loi sera alors englobée dans ce modèle universel et cessera d'être empirique puisqu'elle est maintenant démontrable et explicable. Par exemple, au XVIIIème siècle, Kepler observe le ciel, le mouvement des planètes autour du soleil et propose trois lois empiriques, basées sur ses observations, qui décrivent le mouvement des planètes. 

Plus tard, Newton, proposera un modèle, une théorie universelle mathématique sensée décrire les mouvements de tous objets dans le ciel et sur la terre. Cette théorie, non empirique puisqu'elle ne se base pas uniquement sur l'éxpérience mais sur l'imagination, la réflexion, l'intuition et le génie de Newton, va alors démontrer les trois lois de Kepler. Le travail de Kepler, basé sur l'observation est alors vérifié et démontré grâce à la théorie de la gravitation universelle de Newton.En ce début du XIXième siècle, toutes les lois et principes électriques vont bientôt cesser d'être empiriques car ceux-ci vont alors être démontrables et expliqués par des modèles et théories universels.

La loi de Coulomb, loi universelle de l'électrostatique.

En 1785, Charles Auguste de Coulomb (1736-1806), à l'aide d'expériences effectuées notamment grâce à sa balance électrostatique (appelée balance de Coulomb), énonce une théorie pour expliquer l'attraction et la répulsion électrique. Cette théorie reprend le concept de force que Newton avait utilisé en mécanique. Mais à l'instar de Newton, les forces de Coulomb, électriques et non gravitationnelles, s'exercent entre particules électriquement chargées et ne dépendent pas de leurs masses. Ce modèle électrique explique donc que la force s'exerçant entre des particules dépend de la charge électrique de ces particules et de la distance les séparant. Coulomb introduit alors ce nouveau terme de "charge électrique" remplaçant ainsi le terme de "matière électrique". La charge électrique, positive ou négative, apparait alors comme une nouvelle grandeur physique notée q. Cette grandeur physique a pour unité le Coulomb. 

Des lois mathématiques expliquant l'électrostatique.

Suite à la loi fondamentale de l'électrostatique qui explique l'attraction entre des particules chargées au repos, beaucoup de mathématiciens et physiciens vont s'intéresser à la mathématisation des phénomènes électriques, c'est à dire découvrir d'autres lois mathématiques expliquant l'ensemble des phénomènes électrostatiques. On retiendra les noms de Carl Friedrich Gauss (1777-1785), Simon Denis Poisson (1781-1840), Pierre Simon de Laplace (1749-1827), Joseph Louis Lagrange (1736-1813), Michael Faraday (1791-1867). Ceux-ci vont introduire des concepts mathématiques et physiques tel le champ électrique, les distributions de charge et de nouvelles grandeurs physique telles le potentiel électrostatique ou l'énergie électrique. Tout comme la mécanique de Newton, l'électricité (et plus précisément pour l'instant l'électrostatique), est mise en équation, analysée, démontrée par des concepts mathématiques d'une portée extrêmement puissante et rigoureuse. par la suite, les travaux de nouveaux scientifiques et mathématiciens détermineront d'autres lois portant sur les charges électriques en mouvement, l'électrodynamisme, et feront le lien avec les phénomènes magnétiques.

              L'invention de la pile électrique

Laissons de côté pour l'instant les mathématiciens et théoriciens dans leurs équations et intéressons nous aux expériences de deux savants, Luigi Galvani (1737-1798) et Alessandro Volta (1745-1827). Ces deux scientifiques italiens se sont intéressés en cette fin du XVIIIième siècle au même phénomène : lorsque on met en contact une cuisse de grenouille avec deux métaux différents, la cuisse de grenouille se contracte exactement comme si elle subissait une décharge électrique.

En sciences physiques, lorsque nous avons affaire à un phénomène particulier, nous proposons alors une hypothèse que l'on pourra éventuellement confirmer ou infirmer à l'aide d'une ou plusieurs expériences.

Galvani propose sa propre hypothèse : pour lui, la décharge électrique provient de l'animal. La cuisse de grenouille contient donc déjà une "électricité animale" qui, au contact des métaux, se décharge dans ceux-ci provoquant ainsi la contraction des muscles.

Volta, quant à lui, reprend les expériences de Galvani et propose une autre hypothèse : pour Volta, l'électricité ne provient pas de l'animal mais est générée deux métaux différents séparés par un conducteur humide. Volta fait alors une série d'expériences visant à confirmer sa théorie et réalise notamment un montage mettant en jeu des rondelles de cuivre et de zinc empilés les unes sur les autres et séparées par des disques des feutre imbibés de saumure (eau salée). Cette appareil réalisée en 1800 permet de générer une énergie électrique. La première pile électrique est née.

 

 

Ainsi tout ensemble constitué de deux métaux différents (électrodes) séparés par un milieu conducteur humide (électrolyte) forme une pile électrique. Par exemple, une personne possédant un plombage sur une dent et mâchant par inadvertance un bout de papier aluminium (qui trainait sur un bout de chocolat par exemple), subira une petite décharge électrique dans sa bouche. En effet, le plomb et l'aluminium sont deux métaux différents jouant le rôle des électrodes et notre salive constitue le milieu humide conducteur, l'électrolyte. 

 

Il faut tout de même souligner que Galvani n'avait complètement tort. En effet, le corps humain et animal possède des petites tensions électriques mesurables à l'aide d'un électrocardiogramme. De plus, nous connaissons tous la torpille qui est un poisson ayant la capacité de pouvoir délivrer de fortes décharges électriques notamment pour immobiliser et tuer ses proies.

Bien entendu, la pile électrique constitue une véritable révolution. Il s'agit en effet du premier générateur électrique. Avant, les machines électrostatiques produisaient juste une décharge électrique éphémère; la pile électrique elle, génère de l'électricité en continu jusqu'à épuisement des réactifs c'est à dire des électrolytes.

On sait aujourd'hui interpréter par la théorie le fonctionnement d'une pile. Ce n'est pas à proprement parler les métaux eux-mêmes qui génèrent un courant électrique mais les transformations électrochimiques qui s'y déroulent. En effet, mis au contact d'un électrolyte, les métaux subissent une réaction chimique qui libère de l'énergie électrique.

Le fait que l'on puisse avoir un courant électrique avec deux métaux différents provient de la différence d'état électrique ou de potentiel entre ces deux métaux. Cette différence de potentiel entre deux parties d'un circuit électrique est à l'origine de la production d'un courant électrique lorsque ces deux parties sont mises en contact par l'intermédiaire d'une fermeture du circuit. Cette différence de potentiel sera appelée un peu plus tard tension électrique. Il peut donc exister une tension électrique ou différence de potentiel sans qu'il n'y ait de courant électrique circulant dans le circuit. Par exemple, une pile toute seule possède une tension électrique bien qu'il n'y ait pas de courant électrique. Si l'on relie le pôle positif de la pile avec le pôle négatif par l'intermédiaire d'une lampe, on ferme ainsi le circuit et du courant électrique circulera à travers la lampe. La tension électrique constituera alors une des plus importantes grandeurs physiques en électricité. L'unité de cette grandeur sera appelé le Volt en 1881, en hommage à Volta.

L'électromagnétisme, l'unification de l'électricité et du   magnétisme au XIXième siècle

L'expérience d'Oersted

Jusqu'au XVIIIème siècle, les phénomènes électriques n'ont à priori aucun lien entre eux. Enfin presque ... Certains récits racontent que sous l'effet de la foudre, certaines boussoles, utilisées par les navigateurs, changeaient de direction; certaines fois, leurs pôles magnétiques allaient même jusqu'à s'inverser! D'autres histoires racontent que sous l'effet de la foudre certaines croix en fer devenaient de véritables aimants. Mais comment l'expliquer ? A une époque où l'on venait juste de découvrir le caractère électrique des éclairs, comment expliquer que ceux-ci pouvaient engendrer des phénomènes magnétiques ?

Hans-Christian Oersted ( 1777-1851) est avant tout un docteur en philosophie étudiant aussi la physique, la médecine. Lorsqu'il apprend l'invention de la pile électrique par Volta, celui-ci commence maintes expérimentations d'électricité.

L'histoire raconte que Oersted, alors qu'il donnait un cours à ses étudiants en science au printemps 1820, fit une découverte qui allait bouleverser le monde.

Alors que celui-ci était en train de présenter une expérience d'électricité à ses élèves, il remarqua que l'aiguille aimantée d'une boussole située à côté de son circuit électrique, déviait de son axe anormalement. Il en conclut donc que les effluves électriques de son circuit électrique influençaient la direction de la boussole et ceci sans qu'il n'y ait aucun contact entre les deux. Cela signifie donc selon Oersted qu'un phénomène électrique est capable d'influencer voire d'engendrer un phénomène magnétique à distance !

Toutefois, cette découverte révolutionnaire ne suscite pas l'enthousiasme des scientifiques de l'époque. Peu adhère aux conclusions du physicien danois. Cependant, l'expérience passionne quelques scientifiques qui ne perdent pas un instant pour refaire maintes et maintes fois l'expérience mystérieuse. Ces scientifiques comme François Arago (1786-1853) ou encore André-Marie Ampère (1775-1836) comprennent toute l'importance de la découverte et y voient là une opportunité de faire évoluer la science.

L'électricité en mouvement : Ampère

Jusqu'alors, les lois physiques de l'électricité constituées par Coulomb concernaient des entités électriques statiques. On parle dans ce cas d'électrostatique. Le rôle d'Ampère en ce début de XIXème siècle va être de proposer des lois physiques pour expliquer l'électricité en mouvement : c'est le début de l'électrodynamisme.


Après la découverte d'Oersted, Ampère est convaincu que quelque chose d'électrique circule dans le circuit. Jusqu'ici, il faut bien savoir que à peu près tous les scientifiques pensaient que les phénomènes électriques étaient dûs à des "effluves électriques" ou " de la matière électrique" ou encore " de la substance électrique " restant statiques. Ampère, persuadé du contraire grâce à l'expérience d'Oersted, stipule que les phénomènes magnétiques engendrés sur la boussole sont dûs à de l'électricité en mouvement c'est à dire à un fluide électrique en mouvement : la notion de " courant électrique " est née.

A ce stade, ce n'est bien sûr qu'une hypothèse : Ampère n'a aucun moyen d'observer ce courant électrique. Cependant ce concept est extraordinairement puissant puisqu'il lui permet d'expliquer un bon nombre de phénomènes, de stipuler les lois de l'électrodynamique et d'introduire pour la première fois les notions d'électromagnétisme et de courant électrique.


L'intensité du courant électrique :


Ampère va même beaucoup plus loin. Certes, il ne peut pas "voir" et observer ce fameux courant électrique. Il n'empêche que celui-ci décide d'inventer un appareil capable de mesurer " l'énergie du courant électrique". Il choisit d'appeler cet appareil ou instrument de mesure " le galvanomètre".

En fait, ce que mesure le galvanomètre ce n'est pas l'énergie électrique, c'est le débit du courant électrique. Aujourd'hui, ce débit de courant électrique est appelée " intensité du courant électrique ". L'intensité du courant électrique apparait alors comme une nouvelle grandeur physique mesurable. Problème : pour différencier une grandeur physique d'une autre, on utilise une unité pour chaque grandeur physique (kilogramme pour la grandeur physique masse, seconde pour la grandeur physique temps, etc). Quelle unité va-t-on utiliser pour la grandeur physique intensité ? Tout simplement l'ampère (A). De plus, le terme galvanomètre sera remplacé par ampèremètre.




La tension électrique :

Une autre grandeur physique est découverte par Ampère. De par l'étude des phénomènes électrostatiques (vus précédemment) et de la pile de Volta, Ampère stipule qu'il peut exister plusieurs " états électriques " qui seraient à l'origine des phénomènes électriques. Par exemples, nous avons vus précédemment que deux corps électrisés s'attirent ou se repoussent. ces deux corps possèdent donc un état électrique différents l'un de l'autre. De même, la borne d'une pile possède un état électrique différent de l'autre borne. Phénomène étrange : lorsqu'on relie deux objets dans des états électriques différents, un courant électrique circule entre ces deux objets. Aujourd'hui, on appelle potentiel électrique un état électrique et tension électrique la différence entre deux potentiels électrique. Cette tension électrique est une autre grandeur physique. A l'époque d'Ampère on l'appelait "action électromotrice". Celle-ci était faiblement mesurable à l'aide d'un instrument de mesure appelé électroscope. L'unité de la tension électrique est le Volt (V) en hommage à Volta. Aujourd'hui, on se sert d'un instrument de mesure appelé voltmètre.

Ainsi, il peut exister un tension électrique entre deux points ou deux objets séparés sans qu'il n'y ait de circulation d'un courant électrique. C'est le cas d'un pile par exemple : si les deux bornes d'une pile ne sont pas reliés, il n' y a pas de circulation de courant électrique et pourtant il existe une tension électrique mesurable. Par contre si l'on relie par un conducteur les deux points entre lesquels il existe une tension électrique, le courant électrique va circuler entre ces deux points. Si l'on relie les deux bornes d'une pile par un fil conducteur,, dans ce cas, un courant électrique circule.


L'orage et la foudre : la tension et le courant électrique


Par temps d'orage, il existe une tension de plusieurs millions de volts entre les nuages et le sol car ils sont chargés électriquement différemment. Les nuages et le sol ne sont pas reliés par un conducteur : l'air qui les sépare est en effet un isolant électrique. Pourtant, en certains endroits, l'air va devenir de moins en moins isolant pour finir conducteur : une gigantesque courant électrique va alors pouvoir se propager entre les nuages et la terre : c'est l'éclair !  

 

Il ne faut donc pas confondre tension électrique et intensité du courant électrique!


le sens conventionnel du courant électrique :

Mais revenons à l'époque d'Ampère : comme je l'ai dit, celui-ci n'avais aucun moyen de vérifier si un courant électrique circulait bien dans un circuit électrique. Pour les lois de l'électrodynamique, celui-ci a du choisir arbitrairement (c'est à dire au hasard) le sens de ce courant électrique. En effet, le courant électrique circule soit à partir d'un objet chargé électriquement positif vers un corps chargé électriquement négatif soit l'inverse ! Et aucun moyen de l'observer. Ampère a donc choisi que le courant électrique circulait toujours d'un corps ou objet chargé positivement vers un corps chargé négativement. Dans un circuit électrique, le courant électrique circule de la borne positive de la pile ou du générateur vers la borne négative : c'est le sens conventionnel du courant.


Le sens conventionnel du courant électrique a donc été choisi arbitrairement par Ampère car il n'avait aucun moyen de l'observer. Ce n'est que deux siècle plus tard que les scientifiques, grâce aux nouvelles technologies capables d'explorer l'infiniment petit (du moins de le modéliser par ordinateur), ont été capables de démontrer qu'un courant électrique circulait en effet dans un circuit électrique. Ce courant a même été analysé et identifié : c'est en fait un déplacement de petites particules que l'on qualifie "d'élémentaires" nommés électrons. Pour comprendre ce phénomène il faut revenir à la composition de la matière. Toute la matière qui nous entoure (air, objets, nous mêmes, étoiles, planètes) est constituée de petites particules appelées atomes. Ces atomes sont eux mêmes constitués d'un noyau (lui même constitué de neutrons et de protons) autour duquel se déplacent des électrons (on parle d'un nuage d'électrons ou de densité de probabilité de présence d'un électron). Ces électrons sont liés au noyau par une force électromagnétique. Dans un solide comme un fil de cuivre, les atomes sont très proches les un des autres et certains électrons moins liés que les autres, les électrons libres, vont pouvoir se déplacer vers un autre atome voisin, ce qui va également engendrer le déplacement d'un électron de ce nouvel atome vers un autre atome proche. Ce déplacement d'électrons de proche en proche va constituer le courant électrique. Contrairement à Ampère, nous pouvons depuis le début du XXème siècle, savoir que ce déplacement d'électrons s'effectue de la borne négative du générateur ou de la pile vers la borne négative et non l'inverse comme Ampère l'avait arbitrairement choisi !


On continue pourtant à étudier le sens conventionnel du courant établi par Ampère dans de nombreux cas. 

Le champ magnétique

Revenons maintenant à l'expérience d'Oersted : Un courant électrique circulant dans un conducteur situé à proximité d'une aiguille aimantée est capable de dévier celle-ci. il s'agit donc d'une action à distance. Ampère énonce alors un théorème toujours utilisé aujourd'hui qui constitue le premier théorème mathématique reliant un phénomène électrique avec un phénomène magnétique. Le savant français utilise même une nouvelle notion, la notion de champ, un concept aussi utilisé par Faraday (voir plus loin). Pour lui, des courants électriques circulant à travers une surface sont à l'origine d'un champ magnétique qui peut alors interagir avec d'autres objets magnétiques.

Pour être rigoureux, le théorème d'Ampère s'énonce ainsi : la circulation d'un champ magnétique le long d'un contour fermé est égale à la somme des intensités des courants circulant à travers la surface délimité par ce contour multiplié par la permittivité du vide.

Je n'entrerai pas dans les détails, mais cela signifie par exemple, qu'un courant électrique circulant dans un fil électrique génère un champ magnétique.

L'induction : Faraday.

Une deuxième relation entre les phénomènes électriques et magnétiques a été découverte et mise en équation par le physicien britannique Michael Faraday (1791-1867) une dizaine d'année plus tard en 1831. Celle-ci montre qu'un variation du flux du champ magnétique à travers une surface fermée entraine une force électromotrice ou tension électrique.

Le premier moteur électrique : la roue de Barlow.

Connaissant les découvertes faites sur l'induction, un physicien anglais Peter Barlow réalise alors un appareil électrique composé d'un disque. Celui-ci applique alors au disque une tension électrique à l'aide d'une pile. Comme le disque est conducteur, celui-ci est alors parcouru par un courant électrique. Barlow place alors le disque dans un champ magnétique. L'interaction entre le courant électrique et le champ magnétique provoque l'apparition d'une force appelée force de Laplace. Cette force va alors entrainer la rotation du disque.

C'est une révolution : pour la première fois, on peut mettre en mouvement un objet grâce à un générateur de tension, et ceci, grâce à l'interaction entre les phénomènes magnétiques et électriques.

 

Unification de l'électricité du magnétisme et de l'induction sous forme théorique : Maxwell et Lorentz.

               Importance de l'électromagnétisme aujourd'hui.